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02/07/2015 | FRANCE | N°13/21144

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre b, 02 juillet 2015, 13/21144


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B



ARRÊT MIXTE

(Expertise)

DU 02 JUILLET 2015

jlg

N° 2015/101













Rôle N° 13/21144







[J] [A] [H] [T]





C/



[R] [G]

LE CONSERVATOIRE DE L'ESPACE LITTORAL DES RIVAGES LACUSTRES

OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT CANNES ET RIVE DROITE DU VAR

SCI MIMOSAS

SCI LOUIS

Syndicat des copropriétaires LA FARIGOULE













Gro

sse délivrée

le :

à :



Me Laurent GIMALAC



la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON



Me Pierre LIBERAS



Me Philippe-Laurent SIDER



Me Elie MUSACCHIA



Me Stéphane MONET





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre B

ARRÊT MIXTE

(Expertise)

DU 02 JUILLET 2015

jlg

N° 2015/101

Rôle N° 13/21144

[J] [A] [H] [T]

C/

[R] [G]

LE CONSERVATOIRE DE L'ESPACE LITTORAL DES RIVAGES LACUSTRES

OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT CANNES ET RIVE DROITE DU VAR

SCI MIMOSAS

SCI LOUIS

Syndicat des copropriétaires LA FARIGOULE

Grosse délivrée

le :

à :

Me Laurent GIMALAC

la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON

Me Pierre LIBERAS

Me Philippe-Laurent SIDER

Me Elie MUSACCHIA

Me Stéphane MONET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Septembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 09/00337.

APPELANTE

Mademoiselle [J] [A] [H] [T]

née le [Date naissance 2] 1930 à [Localité 3], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Laurent GIMALAC, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Monsieur [R] [G]

né le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Amance PERROT, avocat au barreau de GRASSE

LE CONSERVATOIRE DE L'ESPACE LITTORAL DES RIVAGES LACUSTRES pris en la personne de son représentant légal en exercice, [Adresse 6]

représenté par Me Pierre LIBERAS, avocat au barreau de MARSEILLE, assisté de Me Evelyne VENUTTI, avocat au barreau de BOURG-EN-BRESSE

OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT CANNES ET RIVE DROITE DU VAR, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Rose-Marie ROSTAGNO BERTHIER, avocat au barreau de GRASSE

SCI MIMOSAS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 8]

représentée par Me Elie MUSACCHIA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Nathalie COMTET, avocat au barreau de TOULON

SCI LOUIS poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, y domicilié., [Adresse 5]

représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Winni-Brigitte SCHREIBER-BALDET, avocat au barreau de GRASSE

Syndicat des copropriétaires LA FARIGOULE, sis [Adresse 7]

représenté par Me Stéphane MONET, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 26 Mai 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Luc GUERY, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Odile MALLET, Président

Monsieur Jean-Luc GUERY, Conseiller

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Juillet 2015

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Juillet 2015,

Signé par Mme Odile MALLET, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, prétentions et moyens des parties :

[P] [F] épouse [C] était propriétaire à [Localité 1], lieudit de [Localité 2], d'un fonds constitué des parcelles cadastrées section [Cadastre 8] pour 04a 05ca, [Cadastre 1] pour 08a 00ca, [Cadastre 3] pour 17a 95ca et [Cadastre 12] pour 26a 80ca.

Le 10 mai 1965, elle a conclu avec M. [R] [G], un compromis de vente portant sur une parcelle de terre de 1800 m² environ.

Par jugement du 30 avril 1976, le tribunal de grande instance de Grasse, après avoir notamment relevé que cet acte ne comportait aucune condition suspensive et que la vente était parfaite entre les parties, a notamment :

-dit que faute pour [P] [C] de régulariser l'acte authentique dans un certain délai, le jugement tiendrait lieu d'acte de vente,

-constaté qu'il résulte d'un document d'arpentage dressé le 19 avril 1971 par M. [X], géomètre-expert, que par suite de la vente, la propriété restant appartenir à [P] [C] est cadastrée section [Cadastre 9] pour 9a 20ca, alors que la partie vendue à M. [G] est cadastrée section [Cadastre 10] pour 17a 60ca.

