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30/04/2012 | FRANCE | N°11/00115

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 30 avril 2012, 11/00115


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 179 DU TRENTE AVRIL DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00115
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes POINTE A PITRE du 14 décembre 2010.
APPELANTE
SOCIETE AVANT GARDE GUADELOUPE SARL 1 Rue Fulton-ZI de Jarry 97122 BAIE MAHAULT Représentée par Me Thierry AMOURET (TOQUE 95) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Gilles Yann Marie Z... ... 97122 BAIE MAHAULT Représenté par Me SZWARCBART-HUBERT (TOQUE 104) avocat au barreau de GUADELOUPE (bénéficie d'une aide juridi

ctionnelle Totale numéro 2011/ 00470 du 25/ 03/ 2011 accordée par le bureau d'aide juri...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 179 DU TRENTE AVRIL DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00115
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes POINTE A PITRE du 14 décembre 2010.
APPELANTE
SOCIETE AVANT GARDE GUADELOUPE SARL 1 Rue Fulton-ZI de Jarry 97122 BAIE MAHAULT Représentée par Me Thierry AMOURET (TOQUE 95) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Gilles Yann Marie Z... ... 97122 BAIE MAHAULT Représenté par Me SZWARCBART-HUBERT (TOQUE 104) avocat au barreau de GUADELOUPE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/ 00470 du 25/ 03/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Février 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère, rapporteur. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 avril 2012 puis le délibéré a été prorogé au 30 avril 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Juliette GERAN, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE qui est spécialisée dans la vente de matériel informatique de la marque DELL a été créée en août 2006 et son établissement est sis 1, rue Fulton 97122 BAIE-MAHAULT.
Par contrat de travail à durée indéterminée du 1er septembre 2007, M. Gilles Z... a été embauché par cette société en qualité de technicien informatique moyennant une rémunération brute mensuelle de 1 718, 86 €.
Par lettre recommandée avec avis de réception, M. Gilles Z... a été convoqué à un entretien préalable qui s'est déroulé le 9 mars 2009.
Celui-ci a par la suite fait l'objet d'un licenciement par lettre recommandée avec avis de réception du 17 mars 2009, libellée en ces termes : ".... En ce qui concerne les motifs de ce licenciement, il s'agit de ceux qui vous ont été exposés lors de l'entretien précité du 9 mars dernier. L'entreprise est confrontée à des difficultés économiques qui rendent nécessaire sa réorganisation pour sauvegarder sa compétitivité. Comme nous l'avons indiqué, le bilan de l'exercice 2008 est déficitaire malgré tous les efforts consentis pour pérenniser et développer notre activité. Nos résultats se sont particulièrement dégradés au cours du deuxième semestre 2008. Malheureusement, depuis le début de l'année 2009, nous subissons une baisse durable des commandes et de notre activité, liée à un tassement de la demande, qui plus est dans un très fort contexte concurrentiel. Nos résultats sont de plus en plus déficitaires, sans que cette situation puisse être uniquement imputable au mouvement social qui a gravement perturbé la Guadeloupe en ce début d'année 2009. Notre société et nos perspectives économiques menacent notre compétitivité et nous oblige, en conséquence à réorganiser l'entreprise pour l'adapter à l'évolution de son marché. Dans le cadre de cette nécessaire réorganisation, nous sommes amenés à supprimer votre poste d'assistante de direction, sans que nous ayons été en mesure, préalablement, de concrétiser une offre de reclassement compte tenu de la compression d'effectif que la situation de l'entreprise nous impose de réaliser. ".
Par requête enregistrée le 07 avril 2009, M. Gilles Z... a saisi le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de voir condamner son employeur à lui payer diverses sommes et à lui remettre une Attestation Assedic.
Par jugement de départage prononcé le 14 décembre 2010, le conseil de prud'hommes a condamné la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE à payer au requérant les sommes suivantes :-4 182, 56 € au titre de l'indemnité de préavis,-458, 36 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,-10316, 16 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, et condamné la même aux dépens.

