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16/05/2019 | FRANCE | N°17VE02213

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 16 mai 2019, 17VE02213


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler les arrêtés du 20 juin 2017 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis, d'une part, a ordonné son transfert vers l'Italie, Etat désigné comme responsable de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1705592 du 3 juillet 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Pr

océdure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 juillet 2017, M. A..., représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler les arrêtés du 20 juin 2017 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis, d'une part, a ordonné son transfert vers l'Italie, Etat désigné comme responsable de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1705592 du 3 juillet 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 juillet 2017, M. A..., représenté par Me Ka, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement et ces arrêtés ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un dossier de demande d'asile à transmettre à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa demande d'admission au séjour, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision de transfert :

- le magistrat désigné n'a pas répondu au moyen tiré de ce que l'accord implicite n'avait pas été communiqué aux autorités italiennes ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 10 du règlement (UE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2013 ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 5 du (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

Sur l'assignation à résidence :

- le magistrat désigné a omis de statuer sur les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 561-2-1, L. 552-4 et L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'absence d'éléments relatifs à une exécution prochaine de l'arrêté ;

- elle est insuffisamment motivée en fait ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de transfert ;

- il n'appartenait pas au préfet de mettre fin à son hébergement d'urgence.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Tronel, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant soudanais né le 1er janvier 1992, relève appel du jugement du 3 juillet 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 20 juin 2017 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis, d'une part, a ordonné son transfert vers l'Italie, Etat désigné comme responsable de l'examen de sa demande d'asile, et d'autre part, l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Sur la décision portant transfert de M. A...aux autorités italiennes :

2. Il résulte de la combinaison des dispositions du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre une décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 de ce règlement, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'État requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'État requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

3. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A...a présenté, le 17 janvier 2017, une demande d'asile auprès des services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis. Il est apparu au cours de l'instruction de cette demande et après la consultation du fichier Eurodac, que l'examen de celle-ci relevait de la responsabilité de l'Italie. L'autorité préfectorale a saisi, le 8 février 2017, les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge qui a été implicitement acceptée. Le préfet de la Seine-Saint-Denis a ordonné le transfert de l'intéressé vers l'Italie. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le délai de six mois imparti à l'administration pour procéder à ce transfert à compter de l'acceptation par les autorités italiennes de la demande de reprise en charge a été interrompu par la présentation devant le Tribunal administratif de Montreuil, le 22 juin 2017, de la demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté ordonnant son transfert. Ce délai de six mois a recommencé à courir à compter du jugement du 3 juillet 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé cet arrêté. Par suite, le délai de six mois ayant expiré le 3 janvier 2018, l'Italie a été libérée, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, de son obligation de reprendre en charge M. A...et la responsabilité de l'examen de sa demande d'asile a été transférée, à cette date, à la France. Cette caducité étant intervenue postérieurement à l'introduction de l'appel, les conclusions de la requête de M. A... tendant à l'annulation du jugement du 3 juillet 2017 en tant qu'il rejette sa demande d'annulation de l'arrêté du 3 juillet 2017 portant transfert vers l'Italie et à l'annulation de cet arrêté sont devenues sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur la décision portant assignation à résidence :

4. Aux termes du I de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) / 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 (...) ".

5. En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

6. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.

7. En l'espèce, la décision de transfert vise le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et indique que M. A...est irrégulièrement entré en France le 3 décembre 2016, qu'il a déposé une demande d'asile le 17 janvier 2017, qu'il est apparu au cours de l'instruction de cette demande, après consultation du fichier Eurodac, que celle-ci relevait de la responsabilité de l'Italie et que les autorités de ce pays ont été saisies d'une demande de reprise en charge en application des articles 23 et 25 du règlement précité. La décision ne précise cependant pas les éléments de fait permettant de déterminer quel critère de reprise en charge a été appliqué, parmi ceux mentionnés aux b), c) ou d) de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Elle est par suite insuffisamment motivée. Il en résulte que l'arrêté prononçant l'assignation à résidence de M. A...est privé de base légale en raison de l'illégalité de la décision de transfert aux autorités italiennes et doit pour ce motif et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens soulevés par M.A..., être annulé.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. L'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à M. A...une attestation provisoire de séjour, l'admette au bénéfice des conditions d'accueil des personnes demandant la protection internationale ou, à défaut, procède au réexamen de sa demande. Les conclusions d'injonction sous astreinte présentées en ce sens doivent, par suite, être écartées.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A...tendant à l'annulation du jugement n° 1705592 du 3 juillet 2017 en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2017 du préfet de la Seine-Saint-Denis ordonnant son transfert vers l'Italie ainsi qu'à l'annulation de cette décision de transfert.

Article 2 : L'arrêté du 20 juin 2017 du préfet de la Seine-Saint-Denis assignant M. A...à résidence est annulé.

Article 3 : Le jugement n° 1705592 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 3 juillet 2017, en tant qu'il se prononce sur les conclusions de M. A... à fin d'annulation de l'arrêté du 20 juin 2017 du préfet de la Seine-Saint-Denis l'assignant à résidence, est annulé.

Article 4 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

N° 17VE02213 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02213
Date de la décision : 16/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Nicolas CHAYVIALLE
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : KA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-05-16;17ve02213 ?
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