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07/03/2023 | FRANCE | N°21VE02951

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 07 mars 2023, 21VE02951


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 7 mai 2021 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2104741 du 4 octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 et 5 novembr

e 2021, M. B..., représenté par Me Simon, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 7 mai 2021 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2104741 du 4 octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 et 5 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Simon, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un certificat de résidence temporaire valable un an portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard au-delà de ce délai ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard au-delà de ce délai et, dans l'attente, d'enjoindre au préfet de Police de Paris de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire sont entachées d'incompétence ;

- la décision portant refus de titre de séjour :

o méconnaît les stipulations de l'article 7-b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

o méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa vie privée, ainsi que d'un défaut d'examen particulier à cet égard ;

- l'obligation de quitter le territoire français :

o n'a pas été suffisamment motivée ;

o est dépourvue de base légale ;

o méconnaît l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

o méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

o est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa vie privée ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

o est insuffisamment motivée ;

o méconnaît l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;

- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale dès lors que les décisions refusant le titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours sont illégales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2022, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Houllier, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 2 mai 1988, est entré en France le 14 avril 2019 sous couvert d'un visa Schengen portant la mention " famille de Français ". Il a obtenu, le 23 avril 2019, un certificat de résidence algérien valable un an. Il a sollicité, le 10 décembre 2019, un changement de statut en invoquant le bénéfice de l'article 7-b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par un arrêté du 7 mai 2021, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit. M. B... demande l'annulation du jugement n° 2104741 du 4 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire :

2. L'arrêté attaqué a été signé par M. D... C..., directeur de l'immigration et de l'intégration de la préfecture de l'Essonne, qui a reçu délégation pour ce faire par arrêté préfectoral n° 2020-PREF-DCPPAT-BCA-310 du 31 décembre 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 120 de la préfecture de l'Essonne du même jour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire doit être écarté.

Sur les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation entachant les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France le 14 avril 2019 après s'être marié avec une ressortissante française dont il s'est depuis séparé. Si M. B... se prévaut de la présence en France de ses deux parents, de nationalité française, de ses trois frères, ainsi que de nombreux oncles, tantes, cousins et neveux, dont certains sont de nationalité française, ainsi que de son insertion professionnelle et de ses attaches amicales sur le territoire, la seule présence en France de plusieurs membres de sa famille ne peut suffire à caractériser une méconnaissance de son droit à une vie privée et familiale normale compte tenu de la faible durée de sa présence en France, où il n'est entré qu'un peu plus de deux ans avant l'arrêté contesté, à l'âge de 31 ans, et alors qu'il ne démontre pas que sa présence serait indispensable pour s'occuper de sa mère titulaire d'une carte d'invalidité. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur l'autre moyen dirigé contre la décision portant refus de séjour :

5. Aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) / b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ; (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a sollicité, le 10 décembre 2020, un changement de statut à travers la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " salarié " sur le fondement des stipulations précitées de l'article 7-b) de l'accord franco-algérien. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France, après avoir constaté que le dossier était incomplet faute pour le formulaire CERFA d'avoir été correctement rempli, a adressé une demande de pièces complémentaires à l'employeur de M. B.... Si ce dernier a produit certains éléments par email, puis par courrier, il n'a pas produit le formulaire CERFA sollicité de telle sorte que la DIRECCTE a refusé, le 9 mars 2021, de délivrer l'autorisation de travail sollicitée. Dans ces conditions, le préfet était fondé à relever que M. B... ne remplissait pas les conditions exigées par l'article 7-b) précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié.

Sur les autres moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; (...) ".

8. D'une part, la décision attaquée, qui vise expressément l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans son titre, énonce avec suffisamment de précisions les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est par suite suffisamment motivée.

9. D'autre part, le titre de séjour sollicité par M. B... ayant été refusé, le préfet a légalement pu se fonder sur les dispositions précitées de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obliger ce dernier à quitter le territoire français.

Sur les autres moyens dirigées contre décision fixant le délai de départ volontaire :

10. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Elle peut prolonger le délai accordé pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation ".

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait fait valoir auprès des autorités préfectorales des circonstances particulières justifiant l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur au délai de droit commun de trente jours prévu par les dispositions précitées. Par suite, la décision contestée n'avait pas à faire l'objet d'une motivation particulière sur ce point.

12. En second lieu, si M. B... soutient qu'il n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations, ainsi que le prévoit l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, avant la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours, il ressort de l'ensemble des dispositions du livre VI du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut donc qu'être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

13. L'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions, soulevées à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 9 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

M. Camenen, président-assesseur,

Mme Houllier, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mars 2023.

La rapporteure,

S. HOULLIERLe président,

B. EVENLa greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE02951


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02951
Date de la décision : 07/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sarah HOULLIER
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : SIMON

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-03-07;21ve02951 ?
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