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20/05/2022 | FRANCE | N°18/18574

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 20 mai 2022, 18/18574


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6



ARRÊT AU FOND

DU 20 MAI 2022



N° 2022/ 167













Rôle N° RG 18/18574 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMNY







[J] [L]





C/



SARL PIM





















Copie exécutoire délivrée

le : 20/05/2022

à :



Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON



Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau

de MARSEILLE













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 05 Novembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00119.





APPELANT



Monsieur [J] [L], demeurant [Adresse 4] - [Localité 1]



représen...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 20 MAI 2022

N° 2022/ 167

Rôle N° RG 18/18574 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMNY

[J] [L]

C/

SARL PIM

Copie exécutoire délivrée

le : 20/05/2022

à :

Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON

Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 05 Novembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00119.

APPELANT

Monsieur [J] [L], demeurant [Adresse 4] - [Localité 1]

représenté par Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

SARL PIM ( Plafonds Placo Isolation) , [Adresse 3] - [Localité 2]

représentée par Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Aziza OUSSMOU, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 1er Mars 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Thierry CABALE, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Philippe SILVAN, Président de chambre

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

M. Ange FIORITO, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2022,

Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par contrat de travail à durée indéterminée, Monsieur [J] [L] a été engagé à compter du 1er avril 2015 par la Sarl Pim ( Plafonds Placo Isolation) pour exercer des fonctions de chargé d'affaires, statut cadre, à temps complet.

Par lettre du 18 janvier 2017, le salarié a été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 27 janvier 2017 et qui a été suivi de son licenciement pour insuffisance professionnelle par lettre du 9 février 2017.

Le 23 février 2017, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Toulon qui par jugement du 5 novembre 2018 a :

- dit et jugé que le licenciement de Monsieur [L] reposait sur une cause réelle et sérieuse, l'insuffisance professionnelle étant caractérisée,

- constaté que la société Pim s'était dûment acquittée de l'indemnité de licenciement lors de l'établissement du solde de tout compte,

- constaté que le préavis avait bien été réglé au salarié aux dates normales d'échéance de paie,

- débouté Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- débouté la société Pim de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

- laissé à chacune des parties pour moitié les dépens par elles exposés.

Le 26 novembre 2018, dans le délai légal, le salarié a relevé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du 25 octobre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, le salarié demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

dit et jugé que le licenciement de Monsieur [L] repose sur une cause réelle et sérieuse, l'insuffisance professionnelle étant caractérisée,

constaté 'sur' la société Pim s'est dûment acquittée de l'indemnité de licenciement lors de l'établissement du solde de tout compte,

constaté que le préavis a bien été réglé au salarié aux dates normales d'échéance de paie,

débouté Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

laissé à chacune des parties pour moitié les dépens par elles exposés;

et la cour statuant à nouveau et y ajoutant :

- déclarer le licenciement de Monsieur [L] sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- condamner la société Pim à payer à Monsieur [L] la somme de 60000 euros de dommages

et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- condamner la société Pim à payer à Monsieur [L] la somme de 18869,25 euros brut à titre d'indemnité de préavis en deniers ou quittances, outre la somme de 1886,93 euros à titre de congés payés sur préavis,

- condamner la société Pim à payer à Monsieur [L] la somme de 2515.90 euros à titre du solde de l'indemnité spéciale de licenciement,

- condamner la société Pim à payer à Monsieur [L] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Pim à l'intégralité des dépens du procès, distraits au profit de Maître Stéphane Mamou Avocat aux offres de droit.

Le salarié fait valoir que :

- le motif de son licenciement ne concerne ni la discipline, ni les négligences, ni l'insuffisance professionnelle, mais concerne davantage une volonté de l'employeur de faire des économies sur le personnel grâce, mais pas seulement, au fils du président de la société, Monsieur [V] [B], à qui un certain nombre de ses tâches ont été confiées, de nombreux salariés, dont lui-même et un commercial, Monsieur [U] licencié pour motif économique, étant concomitamment sortis des effectifs sans jamais être remplacés;

- l'employeur lui reprochant en partie des fautes, la prescription des faits fautifs doit s'appliquer;

- la lettre de licenciement fixant les termes du litige, il faut s'en tenir aux seuls griefs qu'elle énonce :

. s'agissant du chantier [N], seul chantier expressément visé, son retard est imputable à la maîtrise d''uvre et au fait que le gros 'uvre n'était pas terminé; l'existence de pertes qui lui seraient imputables n'est pas démontrée, s'agissant notamment de pénalités de retard; son éviction de l'entreprise a permis à Monsieur [V] [B] de prendre le relais dans la direction et la gestion des travaux;

. la perte de marchés publics pour dépôt de dossiers hors délais et offres non terminées

n'est étayée par aucun élément;

