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18/12/2018 | FRANCE | N°17VE02340

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 18 décembre 2018, 17VE02340


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 8 mai 2017 du préfet des Hauts-de-Seine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination, lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et procédant à son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen pour la même durée.

Par un jugement n° 1704372 du 20 juin 2017, le magistrat désigné par le Tribunal

administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision portant interdiction de retour s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 8 mai 2017 du préfet des Hauts-de-Seine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination, lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et procédant à son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen pour la même durée.

Par un jugement n° 1704372 du 20 juin 2017, le magistrat désigné par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 20 juillet 2017,

14 novembre 2017 et 22 novembre 2018, M. B..., représenté par Me D'Angela, avocat, demande à la Cour :

1° de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2° d'annuler ce jugement ;

3° d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai et la décision fixant le pays de destination ;

4° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne en ce qui concerne le droit d'être entendu ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du

19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli,

- et les observations de Me D'Angela, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant ivoirien, âgé de trente-six ans à la date des décisions en litige, relève appel du jugement du 20 juin 2017 par lequel le magistrat désigné par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 mai 2017 du préfet des Hauts-de-Seine en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai et fixe le pays de destination.

Sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président (...) ". Aux termes de l'article 62 du décret du 19 décembre 1991 pris pour l'application de ces dispositions : " L'admission provisoire est demandée sans forme au président du bureau ou de la section ou au président de la juridiction saisie. (...) L'admission provisoire peut être prononcée d'office si l'intéressé a formé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été définitivement statué ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B...le 22 août 2017 a fait l'objet le 10 août 2018 d'une décision de rejet du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de Grande Instance de Versailles. Par suite, il y a lieu de rejeter la demande d'aide juridictionnelle provisoire présentée par le requérant.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, laquelle, en vertu du premier alinéa du paragraphe 1 de l'article 6 du traité sur l'Union européenne, a la même valeur juridique que les traités : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union (...) ". Si les dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne sont pas en elles-mêmes invocables par un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement telle qu'une obligation de quitter le territoire français, celui-ci peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union relatif au respect des droits de la défense imposait qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée.

5. M. B...soutient que le droit d'être entendu, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des principes généraux du droit de l'Union européenne et qui implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne, a été méconnu. Toutefois, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision défavorable est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie. En l'espèce, il ne ressort d'aucune pièce du dossier et n'est pas même soutenu que M. B...aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'il aurait été empêché de présenter ses observations avant que ne soit pris l'arrêté contesté. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient d'un principe général du droit de l'Union.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. B...soutient, d'une part, que l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet est de nature à mettre gravement en péril l'activité de prestations informatiques qu'il a développée en France et, d'autre part, qu'il rend régulièrement visite à sa tante et mère adoptive, MmeC..., qui réside sur le territoire français. Toutefois, M.B..., qui demeurait en France depuis moins de trois ans à la date de la décision attaquée, est célibataire et sans charge de famille et ne soutient pas qu'il serait dépourvu de toutes attaches privées et familiales en Côte d'Ivoire où il a vécu jusqu'au moins l'âge de trente-quatre ans et où il indique avoir créé sa société. M. B...n'établit pas davantage l'existence d'une atteinte à sa vie privée du fait du développement d'une activité professionnelle en France, dont la réalité et l'étendue ressort, au demeurant, pour l'essentiel, de documents établis postérieurement aux décisions attaquées. Il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

4

N° 17VE02340


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02340
Date de la décision : 18/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Nathalie RIBEIRO-MENGOLI
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : D'ANGELA

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-12-18;17ve02340 ?
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