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21/04/2023 | FRANCE | N°21VE01200

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 21 avril 2023, 21VE01200


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 23 mars 2019 par lequel le maire de la commune de Draveil a retiré l'arrêté du 27 décembre 2018 l'autorisant à effectuer des travaux, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux, d'enjoindre au maire de Draveil de rétablir l'arrêté du 27 décembre 2018 et de mettre à la charge de la commune de Draveil une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par

un jugement n° 1906058 du 12 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 23 mars 2019 par lequel le maire de la commune de Draveil a retiré l'arrêté du 27 décembre 2018 l'autorisant à effectuer des travaux, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux, d'enjoindre au maire de Draveil de rétablir l'arrêté du 27 décembre 2018 et de mettre à la charge de la commune de Draveil une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1906058 du 12 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 23 mars 2019 et rejeté le surplus des conclusions de la demande ainsi que les conclusions présentées par la commune de Draveil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 23 avril 2021, le 30 mai 2022 et le 21 novembre 2022, la commune de Draveil, représentée par Me Bluteau, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. D... C... ;

3°) de mettre à la charge de M. D... C... une somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté de non-opposition à la déclaration préalable de M. D... C... du 27 décembre 2018 ayant été acquis au prix d'une fraude, dès lors que ce dernier a dissimulé qu'il n'était pas le propriétaire de la parcelle cadastrée AK 153, le maire de Draveil était fondé à retirer cet arrêté, sans condition de délai ;

- le retrait a été réalisé dans le délai de trois mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ;

- le maire de la commune de Draveil aurait pris la même décision de retrait de l'arrêté de non-opposition du 27 décembre 2018 en se fondant uniquement sur l'absence de qualité requise au titre de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, sans avoir à établir la fraude, cette substitution de motifs n'ayant pas pour effet de priver l'intéressé d'une garantie procédurale.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 21 février 2022 et le 17 octobre 2022, M. D... C..., représenté par Me Foucard, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Draveil une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté du 27 décembre 2018 n'a pas été obtenu au prix d'une fraude ;

- en l'absence de fraude, l'arrêté du 27 décembre 2018 ne pouvait plus être retiré au-delà du délai de 3 mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ;

- le propriétaire de la parcelle cadastrée AK 153 est inconnu ;

- le fait qu'il n'est pas le propriétaire de cette parcelle ne suffit pas à démontrer qu'il n'avait pas qualité pour déposer une déclaration préalable au sens de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme.

Par une ordonnance du 24 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 9 décembre 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Béguin, substituant Me Bluteau, pour la commune de Draveil et de Me Hongre-Boyeldieu, substituant Me Foucard, pour M. D... C....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C... a déposé, le 3 décembre 2018, une déclaration préalable de travaux en vue de la réalisation d'une clôture sur la parcelle cadastrée AK 153 à Draveil. Par un arrêté du 27 décembre 2018, le maire de la commune de Draveil ne s'est pas opposé à cette déclaration préalable. Toutefois, par un courrier du 22 février 2019, le maire de Draveil a informé M. D... C... qu'il était susceptible de procéder au retrait de cet arrêté dès lors que l'intéressé ne justifiait pas être le propriétaire de la parcelle concernée par les travaux. Le maire de Draveil a ensuite procédé au retrait de l'arrêté du 27 décembre 2018 par un arrêté du 23 mars 2019 au motif que la déclaration préalable avait été acquise au prix d'une fraude portant sur la qualité du pétitionnaire. La commune de Draveil demande à la Cour l'annulation du jugement n° 1906058 du 12 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté du 23 mars 2019.

Sur la légalité de l'arrêté du 23 mars 2019 portant retrait de l'arrêté du 27 décembre 2018 :

2. Aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; / c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique ". En vertu du dernier alinéa de l'article R. 431-5 dudit code, la demande de permis de construire comporte l'attestation du demandeur qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis. Enfin, aux termes de l'article L. 424-5 de ce code : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire ou de déclaration préalable doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Enfin, si postérieurement à la délivrance de l'autorisation, l'administration a connaissance de nouveaux éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de sa décision, elle peut légalement procéder à son retrait sans condition de délai. La fraude est caractérisée lorsqu'il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire a eu l'intention de tromper l'administration sur sa qualité pour présenter la demande d'autorisation d'urbanisme.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. D... C... a attesté, en remplissant le cadre 8 du formulaire CERFA, avoir qualité pour déposer une déclaration préalable visant à la réalisation d'une clôture sur la parcelle cadastrée AK 153 à Draveil en vue de mettre fin au stationnement sauvage constaté sur cette parcelle, qui limite les conditions d'accès à sa propre parcelle. Toutefois, il est constant que l'intéressé n'est pas propriétaire de la parcelle cadastrée AK 153. Si, par un courrier du 16 novembre 2018, la commune de Draveil a indiqué à M. et Mme D... C..., en réponse à plusieurs échanges au sujet de ces nuisances, qu'ils étaient " en droit de clôturer leur propriété ", cette seule invitation, qui n'a pas été émise par le propriétaire de la parcelle cadastrée AK 153, ne saurait être regardée comme conférant à M. D... C... un mandat lui donnant qualité pour présenter une déclaration préalable sur cette parcelle au sens de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, en attestant avoir qualité pour demander l'autorisation de construire en litige et en indiquant que les travaux portaient sur une clôture " sur notre copropriété ", alors qu'il n'ignorait pas ne pas être le propriétaire de la parcelle cadastrée AK 153, et alors que l'intéressé n'a pas répondu au courrier du 22 février 2019 par lequel le maire de Draveil l'informait qu'il envisageait de retirer l'autorisation délivrée et l'invitait à justifier de sa qualité à déposer la demande, M. D... C... doit être regardé comme ayant nécessairement eu l'intention de tromper le service instructeur. Par suite, l'autorisation du 27 décembre 2018 ayant été obtenue sur la base d'une déclaration frauduleuse, le maire a légalement pu la retirer, sans condition de délai, par l'arrêté attaqué du 23 mars 2019, l'absence de qualité de M. D... C... ne pouvant, au surplus, donner lieu à une contestation sérieuse sur le fondement des dispositions du code civil relatives à la prescription acquisitive ou à l'existence d'une servitude de passage.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de substitution de motif formée par la commune en appel, que la commune de Draveil est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 23 mars 2019.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Draveil, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... C... demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la M. A... C... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Draveil sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1906058 du 12 avril 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D... C... devant le tribunal administratif de Versailles ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : M. D... C... versera à la commune de Draveil une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Draveil et à M. E... D... C....

Copie en sera transmise, en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal judiciaire d'Evry.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Dorion, présidente assesseure,

Mme Houllier, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 avril 2023.

La rapporteure,

S. B...Le président,

B. EVENLa greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au préfet de l'Essonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE01200


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01200
Date de la décision : 21/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sarah HOULLIER
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : FOUCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-04-21;21ve01200 ?
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