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27/06/2013 | FRANCE | N°11/01246

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre a, 27 juin 2013, 11/01246


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2013



N° 2013/ 368













Rôle N° 11/01246







[X] [E]





C/



[K] [Y]

[W] [E]

[U] [B]





















Grosse délivrée

le :

à :



SCP MAYNARD

SCP BADIE













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 14 Décembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 2007/40434.





APPELANT



Monsieur [X] [E]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 6] (13), demeurant [Adresse 2]



représenté par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Stéphane CECC...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2013

N° 2013/ 368

Rôle N° 11/01246

[X] [E]

C/

[K] [Y]

[W] [E]

[U] [B]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP MAYNARD

SCP BADIE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 14 Décembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 2007/40434.

APPELANT

Monsieur [X] [E]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 6] (13), demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [K] [Y]

né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 4] (ITALIE), demeurant [Adresse 4]

représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL,avoués

plaidant par Me Yann ARNOUX-POLLAK, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [W] [E]

né le [Date naissance 4] 1951 à [Localité 3] ([Localité 2]), demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL,avoués

plaidant par Me Yann ARNOUX-POLLAK, avocat au barreau de MARSEILLE

Maître [U] [B],

pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL BERTOBROS

né le [Date naissance 3] 1945 à [Localité 5] ([Localité 1]), demeurant [Adresse 1]

représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL,avoués

plaidant par Me Sophie CAIS, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Mai 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Guy SCHMITT, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Guy SCHMITT, Président

Madame Catherine DURAND, Conseiller

Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2013,

Signé par Monsieur Guy SCHMITT, Président et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement frappé d'appel rendu le 14 décembre 2006 par le tribunal de commerce de Draguignan ;

Vu les conclusions déposées le 22 novembre 2012 par [X] [E], appelant ;

Vu les conclusions déposées le 23 novembre 2012 par maître [B], liquidateur à la liquidation judiciaire de la société BERTOBROS, intimé ;

Vu les conclusions déposées le 22 novembre 2012 par [W] [E] et [K] [Y], intimés ;

Attendu que par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux conclusions visées ci-dessus pour l'exposé des prétentions et moyens des parties;

Attendu que, associés à égalité de la SARL BERTOBROS HOLDING (la holding) qui détenait 396 des 400 parts de la SARL BERTOBROS (la société BERTOBROS) , [X] [E], [W] [E] et [K] [Y] possédaient également, le premier deux parts, les deux autres une part de la société BERTOBROS qui exerçait une activité d'agent commercial distribuant différentes marques de prêt-à-porter; que [X] [E], qui avait été désigné comme gérant de la société BERTOBROS le 7 septembre 2006, a cédé ses parts dans cette dernière et dans la holding par moitié le 4 janvier 2007 à chacun de ses coassociés ; que ces derniers, dans un courrier du 8 janvier 2007, ont déclaré renoncer à exploiter quatre marques de prêt-à-porter au bénéfice du cédant mais ont annoncé par écrit le même jour qu'ils faisaient procéder à l'évaluation de ces marques par un expert et demandé au cédant de ne pas se les approprier;

Attendu que, soutenant que ses anciens associés exploitaient des marques lui revenant, le dénigraient auprès des titulaires de ces marques, et lui avait remis des chèques sans provision en paiement des parts, [X] [E] les a assignés devant le tribunal de commerce de Brignoles afin, d'une part de leur voir interdire toute démarche auprès des titulaires des marques en cause, d'autre part de les voir condamnés au paiement de la valeur des parts cédées ainsi que d'une somme de 100'000 € à titre de dommages-intérêts; que ce tribunal a désigné un expert le 3 avril 2007, le rapport ayant été déposé le 11 février 2009 ; que la procédure a été poursuivie devant le tribunal de commerce de Draguignan après la suppression de celui de Brignoles le 1er janvier 2009 ; que [X] [E] a maintenu ses demandes et appelé en cause les sociétés AWAC et SYNAPSES, créancières de la société BERTOBROS dont les créances avaient été qualifiées de suspectes par l'expert; que [W] [E] a réclamé la restitution de la somme versée de 44'827,50 €; que la société BERTOBROS ayant été déclarée en redressement judiciaire le 5 mai 2009 puis en liquidation judiciaire le 10 novembre 2009 maître [B] , liquidateur désigné, a réclamé la [X] [E] une somme de 111'879 € correspondant selon lui à des dépenses indues engagées fautivement pour le compte de cette société ;

