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02/10/2018 | FRANCE | N°17VE03068

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 02 octobre 2018, 17VE03068


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les arrêtés en date du 8 août 2017 par lesquels le préfet des Yvelines a décidé son transfert aux autorités italiennes et prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une attestation de demande d'asile et un formulaire de demande d'asile ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative.

Par un jugement n° 1706159 du 4 septe

mbre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les arrêtés en date du 8 août 2017 par lesquels le préfet des Yvelines a décidé son transfert aux autorités italiennes et prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une attestation de demande d'asile et un formulaire de demande d'asile ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative.

Par un jugement n° 1706159 du 4 septembre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 octobre 2017, M.A..., représenté par Me Scalbert, avocat, demande à la Cour :

1° de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2° d'annuler le jugement n°1706159 du Tribunal administratif de Versailles ;

3° d'annuler les arrêtés en date du 8 août 2017 par lesquels le préfet des Yvelines a décidé son transfert aux autorités italiennes et prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;

4° d'enjoindre au préfet d'enregistrer sa demande d'asile dans un délai de 3 jours et de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile en procédure normale en application de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Il soutient que :

- les dispositions de l'article 23 (2) du règlement UE n°604/2013 ont été méconnues dès lors que la demande de protection internationale de l'intéressé a été introduite le 27 décembre 2016 et que le résultat positif Eurodac a été reçu le jour même ; la saisine des autorités italiennes le 14 avril 2017 a donc outrepassé le délai de deux mois ;

- le préfet doit démontrer qu'il a effectivement reçu les brochures A, B et Eurodac au moment où il a introduit sa demande de protection internationale ; il a été privé d'une garantie essentielle entachant d'irrégularité la procédure de désignation de l'Etat responsable de sa demande d'asile et donc l'arrêt de transfert.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement européen n° 604/2013/CE du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Margerit a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant guinéen né le 26 avril 1992, est entré irrégulièrement en France le 15 décembre 2016, est passé par le camp parisien de la Porte de la Chapelle puis a été pris en charge par le Centre d'examen de situation administrative (CESA) à Paris. Il a alors sollicité l'asile sur le territoire français. Par deux arrêtés en date du 8 aout 2017, le préfet des Yvelines a décidé son transfert aux autorités italiennes et prononcé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation de ces deux arrêtés. Par jugement en date du 4 septembre 2017, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande. M. A...relève donc appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. L'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : (...) b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre Etat membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre Etat membre " ; qu'aux termes de l'article 20 du même règlement : " 1. Le processus de détermination de l'État membre responsable commence dès qu'une demande de protection internationale est introduite pour la première fois auprès d'un État membre. 2. Une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur ou un procès-verbal dressé par les autorités est parvenu aux autorités compétentes de l'État membre concerné. Dans le cas d'une demande non écrite, le délai entre la déclaration d'intention et l'établissement d'un procès-verbal doit être aussi court que possible " ; qu'aux termes de l'article 23 du même règlement : " 1. Lorsqu'un État membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre État membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre État membre aux fins de reprise en charge de cette personne. 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac ("hit"), en vertu de l'article 9, paragraphe 5, du règlement (UE) no 603/2013. (...) 3. Lorsque la requête aux fins de reprise en charge n'est pas formulée dans les délais fixés au paragraphe 2, c'est l'État membre auprès duquel la nouvelle demande est introduite qui est responsable de l'examen de la demande de protection internationale " ; que, par l'effet des dispositions précitées, il appartient aux autorités françaises ayant reçu un résultat positif Eurodac et souhaitant mettre en oeuvre la procédure de reprise en charge d'un demandeur d'asile par un autre État antérieurement saisi d'une demande de protection, de saisir celui-ci d'une telle demande de reprise en charge dans un délai de deux mois suivant la réception de ce résultat ;

3. En l'espèce, M. A...a présenté, le 27 décembre 2016, une première demande de protection internationale en France au sens du 1 de l'article 20 du règlement (UE) n° 604/2013 auprès des services du préfet de police de Paris, ainsi que l'atteste le procès-verbal d'audition dressé à cette occasion par les services préfectoraux. Il ressort des termes d'une note d'information sur la procédure de reprise en charge d'un demandeur d'asile par un État membre dans le cadre du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013, également remise à M. A... le 27 décembre 2016 par les services du préfet de police de Paris, que l'intéressé a reçu, le même jour, un résultat positif Eurodac établissant que M. A...avait déposé une demande d'asile en Italie le 1er septembre 2016. Ainsi, alors même que le dossier de M. A... a été transmis à la sous-préfecture de Triel (78) pour examen et que ce dernier y a été reçu en entretien le 10 mars 2017 après que, le 3 mars 2017, un nouveau résultat positif Eurodac soit transmis à la préfecture des Yvelines, la réception du premier résultat positif Eurodac " hit " par les services de l'État le 27 décembre 2016 a fait courir le délai de deux mois prévu, dans un tel cas, par le paragraphe 2 de l'article 23 précité du règlement (UE) n° 604/2013 pour formuler une demande aux fins de reprise en charge de M. A...auprès des autorités italiennes. Ce délai était donc expiré le 14 avril 2017, date à laquelle le préfet des Yvelines a saisi d'une telle demande les autorités italiennes. Par voie de conséquence, M. A... est fondé à soutenir qu'en saisissant le 14 avril 2017 les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge, le préfet des Yvelines a méconnu les dispositions précitées de l'article 23 du règlement (UE) n° 604/2013, dans la mesure où, à compter du 27 février 2017, la France était devenue seule responsable de l'examen de sa demande de protection internationale en vertu des dispositions du 3 de cet article. Il y a donc lieu, pour ce motif, de prononcer l'annulation de l'arrêté litigieux ainsi que, par voie de conséquence, de l'arrêté du même jour assignant à résidence le requérant et dont celui-ci demande également l'annulation.

4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation des arrêtés du préfet des Yvelines du 8 août 2017 ordonnant son transfert aux autorités italiennes et prononçant son assignation à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ". L'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'il soit statué sur la demande d'asile présentée par M. A...et qu'il soit muni, durant cet examen, d'une attestation de demande d'asile. Il y a donc lieu, par suite, d'enjoindre au préfet des Yvelines de procéder au réexamen de la situation de l'intéressé dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de le munir, dans cette attente d'une telle attestation, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1706159 du 4 septembre 2017 du magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Versailles et les arrêtés du préfet des Yvelines du 8 août 2017 portant transfert de M. A...aux autorités italiennes et l'assignation de l'intéressé sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de procéder au réexamen de la demande d'asile de M. A...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de le munir, durant cet examen, d'une attestation de demande d'asile.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

2

N° 17VE03068


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03068
Date de la décision : 02/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: Mme Diane MARGERIT
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : SCALBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-10-02;17ve03068 ?
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