[P] [C] est décédée le [Date décès 1] 1996 en laissant pour lui succéder ses deux enfants issus de son premier mariage, M. [U] [T] et Mme [J] [T].

Par acte du 23 mai 1997, M. [U] [T] a cédé à Mme [J] [T] ses droits indivis sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 8], [Cadastre 1], [Cadastre 3] et [Cadastre 9].

M. [G] a vendu la parcelle [Cadastre 6] à la SCI Louis selon acte notarié du 16 mai 2007.

Invoquant l'enclave de sa parcelle [Cadastre 6], la SCI Louis a, par acte du 14 juin 2007, assigné Mme [T] afin qu'un passage lui soit accordé sur la parcelle [Cadastre 9]. Cette dernière s'est opposée à cette demande et a revendiqué le propriété d'une bande de terrain.

Par ordonnance du 5 juin 2008, le juge de la mise en état a, d'une part, rejeté la demande d'expertise formée par la SCI Louis, faute pour elle d'avoir mis en cause tous les propriétaires des fonds sur lesquels un passage pouvait être envisagé, d'autre part, ordonné une expertise afin de permettre au tribunal de statuer sur la demande de Mme [T] et désigné M. [N] [V] pour y procéder.

La SCI Louis a appelé en cause l'office public de l'habitat Cannes et rive droite du Var, le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (le Conservatoire du littoral), la société la Farigoule et M. [G].

Par ordonnance du 18 décembre 2008, le juge de la mise en état a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Nice en application de l'article 47 du code de procédure civile.

La SCI Louis a également appelé en cause la SCI Mimosas.

M. [V] a établi son rapport le 27 février 2009.

Par ordonnance du 6 mai 2010, le juge de la mise en état a ordonné une expertise afin de permettre au tribunal de statuer sur la demande de la SCI Louis et commis pour y procéder M. [V] qui a établi un second rapport le 8 mars 2012.

Par jugement du 12 septembre 2013, le tribunal de grande instance de Nice a :

-constaté l'état d'enclave de la parcelle [Cadastre 6],

-ordonné son désenclavement sur le fondement de l'article 684 du code civil par la constitution d'une servitude de passage sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 9] et [Cadastre 3] selon le tracé teinté en jaune sur le plan en annexe 3 du rapport de M. [V],

-dit n'y avoir lieu à indemnité de servitude de passage,

-ordonné la publication du jugement,

-débouté Mme [T] de sa demande de prescription acquisitive de la bande de terrain comprise entre les lignes A-B et C-D tracées sur le plan en annexe 5-3 du rapport de M. [V] et de sa demande de désignation d'un expert,

-rejeté toutes autres demandes,

-débouté la SCI Louis et Mme [T] de leur demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la SCI Louis à payer à la société la Farigoule, à la SCI Mimosas, au Conservatoire du littoral, chacun une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la SCI Louis aux dépens, y compris les frais d'expertise.

Mme [T] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 29 octobre 2013.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 22 octobre 2014 et auxquelles il convient de se référer, elle demande à la cour :

-de constater que le passage de la servitude préconisé par l'expert emprunte une zone EBC comme l'indique son rapport, et que la coupe d'arbres est interdite,

-de dire et juger que l'article 684 du code civil est donc inapplicable,

-de constater que la division est trentenaire et que la servitude de passage n'a pas été demandée dans ce délai,

-de dire et juger que l'article 684 du code civil n'est donc pas applicable,

-de constater que la division ne concernait que Mme [F] et M. [G] et que la servitude jamais demandée jusqu'à la présente procédure n'a qu'un effet relatif et qu'elle est donc inopposable aux cessionnaires des deux présumés fonds servant et dominant,

-de dire et juger que l'article 684 du code civil est donc inapplicable,

-de dire et juger que la vente et la division des terrains a été forcée par jugement et que les conditions légales de l'article 684 du code civil ne sont donc pas remplies,

-de constater que l'expert judiciaire n'a pas recherché s'il existait une division antérieure avant la dernière division parcellaire,

-de dire et juger que l'article 684 ne s'applique donc pas, faute d'avoir défini la parcelle d'origine objet de la division,

