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22/01/2019 | FRANCE | N°16VE01161

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 22 janvier 2019, 16VE01161


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 17 septembre 2012 par laquelle le préfet de l'Essonne a accordé le concours de la force publique à l'expulsion du logement occupé 51 rue Pierre Brossolette, 22/24 avenue Granger, à Draveil, et d'ordonner la production de l'acte de signification en date du 19 décembre 2011 allégué par les services de la préfecture de l'Essonne.

Par un jugement n° 1206365 en date du 19 février 2016, le Tribunal administratif de

Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 17 septembre 2012 par laquelle le préfet de l'Essonne a accordé le concours de la force publique à l'expulsion du logement occupé 51 rue Pierre Brossolette, 22/24 avenue Granger, à Draveil, et d'ordonner la production de l'acte de signification en date du 19 décembre 2011 allégué par les services de la préfecture de l'Essonne.

Par un jugement n° 1206365 en date du 19 février 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 avril 2016, MmeA..., représentée par

Me Nehorai, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement du 19 février 2016 du Tribunal administratif de Versailles ;

2° d'annuler la décision préfectorale du 17 septembre 2012 par laquelle le préfet de l'Essonne a accordé le concours de la force publique à l'expulsion du logement occupé au

51 rue Pierre Brossolette, 22/24 avenue Granger à Draveil.

Elle soutient que :

- la lettre du 17 septembre 2012 constitue une décision d'octroi de la force publique, tant par sa forme, son objet, son contenu, ses effets directs. Elle fait dès lors grief, et n'est pas seulement à vision purement informative. Ainsi, sa requête en excès de pouvoir est recevable ;

- les premiers juges ont méconnu l'article 61-1 de la Constitution et la loi organique du 10 décembre 2009 en statuant sur l'irrecevabilité de la requête et par voie de conséquence sur la question prioritaire de constitutionnalité ;

- le préfet de l'Essonne aurait dû attendre le résultat du rapport social avant de prendre la décision du 17 septembre 2012 ;

- le titre exécutoire auquel la décision apportait le concours de la force publique aurait dû être identifié et désigné précisément ;

- la décision préfectorale du 17 septembre 2012 est irrégulière du fait des conditions du jugement d'expulsion du Tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge ;

- le jugement l'a abusivement privée de son droit d'accès à la justice ;

- l'expulsion ordonnée par le jugement du 8 novembre 2011 a porté atteinte à la dignité humaine ;

- elle reprend en appel tous les moyens de faits et de droit présentés devant les premiers juges.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 16VE01161 du 3 mai 2016 ;

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- la loi organique du 10 décembre 2009 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Margerit,

- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...relève appel du jugement du Tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 septembre 2012 par laquelle le préfet de l'Essonne a accordé le concours de la force publique à l'expulsion du logement occupé 51 rue Pierre Brossolette, 22-24 avenue Granger, à Draveil.

Sur la régularité du jugement :

2. Mme A...se borne à soutenir que le jugement du Tribunal administratif de Versailles l'a privée de son droit d'accès à la justice, sans apporter de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

3. Par un courrier du 17 septembre 2012, le préfet de l'Essonne a informé Mme A... qu'il a été saisi, le 13 avril 2012, d'une demande d'assistance de la force publique en vue de procéder à son expulsion de l'appartement qu'elle occupait et qu'il a décidé d'autoriser le commissaire de police de Draveil à assister l'huissier en vue de l'exécution forcée. Ce courrier du 17 septembre 2012 a le caractère de décision faisant grief et dès lors, peut faire l'objet d'un recours en annulation. Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté comme irrecevable sa requête tendant à l'annulation de ce courrier du 17 septembre 2012.

4. Ainsi le jugement du Tribunal administratif de Versailles doit être annulé en tant qu'il a rejeté ces conclusions. Il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions présentées en première instance par MmeA....

Sur le fond :

5. Il ressort des pièces du dossier, que par un arrêté du 25 juin 2010, régulièrement publié, le préfet de l'Essonne a donné délégation à M. Espinasse, secrétaire général, à l'effet de signer tous les actes et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le Département de l'Essonne. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

6. Aux termes de l'article L. 153-1 du code des procédures civiles d'exécution : " L'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation " et selon l'article R. 153-1 du même code : " Si l'huissier de justice est dans l'obligation de requérir le concours de la force publique, il s'adresse au préfet (...) Le défaut de réponse dans un délai de deux mois équivaut à un refus (...) ".

