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30/12/2013 | FRANCE | N°12VE01431

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 30 décembre 2013, 12VE01431


Vu la requête, enregistrée le 11 avril 2012, présentée pour la SOCIETE CABLE, dont le siège est situé 94 avenue du Général de Gaulle à Rosny-Sous-Bois (Seine-Saint-Denis), par Me Meillard, avocat ;

La SOCIETE CABLE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1103964 du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 mars 2011 par laquelle le maire de la commune de Rosny-Sous-Bois a décidé d'exercer son droit de préemption sur des biens immobiliers situés 94/98 avenue d

u Général de Gaulle ;

2° de mettre à la charge de la commune de Rosny-Sous-Boi...

Vu la requête, enregistrée le 11 avril 2012, présentée pour la SOCIETE CABLE, dont le siège est situé 94 avenue du Général de Gaulle à Rosny-Sous-Bois (Seine-Saint-Denis), par Me Meillard, avocat ;

La SOCIETE CABLE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1103964 du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 mars 2011 par laquelle le maire de la commune de Rosny-Sous-Bois a décidé d'exercer son droit de préemption sur des biens immobiliers situés 94/98 avenue du Général de Gaulle ;

2° de mettre à la charge de la commune de Rosny-Sous-Bois le versement d'une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la commune justifiait du caractère exécutoire de la délibération du conseil municipal de Rosny-Sous-Bois du 25 juin 1987 instituant le droit de préemption urbain dans la mesure où il n'est aucunement établi que le journal " La voix de l'Est " aurait eu une diffusion suffisante ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la commune avait suffisamment justifié l'existence d'un objectif suffisamment précisé motivant la décision de préemption ;

- la commune n'a aucunement fait apparaître la nature du projet envisagé ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que la commune établissait l'existence d'un projet réel sur les parcelles préemptées ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2013 :

- le rapport de M. Lenoir, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public,

- et les observations de Me A... de la Selarl Huglo Lepage et associés pour la commune de Rosny-Sous-Bois ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE CABLE s'est engagée, par la signature, le 10 novembre 2010, d'une promesse de vente, à céder à la SCI Ile-de-France 7 parcelles cadastrées O57, O277, O279, O283, O281, O349 et O350 d'une superficie totale de 1 787 m2, situé aux n°94 à 98 de l'avenue du Général de Gaulle à Rosny-Sous-Bois (Seine Saint Denis) contre paiement d'une somme pouvant varier, en fonction du montant des indemnités d'éviction à négocier avec les locataires, entre 2 300 000 euros et 2 500 000 euros ; que, par une lettre en date du 21 janvier 2011, le notaire chargée de la réalisation de cette vente a transmis à la commune de Rosny-Sous-Bois une déclaration d'intention d'aliéner les parcelles en question au prix annoncé dans l'acte du 10 novembre 2010 ; que, par une décision en date du 15 mars 2011, le maire de la commune de Rosny-Sous-Bois a décidé d'exercer le droit de préemption urbain de la commune sur la parcelle en question au prix de 1 261 800 euros ; que la SOCIETE CABLE relève appel du jugement en date du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil, qu'elle avait saisi d'une demande d'annulation de cette décision, a rejeté celle-ci ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux articles L. 300-1 (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels (...)Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat (...) la décision de préemption peut (...) se référer aux dispositions de cette délibération. Il en est de même lorsque la commune a délibéré pour délimiter les périmètres déterminés dans lesquels elle décide d'intervenir pour les aménager et améliorer leur qualité urbaine " ; qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ;

