La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2015 | FRANCE | N°14VE03451

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 01 décembre 2015, 14VE03451


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 16 janvier 2014 rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1401622 du 16 septembre 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 décembr

e 2014, M.B..., représenté par Me Akagunduz, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 16 janvier 2014 rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1401622 du 16 septembre 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2014, M.B..., représenté par Me Akagunduz, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une carte de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il est insuffisamment motivé dans sa réponse au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté, et dès lors qu'il n'a pas statué sur le moyen tiré de la méconnaissance de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée dès lors que, alors qu'il avait sollicité un titre de séjour en qualité de salarié, le préfet n'a ni visé ni fait référence à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'a pas, par ailleurs, suffisamment précisé les faits sur lesquels il fonde son rejet ;

- le préfet ne s'est pas prononcé sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que la demande avait été présentée notamment sur ce fondement ;

- le préfet était tenu de saisir la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi dans la mesure où il demandait explicitement un titre de séjour portant la mention " salarié " ;

- le préfet a commis une erreur de droit en ne se livrant pas à un examen particulier de sa situation personnelle au regard des lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012, non visée par l'arrêté ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles L. 313-14 et L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet lui a dénié toute qualification et expérience professionnelle dans le domaine du bâtiment, alors qu'il est attesté qu'il a travaillé en Turquie comme chef de chantier, puis plusieurs années en France dans le domaine du bâtiment ;

- la commission départementale du titre de séjour aurait dû être consultée dès lors qu'il a établi sa résidence habituelle en France depuis l'année 2003 ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à l'ancienneté et à l'intensité de ses liens personnels en France ainsi qu'à son intégration professionnelle " parfaite " dans la société française ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 79-589 du 11 juillet 1979 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Bergeret.

1. Considérant que M.B..., ressortissant turc né le 1er octobre 1976, relève appel du jugement du 16 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Val-d'Oise

du 16 janvier 2014 rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.B..., le jugement attaqué, d'une part, répond de façon suffisamment motivée au moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux ne serait pas lui-même suffisamment motivé, et, d'autre part, statue sur le moyen, au demeurant inopérant, tiré de la méconnaissance des dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, dite " circulaire Valls " ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi

du 11 juillet 1979 : " (...) doivent être motivées les décisions qui restreignent l'exercice des libertés publiques ou, d'une manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

4. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier, et notamment de l'attestation

du 5 mars 2013, produite par M.B..., par laquelle le préfet du Val-d'Oise accuse réception d'une demande de régularisation faite " au titre de la circulaire du

28 novembre 2012 ", que sa demande de titre de séjour tendait à une admission exceptionnelle au séjour au titre du travail sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, l'arrêté contesté, qui se fonde sur ce texte et comporte des considérations de fait pertinentes à cet égard, en relevant notamment que l'intéressé ne justifie pas d'une expérience et d'une qualification professionnelles suffisantes, est correctement motivé au regard des exigences de la loi précitée du 11 juillet 1979, alors même qu'il ne vise ni ne se fonde sur les dispositions de l'article L. 313-10 du même code ; que, par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la décision obligeant un étranger à quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus de séjour ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en n'examinant pas la demande de M. B...sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte d'aucun texte que le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, serait tenu de consulter la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi avant de se prononcer sur une telle demande ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de saisine de cette direction par le préfet du Val-d'Oise doit être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que M. B...ne peut se prévaloir utilement des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du

28 novembre 2012, relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que ces orientations générales, sans valeur règlementaire, ne constituent pas des lignes directrices ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ; que M. B... ne produit, au soutien de son allégation selon laquelle il résiderait sur le territoire français de manière habituelle et continue depuis 2003, que des éléments insuffisamment probants pour les années 2004 à 2006, six des huit justificatifs produits pour les trois années considérées consistant en des documents médicaux ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier qu'il a fait l'objet le 28 décembre 2009 d'un arrêté portant reconduite à la frontière, concomitamment à son placement en rétention administrative, et qu'il n'allègue pas que cette mesure d'éloignement du territoire est restée sans effet, alors qu'aucune pièce du dossier ne témoigne d'une présence sur le territoire au cours des premiers mois de l'année 2010 ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient M.B..., le préfet du Val-d'Oise n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

9. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que M. B...soutient qu'en rejetant sa demande en relevant l'absence de justification d'une qualification ou expérience professionnelle dans le domaine du bâtiment, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que, cependant, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'attestation rédigée par son frère qu'il verse au dossier, selon laquelle il aurait exercé en Turquie, au cours des années 2000 à 2003, une activité de chef de chantier, est dépourvue de toute valeur probante ; que, par ailleurs, si M. B...a effectué depuis 2009 des transferts de fond à destination de son pays d'origine, et s'il ressort des relevés de compte bancaire qu'il a versés au dossier qu'il disposait, sur certaines périodes, de revenus réguliers, dont il a déclaré une partie, l'origine de ces revenus, en l'absence de tout bulletin de salaire, contrat de travail, certificat de travail ou de tout autre document probant, reste inconnue ; que, par suite, et compte tenu de la durée de séjour et de la situation personnelle et familiale de l'intéressé, le préfet du Val-d'Oise n'a commis ni erreur de droit ni erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'en l'absence de motif exceptionnel de régularisation, la demande de l'intéressé devait être rejetée ;

10. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ; qu'aux termes de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

11. Considérant que M. B... se prévaut de plusieurs années de séjour en France depuis l'année 2003, d'une insertion sociale et professionnelle " parfaite ", de sa maîtrise de la langue française, et soutient qu'il a tissé sur le territoire des liens personnels intenses ; qu'il ne produit, toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aucune pièce probante concernant son insertion professionnelle, ni sur les modalités de son séjour en France ; que, surtout, il ressort des pièces du dossier que ses parents, son épouse, et ses six enfants sont restés en Turquie ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué, en ce qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels ces décisions ont été prises ; que le préfet du Val-d'Oise n'a donc méconnu ni les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte, ainsi que celle présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

''

''

''

''

2

N° 14VE03451


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE03451
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : AKAGUNDUZ

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-12-01;14ve03451 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award