Attendu que par le jugement attaqué le tribunal de commerce de Draguignan a joint les procédures, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de la même localité pour connaître du litige relatif à la cession des parts de la société BERTOBROS, a débouté [X] [E] de ses demandes, et l'a condamné à payer une somme de 69'794,60 € à maître [B] ainsi que différentes indemnités au titre des frais irrépétibles, en retenant que la cession des parts d'une SARL est un acte civil par nature, que la renonciation par la société BERTOBROS à l'exploitation des marques ANGEL DEVIL, GANG, WAS et LITTLE BIG était intervenue sur de faux renseignements fournis par [X] [E] à l'époque gérant, et que celui-ci avait engagé au détriment de cette société des dépenses injustifiées constitutives d'une faute de gestion légitimant sa condamnation à payer au liquidateur la somme de 69'794,60 €uros ; que [X] [E] a interjeté appel de cette décision et intimé maître [B], ainsi que ses anciens associés [K] [Y] et [W] [E];

Attendu que [X] [E] reconnaît devoir une somme de 14'706,12 €uros au titre de ses dépenses personnelles réglées par la société BERTOBROS; qu'il demande à la cour d'écarter des débats un constat d'huissier transcrivant l'enregistrement d'une conversation privée au moyen d'un téléphone mis à sa disposition par cette société, de déclarer le tribunal de commerce compétent pour connaître du litige relatif à la cession des parts sociales, et d'annuler ou retirer des débats le rapport d'expertise ; que pour le surplus il conclut à l'infirmation du jugement attaqué et sollicite:

' l'admission au passif de la société BERTOBROS d'une créance de 100'000 € à titre de dommages-intérêts et la compensation avec sa dette à l'égard de cette société.

' la condamnation solidaire de [W] [E] et [K] [Y] au paiement de la somme de 47'619 € correspondant au prix des parts cédées au second nommé avec les intérêts au taux légal capitalisés à compter du 4 janvier 2007 ainsi que d'une somme de 20'000 € à titre de dommages-intérêts en raison de l'inexécution fautive des conventions de cession.

' la condamnation solidaire de ses anciens associés et de maître [B] es qualités au paiement d'une somme de 5'000 € au titre des frais irrépétibles ;

Attendu que [W] [E] et [K] [Y] concluent à l'irrecevabilité de l'appel, à la confirmation du jugement attaqué quant à la compétence du tribunal de commerce pour connaître de la demande relative à la cession des parts sociales, au rejet des demandes de [X] [E], à la réformation du jugement pour le surplus, et à la condamnation de [X] [E] à payer:

' à maître [B] une somme de 111'368,79 €uros au titre des fautes de gestion.

' à chacun d'eux une somme de 15'000 € à titre de dommages-intérêts ainsi qu' une somme de 8'000 € au titre des frais irrépétibles ;

' à [W] [E], dans l'hypothèse où la cour retiendrait sa compétence pour connaître de la cession des parts sociales, la somme de 47'827,50 € versée à [X] [E] au titre de cette cession;

Attendu qu'en sa qualité de liquidateur de la société BERTOROS maître [B] conclut à la réformation du jugement quant au quantum de sa créance, à la condamnation de [X] [E] au paiement d'une somme de 85'280,91 € ainsi que d'une somme de 3000 € au titre des frais irrépétibles, et à la confirmation du jugement pour le surplus ;

SUR CE,

Sur la recevabilité de l'appel.

Attendu que les premiers juges ont retenu leur incompétence pour connaître de la cession des parts sociales, rejeté les demandes relatives aux marques, et statué sur la demande reconventionnelle ; que [W] [E] et [K] [Y] estiment que le jugement ne pouvait dès lors être attaqué que par la voie du contredit du chef de la cession des parts sociales ; que cette exception sera rejetée dès lors que le jugement a tranché une partie du fond et que par suite, par application des dispositions des articles 80 et 544 du code de procédure civile, il ne pouvait être attaqué que par la voie de l'appel dans l'ensemble de ses dispositions ;

Sur les demandes en dommages-intérêts pour fautes de gestion dirigées contre [X] [E].