-de constater l'absence d'évaluation de l'indemnité qui lui est due pour la servitude de passage,

-avant dire droit, de désigner un expert,

-de réformer le jugement entrepris,

-de constater que les règles d'urbanisme (zone boisée classée) excluent radicalement la solution retenue par l'expert judiciaire,

-de constater que la SCI Louis a acquis sa parcelle auprès de M. [G] qui ne lui a pas consenti de droit de passage, qu'elle s'est donc volontairement enclavée « de concert » avec son vendeur et que son action à son encontre est une man'uvre pour déplacer la charge de ce droit de passage sur son fonds sans que cela soit justifié par la configuration des lieux,

-de constater que la SCI Louis dispose d'au moins deux autres accès plus aisés pour accéder à sa propriété,

-de rejeter l'ensemble des demandes de la SCI Louis,

-subsidiairement, de condamner la SCI Louis au paiement de la somme de 50 000 euros en compensation de la création de la servitude de passage,

-à titre reconventionnel, de constater la production des preuves d'une possession continue et paisible sur trente ans et de définir la limite exacte de sa propriété en prenant comme repères les clôtures actuelles situées à la frontière de sa propriété et de celle de la SCI Louis,

-de condamner la SCI Louis à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 9 mai 2015, le Conservatoire du littoral, demande à la cour de confirmer le jugement déféré, de constater qu'aucune demande n'est formée à son encontre, d'ordonner sa mise hors de cause et de condamner Mme [T] ou « qui mieux devra », à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 14 mars 2014 et auxquelles il convient de se référer, l'office public de l'habitat Cannes et rive droite du Var demande à la cour de constater que rien n'est réclamé contre lui, de le mettre hors de cause, de condamner tout contestant aux entiers dépens et de lui allouer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 17 mars 2015 et auxquelles il convient de se référer, le syndicat des copropriétaires la Farigoule, venant aux droits de la société la Farigoule, demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation de Mme [T] ou de tout succombant à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 20 mars 2014 et auxquelles il convient de se référer, la SCI Mimosa demande également la confirmation du jugement et la condamnation de Mme [T] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 23 septembre 2014 et auxquelles il convient de se référer, M. [G] demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de condamner Mme [T] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 17 septembre 2014 et auxquelles il convient de se référer, la SCI Louis demande à la cour :

-de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

-de dire et juger que la seule solution de désenclavement de la parcelle [Cadastre 6] consiste à retenir le passage par l'unité foncière d'origine, soit sur les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 9] appartenant à Mme [T],

-d'ordonner l'établissement d'un passage d'au moins 3,5 m de largeur le long de la limite nord, tel que préconisé par M. [V] sur son annexe 3,

-de dire et juger que ce passage s'impose eu égard aux dispositions de l'article 684 du code civil et met obstacle à toute demande d'indemnisation émanant du propriétaire du fonds servant,

-de débouter Mme [T] de sa demande tendant à la désignation d'un expert en vue de se prononcer sur une possession continue et paisible, au regard de la garantie due par le vendeur ne permettant pas la prescription acquisitive à l'encontre de l'acquéreur,

-de condamner Mme [T] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-de débouter le Conservatoire du littoral ainsi que les autres intimés de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-de condamner en outre Mme [T] au paiement de l'intégralité des dépens, y compris les frais de l'expertise de M. [V].

Une ordonnance de clôture a été rendue le 12 mai 2015.

Motifs de la décision :

Il est plus cohérent de statuer d'abord sur la revendication de propriété de Mme [T].

Cette dernière soutient avoir acquis par prescription la bande de terrain comprise entre une clôture et la ligne divisoire, telle que cette ligne résulte du document d'arpentage du 19 avril 1971 et telle qu'elle a été fixée sur le plan de division du géomètre-expert [X], signé le 10 mai 1965 par [P] [C] et M. [G].

Contrairement à ce que soutient Mme [T], le jugement du 30 avril 1976 n'a pas contraint [P] [C] à vendre une partie de son terrain à M. [G], mais lui a simplement ordonné de réitérer par acte authentique la vente du 10 mai 1965 dont il a constaté le caractère parfait.