. il n'est pas plus justifié d' une absence de prise de commandes; aucune insuffisance de résultats ne peut lui être opposée puisqu'il n'était soumis à aucun résultat ni à des objectifs minimums; il n'avait pas d'obligation de rentrer des chantiers; à ce sujet, les éléments de comparaison ne lui sont pas opposables, sont inexacts ou ne sont pas pertinents au regard notamment des fonctions des intéressés; la pièce 41 adverse n'est pas probante et sa confrontation avec la pièce 6 démontre qu'il s'agissait d'un chantier en attente, ce qui exclut qu'une négligence de sa part soit à l'origine de la non-signature du marché;

. des mécontentements de clients en lien avec des décisions de l'employeur, notamment en raison de plannings trop restrictifs, ne sauraient lui être imputés;

. il n'a pas commis de carence en envoyant deux fois une même facture puisqu'il ne s'agissait pas de demander un double paiement qui n'a pas eu lieu;

- l'article L 1235-3 du code du travail prévoit une indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un minimum de six mois pour une entreprise comptant au moins onze salariés;

- son préavis est de trois mois; l'indemnité compensatrice de préavis est calculée sur la base de la moyenne des trois derniers mois, soit un salaire de référence de 6289,75 euros bruts;

- l'indemnité de licenciement lui est due.

Par dernières conclusions du 3 septembre 2019, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, la Sarl Pim demande à la cour de:

- confirmer en tous points le jugement entrepris,

en conséquence de quoi,

- dire et juger que le licenciement de Monsieur [L] repose sur une cause réelle et sérieuse, l'insuffisance professionnelle étant caractérisée,

- constater que la société s'est dûment acquittée de l'indemnité de licenciement lors de l'établissement du solde de tout compte;

- constater que le préavis a bien été réglé au salarié aux dates normales d'échéance de paie;

dans ces conditions,

- débouter Monsieur [L] de sa demande en versement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouter Monsieur [L] de sa demande en versement de l'indemnité compensatrice de préavis (et des congés payés y afférents),

- débouter Monsieur [L] de sa demande en versement du solde d'indemnité spéciale de licenciement,

- débouter Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

condamner Monsieur [L] à verser à la société Pim la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [L] aux entiers dépens.

L'employeur fait valoir que:

- le salarié ne justifie pas de l'existence d'un motif ni économique ni disciplinaire puisqu'il s'agit d'insuffisances professionnelles l'ayant contraint à le relancer dans son travail à plusieurs reprises et ayant entraîné des pertes financières pour l'entreprise, soit :

. une insuffisance de résultats qui constitue une insuffisance professionnelle indépendamment d'une clause de quotas ou du versement d'une prime de résultat; il occupait bien un poste de commercial; les pièces qu'il fournit ne sont pas contradictoires; les prises de commandes du salarié ont été exactement et complètement évaluées sans tenir compte de simples devis non suivis d'effets et/ou repris ultérieurement par un autre salarié en raison de sa seule inertie; ces prises de commandes ont représenté un chiffre très inférieur à ceux des deux autres chargés d'affaires; il n'a conclu que deux affaires, soit les chantiers Covea et Le Vega, mises à son crédit;

. des négligences dans l'exécution de son travail : premièrement, le salarié a été défaillant dans le suivi du paiement des sous-traitants, ce qui a généré le double paiement d'une même facture sur ses indications figurant dans son mail du 6 février 2017 qui mentionne 'à régler', mail envoyé à sa direction qui ne lui avait rien demandé à ce sujet; deuxièmement, le règlement d'avances pour des montants indus a été la conséquence de ses négligences dans la vérification des factures et des garanties qui devaient l'être n'ont pas été prises au préjudice de la société; troisièmement, dans le dossier [N], des clients ont manifesté leur mécontentement sur son travail, notamment par un mail du 30 janvier 2017; il en a été de même s'agissant du chantier Covea; quatrièmement, le comportement du salarié l'a exposé à des pénalités de retard et a entraîné des retards dans le règlement de ses prestations; enfin, il n'a pas su gérer les coûts relatifs aux chantiers placés sous sa responsabilité;

- à titre subsidiaire, le salaire mensuel brut de référence n'est que de 5106,52 euros en proratisant le treizième mois; le montant alloué au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être réduit à de plus justes proportions; l'indemnité de licenciement lui a été intégralement réglée; le préavis, exécuté, lui a été également payé.

La clôture de l'instruction est intervenue le 4 février 2022.

MOTIFS:

Sur les demandes principales:

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.

La lettre de licenciement fixe les limites des débats.

Dans la lettre en date du 9 février 2017, qui fixe les termes du litige, les motifs du licenciement s'énoncent en ces termes:

' Nous faisons suite à notre convocation à l'entretien préalable du 27 janvier 2017 à laquelle vous vous êtes présenté seul et vous notifions par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle.

