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09/02/2016 | FRANCE | N°14VE03452

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 09 février 2016, 14VE03452


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 16 janvier 2014 rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par ordonnance du 27 février 2014, la présidente du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a transmis le jugement de cette requête au Tribunal administratif de Melun, à l'exclusion des conclusions

tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 16 janvier 2014 rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par ordonnance du 27 février 2014, la présidente du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a transmis le jugement de cette requête au Tribunal administratif de Melun, à l'exclusion des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un jugement n° 1401626 du 16 septembre 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté la demande de M. B...en tant qu'elle était dirigée contre la décision portant refus de séjour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2014, M.B..., représenté par

Me Akagunduz, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 janvier 2014, en tant qu'il porte refus de séjour ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas statué sur le moyen tiré d'une méconnaissance de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, et qu'il ne statue pas, ou de façon insuffisamment motivée, sur les moyens afférents à l'exercice d'une activité professionnelle en France, ou sur les moyens tirés d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée en ce que, alors qu'il avait sollicité un titre de séjour en qualité de salarié, elle ne vise ni ne fait référence aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et ne précise pas sur quels éléments de fait elle se fonde, s'agissant de l'expérience professionnelle alléguée ;

- elle est irrégulière dès lors que le préfet aurait dû préalablement consulter la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, dans la mesure où était demandé un titre de séjour portant la mention " salarié " ;

- elle est illégale dès lors qu'elle n'examine pas la demande de titre de séjour au regard des lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard des articles L. 313-14 et L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le préfet, en relevant l'absence de preuve de l'exercice d'une activité professionnelle en France, a ajouté une condition que le législateur n'a pas prévue ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions combinées des articles L. 313-14 et L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il justifie d'une promesse d'embauche en qualité de chef de chantier, à durée indéterminée, et d'une expérience professionnelle en France dans le domaine du bâtiment, alors même qu'il ne peut produire de bulletins de salaire, du fait qu'il travaillait sans

autorisation ;

- elle méconnaît, en ce qu'elle lui refuse la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", l'article L. 313-14 et le 7° de L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à l'ancienneté et à l'intensité de ses liens personnels et familiaux en France, où il est bien intégré.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 79-589 du 11 juillet 1979 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Bergeret.

1. Considérant que M.B..., ressortissant turc né le 1er mars 1985, relève appel du jugement du 16 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Val-d'Oise du 16 janvier 2014 rejetant sa demande de titre de séjour ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, d'une part, que M. B...ne peut utilement reprocher au jugement de ne pas statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de la circulaire du

28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, alors que ce moyen, au demeurant inopérant, n'a été soulevé que dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal le 4 juillet 2014, postérieurement à la clôture de l'instruction ; que, d'autre part, si M. B...reproche au jugement de ne pas avoir statué sur les moyens afférents à l'exercice d'une activité professionnelle en France, et d'être insuffisamment motivé dans la réponse qu'il apporte aux moyens tirés de ce qu'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " aurait dû lui être délivré en application de l'article L. 313-14 ou du 7° de L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort des termes du jugement attaqué qu'il répond de manière suffisamment précise à ces moyens, et qu'il n'est donc pas entaché à cet égard d'insuffisance de motivation ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de titre de séjour présentée par M. B...au préfet du Val-d'Oise, aux fins de la régularisation de son séjour " par le travail ", se fondait sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant dans ce cas la délivrance de la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 de ce code ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'une insuffisance de motivation, faute de viser et de motiver le refus de séjour au regard de ce dernier texte, doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu de rejeter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de ce que le préfet du Val-d'Oise, en opposant un refus à la demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans consulter préalablement la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, aurait entaché sa décision d'une erreur de droit ;

5. Considérant, en troisième lieu, que le requérant ne saurait faire grief au préfet du

Val-d'Oise de ne pas avoir examiné son cas au regard des énonciations de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, laquelle ne contient que des orientations générales adressées aux préfets et qui ne peuvent être utilement invoquées devant le juge administratif ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que le refus de titre attaqué, qui rejette la demande sans indiquer l'avoir examinée au vu des termes de ladite circulaire, serait ainsi entaché d'erreur de droit, doit être également écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que M. B...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ressort de l'attestation de dépôt de sa demande de titre du 29 mars 2013 que sa demande ne se fondait pas sur ces dispositions mais sur celles de l'article L. 313-14 du même code, et que le préfet du Val-d'Oise ne s'est, par ailleurs, pas fondé sur les dispositions de l'article L. 313-10 pour refuser de lui délivrer un titre de séjour ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que si, pour rejeter la demande de M. B...aux fins d'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", le préfet du Val-d'Oise s'est fondé sur l'absence d'activité professionnelle de l'intéressé, ce motif, qui revient à opposer à l'intéressé l'absence de justification d'une expérience professionnelle effective dans le domaine d'activité concerné, pouvait légalement fonder la décision de refus de séjour et n'entache donc pas cette décision de l'erreur de droit invoquée dans l'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, en sixième lieu, que si M. B...soutient qu'il a une expérience professionnelle dans le domaine du bâtiment, il ne l'établit pas en se bornant à produire des relevés d'un compte bancaire ouvert à son nom, faisant état de l'encaissement régulier, au cours des années 2012 et 2013, de chèques pouvant correspondre à des salaires, mais dont la provenance reste inconnue ; qu'ainsi et au vu de l'ensemble des autres circonstances de l'espèce, et en admettant même que l'intéressé justifie par les pièces qu'il verse au dossier d'une présence habituelle en France depuis l'année 2005, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet du

Val-d'Oise, en ne relevant pas l'existence d'un motif exceptionnel lui donnant droit à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " par application des dispositions précitées de l'article L. 313-14, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ; qu'aux termes de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

10. Considérant que M. B...fait valoir qu'arrivé en France en 2005 à l'âge de vingt ans, il y a appris la langue française, y a tissé des liens personnels intenses, et qu'il est intégré de façon satisfaisante dans la société française ; qu'il justifie à cet égard qu'il disposait d'un logement et qu'il a déclaré, à partir de l'année 2009, des revenus annuels de l'ordre de 7 000 euros ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que l'intéressé s'est déclaré célibataire et sans charge de famille en France, qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où vivent, notamment, ses parents ainsi que six de ses frères et soeurs, et que le caractère habituel de sa résidence en France n'est justifié, à tout le moins sur les années 2007 à 2011, que par des pièces peu diversifiées et incomplètement probantes ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté ne peut être regardé comme ayant porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris, et, par suite, comme entaché d'une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des éléments relatifs à la situation personnelle de M.B..., tels qu'ils ont été exposés ci-dessus, que le préfet du Val-d'Oise aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au titre de l'admission exceptionnelle au séjour ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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N° 14VE03452


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE03452
Date de la décision : 09/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : AKAGUNDUZ

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-02-09;14ve03452 ?
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