Mme [T] étant tenue, en sa qualité d'héritière de [P] [C], de l'obligation de garantir l'acquéreur du terrain et ses ayants cause contre toute éviction résultant de son fait personnel, telle la possession trentenaire, c'est à bon droit que le premier juge a retenu qu'elle n'avait pu acquérir par prescription la bande de terrain litigieuse et qu'il l'a déboutée de sa demande.

Selon l'article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opération de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

L'article 683 dispose : le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique. Néanmoins, il doit être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé.

L'article 684 dispose : si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes. Toutefois, dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés, l'article 682 serait applicable.

Le rapport d'expertise du 8 mars 2012 permet d'établir :

-que le parcelle [Cadastre 6] est entourée d'autres parcelles et qu'elle ne dispose d'aucune issue sur la voie publique,

-que cette parcelle confronte :

-à l'est la parcelle [Cadastre 9] qui confronte elle-même la parcelle [Cadastre 3], bordée à l'est par le [Adresse 7].

-au nord, le fonds de la SCI Mimosas, constitué de la parcelle [Cadastre 4] et de la parcelle [Cadastre 2], bordée à l'est par le [Adresse 7],

-au sud, le fonds cadastré section [Cadastre 7] et [Cadastre 11] dont M. [G] est propriétaire pour l'avoir acquis par acte notarié du 23 novembre 1965,

-que la SCI Mimosas est propriétaire de la parcelle [Cadastre 4] ainsi que de la parcelle [Cadastre 2] qui provient de la division de la parcelle [Cadastre 5] suivant un document d'arpentage du 27 novembre 2009, pour les avoir acquises le 22 décembre 2009 de la société la Farigoule,

-que la société la Farigoule avait acquis les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] le 23 décembre 1980 de la société Val des Mimosas à qui M. [G] avait vendu ce fonds le 13 juin 1968, après l'avoir acquis, pour partie de [Z] [O] selon acte du 3 décembre 1964, et pour partie de [L] [D] selon acte du 9 juillet 1965.

Il résulte de ce qui précède, en premier lieu que le fonds cadastré [Cadastre 6] appartenant à la SCI Louis est enclavé, en second lieu, que les dispositions de l'article 684 ne sont pas applicables en l'espèce.

La SCI Louis ne peut en effet se prévaloir des dispositions de ce texte à l'égard de Mme [T] car si la parcelle [Cadastre 6] était enclavée lors de la vente du 10 mai 1965, elle a cessé de l'être le 9 juillet 1965 lorsqu'elle a fait partie d'un seul et même tènement appartenant à M. [G] et ayant une issue suffisante sur le [Adresse 7], et ce n'est qu'en raison de la vente par ce dernier d'une partie de ce tènement à la société Val des Mimosas qu'elle est redevenue enclavée le 13 juin 1968.

La SCI Louis ne peut davantage opposer les dispositions de l'article 684 à la SCI Mimosas car lors de la vente du 13 juin 1968 de laquelle résulte directement l'enclave de sa parcelle [Cadastre 6], la vente de cette parcelle à M. [G] n'avait pas encore été publiée en sorte qu'elle n'était pas opposable aux tiers. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a retenu que l'article 684 du code civil était applicable.

Si l'article 684 du code civil n'est pas applicable, il résulte cependant de l'extrait du plan cadastral constituant l'annexe 1 du rapport d'expertise du 8 mars 2012, que le passage d'une largeur de 3,50 m pris sur les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 9], le long de leur limite nord conformément à l'assiette figurant en teinte jaune sur le plan constituant l'annexe 3 du rapport susvisé, est à l'évidence plus court et moins dommageable que tout autre passage qui pourrait être pris les autres fonds. La création d'une voie et la coupe d'arbres dans un espace boisé classé n'étant pas interdits par principe, il n'est pas établi que le tracé susvisé soit incompatible avec les contraintes d'urbanisme et environnementales applicables au fonds de Mme [T]. Ce tracé répondant le mieux aux exigences de l'article 683 du code civil, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a retenu, mais il sera infirmé en ce qu'il a dit que Mme [T] ne pouvait prétendre à une indemnité en compensation du dommage occasionné par le passage.