Lors de cet entretien, nous vous avons rappelé les nombreuses carences dans votre travail et notamment :

Chantier [N] : Absence de bilan de chantier, absence de vérification des métrés de l'opération réclamés maintes et maintes fois.

Très inquiets quant à l'évolution de la gestion des dossiers qui vous étaient confiés, nous vous avons adressé de nombreux courriels afin de vous rappeler vos obligations professionnelles.

En date du 8 novembre 2016, nous vous informons qu'un point sera réalisé quant à la situation et ce, dès mon retour d'un déplacement en Guadeloupe.

Lors de celui-ci, nous avons évoqué les différents sujets, nos légitimes attentes et notamment sur les prises de commandes ainsi que de votre implication dans les dossiers.

Il vous a alors été rappelé la raison pour laquelle vous aviez été engagé par notre société, à savoir, la mission d'un chargé d'affaire, véritable chef de projet, un poste que vous occupiez depuis 2009 à la vue de votre curriculum vitae.

Vous n'êtes pas sans savoir que cette fonction incombe de veiller à une bonne exécution et au suivi du projet, depuis la négociation du contrat, la facturation de la prestation avec un suivi comptable et ce, jusqu'à la réception de l'ouvrage.

Il vous a été rappelé que votre poste incombait également de démarcher de nouveaux prospects, ce qui n'a pas été le cas, d'autant que votre portefeuille clients était totalement nul.

Suite à toutes ces alertes, aucune amélioration significative n 'est intervenue.

Lors de notre entretien du 3 janvier dernier, nous vous avons alors avisé d'une éventuelle rupture conventionnelle de votre contrat de travail et nous sommes rencontrés une nouvelle fois en date du 16 janvier 2017 afin d'en discuter.

Face à notre refus d'accéder à votre demande d'indemnités supplémentaires plus que conséquente, vous nous avez informés ne pas vouloir bénéficier de cette procédure amiable de rupture du contrat de travail.

C'est ainsi que nous vous avons adressé un courrier de convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement, s'étant démulé le 27 janvier 2017 dans les locaux de notre entreprise.

Lors de cet entretien préalable, il vous a été rappelé votre insuffisance professionnelle préjudiciable à la bonne marche de l'entreprise el se traduisant par :

De lourdes pertes concernant l'opération [N] à [Localité 5] ;

La perte de marchés publics pour dépôt de dossier hors délai et offre non terminée ;

Absence de prise de commande ;

Le mécontentement de certains clients, notamment sur le chantier de l'[N].

Cet entretien préalable n'a pas permis de remettre en cause notre appréciation quant à la situation engendrée.

En résumé, la plupart des missions qui vous ont été confiées et qui pourtant relèvent de la compétence d'un Chargé d'affaires, sont effectués de façon non concluante.

Dans ces conditions, il nous apparaît de façon manifeste que vous ne disposez pas des compétences nécessaires pour tenir le poste pour lequel vous avez été engagé.

Par conséquent, nous vous notifions votre licenciement pour insuffisance professionnelle à présentation de cette lettre.

Nous vous informons que vous bénéficiez d'un préavis de licenciement de deux mois à compter de la date de présentation de cette lettre, que nous vous demandons d'effectuer..."

De tels motifs, précis, objectifs et matériellement vérifiables, respectent l'exigence de motivation de la lettre de licenciement.

En premier lieu, il ressort du contrat de travail du 1er avril 2015 et des éléments relatifs à son exécution, notamment des échanges de mails avec le gérant de la société Pim concernant les chantiers qui lui étaient confiés, que le salarié, dont le curriculum vitae mentionne qu'il venait d'exercer pour un autre employeur des fonctions de chargé d'affaires dont il détaillait le contenu et la polyvalence, et ce, durant cinq ans, a été engagé par la société Pim pour occuper de telles fonctions pour un salaire mensuel brut de base, correspondant à sa classification, supérieur à quatre mille six cents euros, soit près de cinq mille euros lors de la rupture de la relation de travail, outre un véhicule de fonction considéré en tant qu'avantage en nature, le salarié étant essentiellement chargé du suivi régulier des projets à chaque étape de ceux-ci afin de permettre leur bonne exécution dans le respect des budgets et délais prévus, ce qui consistait, notamment, à négocier les devis, réaliser la facturation et coordonner l'ensemble des opérations, contribuant au développement commercial de l'entreprise par de la gestion de clientèle.

En deuxième lieu, alors que l'insuffisance professionnelle se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification, l'existence d'un licenciement pour un motif étranger à une insuffisance professionnelle ne s'infère ni de la lettre de licenciement ni des éléments d'appréciation qui ne font pas ressortir que le poste du salarié a été supprimé ou confié à un autre salarié dans le cadre d'un licenciement économique déguisé, ou que l'insuffisance de résultats ou les négligences concernés procèdent d'une mauvaise volonté délibérée et revêtent un caractère fautif.

