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23/09/2013 | FRANCE | N°12/01556

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 23 septembre 2013, 12/01556


BR-VF

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 330 DU VINGT TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 12/ 01556
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 5 juillet 2012- Section Commerce.
APPELANTE
SAS X... ANTILLES Zone artisanale de Calebassier 97100 BASSE TERRE Représentée par Maître Pierre-Marie GRAPPIN, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Maître HERRMANN, avocat au barreau de la Guadeloupe.

INTIMÉ
Monsieur Rodrigue Y.........97100 BASSE-TERRE Comparant en personn

e Assisté de Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de l...

BR-VF

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 330 DU VINGT TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 12/ 01556
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 5 juillet 2012- Section Commerce.
APPELANTE
SAS X... ANTILLES Zone artisanale de Calebassier 97100 BASSE TERRE Représentée par Maître Pierre-Marie GRAPPIN, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Maître HERRMANN, avocat au barreau de la Guadeloupe.

INTIMÉ
Monsieur Rodrigue Y.........97100 BASSE-TERRE Comparant en personne Assisté de Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 juin 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président Madame Françoise Gaudin, conseiller, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 23 septembre 2013
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président et par Madame Valérie Francillette, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire. Faits et procédure :

Par contrat de travail à durée indéterminée en date du 9 août 2002, M. Rodrigue Y...était en engagé en qualité d'agent d'entretien par la Société X... ANTILLES. Il était affecté à la collecte des ordures.
Par lettre remise en main propre le 7 août 2009 contre décharge, l'employeur faisait savoir à M. Y...qu'il était amené à envisager à son égard une mesure de licenciement pour faute grave, et le convoquait à un entretien préalable fixé au 17 août 2009, une mise à pied à titre conservatoire étant notifiée au salarié par le même courrier.
Par lettre recommandée avec avis de réception, en date du 21 août 2009, l'employeur notifiait à M. Y...son licenciement pour faute grave.
Le 26 janvier 2010, M. Y...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre aux fins de contester son licenciement et obtenir paiement de diverses indemnités.
Par jugement du 5 juin 2012, la juridiction prud'homale jugeait que le licenciement de M. Y...était sans cause réelle et sérieuse et fixait au 23 octobre 2009 la date de fin de contrat. Elle condamnait la Société X... ANTILLES à payer à M. Y...les sommes suivantes :-9 617, 46 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-3 205, 82 euros à titre d'indemnité de préavis,-320, 58 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,-801, 45 euros à titre de remboursement de salaire du 6 au 21 octobre 2009 correspondant à la période de mise à pied conservatoire,-1 122, 03 euros à titre d'indemnité de licenciement conventionnel,-19 234, 92 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,-1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La Société X... ANTILLES était condamnée à payer à POLE EMPLOI l'équivalent de 6 mois de salaire, te que prévu par l'article L 1235-4 du code du travail.