Attendu que [W] [E] et [K] [Y] ne soutiennent pas avoir droit personnellement au paiement des sommes selon eux réglées à tort par [X] [E] au moyen des fonds de la société BERTOBROS; que, seul le liquidateur étant habilité à défendre l'intérêt collectif des créanciers, ils sont en conséquence irrecevables à réclamer de ce chef la condamnation de [X] [E] à payer des dommages-intérêts à cette société; que seule la demande de maître [B], inférieure dans son quantum à celle présentée par [W] [E] et [K] [Y], peut par suite être prise en considération;

Attendu qu'au nombre des factures réglées par la société BERTOBROS dont l'expert judiciaire a considéré qu'elles devaient être mises à la charge de [X] [E] comme relevant, soit d'un abus, soit d'une faute de gestion, figurent celles de [V] [T] et de la société AWAC 4x4 (AWAC) ; que [W] [E] et [K] [Y] ont fait consigner dans un procès-verbal d'huissier du 12 janvier 2007 des messages téléphoniques émanant de ces créanciers dont ils estiment qu'ils démontrent le caractère infondé de leur créance et l'abus commis par [X] [E]; que ce dernier soutient que cette preuve a été obtenue par fraude par consultation de sa messagerie privée sur une ligne téléphonique qui lui avait été cédée et qu'il convient par suite de l'écarter des débats par application des dispositions des articles 9 du Code civil et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Attendu que [X] [E] s'est vu délivrer le 4 janvier 2007 par ses anciens associés et nouveaux gérant de la société BERTOBROS, à l'occasion de la restitution de la carte bancaire, des chéquiers et du pass autoroute de cette société qu'ils détenait encore, un reçu l'autorisant à conserver son ancienne ligne téléphonique à condition de défrayer la société; que ce défraiement ne lui avait cependant pas été réclamé de manière prouvée à la date du 12 janvier 2007, et les circonstances dans lesquelles le téléphone portable fonctionnant sur la ligne cédée est parvenu en la possession des nouveaux gérants dans l'intervalle de huit jours séparant le reçu du constat ne sont pas connues, les nouveaux gérants se voyant reprocher l'utilisation frauduleuse d'un double de la carte de ce téléphone; que, la caducité de la cession de la ligne et du téléphone à la date du procès-verbal n'étant pas démontrée, ces éléments suffisent à établir l'interception d'une conversation privée et le caractère déloyal de l'enregistrement contesté qui sera écarté des débats par application des textes invoqués par [X] [E];

Attendu que [X] [E] soutient que les conclusions de l'expert judiciaire ont été influencées par cet enregistrement qui a été porté à sa connaissance et que par suite il faut annuler l'ensemble du rapport d'expertise ; qu'à juste titre, la nullité de l'expertise étant soumise au régime des nullités de procédure, le liquidateur conclut à l'irrecevabilité de l'exception sur le fondement de l'article 74 du code de procédure civile dès lors qu'elle n'a pas été invoquée avant toute défense au fond ; que, l'exception serait-elle recevable, la nullité ne mériterait pas pour autant d'être prononcée dès lors que l'expert, pour conclure au caractère indu des créances des interlocuteurs de [X] [E] auteurs des messages enregistrés, ne s'est nullement fondé sur ces enregistrements mais, s'agissant de la créance de [V] [T], sur les seuls justificatifs comptables et, s'agissant de celle la société AWAC, sur l'insuffisance et l'incohérence des justificatifs ; que sera rejetée pour le même motif la demande subsidiaire de [X] [E] tendant à voir écarter le rapport pour violation des principes d'égalité et de loyauté dans l'administration de la preuve ; qu'en l'absence de grief, et alors que les cessionnaires des parts sociales et le liquidateur ont eux-mêmes qualifié les faits retenus par l'expert, la circonstance que ce dernier ait considéré que certains d'entre eux révélaient une faute de gestion ne peut davantage suffire à fonder une nullité ou une invalidation même partielle du rapport ;