Par déclaration enregistrée le 17 janvier 2011, la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE a relevé appel de cette décision.
Par conclusions remises le 30 septembre 2011 et soutenues oralement à l'audience du 6 février 2012, la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE, représentée, demande à la cour d'infirmer le jugement

entrepris en toutes ses dispositions et de condamner M. Z... au paiement de la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société soutient que le licenciement de M. Gilles Z... est motivé par une cause réelle et sérieuse d'ordre économique ; qu'en effet, elle se trouve confrontée à une chute brutale des commandes de matériels informatiques ; que la lettre de licenciement est parfaitement explicite sur le sujet ; ses difficultés économiques sont justifiées par le bilan et le compte de résultat de l'exercice de 2008 qui font apparaître une chute de son chiffre d'affaires de 20 % entre 2007 et 2008 ; qu'au trois quarts de l'année 2009, les chiffres étaient déjà déficitaires et après déduction des charges, le résultat net n'a cessé de se détériorer, passant de 31 679 € en 2008 à 124 777 € pour 2009 ; que dans un contexte très exacerbé par la concurrence, son positionnement sur le marché doit être complètement revu et passe forcément par la suppression de certains postes et notamment par celui de technicien informatique occupé par M. Z..., l'indication de la suppression du poste d'assistante juridique résultant d'une simple erreur rectifiée par courrier du 30 mars 2009.
Elle précise que le reclassement du salarié n'a pas été possible alors qu'elle a effectivement recherché des possibilités de reclassement, mais s'est bien rendue compte de cette impossibilité en raison de la baisse d'activité du secteur tout entier qui a imposé également d'autres licenciements économiques au sein des structures de la Réunion, de la Guyane et de la Martinique.
Par conclusions remises le 12 décembre 2011 et soutenues oralement, M. Gilles Z..., représenté, demande à la cour de :- confirmer le jugement rendu par le juge départiteur,- statuer à nouveau et de condamner la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE à lui payer les sommes suivantes : * 1 718, 86 € pour non-respect de la procédure, * 17 188, 61 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif (soit 10 mois de salaires) * 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses demandes, l'intimé rappelle en premier lieu et principalement les dispositions des articles L. 1232-2, L. 1233-3, L. 1233-4, L. 1233-5 et L. 1235-15 du code du travail ;
Il soutient au regard de ces textes que non seulement la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE a omis de mettre en place les organes représentatifs du personnel et d'indiquer sur la lettre de convocation l'adresse de la mairie de Baie-Mahault, mais elle a aussi négligé l'obligation de reclassement qui s'imposait à elle, ce qu'elle reconnaît d'ailleurs dans la lettre de licenciement ; qu'en outre, elle invoque une cause économique pour justifier du licenciement qui n'est constituée ni par une suppression d'emploi, ni par une transformation d'emploi ou une modification du contrat de travail, la seule énonciation de difficultés économiques ne saurait suffire à fonder le licenciement engagé contre lui.
Il rappelle par ailleurs que c'est à l'employeur de prouver ses difficultés économiques, ce qui n'est pas le cas lorsque parallèlement au licenciement, celui-ci annonce l'arrivée de trois nouveaux collaborateurs au sein de l'entreprise et décroche un important marché auprès de la société Orange caraïbes, qu'il lui appartenait aussi d'informer l'inspection du travail de la procédure engagée afin de faciliter la recherche d'une solution moins brutale que le licenciement.

