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20/11/2018 | FRANCE | N°16VE00805

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 20 novembre 2018, 16VE00805


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 4 juin 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 4ème section de l'unité territoriale des Hauts-de-Seine a autorisé la SOCIETE PAPILLON à procéder à son licenciement pour inaptitude.

Par un jugement n° 1306320 du 1er février 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a fait droit à sa demande et a annulé la décision du 4 juin 2013 de l'inspecteur du travail de la 4ème section de l'uni

té territoriale des Hauts-de-Seine.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 4 juin 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la 4ème section de l'unité territoriale des Hauts-de-Seine a autorisé la SOCIETE PAPILLON à procéder à son licenciement pour inaptitude.

Par un jugement n° 1306320 du 1er février 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a fait droit à sa demande et a annulé la décision du 4 juin 2013 de l'inspecteur du travail de la 4ème section de l'unité territoriale des Hauts-de-Seine.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 21 et 30 mars 2016 et le 13 avril 2017, la SOCIETE PAPILLON, représentée par Me Nizou-Lesaffre, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

3° de mettre à la charge de Mme A...la somme de 4 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

La SOCIETE PAPILLON soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en tant que les premiers juges n'ont pas indiqué les raisons qui s'opposaient à la substitution de motifs sollicitée ;

- c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision litigieuse alors qu'elle avait satisfait à son obligation de reclassement bien que Mme A...ait été déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise ;

- c'est à tort que les premiers juges ont refusé de procéder à la substitution de motifs pour corriger l'erreur commise par l'inspecteur dans sa décision qui a indiqué par erreur qu'elle n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement.

- les accusations de harcèlement de Mme A...sont infondées.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Besson-Ledey,

- les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public,

- et les observations de Me C...substituant Me Nizou-Lesaffre pour la SOCIETE PAPILLON.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...A..., recrutée par la SOCIETE PAPILLON le

1er octobre 2006, exerçait en dernier lieu les fonctions de comptable et détenait un mandat de délégué du personnel. A l'issue d'une période d'arrêt de travail pour maladie, le médecin du travail l'a déclarée " inapte à l'emploi dans l'entreprise " par un avis du 21 février 2013. Par un courrier du 23 mars 2013, la SOCIETE PAPILLON a sollicité auprès de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier Mme A...pour inaptitude. Par une décision du 4 juin 2013, l'inspecteur du travail de la 4ème section de l'unité territoriale des Hauts-de-Seine a autorisé le licenciement de MmeA.... Par un jugement du 1er février 2016, dont la

SOCIETE PAPILLON relève appel, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des mentions mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif a suffisamment motivé le rejet de la demande de substitution de motifs de la décision de l'inspecteur du travail présentée par la SOCIETE PAPILLON en précisant que l'appréciation portée par l'administration sur l'insuffisance des efforts de reclassement par la société concernée ne saurait relever d'une simple erreur de plume comme le fait valoir celle-ci. Par suite, la SOCIETE PAPILLON n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'insuffisance de motivation.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable du 1er mai 2008 au 1er janvier 2017 : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. ". Aux termes de son article L. 1226-3 : " Le contrat de travail du salarié déclaré inapte peut être suspendu pour lui permettre de suivre un stage de reclassement professionnel. ". Enfin, selon l'article R. 4624-31 du même code, dans sa rédaction applicable du 1er juillet 2012 au 1er janvier 2017 : " (...) Lorsque le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers ou lorsqu'un examen de pré reprise a eu lieu dans un délai de trente jours au plus, l'avis d'inaptitude médicale peut être délivré en un seul examen. ".

4. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur a cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en oeuvre, dans l'entreprise, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel. La circonstance que l'avis du médecin du travail, auquel il incombe de se prononcer sur l'aptitude du salarié à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment ou à exercer d'autres tâches existantes, déclare le salarié protégé " inapte à tout emploi dans l'entreprise " ne dispense pas l'employeur, qui connaît les possibilités d'aménagement de l'entreprise et peut solliciter le groupe auquel, le cas échéant, celle-ci appartient, de rechercher toute possibilité de reclassement dans l'entreprise ou au sein du groupe, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations des postes de travail ou aménagement du temps de travail.

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue d'une période d'arrêt de travail, le médecin du travail a, par avis du 21 février 2013, déclaré Mme A..." conformément à l'article R. 4624-31 du code du travail, compte tenu du danger immédiat, un seul examen, inapte à l'emploi dans l'entreprise ". Le 27 février 2013, la SOCIETE PAPILLON a adressé un courrier à Mme A...contenant deux propositions de reclassement interne à l'entreprise pour un poste d'ouvrier peintre et un poste d'ouvrier poseur de sol / revêtement, nécessitant au préalable une ou plusieurs formations qualifiantes, ainsi qu'une proposition de transformation du poste ou d'aménagement du temps de travail. Le lendemain, le médecin du travail a indiqué à la société qu'aucune proposition concrète ne pouvait être faite pour un reclassement en interne. Mme A...a refusé les propositions de reclassement par un courrier du 15 mars 2013.

6. D'autre part, pour prendre la décision attaquée, l'inspecteur du travail a relevé que la SOCIETE PAPILLON " n'a manifestement pas recherché l'adéquation éventuelle des dites propositions " et qu'elle " n'a pas été en mesure de présenter (...) des éléments permettant d'attester que les prétendues recherches de reclassement respectaient les préconisations du médecin du travail (...) " pour conclure que l'entreprise " n'a manifestement pas respecté les dispositions du code du travail ". Par suite, alors que la décision fait état de ce que la recherche de reclassement n'a pas été mise en oeuvre de façon correcte, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'inspecteur du travail ne pouvait, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation quant à la portée de l'avis médical, autoriser le licenciement de MmeA....

7. En second lieu, si la SOCIETE PAPILLON soutient que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas substitué au motif selon elle erroné du caractère insuffisant de l'obligation de reclassement de la décision attaquée un motif tiré de ce qu'elle a procédé à une recherche sérieuse et suffisante de reclassement et réitère en appel sa demande de substitution de motif, il ne saurait être procédé à une telle substitution de motif alors que l'appréciation faite pas l'inspecteur du travail sur le caractère suffisant des recherches de reclassement de Mme A...ne relève pas d'une simple erreur matérielle comme le prétend la SOCIETE PAPILLON et qu'une telle demande ne peut, en outre, être présentée que par l'administration auteur de la décision attaquée, laquelle s'est abstenue de le faire. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de substitution de motifs présentée par la société requérante.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE PAPILLON n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 4 juin 2013 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de MmeA.... Sa requête doit être rejetée, y compris les conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la SOCIETE PAPILLON le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE PAPILLON est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE PAPILLON versera à Mme A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

N° 16VE00805 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00805
Date de la décision : 20/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-035-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Motifs autres que la faute ou la situation économique. Inaptitude ; maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : NIZOU-LESAFFRE et HUBERT NLH AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-11-20;16ve00805 ?
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