Attendu que le liquidateur reproche notamment à [X] [E] d'avoir réglé une facture de la société AWAC de 15'548 € le 22 décembre 2006 ; que l'intéressé soutient qu'à cet égard l'action est en toute hypothèse prescrite dès lors que la convention fondant le paiement a été conclue le 14 novembre 2005 et que l'action du liquidateur n'a été introduite que le 1° décembre 2009, plus de trois ans plus tard; que cependant le liquidateur ne poursuit pas l'annulation de cette convention mais uniquement l'indemnisation des conséquences de paiements fautifs constitutifs du fait dommageable intervenus moins de trois ans avant la notification de la demande, de sorte que la fin de non-recevoir sera rejetée ;

Attendu que l'expert a établi une liste de cinq dépenses d'un montant total de 69'794,60 €uros selon lui contraires à l'intérêt de la société BERTOBROS ; que cette contrariété est indiscutable s'agissant de l'acquisition, par [X] [E], d'une montre personnelle, de boucles d'oreilles et de véhicules pour sa fille et sa femme pour un montant total de19706,12 €; que s'y ajoutent une facture d'une société SYNAPSES de 16'600,48 €uros et deux factures de la société AWAC de 17'940 et 15'548 €uros ; que, s'agissant de la société SYNAPSES, l'expert a considéré la facture comme suspecte en l'absence d'ordres de mission et de détail des prestations en cause ; que, concernant celles de la société AWAC, il a qualifié leur paiement de fautif en raison de la tardiveté de leur émission, d'incohérences chronologiques, d'absence de détails, et de la nature des prestations résidant dans une médiation entre associés sans bénéfice pour la société ;

Attendu que des conclusions des sociétés SYNAPSES et AWAC déposées en première instance et d'un courrier de la première nommée du 30 septembre 2008 il ressort que les factures litigieuses ont toute trait pour l'essentiel à une médiation entre associés réclamée en raison de leur mésentente ; qu'il faut retenir à cet égard qu'il n'est pas établi que cette mésentente menaçait la pérennité de la société, les associés, selon les explications et justificatifs produits, n'ayant eu en vue que leur propre intérêt sans jamais envisager la dissolution de la société dont le fonctionnement n'était pas compromis; qu'il s'ensuit, peu important que les conventions servant de support aux factures aient été conclues et signées par [K] [Y], que le paiement de ces prestations a été mis à tort à la charge de la société et qu'à juste raison de liquidateur l'impute à faute à [X] [E] ; que, les justificatifs examinés par l'expert ne permettant pas de retenir la réalité des prestations de formation qui s'y trouvent incluses, censément fournies à [X] [E] à l'époque dirigeant de la société BERTOBROS , et les simples explications présentées en première instance par ces créancières étant insuffisantes, le paiement des deux factures litigieuses dénote un abus de sorte qu'elles seront mises à la charge de [X] [E];

Attendu que l'expert a également dressé une liste de paiements effectués sans justificatifs par [X] [E] pour un montant total de 41'574,19 €uros ; que s'y trouvent incluses deux factures d'une société MCI de 14'439,31 et 1047 €, seules prises en compte par le liquidateur, relatives à l'acquisition de matériel informatique dont il a été relevé dans une proposition de rectification de l'administration fiscale du 10 juillet 2009 qu'il avait été payé par la société et accaparé par [X] [E] qui l'avait reconnu ; que, aucune preuve de la restitution n'étant rapportée, le paiement de ces factures caractérise un détournement ; que la demande du liquidateur sera en conséquence satisfaite dans son intégralité;

Sur l'annulation de la cession de parts sociales.

Sur la compétence

Attendu que l'action qui tend à faire établir la validité ou la nullité de la cession des parts d'une société commerciale tend par là même à la consécration ou à la perte de la qualité d'associés des parties à la cession ; qu'elle relève dès lors des dispositions de l'article L. 721 ' 2 du code de commerce qui attribue compétence au tribunal de commerce pour connaître de toutes les contestations relatives aux sociétés commerciales ; que le jugement attaqué sera par suite infirmé en ce qu'il a désigné comme compétent le tribunal de grande instance pour connaître de l'action en annulation ;