Il conclut au bien-fondé de ses demandes relatives à l'indemnité de préavis et à l'indemnité compensatrice de congés payés.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions écrites et à la décision antérieure.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LA PROCÉDURE DE LICENCIEMENT :
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L. 1232-4 et D. 1232-5 du code du travail que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner la faculté pour le salarié, lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, de se faire assister par un conseiller de son choix, inscrit sur une liste dressée par le présentant de l'Etat dans le département, et préciser l'adresse de l'inspection du travail et de la mairie où cette liste est tenue à la disposition des salariés ; que l'omission d'une de ces adresses constitue une irrégularité de procédure selon l'arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 3 décembre 2008 ;
Attendu qu'en l'espèce, outre le fait que l'intimé relève qu'aucune institution représentative n'a été organisée au sein de l'entreprise, celui-ci rapporte la preuve que la lettre de convocation à l'entretien préalable ne fait pas apparaître l'adresse de la mairie de Baie-Mahault ;
que dès lors, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris de ce chef et de juger irrégulière la procédure de licenciement engagée contre M. Gilles Z... et de condamner la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE à payer à ce dernier la somme de 1 718, 86 €, étant précisé que le cumul des indemnités prévues par l'article L. 1235-2 et L. 1235-3 nouveau du code du travail est autorisé lorsqu'il s'agit du non respect des règles relatives à l'assistance du conseiller du salarié, étant relevé que dans la présente espèce, l'adresse de la mairie où se trouve tenue la liste des conseillers du salatié, fait défaut.

SUR LE LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE :

Attendu qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusé par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ;
Attendu que cette articulation légale est précise et qu'il appartient au juge de la suivre en constatant dans l'ordre :
* que le licenciement n'est pas lié à la personne du salarié, * que l'emploi a été bien supprimé ou transformé ou que le salarié a refusé une modification de son contrat de travail, * que cette suppression ou transformation a été provoquée soit par des difficultés économiques, soit par des mutations technologiques, * que la réorganisation de l'entreprise est nécessaire pour sauvegarder sa compétitivité ou celle du groupe auquel elle appartient,

Attendu que le juge doit également s'assurer de la motivation de la lettre de licenciement et du respect de l'obligation de reclassement ; qu'enfin, l'employeur doit justifier qu'il a tenté de reclasser le salarié, même si celui-ci a adhéré à une convention de conversion ;

Attendu qu'en l'espèce, la cour constate non seulement que la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE informe M. Gilles Z... de la suppression du poste d'assistante juridique qui n'est pas le sien, celui-ci ayant été embauché en qualité de technicien informatique, mais aussi qu'aucune mesure de reclassement n'a été tentée par l'employeur au profit de son salarié comme il le reconnaît d'ailleurs dans la lettre de licenciement comme suit : " dans le cadre de cette nécessaire organisation, nous sommes amenés à supprimer votre poste d'assistante juridique, sans que nous n'ayons été en mesure, préalablement, de concrétiser une offre de reclassement compte tenu de la compression d'effectif que la situation de l'entreprise nous impose de réaliser " ;
que par motifs propres et adoptés, la cour confirme la décision rendu de ce chef par le juge départiteur, tant en son principe qu'en son montant, l'indemnité de 10 316, 16 € correspondant à 6 mois de salaires et M. Z... ne bénéficiait au sein de l'entreprise que d'une ancienneté de 19 mois,
SUR LES AUTRES DEMANDES PÉCUNIAIRES :
Attendu qu'en conséquence du licenciement de M. Gilles Z..., une indemnité de préavis et une indemnité compensatrice sur préavis sont dues au salarié, qu'il convient de les confirmer telles qu'elles ont été accordées par le premier juge.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Confirme le jugement du 14 décembre 2011 sauf en ce qu'il a jugé régulière la procédure de licenciement ;
Statue à nouveau ;
Dit que la procédure de licenciement engagée contre M. Gilles Z... est irrégulière ;
Condamne en conséquence la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE à M. Gilles Z... la somme de 1 718, 86 € pour procédure irrégulière ;
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne la SARL AVANT-GARDE GUADELOUPE à payer à M. Gilles Z... la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;
La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00115
Date de la décision : 30/04/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-04-30;11.00115 ?
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