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17/03/2014 | FRANCE | N°13/00048

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 17 mars 2014, 13/00048


MJB/ JG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 98 DU DIX SEPT MARS DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00048
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 13 décembre 2012.
APPELANTE
SARL SEPRODOM ANTILLES Lotissement Frida-impasse des Palétuviers-voie Verte 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par Me Patrick ADELAIDE, (TOQUE 1) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Angélica Y.........97122- BAIE MAHAULT Comparante en personne, assistée de M. Luc Z..., délégué syndical ouvrie

r.)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 décembre 2013, en audience publiqu...

MJB/ JG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 98 DU DIX SEPT MARS DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00048
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 13 décembre 2012.
APPELANTE
SARL SEPRODOM ANTILLES Lotissement Frida-impasse des Palétuviers-voie Verte 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par Me Patrick ADELAIDE, (TOQUE 1) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Angélica Y.........97122- BAIE MAHAULT Comparante en personne, assistée de M. Luc Z..., délégué syndical ouvrier.)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 décembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, Conseillère, Mme Françoise GAUDIN, Conseillère. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 27 janvier 2014 puis le délibéré a été successivement prorogé jusqu'au 17 mars 2014
GREFFIER Lors des débats Madame Marie-Luce KOUAME.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAIT ET PROCÉDURE

La SARL SEPRODOM ANTILLES exerce une activité de prestataire de santé à domicile, spécialisée dans la location, la vente et la réparation de matériel médico-chirurgical.
Dans le cadre de ses activités, cette société assure le suivi de patients en assistance respiratoire, dans un protocole appelé " RESPIDOM ".
Mme Angélica Y...a été embauchée le 1er mars 2010 par la SARL SEPRODOM ANTILLES par un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein.
Ce contrat a été modifié par avenant du 30 avril 2010.
Par lettre remise en main propre contre décharge le 21 mars 2011, Mme Y...a été convoquée à un entretien préalable à une mesure de licenciement pour faute grave, prévu le 5 avril 2011.
Par lettre recommandée avec avis reçu le 16 avril 2011, elle a été informée de son licenciement pour faute personnelle.
Contestant cette mesure, elle saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre pour être remplie de ses droits et obtenir paiement de diverses sommes.
Par jugement du 13 décembre 2012, la juridiction prud'homale a condamné la SARL SEPRODOM ANTILLES, en la personne de son représentant légal, au paiement des sommes suivantes :-4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,-500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle a débouté Mme Y...du reste de ses demandes, a également débouté la SARL SEPRODOM ANTILLES de ses prétentions et condamné celle-ci aux entiers dépens.
Par déclaration remise au greffe de la cour le 07 janvier 2013, la société SEPRODOM ANTILLES a relevé appel de cette décision.
Par conclusions notifiées à l'intimée le 12 août 2013 et soutenues à l'audience des plaidoiries du 2 décembre 2013, représentée, la société appelante demande à la cour de :
- dire recevable son appel,- dire et juger valide le licenciement de Mme Angélica Y..., fondé sur une cause réelle et sérieuse, compte tenu des griefs reprochés et corroborés par les diverses pièces versées aux débats,- infirmer en conséquence le jugement du 13 décembre 2012,- débouter l'intimée de toutes ses demandes,- condamner la même à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle rappelle d'abord à la cour qu'embauchée pour des tâches bien précises et détaillées dans son contrat de travail, Mme Y...n'a pas rempli sa mission, commettant des fautes dans le traitement des dossiers, fautes qui ont été reprises dans la lettre de licenciement.

Elle précise ensuite que c'est à partir de juin 2010, que la relation de travail a commencé à se dégrader, lorsqu'il lui a été proposé la mise en place d'un système de prime que cette dernière a refusé en août 2010.

Elle explique que Mme Y...s'est mise en tête que toutes les demandes formulées par la suite répondaient à une volonté de sa part de la harceler à un point tel que les relations entre collègues ont fini par se dégrader.
Elle ajoute que la procédure de licenciement a été parfaitement respectée conformément aux dispositions des articles L. 1232-1 et suivants du code du travail.
Elle considère tout aussi fondé le licenciement pour motif personnel puisque celui-ci repose sur des faits et des dates précises (non-respect des termes du contrat de travail et des notes de service constituant des rappels) de sorte que les conditions d'existence, de réalité et d'objectivité sont parfaitement remplies.
Elle reproche également à la salariée son attitude à l'égard de ses collègues ; Mme Y...en apporte la preuve elle-même par ses propres déclarations écrites.
Elle conclut sur l'erreur manifeste d'appréciation du conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre qui a retenu pour qualifier le licenciement de Mme Y...d'abusif, l'existence d'un harcèlement moral de la part de l'employeur, alors que la salariée n'a aucun moment soutenu un tel grief dans ses écritures devant les premiers juges.