En troisième lieu, une insuffisance de résultat ne peut en l'espèce constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement du salarié dès lors qu'il ne résulte pas des éléments d'appréciation que celui-ci n'a pas atteint des objectifs quantifiables qui lui auraient été préalablement assignés; de même, il n'apparaît pas que l'insuffisance professionnelle puisse découler d'une production d'activité insuffisante au regard de critères quantitatifs objectifs.

En quatrième lieu, les insuffisances professionnelles du salarié sont établies en ce que :

- premièrement, celui-ci a commis des négligences et des erreurs dans le suivi et la gestion du chantier [N] qui au vu des éléments d'appréciation lui sont exclusivement imputables telles que celles-ci s'évincent, notamment, de factures, relevés bancaires et mails produits par l'employeur non utilement remis en cause dans leur authenticité ou leur caractère probant; ainsi, au mois de février 2017, le salarié, qui ne justifie pas avoir été sollicité à cette fin, a demandé à son employeur le règlement d'une facture "Inter France" d'un montant d'environ vingt mille euros dont il avait sollicité et obtenu le complet règlement au cours des mois précédents; pareillement, le salarié a commis des erreurs et négligences dans le contrôle et la vérification de la facturation d'un autre sous-traitant, "Les Bâtisseurs d'Haut Daces", en validant successivement et pendant plusieurs mois pour règlements un surcroît de facturation de plusieurs milliers d'euros qui n'avait d'autre cause que son caractère indû; de même, le salarié n'a pas procédé, par erreur ou négligence lors des situations successivement réglées, à des déductions de plusieurs milliers d'euros représentant près de dix pour cents du montant total de la facture; en outre, une succession de mails échangés au cours de l'année 2016, plus particlièrement lors du dernier quadrimestre de l'année 2016, montre que l'employeur a été confronté à l'incapacité du salarié à répondre, dans des délais raisonnables, sans surcharge de travail avérée, à des demandes relevant de ses fonctions et de ses compétences ne présentant aucune complexité le contraignant à une réponse aussi différée dans le temps, s'agissant notamment de l'établissement de documents contractuels, techniques ou de situations, de la réalisation de chiffrages ou de métrés, de la fixation de délais d'exécution de travaux, situations qui ont exposé l'entreprise à des pertes financières en partie réelles; enfin, dans un mail du 30 janvier 2017 détaillé et explicite, le client s'est plaint d'insuffisances de la part du salarié avec lequel il indique ne plus vouloir échanger en raison de son incompréhension des urgences et des finitions attendues dans l'ordre d'avancement du chantier;

- deuxièmement, il ressort d'un courrier et d'une facture produits aux débats, non utilement contredits, que le mécontentement de la clientèle en matière de contrôle des finitions avait déjà été révélé à l'employeur au mois de septembre 2016 concernant l'autre chantier important suivi par le salarié, soit le chantier Opéra Covea, ce qui s'était traduit par une retenue financière proportionnellement conséquente de dix mille euros hors taxes.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que dans le cadre de l'exécution de ses fonctions dont les exigences en matière, notamment, de polyvalence, de technicité, de rigueur et de réactivité étaient à la mesure du niveau élevé de la qualification requise et de la rémunération perçue, le salarié a commis des erreurs et négligences de manière récurrente et s'est trouvé dans l'incapacité objective d'accomplir ses missions au cours des deux chantiers précités qui lui ont été confiés.

Le licenciement pour insuffisance professionnelle est donc bien-fondé et le salarié doit dès lors être débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au soutien de sa demande en paiement d' une indemnité de licenciement qu'il ne justifie pas pouvoir être "spéciale" et qui ne pourrait représenter qu' un solde en raison du règlement à ce titre d'une somme de 1779,34 euros dans le cadre du solde de tout compte, le salarié ne développe aucun argument pertinent et ne procède à aucun calcul. Il sera donc débouté de cette demande.

De même, il se prévaut d'un préavis d'une durée de trois mois qui ne résulte pas des dispositions conventionnelles ou légales, et il ressort des éléments d'appréciation qu'il a perçu ce à quoi il avait droit au titre de l'exécution d'un préavis de deux mois correspondant à son ancienneté. Cette demande sera également en voie de rejet.

Sur les frais irrépétibles: En équité, la somme de 2000 euros sera allouée à l'employeur en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Sur les dépens:

Le salarié, partie succombante, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe:

Infirme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension et y ajoutant :

Dit bien-fondé le licenciement pour insuffisance professionnelle de Monsieur [J] [L].

Le déboute de l'ensemble de ses demandes.

Le condamne à payer à la société Pim la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-6
Numéro d'arrêt : 18/18574
Date de la décision : 20/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-20;18.18574 ?
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