Par déclaration adressée au greffe de la cour le 14 août 2012, la Société X... ANTILLES interjetait appel de cette décision.
****
Par conclusions notifiées la partie adverse le 14 février 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société X... ANTILLES sollicite la réformation intégrale du jugement déféré et le rejet de toutes les demandes de M. Y....
La Société X... ANTILLES expose que le salarié ne saurait être fondé à exciper de l'annulation de la mesure de rupture, dans la mesure où il n'y a pas de nullité sans texte. Elle fait valoir que sur le fond, le licenciement est causé puisque les preuves des insubordinations commises par le salarié sont rapportées, s'appuyant pour ce faire sur les déclarations de MM. B..., C...et D....
À titre subsidiaire la Société X... ANTILLES conteste le fondement de la demande de dommages et intérêts à hauteur de 19 234, 92 euros, pour rupture abusive, faisant valoir que la notion de rupture abusive suppose l'existence d'une faute distincte d'une particulière gravité telles que des brutalités ou des procédures vexatoires accompagnant le licenciement.
La Société X... ANTILLES demande en tant que de besoin le remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire.
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 20 février 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. Y...sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et réclame en outre le paiement d'un mois de salaire pour non-respect de la procédure de licenciement et celle de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure d'appel.
M. Y...fait valoir que le licenciement pour faute grave s'avère être abusif comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, les griefs relatifs à des prétendues menaces qu'il aurait proférées, et à l'abandon de poste reprochée, étant totalement infondés et injustifiés.
M. Y...expose que la Société X... ANTILLES se borne à se prévaloir de prétendues menaces, sans étayer et sans préciser en aucune façon ses dires, se contentant d'énoncer ce grief de manière générale et floue sans aucune précision de fait et de date, un tel grief étant dès lors totalement infondé et invérifiable. Il conteste la fiabilité des attestations versées en cause d'appel par l'employeur.
M. Y...soutient qu'il n'a pas abandonné son poste de travail le 6 août 2009, et qu'il n'a pu que subir la décision du chauffeur conduisant le camion de collecte d'ordures ménagères qui a décidé de rentrer au dépôt et d'arrêter la collecte. Il fait valoir que l'abandon de poste s'assimile à une démission laquelle ne se présume pas et doit reposer sur un acte non équivoque de la part du salarié, et que tel n'est pas le cas en l'espèce.
S'agissant de l'irrégularité de la procédure, M. Y...relève que toute la procédure de licenciement a été conduite par un délégué syndical CGT, dont la qualité dans l'entreprise n'a pas été précisée dans l'acte portant délégation de pouvoir à son profit, la lettre de licenciement étant signée par M. Patrick E...et la délégation de pouvoirs consentie par M. Louis X... n'étant pas authentifiée en l'absence d'une copie de pièce d'identité du mandataire permettant à la cour d'opérer son devoir de vérification.
M. Y...entend caractériser les circonstances humiliantes et vexatoires de son licenciement par l'intervention anormale et irrégulière d'un syndicaliste de renom pour conduire la procédure, par la légèreté des griefs reposant sur le mensonge, la calomnie et de faux témoignages, et la vacuité du dossier disciplinaire, assorti d'une mesure de mise à pied à titre conservatoire, après de 7 ans de bons, dévoués et loyaux services.
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Motifs de la décision :
Dans sa lettre du 21 août 2009, l'employeur expose les motifs du licenciement de la façon suivante :
« Ces griefs se rapportent aux menaces que vous avez l'habitude de proférer à l'encontre de collègues, ce qui vous a déjà valu de nombreuses observations orales à ce sujet.

Vous avez également, le 6 août 2009, abandonné votre poste de travail sans aucun motif ; cette attitude a non seulement perturbé grandement le service (absence de collecte dans le centre-ville de Basse-Terre), mais a fait également l'objet, de la part de la Communauté des Communes du Sud Basse-Terre, de vives remontrances.

