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25/04/2017 | FRANCE | N°16VE03688

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 25 avril 2017, 16VE03688


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2015 du préfet du Val-d'Oise refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1604069 du 4 juillet 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la C

our :

Par une requête, et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 19 décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2015 du préfet du Val-d'Oise refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1604069 du 4 juillet 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 19 décembre 2016, et le 14 mars 2017, M.D..., représenté par Me Bati, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au bénéfice de Me Bati en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 11 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors notamment qu'il est le père de deux enfants nés en France dont il s'occupe ;

- elle méconnaît également le 11° de cet article dès lors qu'il est atteint d'un grave symptôme dépressif ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle est signée par une autorité incompétente ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bergeret a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.D..., ressortissant de la République démocratique du Congo, relève appel du jugement du 4 juillet 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 18 novembre 2015 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il sera éloigné ;

Sur la décision de refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué mentionne, après avoir relevé que M. D...a sollicité son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande le 28 novembre 2014, que cette décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 6 novembre 2015 et que la demande de titre de séjour formulée au titre de l'asile doit donc être rejetée ; qu'elle précise, en outre, que, " à titre subsidiaire ", l'intéressé ne peut davantage bénéficier des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il est célibataire et que deux de ses enfants résident dans son pays d'origine ; que le préfet du Val-d'Oise a ainsi précisé les considérations de fait et de droit sur lesquelles repose sa décision de refus de séjour ; que s'il a, par ailleurs, mentionné que l'intéressé n'entrait dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'était pas tenu de mentionner les raisons pour lesquelles il estimait que M. D... ne pouvait se voir délivrer un titre de séjour sur un autre fondement que celui sur lequel se fondait sa demande ; qu'il suit de là que le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé de la décision de refus de séjour contestée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., qui est entré en France en décembre 2012, est notamment le père de deux enfants nés à Pontoise les 18 octobre 2013 et 7 juin 2015, domiciliés à Saint-Leu, dans le Val-d'Oise, chez leur mère de nationalité congolaise, avec laquelle il ne soutient pas avoir jamais résidé ; qu'il soutient qu'il contribue à hauteur de ses modestes moyens à leur entretien, notamment en procédant pour eux à divers achats, en les voyant aussi souvent que possible et en effectuant de temps à autre des virements sur le compte de leur mère ; que, toutefois, cette dernière n'est pas identifiée comme le destinataire de l'ensemble des achats à prédominance alimentaire dont il justifie par des tickets de caisse faisant état de paiements en espèce, à compter seulement, d'ailleurs, du mois d'octobre 2015 ; qu'il en est de même pour les deux virements effectués en 2015 pour un montant global de 610 euros, dont le bénéficiaire n'est pas indiqué, et pour l'achat d'un réfrigérateur réglé en espèces le 27 février 2015 ; que si celle-ci, dans une attestation rédigée le 21 avril 2016, postérieurement à la décision attaquée, fait état de tels achats pour son compte, et de ce que l'intéressé " s'occupe bien de ses enfants ", cette attestation isolée est insuffisante pour établir l'intensité de ses liens avec ses deux cnfants ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que M.D..., qui a quitté son pays d'origine à l'âge de vingt-neuf ans, y a conservé des liens familiaux forts, en la personne, au moins, de deux autres enfants mineurs, ainsi que de ses propres parents et d'une soeur ; que, par suite, au regard notamment de l'intensité, de l'ancienneté et de la stabilité des liens familiaux de l'intéressé en France, ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine tels qu'il ressortent du dossier, il n'est pas établi qu'en rejetant la demande de titre de séjour de l'intéressé, le préfet du Val-d'Oise aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, et aurait, par suite, méconnu les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en troisième lieu, que si M. D...soutient que la décision de refus de séjour contestée est intervenue en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que, au vu des certificats médicaux qu'il verse au dossier, il est traité pour un syndrome dépressif depuis le mois d'avril 2016, les seules pièces qu'il produit pour justifier de ce que son état de santé aurait pu lui donner droit au séjour en application de ces dispositions restent insuffisantes pour établir un état de santé d'une gravité suffisante pour qu'un droit au séjour puisse en résulter sur ce fondement légal, ni, en tout état de cause, pour établir qu'avant de statuer sur la demande, le préfet aurait dû, à peine d'irrégularité d'une décision de refus de séjour, saisir le médecin de l'agence régionale de santé en vue d'être éclairé sur un éventuel droit au séjour au titre de l'état de santé, à supposer, que cette dernière branche de moyen soit effectivement soulevée ;

6. Considérant, enfin, que pour les mêmes motifs de fait que ceux exposés ci-dessus, la décision de refus de séjour ne peut être regardée comme entachée de l'erreur manifeste d'appréciation invoquée par M. D..., au regard de l'ensemble de ses conséquences sur sa situation personnelle, même en tenant compte des dispositions de la convention internationale relative aux droits de l'enfant qu'il évoque dans ce cadre en indiquant qu'il en résulte " un droit des enfants à grandir auprès de leurs deux parents ", dès lors, en tout état de cause, qu'il est constant qu'il ne vit pas avec ses deux enfants nés en France et qu'il n'est pas établi qu'il participerait effectivement à leur entretien ou leur éducation ;

Sur la mesure d'éloignement :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces versées au dossier de première instance que la décision portant obligation de quitter le territoire est signée par Mme A...B..., chef du service de l'immigration et de l'intégration, qui bénéficiait à cet effet d'une délégation de signature du préfet du Val-d'Oise en date du 16 février 2015, régulièrement publiée le même jour au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que M. D...n'établit pas que la décision de refus de séjour qui lui a été opposée serait entachée d'illégalité ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que cette prétendue illégalité entraînerait, par voie de conséquence, celle de la mesure d'éloignement en litige ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant que M. D...fait valoir que la décision litigieuse porterait une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale dès lors qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants nés et résidants en France auprès de leur mère titulaire d'une carte de résident ; que toutefois, dès lors que comme indiqué ci-dessus au point 4, sa contribution à l'entretien et à l'éducation de ses enfants mineurs n'est pas démontrée, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 précité doit être écarté ;

11. Considérant que si, aux termes du dernier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " l'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ", il résulte de l'article L. 513-3 du même code que " la décision fixant le pays de renvoi constitue une décision distincte de la mesure d'éloignement elle-même " ; qu'il suit de là que le moyen tiré par M. D...de ce qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est inopérant à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ; qu'à supposer que l'intéressé ait entendu soulever ce moyen contre la décision fixant le pays de renvoi, il ne présente pas à la Cour, en se bornant à évoquer le traitement médical qu'il suit pour un état dépressif, d'éléments de nature à établir qu'il encourrait effectivement et personnellement, en cas de retour dans son pays d'origine, des risques correspondant à ceux visés à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

5

N° 16VE03688


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE03688
Date de la décision : 25/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : SCP KERDREBEZ-GAMBULI et BATI

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-04-25;16ve03688 ?
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