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24/01/2017 | FRANCE | N°16VE03253

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 janvier 2017, 16VE03253


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de

Versailles l'annulation de l'arrêté du 25 février 2016 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602179 du 14 octobre 2016, le Tribunal administratif de

Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, en

registrée 14 novembre 2016, et des pièces complémentaires, enregistrées les 1er et 16 décembre 2016, M.D..., re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de

Versailles l'annulation de l'arrêté du 25 février 2016 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602179 du 14 octobre 2016, le Tribunal administratif de

Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée 14 novembre 2016, et des pièces complémentaires, enregistrées les 1er et 16 décembre 2016, M.D..., représenté par Me Feder, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- que le paraphe de l'auteur de l'acte étant illisible, l'identité de son signataire ne peut être connue tandis que le justiciable est mis dans l'impossibilité de s'assurer que la personne mentionnée sur l'arrêté comme en étant l'auteur de l'acte n'était pas en congés à la date de sa signature ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que sa pathologie, dont le traitement est extrêmement lourd, ne pourrait être effectivement prise en charge au Cameroun, ce que ni le préfet, ni le tribunal ne démontrent ;

- le médecin de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, qui ne l'a pas reçu, ne l'a pas examiné avant de prendre son avis, alors qu'il est régulièrement suivi par deux médecins ;

- cette décision contrevient aux dispositions du 7° de l'article 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi qu'aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ses attaches familiales sont en France où ses soeurs résident régulièrement et où il est bien intégré ;

- elle est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- son renvoi dans son pays d'origine méconnaîtrait enfin les stipulations de l'article 3 de la même convention en raison des discriminations subies par les membres de son ethnie, mais également d'une pathologie grave ne pouvant y être soignée.

..........................................................................................................

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Locatelli,

- et les observations orales de Me Feder, pour M.D....

1. Considérant que M.D..., ressortissant camerounais, né le

8 mai 1986, relève appel du jugement du 14 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du

25 février 2016 refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ;

2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué a été signé par Mme B...A..., directrice de l'immigration de la préfecture de l'Essonne qui disposait, en vertu d'un arrêté du

30 août 2015, régulièrement publié le même jour au bulletin d'informations administratives de cette préfecture, d'une délégation du préfet du département à l'effet, notamment de signer, les décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays vers lequel sera éloigné un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, de surcroît, la circonstance que la signature portée sur l'arrêté attaqué est illisible est sans conséquence en l'espèce sur sa régularité dès lors qu'elle a été apposée sous les mentions des prénom et nom de son signataire, parfaitement lisibles quant à eux ce qui, par suite, permettait au requérant à la fois de s'assurer de l'identité de l'auteur de l'acte et de ce que Mme A...n'était pas absente pour congés à la date de signature de l'arrêté attaqué ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de Mme A...pour signer la décision déférée ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " et qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au litige : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police (...) " ;

4. Considérant que M. D...soutient que, compte tenu de la nature et la gravité de la pathologie dont il est atteint, il ne pourrait bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée au Cameroun, si bien que le refus du préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que, dans son avis du 22 janvier 2016, le médecin de l'agence de santé d'Île-de-France a estimé que l'état de santé de M. D...ne nécessitait aucune prise en charge médicale et que l'intéressé était en état de voyager ; que le compte-rendu médical délivré par le docteur de la Vaissière en date du 31 octobre 2014 et qui fait état de ce que la paralysie faciale gauche du visage dont le patient souffrait à l'époque, doit faire l'objet d'un traitement par kinésithérapie n'est pas, compte tenu tant de son ancienneté que des informations qu'il contient, de nature à démontrer que M. D...était encore souffrant aux dates où le médecin de l'agence régionale de santé a rendu son avis et le préfet pris son arrêté ; qu'en outre, les certificats médicaux délivrés par ce médecin et un masseur kinésithérapeute le 12 décembre 2016 et se bornent à mentionner, sans plus de précision, pour le premier, que l'état de santé du patient nécessite une prise en charge et un bilan radiologique et, pour le second, la présence du requérant au cabinet pour une rééducation des muscles faciaux, ne permettent pas, dans les termes très généraux où ils sont rédigés, de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé publique d'Île-de-France ; qu'il en va de même des trois ordonnances délivrées par le docteur Saadi qui font état de la nécessité de pratiquer une " IRM ", une quinzaine de séances de rééducation des muscles du visage en raison d'une paralysie, que l'une de ces ordonnances qualifie, elle-même, de " modérée " et de la prise d'un médicament à base de cortisone (solupred), d'un antiviral destiné à traiter ou à prévenir les infections oculaires et de larmes artificielles, dont il n'est pas établi, de surcroît, que de telles posologies ne pourraient être administrées au Cameroun ; qu'enfin, et contrairement à ce que

M. D...soutient, aucune disposition législative ou règlementaire n'oblige le médecin de l'agence régionale de santé publique à examiner le requérant avant de rendre son avis ; que, dans ces conditions, M. D...n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, le préfet de l'Essonne a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : " A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. D... résidait depuis moins de quatre ans en France où il est entré à l'âge de vingt-six ans ; que, célibataire et sans charge de famille, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Cameroun où ses parents et quatre de ses frères continuent de résider ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et de ses conditions de séjour de l'intéressé en France, et nonobstant la circonstance qu'une partie de sa fratrie vivrait sur le territoire national, l'arrêté attaqué ne saurait avoir porté au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet acte a été pris ; que, par suite, il ne méconnaît pas les dispositions et stipulations précitées ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, pour l'ensemble des motifs de fait tenant aux aspects médicaux et familiaux précédemment exposés, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'ensemble de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

8. Considérant, enfin, que, s'il soutient que l'ethnie à laquelle il appartient fait l'objet de graves discriminations au Cameroun, le requérant ne l'établit pas ; que s'il prétend également qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier d'un traitement médical approprié dans ce pays, dont le défaut serait susceptible d'entrainer de graves conséquences médicales, il n'en justifie pas au vu des éléments qu'il produit ; que, dans ses conditions, cet arrêté, en tant qu'il fixe prioritairement le Cameroun comme pays de renvoi, ne saurait méconnaître, dans les circonstances de l'espèce, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prohibant les traitements inhumains et dégradants ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

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N° 16VE03253


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE03253
Date de la décision : 24/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : FEDER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-01-24;16ve03253 ?
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