Une telle conduite perturbe la bonne marche du service auquel vous êtes affecté. »
La réalité des griefs ainsi reprochés est suffisamment établie par les attestations circonstanciées, précises, détaillées et concordantes des collègues de travail de M. Y....
Ainsi il résulte de l'attestation de Monsieur Steeve B..., équipier de collecte, que celui-ci travaillant dans l'équipe du soir en compagnie de M. Y...et de M. Alain C..., a dû à plusieurs reprises informer les responsables et la direction, que M. Y...l'insultait et le menaçait. Il précise que le 6 août 2009 M. Y...a refusé de prendre une poubelle qui se trouvait de son côté, et a demandé au chauffeur de partir. M. Alain C..., chauffeur du camion attendit que M. Y...exécute sa tâche, mais ce dernier s'assit et refusa de prendre la poubelle. M. B...prévint son chef d'équipe, M. Michel D...afin qu'il vienne régler le problème, la situation s'étant produite plusieurs fois. M. D...demanda alors à l'équipe de quitter le travail et de revenir au parc en indiquant que le problème devait être réglé par la direction car il en avait assez d'intervenir à cause du comportement de M. Y....
Dans son attestation, M. Alain C...confirme les faits relatés par Monsieur B..., en indiquant qu'il a dû appeler son responsable M. D..., qui lui a demandé de dire à M. Y...de reprendre son travail, celui-ci ayant refusé et ayant répondu qu'il « en a marre de soulever les poubelles ». M. Alain C...poursuit en indiquant que sur ordre de M. D..., il est retourné au garage, le travail n'ayant pas été fait ce jour-là.
M. D..., qui a la qualité de surveillant et est responsable de la collecte au sein de la Société X... ANTILLES, rapporte que M. Y...a fait l'objet de nombreuses plaintes de la part de ses collègues pour insultes et menaces, et qu'à cet égard il a dû le changer d'équipe à plusieurs reprises. Il indique que le 6 août 2009, par un appel téléphonique de M. Alain C..., chauffeur et responsable de l'équipe de collecte du soir, il a appris que M. Y...avait quitté son poste en début de service au niveau de la cité Casse de Basse-Terre en déclarant qu'il en avait assez de soulever les poubelles. M. D...précise que par l'intermédiaire du chauffeur, il a demandé à ce que M. Y...reprenne son poste, mais que devant le refus de ce dernier, ne pouvant plus assurer la prestation, il a demandé à M. Alain C...de rejoindre le parc, la collecte n'ayant pu être assurée au centre-ville de Basse-Terre ce jour-là.
Le refus persistant de M. Y...d'exécuter la tâche qui lui est assignée, malgré l'ordre donné par son supérieur hiérarchique, constitue une entrave sérieuse au fonctionnement de l'entreprise et est de nature à affecter les relations commerciales de celle-ci.
Compte tenu de l'impossibilité d'obtenir de M. Y...l'exécution de son travail, malgré l'ordre donné, le contrat de travail de ce dernier ne pouvait se poursuivre, la rupture immédiate du contrat de travail s'imposait.
Ainsi la mise à pied et le licenciement pour faute grave décidés par l'employeur, sont parfaitement justifiés.
En ce qui concerne la prétendue irrégularité affectant la procédure de licenciement, il y a lieu de relever qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. Patrick E..., qui a procédé à l'entretien préalable, et signé la lettre de licenciement, avait reçu de la part de Mme Christine G..., directrice de la Société X... ANTILLES, délégation de pouvoir et de signature le 7 août 2009 pour la procédure de licenciement individuel de M. Y..., et la " représentation de la Société à tout entretien préalable, prononcé de la sanction ou révocation, rédaction d'un licenciement ou et signature de la lettre de licenciement ». Mme Christine G...avait elle-même reçu, le 19 décembre 2007, délégation de pouvoir de la part du président de la Société X... ANTILLES, M. Louis X..., pour notamment prendre « toutes mesures disciplinaires en cas de non-respect de la législation ou des mesures d'organisation mise en oeuvre ». Il était stipulé que Mme Christine G...pouvait choisir un subdélégataire.
L'irrégularité de procédure invoquée par M. Y...sera donc écartée, et celui-ci sera débouté de sa demande de paiement d'indemnité à hauteur d'un mois de salaire pour procédure irrégulière.
La faute grave retenue par l'employeur comme fondement du licenciement, étant privative d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais aussi privative des indemnités de préavis et de licenciement, M. Y...sera débouté de ses demandes portant sur lesdites indemnités.
Aucune des pièces versées aux débats, ni aucun des faits de l'espèce, ne révèle de circonstances humiliantes ou vexatoires ayant entouré le licenciement, M. Y...doit donc être débouté de sa demande de dommages et intérêts fondée sur de telles circonstances.

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
Déboute M. Y...de l'ensemble de ses demandes,
Rappelle que le présent arrêt infirmatif vaut titre exécutoire pour obtenir restitution des sommes qui auraient été versées au titre de l'exécution provisoire du jugement infirmé,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de M. Y....
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/01556
Date de la décision : 23/09/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2013-09-23;12.01556 ?
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