3. Considérant, d'une part, que, dès lors qu'elle n'avait défini qu'un périmètre " d'études " sur le secteur concerné par la décision de préemption et non un périmètre d'intervention pour la réalisation d'une opération d'aménagement, la commune de Rosny-Sous-Bois devait faire apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ; que, dans la décision en cause, le maire a, après avoir mentionné la volonté de la commune de restructurer l'avenue du Général de Gaulle représentant un linéaire de façade de près de 1,5 km, fait valoir que la réalisation de la ZAC des Portes de Rosny située à proximité immédiate impliquera la transformation de l'avenue du Général de Gaulle en véritable boulevard urbain et que le renouvellement urbain de cette zone nécessite un aménagement cohérent en continuité de celui opéré en centre ville ; qu'il fait également valoir que les immeubles mentionnés dans la déclaration d'intention d'aliéner sont inclus dans le périmètre d'études de la future ZAC dite " du Grand Pré " et s'inscrivent dans un secteur en mutation qui permettra de diversifier l'offre de logements ; qu'enfin, le maire fait état de la circonstance que la commune a entrepris, depuis plusieurs années, de procéder à des acquisitions immobilières sur ce secteur ; que, cependant, ces mentions ne permettent pas, en raison de leur imprécision, de déterminer la nature du projet justifiant l'exercice par la commune du droit de préemption urbain sur les parcelles en cause et, par suite, entachent la décision attaquée d'une insuffisance de motivation ;

4. Considérant, d'autre part, que la commune de Rosny-Sous-Bois fait valoir que la réalité du projet justifiant qu'il soit procédé à l'acquisition des immeubles vendus par la SOCIETE CABLE est établie au vu des mentions figurant tant dans le périmètre d'études de la ZAC dite " des Portes de Rosny " créée en 1992 que dans le périmètre d'études de la future ZAC dite " du Grand Pré ", dont les objectifs ont été définis par une délibération du 22 septembre 2008 ; que la réalité de ce projet serait également établie par les propositions figurant dans deux études réalisées en mai 2009 et juillet 2010 ; qu'enfin, la commune fait valoir qu'elle a acquis, dans ce but, depuis l'année 2005, plusieurs parcelles situées dans le même secteur ; que, toutefois, ni la mise en place d'un périmètre d'études qui ne saurait s'assimiler à un périmètre opérationnel au sens du dernier alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme précité, ni la réalisation, en 2009, de l'étude urbaine de définition et un plan guide préalable à la création d'une zone d'aménagement concerté, qui n'identifie pas la nature des constructions devant être implantées sur les parcelles faisant l'objet de la décision de préemption, ni l'étude effectuée en 2010 évoquant quatre projets distincts de programme d'aménagement, ne permettent d'établir la réalité du projet justifiant l'opération de préemption ; que, la commune n'établit pas non plus la réalité de ce projet en se référant aux acquisitions qu'elle menées depuis 2005 sur ce secteur dans la mesure où elle ne fait aucunement apparaître que ces acquisitions ont été menées pour la réalisation d'un même objectif ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier, ainsi que le fait valoir la société requérante, que l'objectif affiché dans la décision attaqué de " diversifier l'offre de logements " n'est pas compatible avec les mentions figurant dans l'étude effectuée en 2009 déjà citée qui envisage l'implantation d'activités tertiaires sur le secteur concerné ; que, par suite, la SOCIETE CABLE est fondée à soutenir que la commune n'établit pas la réalité du projet justifiant la décision de préemption prise par son maire et est, fondée, en conséquence, à demander également l'annulation de cette décision pour ce motif ;

5. Considérant qu'aucun des autres moyens tant de la requête que de la demande de première instance n'apparaît de nature, en l'état du dossier, à justifier l'annulation de la décision attaquée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CABLE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la SOCIETE CABLE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la commune de Rosny-Sous-Bois de la somme demandée par cette dernière au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Rosny-Sous-Bois le versement à la SOCIETE CABLE d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1103964 du 9 février 2012 du Tribunal administratif de Montreuil et la décision en date du 15 mars 2011 du maire de la commune de Rosny-Sous-Bois sont annulés.

Article 2 : Il est mis à la charge de la commune de Rosny-Sous-Bois le versement à la SOCIETE CABLE d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 12VE01431


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE01431
Date de la décision : 30/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption. Droit de préemption urbain.


Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Hubert LENOIR
Rapporteur public ?: Mme AGIER-CABANES
Avocat(s) : MEILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-12-30;12ve01431 ?
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