7. Toute décision de justice ayant force exécutoire peut donner lieu à une exécution forcée, la force publique devant, si elle est requise, prêter main forte à cette exécution. Toutefois des considérations impérieuses tenant à la sauvegarde de l'ordre public ou à la survenance de circonstances postérieures à la décision judiciaire d'expulsion, telles que l'exécution de celle-ci serait susceptible d'attenter à la dignité de la personne humaine, peuvent légalement justifier, sans qu'il soit porté atteinte au principe de séparation des pouvoirs, le refus de prêter le concours de la force publique. En cas d'octroi de la force publique il appartient au juge de rechercher si l'appréciation à laquelle s'est livrée l'administration sur la nature et l'ampleur des troubles à l'ordre public susceptibles d'être engendrés par sa décision ou sur les conséquences de l'expulsion des occupants compte tenu de la survenance de circonstances postérieures à la décision de justice l'ayant ordonné, n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Le moyen tiré de ce que le commandement de quitter les lieux du 19 décembre 2011 n'aurait pas été signifié régulièrement dès lors qu'il ne ferait pas référence au jugement du 8 novembre 2011 du Tribunal de grande instance d'Evry ordonnant l'expulsion de la requérante est inopérant dès lors que ce jugement a été notifié à Mme A...et doit être écarté.

9. Le moyen tiré de ce que la décision du 17 septembre 2012 ne mentionnerait pas ledit jugement du 8 novembre 2011 est inopérant dès lors que ce jugement a été notifié à Mme A... et doit donc être écarté.

10. Il ressort des pièces du dossier que la décision du 17 septembre 2012 a été prise en l'absence de communication du rapport social demandé le 13 avril 2012 par le préfet de l'Essonne aux services d'assistance sociale. En effet, ce rapport n'a été rendu par l'assistante sociale que le 18 octobre 2012. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'assistante sociale avait contacté la requérante pour la rencontrer dès le 22 mai 2012 mais sa lettre lui est revenue. Elle l'a ensuite contactée le 27 août 2012, mais Mme A...lui a fait savoir qu'elle ne pouvait pas la rencontrer du fait qu'elle était en train de régler des problèmes notariaux. Dans ces circonstances, le fait que la décision attaquée n'ait pu être prise au vu d'un rapport social est sans incidence sur la légalité de ladite décision.

11. Mme A...ne saurait utilement soutenir que le recours exercé contre le jugement du Tribunal de grande instance du 8 novembre 2011 serait suspensif.

12. Mme A...fait valoir qu'elle a divorcé de son mari qui aurait, à la suite de dettes contractées, été contraint de procéder à la vente par adjudication du pavillon objet du litige, et qu'elle serait atteinte d'un cancer du cerveau. Toutefois, elle est assistée de sa fille et n'établit pas que l'exécution du jugement du TGI d'Evry du 8 novembre 2011 porterait une atteinte à sa dignité. Il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse aurait porté atteinte à sa dignité, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

13. Le moyen tiré de ce que le jugement attaqué l'aurait abusivement privée de son droit d'accès à la justice n'est pas assorti des précisions suffisantes et doit être écarté.

14. Enfin, Mme A...soutient que les premiers juges auraient méconnu l'article 61-1 de la Constitution et la loi organique du 10 décembre 2009, et plus précisément l'exigence de statuer prioritairement sur le moyen de fond que définit une question prioritaire de constitutionnalité, en statuant sur l'irrecevabilité de la requête et par voie de conséquence sur ladite question. Toutefois, il a été répondu à cette question prioritaire de constitutionnalité par une ordonnance du président du Tribunal administratif de Versailles du 21 décembre 2012.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 17 septembre 2012.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1206365 du Tribunal administratif de Versailles du 19 février 2016 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme A...est rejetée.

N° 16VE01161 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01161
Date de la décision : 22/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

37-05-01 Juridictions administratives et judiciaires. Exécution des jugements. Concours de la force publique.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Diane MARGERIT
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : NEHORAI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-01-22;16ve01161 ?
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