Sur le fond

Attendu que [W] [E] et [K] [Y] soutiennent que leur consentement à la cession des parts sociales a été surpris par la dissimulation dolosive des règlements indus et fautifs effectués par [X] [E], la prescription biennale de l'action en annulation pour vice caché invoquée par ce dernier n'étant dès lors pas applicable ; qu'il résulte à cet égard des documents comptables produits qu'après une année 2005 satisfaisante qui s'était soldée par un résultat de 106'396 € pour un chiffre d'affaires de 2'669'667 €, l'année 2006 a vu le chiffre d'affaires régresser à 1'596'745 €, un résultat positif de 89'033 €, alors que la perte d'exploitation était de 400'345 €, étant la conséquence d'un produit exceptionnel sur opérations en capital de 650'000 €; que si en réalité, en raison des abus et fautes commis par [X] [E], et à retenir le montant total avancé par l'expert, le résultat était en réalité faiblement négatif, il ne peut être tenu pour acquis que les cessionnaires auraient renoncé à leur projet en considération des paiements indus alors, d'une part qu'ils n'établissent pas que la situation bilantielle de la société leur était inconnue, d'autre part qu'en dépit de la perte d'exploitation enregistrée, l'actif comprenait encore des valeurs mobilières de placement d'un montant total de 302'520 € ' pépite d'un attrait suffisant pour considérer que la connaissance des abus dénoncés n'aurait pas empêché la cession ' prélevé ou distribué en 2007 à l'exception d'un reliquat de 37'550 € sans preuve de son affectation au cycle d'exploitation ; que, s'agissant des marques dont le droit d'exploitation a été transféré à [X] [E] concomitamment à la cession des parts, rien ne permet de retenir, ni une manoeuvre de ce dernier consistant en la dissimulation de l'intérêt et de la valeur des droits cédés pour la société qui ne saurait résulter du seul revirement des cessionnaires par suite d'une erreur d'appréciation prétendue, ni l'incidence de ce transfert sur l'acceptation de la cession des parts ; que, seule la valeur des parts ayant été en toute hypothèse susceptible d'avoir été affectée, et la preuve du caractère déterminant de la réticence dolosive invoquée n'étant pas rapportée, la demande d'annulation sera rejetée ;

Attendu, par suite, que [X] [E] peut prétendre au règlement du prix des parts cédées, étant relevé que son frère [W] le lui a payé, seul [K] [Y] étant encore débiteur ; que, la demande d'annulation des actes de cession ayant été rejetée, [W] [E] ne peut prétendre à la restitution de la somme versée; que [K] [Y] sera condamné au paiement de la somme réclamée; que, les parts de sociétés étant destinées à porter des fruits sous forme de dividendes, les intérêts de retard au taux légal sont dûs à compter de l'acte de cession par application des dispositions de l'article 1656 du Code civil ; que la capitalisation des intérêts, réclamée par [X] [E], sera accordée à compter de la première demande qui en a été faite le 8 août 2012 par application des dispositions de l'article 1154 du même code; qu'il n'y a pas lieu de condamner solidairement [W] [E] au paiement du solde du prix dû par [K] [Y] dès lors que chacun des deux cessionnaires, en acquérant par des actes distincts un sixième des parts de la société holding et une part infime de celles de la SARL, n'a pas acquis conjointement avec son co-cessionnaire un bloc de contrôle impliquant la solidarité commerciale ;

Sur les demandes de dommages-intérêts.

Attendu que compte tenu des abus et fautes mis en évidence ci-dessus, et alors que la réticence des cessionnaires à s'exécuter n'était pas dépourvue de légitimité, la demande de [X] [E] en octroi d'une somme de 20'000 € à titre de dommages-intérêts pour inexécution fautive des actes de cession sera rejetée ; qu'aucun préjudice économique qu'auraient subi les cessionnaires en conséquence des dissimulations dont s'est rendu coupable [X] [E] n'est caractérisé, aucune preuve n'étant rapportée de ce que la déconfiture de la société BERTOBROS en a découlé et les intéressés s'étant empressés après la cession d'accaparer les valeurs mobilières détenues par cette société;

Attendu que même si le caractère déterminant des dissimulations dont s'est rendu coupable [X] [E] n'est pas démontré et si la demande d'annulation des cessions de parts a été rejetée, la déloyauté du cédant n'en est pas moins patente et a causé aux cessionnaires, à tout le moins, un préjudice moral méritant d'être indemnisé ; qu'il peut, au vu des justificatifs produits, être considéré qu'un état dépressif dont est atteint [W] [E] est pour partie la conséquence des agissements de son frère ; que lui sera accordée une indemnité de 10'000 € ; que [K] [Y], qui a pris ses distances avec la société BERTOBROS depuis fort longtemps selon les explications fournies, se verra accorder une somme de 5'000 € ;

Sur la créance de dommages-intérêts déclarée par [X] [E] au passif de la société BERTOBROS.

