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08/10/2021 | FRANCE | N°20VE00935

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 08 octobre 2021, 20VE00935


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays vers lequel il pourrait être reconduit, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astre

inte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de lui enjoindre de réexamine...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays vers lequel il pourrait être reconduit, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois et sous la même astreinte et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler le temps du réexamen.

Par un jugement n° 1908791 du 11 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mars 2020, M. B..., représenté par Me Launois-Flacelière, avocate, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois et sous la même astreinte et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler le temps du réexamen ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- la décision implicite de rejet ne pouvait être retirée sans méconnaitre les dispositions de l'article L. 243-3 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'erreurs de fait ;

- le préfet a méconnu le champ d'application de la loi et a entaché sa décision d'une erreur de droit en la fondant sur l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnaît l'article 6,5° de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît le 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Orio,

- et les observations de Me Malik Fazal, substituant Me Launois-Flacelière, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant algérien, né le 9 mai 1973 à Tasga (Algérie), a sollicité le 10 juillet 2018 la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié et au titre de l'admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 5 juillet 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit. M. B... fait régulièrement appel du jugement du 11 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour vise les dispositions pertinentes de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle mentionne que l'intéressé n'allègue aucun motif exceptionnel ou humanitaire pour prétendre au bénéfice de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il n'entre pas dans le champ des stipulations de l'accord franco-algérien, qu'il ne peut se prévaloir d'une longue présence habituelle et continue sur le territoire, que la décision de refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale. Elle comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation du requérant. Contrairement à ce que fait valoir le requérant, le préfet a bien relevé que ses parents résidaient en France et a indiqué que M. B... ne démontrait pas la nécessité de rester auprès d'eux.

4. En troisième lieu, les erreurs de fait alléguées relatives à la situation des parents du requérant et à sa présence réelle et continue en France ne sont pas établies.

5. En quatrième lieu, M. B... soutient que la décision implicite rejetant sa demande a été retirée par la décision explicite de rejet du 5 juillet 2019 au-delà du délai prévu par les dispositions de l'article L. 243-3 du code des relations entre le public et l'administration et qu'elle doit, dès lors, être annulée. Toutefois, l'arrêté s'est uniquement substitué à la décision implicite de rejet et ne peut être regardé comme l'ayant retirée, dès lors que la décision implicite n'a jamais eu pour objet ou pour effet d'accorder de droit au séjour à l'intéressé. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 243-3 du code des relations entre le public et l'administration ne peut, dès lors, être utilement invoqué et doit être écarté.

6. En cinquième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...)5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus; (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

8. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants algériens, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles ils peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle et les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés.

9. D'une part, M. B... soutient que le préfet a méconnu le champ d'application de la loi en examinant sa situation au regard des seules dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort toutefois des termes de la décision attaquée, qui vise notamment les articles 6, alinéa 5 et 7 b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, qui relève que l'intéressé a sollicité une certificat de résidence en qualité de salarié et qui indique que l'intéressé " ne rentre pas dans le champ d'application desdits accords et article ", que le préfet de la Seine-Saint-Denis a examiné les possibilités de délivrance de plein droit d'un certificat de résidence à M. B... au regard de l'accord franco-algérien avant d'exercer son pouvoir de régularisation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du champ d'application de la loi doit être écarté.

10. D'autre part, si M. B... se prévaut de sa présence en France depuis 2015 et de la présence régulière en France de ses parents, il n'établit pas la nécessité de sa présence aux côtés de ses parents, alors qu'un de ses frères réside régulièrement sur le territoire, qu'il est lui-même célibataire et sans charge de famille, et qu'il a vécu en Algérie jusqu'à l'âge de 42 ans. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, et les moyens tirés de la méconnaissance du 5) des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

11. Enfin, si le requérant, qui ne conteste pas ne pas remplir les conditions d'exercice d'une activité professionnelle fixées par le b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, fait valoir avoir travaillé depuis son arrivée sur le territoire français en 2015, il ne l'établit pas. Par ailleurs, il n'établit pas la nécessité de sa présence auprès de ses parents âgés par la seule production d'un certificat peu circonstancié d'un médecin généraliste et alors que son frère réside également en France. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'absence de régularisation de sa situation ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

12. En premier lieu, l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour n'étant pas établie, le moyen tiré du défaut de base légale de la mesure d'éloignement en raison de l'illégalité du refus de titre ne peut qu'être écarté.

13. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. (...) ".

14. M. B... reprend en appel sans invoquer d'élément nouveau son moyen tiré de ce que le 10° de l'article L. 511-4 serait méconnu. Les premiers juges ont relevé que si le requérant soutient que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ne ressort pas des pièces du dossier, qui se bornent à faire état de la nécessité d'un traitement et d'un suivi médical régulier, qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il y a lieu d'écarter par adoption de ces motifs retenus à bon droit par les premiers juges le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

15. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ne peuvent, au vu des éléments de fait exposés au point 8, qu'être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

16. L'illégalité des décisions refusant le titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établies, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre et d'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

5

N° 20VE00935


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00935
Date de la décision : 08/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Eugénie ORIO
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : LAUNOIS-FLACELIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-10-08;20ve00935 ?
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