Par conclusions notifiées à l'appelante le 13 novembre 2013 et soutenues à l'audience, Mme Y..., représentée, demande à la cour de :- confirmer le jugement querellé,- constater qu'elle a subi un véritable harcèlement moral de la part de M. C..., cogérant de la société SEPRODOM ANTILLES, eu égard aux dispositions des articles L. 1152-1, L1152-2, et L. 4131-1 du code de travail,- condamner en conséquence l'employeur à l'une des deux peines suivantes : * sa réintégration au sein de l'entreprise, * le paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts,- débouter la SARL SEPRODOM ANTILLES.

Elle indique que victime d'une machination de la part de l'employeur, elle s'est vu notifier une mise à pied, pour être ensuite licenciée avec dispense de préavis.
Elle soutient qu'aucune faute ne peut lui être reprochée et rappelle que le code du travail prévoit qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral, ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés par application des articles L. 1152-1 et suivants du code du travail.
Elle rappelle la jurisprudence constante de la cour de cassation en matière de harcèlement moral exercé par le supérieur hiérarchique (Cour de Cassation. Chambre sociale du 20 juin 2013. No pourvoi 13-18408).

Elle dénonce à cet égard la pression de plus en plus grande exercée par la SARL SEPRODOM ANTILLES sur sa personne au point qu'elle a été obligée de lui faire parvenir deux mails consécutifs (pièces no6 et 7), et réfute les fautes qui lui sont reprochées, parce que celles-ci ne sont pas constituées.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions écrites et à la décision des premiers juges.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LE LICENCIEMENT POUR FAUTE

Les termes de la lettre de licenciement fixent les limites du litige.
La lettre de licenciement du 15 avril 2011 est rédigée en ces termes :
" Nous revenons vers vous suite à l'entretien préalable qui s'est tenu en nos locaux le 5 avril 2011 et au cours duquel vous étiez assistée par un conseiller inscrit sur les listes préfectorales. Par la présente, nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour faute. A titre liminaire, nous souhaitons répondre à votre courrier du 25 mars 2011 à l'occasion duquel vous évoquez une prétendue situation de harcèlement dont vous seriez victime et qui serait à l'origine de votre licenciement que vous jugez comme étant déjà acquis.
Vous constaterez à la lecture de la présente lettre que tel n'est pas le cas et nous sommes d'ailleurs étonnés que vous n'ayez pas abordé ce sujet lors de l'entretien préalable à votre licenciement.
Nous vous rappelons que vous avez été embauchée en contrat à durée déterminée à compter du 1 er février 2010 en qualité de secrétaire commerciale puis en contrat à durée indéterminée à compter du 1er mars suivant.
Votre contrat de travail que vous avez signé, reprend les tâches administratives relatives à la gestion quotidienne de la société, notamment la gestion quotidienne des dossiers clients et patients afin que 100 % de dossiers puissent se facturer en fin de mois.
Nous vous avons rappelé vos missions dans le cadre d'une note de service datée du 28 octobre 2010.
Puis à l'occasion de votre entretien annuel de performance du 8 novembre 2010, nous vous avons fixé des objectifs à atteindre lesquels ne font que reprendre les missions qui vous étaient imparties dans le cadre de votre contrat de travail, à savoir :- avoir un statut assuré à jour sur les dossiers Respidom, avec une échéance au 1er février 2011,- avoir un renouvellement des dossiers patients compliants, avec une échéance au 1er février 2011.