En l'absence d'éléments d'appréciation permettant de fixer cette l'indemnité, il convient de recourir aux lumières d'un technicien. Des constatations ou une consultation n'étant pas suffisantes pour éclairer la cour, une expertise sera ordonnée.

Mme [T], qui succombe dans sa revendication de propriété, supportera les frais de l'expertise du 27 février 2009.

En ce qui concerne les autres dépens, c'est par une juste appréciation que le premier juge a condamné la SCI Louis à les supporter et à payer à la société la Farigoule, à la SCI Mimosas et au Conservatoire du littoral la somme de 1 000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [T], dont les prétentions relatives à la fixation du passage ne sont pas accueillies, sera condamnée aux dépens exposés devant la cour par les autres propriétaires de fonds voisins.

Par ces motifs :

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a fait application de l'article 684 du code civil, dit n'y avoir lieu à indemnité de servitude de passage et condamné la SCI Louis aux frais de l'expertise du 27 février 2009 ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés ;

Dit que l'article 684 du code civil n'est pas applicable ;

Dit que la SCI Louis doit indemniser Mme [T] du dommage occasionné par le passage ;

Avant dire droit sur le montant de l'indemnité due à Mme [T], ordonne une expertise et commet pour y procéder M. [N] [V], [Adresse 1], avec mission de :

-entendre les parties en leurs explication,

-indiquer la surface de l'assiette de la servitude figurant en teinte jaune sur le plan constituant l'annexe 3 du rapport d'expertise du 8 mars 2012,

-fournir tous éléments permettant d'évaluer le prix du m² de terrain dans le secteur en cause et de fixer l'indemnité due par la SCI Louis à Mme [T] en compensation du dommage occasionné par le passage,

-s'expliquer techniquement dans le cadre de ces chefs de mission sur les dires et observations des parties après leur avoir communiqué ses pré-conclusions écrites,

Dit que Mme [T] devra consigner au greffe de la Cour (régie) dans un délai de 2 mois à compter de ce jour, une provision de 1 500 euros pour garantir la rémunération de l'expert ;

Dit que lors de la première réunion, ou au plus tard de la seconde réunion des parties, l'expert dressera un programme de ses investigations et évaluera d'une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et de ses débours ;

Dit qu'à l'issue de cette réunion, l'expert fera connaître au juge la somme globale qui lui paraît nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et des ses débours et sollicitera, le cas échéant, le versement d'une consignation complémentaire ;

Dit que l'expert devra déposer au greffe rapport de ses opérations dans le délai de 2 mois à compter de la consignation, sauf prorogation dûment autorisée, et qu'il en délivrera copie à chacune des parties en cause ;

Dit qu'au cas où les parties viendraient à se concilier, il devra constater que sa mission est devenue sans objet et en faire rapport ;

Dit qu'en cas d'empêchement, refus ou négligence, l'expert commis pourra être remplacé par ordonnance rendue sur simple requête de la partie la plus diligente ;

Désigne le conseiller de la mise en état de la 4ème chambre B pour contrôler les opérations d'expertise ;

Condamne Mme [T] aux frais de l'expertise du 27 février 2009 ;

Condamne Mme [T] aux dépens exposés devant la cour par le Conservatoire du littoral, l'office public de l'habitat Cannes et rive droite du Var, le syndicat des copropriétaires la Farigoule, la SCI Mimosa et M. [G] ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme [T] à payer la somme de 500 euros au Conservatoire du littoral, la somme de 500 euros au syndicat des copropriétaires la Farigoule, la somme de 500 euros à la SCI Mimosas ; rejette les demandes les demandes de l'office public de l'habitat Cannes et rive droite du Var et de M. [G] ;

Réserve tous les autres dépens d'appel ;

Met le Conservatoire du littoral, l'office public de l'habitat Cannes et rive droite du Var, le syndicat des copropriétaires la Farigoule, la SCI Mimosa et M. [G] hors de cause pour la suite de l'instance ;

Renvoie l'affaire devant le juge de la mise en état pour nouvel examen à l'expiration du délai imparti pour consigner la provision à valoir sur la rémunération de l'expert ;

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/21144
Date de la décision : 02/07/2015

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4B, arrêt n°13/21144 : Autre décision avant dire droit


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-07-02;13.21144 ?
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