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02/04/2019 | FRANCE | N°18VE03359

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 02 avril 2019, 18VE03359


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2018 par lequel la préfète de la Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par une ordonnance n° 1805801 du 7 septembre 2018, le premier vice-président du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 octobre 2018, M.B..., représentée par Me Levy,

avocat, demande à la cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2° d'annuler l'arrêté litigieux ;
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2018 par lequel la préfète de la Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par une ordonnance n° 1805801 du 7 septembre 2018, le premier vice-président du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 octobre 2018, M.B..., représentée par Me Levy, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2° d'annuler l'arrêté litigieux ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande était recevable ;

- l'arrêté est signé par une autorité incompétente faute de délégation de compétence ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé en violation de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- les mentions contradictoires du délai de recours méconnaissent son droit au recours protégé par l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'entré en France en décembre 2007 et s'y maintenant depuis plus de dix ans, il n'a plus d'attache en Tunisie ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Munoz-Pauziès, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., de nationalité tunisienne, relève appel de l'ordonnance du

7 septembre 2018 par laquelle le premier vice-président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2018 de la préfète de la Seine-et-Marne portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

2. Aux termes de l'article 1'article L. 512-1- I bis du code de 1'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision ( .. .) ".

3. L'ordonnance attaquée, après avoir relevé que l'arrêté du 25 mai 2018 mentionnait les voies et délais de recours et qu'il avait été notifié par voie administrative le 25 mai 2018, a rejeté comme tardive la demande de M.B..., enregistrée le 22 juin 2018, après l'expiration du délai de quinze jours mentionné ci-dessus. Toutefois, le procès-verbal de notification du

25 mai 2018 mentionnait un délai de 30 jours pour former un recours devant le tribunal administratif. Cette mention erronée relative aux voies et délais de recours fait obstacle à ce que le délai de quinze jours puisse être opposé au requérant. Par suite, c'est à tort que le premier juge a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi. L'ordonnance du 7 septembre 2018 doit, dès lors, être annulée.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Montreuil.

5. En premier lieu, par arrêté n° 17/PCAD/171 du 27 juillet 2017, régulièrement publié au recueil des actes de la préfecture du 28 juillet 2017, la préfète de Seine-et-Marne a donné délégation à M. F...E..., directeur de la citoyenneté et de la réglementation, à l'effet de signer, notamment, les obligations de quitter le territoire français. Le même arrêté, dans son article 2, prévoit qu'en cas d'absence ou d'empêchement de M. E..., délégation de signature est donnée à Mme D...C..., attachée de préfecture. Le moyen tiré de ce que, faute de délégation de signature, cette dernière serait incompétente pour signer l'arrêté attaqué doit être écarté.

6. En deuxième lieu, la décision attaquée, qui mentionne les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les principaux éléments relatifs à la situation de M.B..., et notamment qu'il ne peut justifier d'une entrée régulière sur le territoire français ni de documents d'identité et qu'il déclare être célibataire, sans domicile fixe, sans charge de famille et sans ressources, est suffisamment motivée. Cette motivation révèle que la préfète de Seine-et-Marne a procédé à un examen particulier de la situation de

M.B....

7. En troisième lieu, les conditions de notification d'une décision administrative sont sans influence sur sa légalité. Ainsi, la circonstance que l'arrêté attaqué mentionnait un délai de recours de quinze jours, alors que le procès-verbal de notification faisait quant à lui état d'un délai de trente jours, est sans influence sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français litigieuse. Cette circonstance ne l'ayant pas privé de la possibilité de saisir le juge,

M. B...ne peut utilement se prévaloir de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En quatrième lieu, l'article 11 de l'accord franco-tunisien stipule : " les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. " Cet accord ne traite que de la délivrance de titres de séjour et ne comprend aucune stipulation relative aux conditions dans lesquelles les ressortissants tunisiens qui ne peuvent prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sont obligés de quitter le territoire français. C'est par suite à bon droit que la préfète de

Seine-et-Marne a fait application à M. B...des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux obligations de quitter le territoire français.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. M. B...fait valoir qu'il est entré en France en décembre 2007 et s'y est maintenu de manière stable et ininterrompue depuis cette date. Toutefois, l'intéressé, qui n'établit pas l'ancienneté de sa présence en France, est célibataire et sans enfants, et n'apporte aucun élément démontrant son intégration sur le sol français. S'il produit un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'électricien signé le 2 janvier 2018, cette circonstance est postérieure à l'arrêté litigieux. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

11. Enfin, et en tout état de cause, M.B..., qui ne fait état d'aucune considération humanitaire ou circonstance exceptionnelle, n'a pas déposé de demande de titre de séjour et n'établit pas résider en France depuis plus de dix ans, n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les raisons mentionnées au point 10 du présent arrêt, il n'est pas davantage fondé à se prévaloir des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2018 par lequel la préfète de la Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination. Par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 7 septembre 2018 du premier vice-président du Tribunal administratif de Montreuil est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Montreuil est rejetée.

2

N°18VE03359


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE03359
Date de la décision : 02/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : GRYNER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-04-02;18ve03359 ?
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