Attendu que [X] [E] reconnaît que la société BERTOBROS ne disposait d'aucun droit formalisé par écrit sur les quatre marques dont ses anciens associés, cessionnaires de ses parts, lui ont accordé le droit d'exploitation à l'occasion de la cession; qu'il n'en demeure pas moins que les courriers émanant des titulaires de ces marques démontrent qu'elle était cocontractante de ces dernières et bénéficiaire d'un droit de distribution de fait susceptible de revêtir une valeur patrimoniale et d'affecter ses comptes en cas de privation ; qu'il en est ainsi, notamment, de la marque LITTLE BIG pour laquelle elle fournit le détail des ventes réalisées ; qu'à juste titre dès lors le liquidateur soutient que les associés ne pouvaient sans commettre un abus se répartir les droits d'exploitation sans contrepartie financière pour la société ; que [X] [E] ne peut par conséquent prétendre à l'indemnisation, par la société, du préjudice qu'il prétend avoir subi du fait de la non exploitation de ces marques qu'au demeurant il ne démontre pas sur le plan comptable ; qu'il ne peut pas davantage soutenir qu'il a été dénigré aux yeux des titulaires des marques en cause, l'information fournie à ces derniers par la société BERTOBROS quant à la poursuite des relations l'ayant été en des termes courtois et mesurés sans allusion dévalorisante au litige en cours, et cette société s'étant au demeurant vu notifier par la suite le retrait du droit de distribution de la marque LITTLE BIG; que la demande de [X] [E] en admission au passif de la société BERTOBROS d'une créance de 100'000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice économique et dénigrement sera dans ces conditions rejetée ;

***

**

Attendu qu'encore qu'elles n'aient pas été satisfaites, les demandes de [W] [E] et de [K] [Y] en annulation des cessions de parts sociales n'étaient pas dépourvues de légitimité en considération des abus commis par [X] [E]; que ce dernier sera dès lors condamné aux entiers dépens et à payer des indemnités au titre des frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare les appels réguliers et recevables pour l'ensemble des chefs de la décision attaquée.

Réforme le jugement attaqué et, statuant à nouveau,

Dit que le tribunal de commerce était compétent pour connaître de la demande en annulation de la cession des parts sociales de [X] [E] à [W] [E] et à [K] [Y].

Rejette cette demande au fond.

Condamne [K] [Y] à payer à [X] [E] la somme de 47'619 € avec les intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2007 capitalisés à la date du 8 août 2012 et à chaque date anniversaire ultérieure.

Déboute [W] [E] de sa demande de restitution du prix des parts sociales de la société BERTOBROS que lui a cédées [X] [E].

Écarte des débats le procès-verbal comportant la transcription de l'enregistrement de messages téléphoniques à destination de [X] [E].

Rejette les fins de non recevoir soulevées par [X] [E].

Le condamne à payer à maître [B] en sa qualité de liquidateur de la société BERTOBROS une somme de 85'280,91 € .

Le déboute de ses demandes de dommages-intérêts et d'admission d'une créance au passif de la société BERTOBROS.

Le condamne à payer à titre d'indemnités pour préjudice moral une somme de 10'000 € à [W] [E] et une somme de 5'000 € à [K] [Y].

Déboute [W] [E] et [K] [Y] du surplus de leurs demandes..

Condamne [X] [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le condamne à payer une somme de 3000 € au titre des frais irrépétibles tant à maître [B] qu'à [W] [E] et à [K] [Y].

Accorde aux représentants de maître [B], de [W] [E] et de [K] [Y] le bénéfice de distraction de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre a
Numéro d'arrêt : 11/01246
Date de la décision : 27/06/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8A, arrêt n°11/01246 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-06-27;11.01246 ?
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