Il s'avère que vous n'avez pas rempli vos objectifs alors que vous vous y étiez engagée à l'issu de votre entretien annuel.
En effet, s'agissant du statut assuré des dossiers Respidom, vous deviez anticiper les appels aux patients pour mettre à jour le statut assuré des dossiers qui arrivent à renouvellement, et ce, afin que 100 % des dossiers renouvelés avec demande d'entente préalable (DEP) signée du médecin soient désuspendus à temps.
De même, vous deviez alerter les patients compliants de leur renouvellement pour que ces dossiers puissent voir leur médecin à temps.
Or, vous n'accomplissez pas correctement ces fonctions alors qu'elles font partie intégrante de votre contrat de travail.
Votre manque d'initiative se manifeste sur la tenue des dossiers dont vous avez la charge.
A cet égard, vous sollicitez de manière excessive vos collègues de travail afin d'obtenir des documents ou informations dont vous êtes déjà en possession ou que vous pourriez trouver vous-même, notamment en procédant à une vérification sur le site internet de l'assurance maladie nommé " AMELI ".
Par ce procédé, vous faites perdre du temps à vos collègues de travail et les dossiers dont vous avez la charge, ne peuvent pas faire l'objet de facturation.
Dès lors, les factures sont adressées avec retard à nos clients et notre trésorerie s'en trouve pénalisée, ce qui met en péril notre société.
Nous avons constaté qu'à la date du 18 mars 2011, 60 dossiers sont restés suspendus de votre fait, notamment en raison de statuts assurés non à jour, de dossiers renouvelés non compliants et de nouveaux dossiers qui auraient dû être facturés.
A titre d'exemple, le dossier du patient A...aurait dû faire l'objet d'une facturation fin mars.
Or ce dossier est toujours suspendu car vous avez cherché à savoir si le patient est affilié à la caisse générale de sécurité sociale (CGSS), alors qu'il est affilié à l'organisme RAM, ce que nous savons depuis le 8 février 2010, date d'installation du matériel médical en vue du traitement de ses apnées du sommeil.
Par ailleurs, votre comportement avec certains salariés n'est pas acceptable.
Ainsi, par courrier daté du 14 mars 2011, un salarié de la société nous a alerté sur vos agissements qu'il qualifie de harcèlement.
Nous ne pouvons tolérer plus longtemps un tel comportement qui nuit à la bonne marche de notre entreprise.
En outre, votre travail est souvent émaillé de multiples erreurs.
Tel est le cas dans les dossiers des patients E...et F...qui auraient dû être suspendus et faire l'objet d'une facturation puisqu'ils étaient complets.
Or, vous n'avez pas jugé opportun de le faire.

Autre exemple d'anomalie dont vous êtes à l'origine, vous avez attribué au patient G... un médecin qui n'est pas le sien.

Ces erreurs pénalisent la facturations de nos dossiers et peuvent s'avérer dangereuses pour nos relations avec la caisse générale de sécurité sociale.
Enfin, le 9 février 2011, vous avez quitté votre poste de travail deux heures avant la débauche sans avertir votre hiérarchie, ce que nous ne pouvons accepter.
L'ensemble de ses faits méritaient d'être qualifié de faute grave.
Cependant, nous désirons tenir compte de votre situation personnelle et des éléments d'explication que vous avez bien voulu nous livrer pendant l'entretien préalable à votre licenciement.
C'est la raison pour laquelle nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute personnelle.
Le présent licenciement reposant donc sur une cause réelle et sérieuse, la période de mise à pied vous sera rémunérée... ".
L'examen du dossier de l'appelante permet à la cour de constater qu'il n'est versé aucun document prouvant les manquements professionnels de Mme Y...au regard de ses missions contractuelles rappelées dans cette lettre de licenciement.
La cour relève également que l'attestation de Mme D...(pièce no10), datée du 14 mars 2011, soit quelques jours avant la convocation de l'intimée à l'entretien préalable, relate des faits de harcèlement, de haine et de discorde de la part de celle-ci par mails durant depuis huit mois. La preuve des dits mails n'est pas rapportée et le dépôt de plainte dont il est fait référence, ne l'est pas davantage.
Cette pièce est inopérante pour qualifier de harcèlement le comportement de Mme Y...à l'égard de cette personne.
Il convient alors de juger abusif le licenciement de Mme Y...eu égard aux dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail, et de confirmer l'indemnité qui lui a été accordée à ce titre par les premiers juges.
SUR LE HARCÈLEMENT MORAL ET LES DOMMAGES-INTÉRÊTS
L'article L. 1152-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Aucune des pièces versées par Mme Y...(no5, 6, 7, 10, 12) ne prouve l'existence d'un harcèlement moral exercé par l'employeur. L'intimée relate dans ces documents des faits sans en dire la nature, les dates et le contexte, et sans en rapporter la preuve, y compris celles de leur répétition et de leurs conséquences sur l'exercice de ses droits et sur sa personne.
La demande formulée à ce titre est rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement du 13 décembre 2012 ;
Condamne la SARL SEPRODOM ANTILLES aux éventuels dépens ;
La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00048
Date de la décision : 17/03/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2014-03-17;13.00048 ?
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