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31/05/2022 | FRANCE | N°18/00077

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 31 mai 2022, 18/00077


AFFAIRE : N° RG 18/00077 -

N° Portalis DBVC-V-B7C-F7S4





ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de COUTANCES du 02 Novembre 2017

RG n° 17/00130







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 31 MAI 2022





APPELANTS :



Monsieur [D], [X] [N]

né le 04 Avril 1964 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Monsieur [A], [Y], [G] [W]

né le 01 Mars 1974 à [L

ocalité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentés par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN

assistés de Me Jean-Pierre GOUEDARD, avocat au barreau de COUTANCES,





INTIMÉ :



Monsieur [J] [O]

[Adresse 1]

...

AFFAIRE : N° RG 18/00077 -

N° Portalis DBVC-V-B7C-F7S4

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de COUTANCES du 02 Novembre 2017

RG n° 17/00130

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 31 MAI 2022

APPELANTS :

Monsieur [D], [X] [N]

né le 04 Avril 1964 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Monsieur [A], [Y], [G] [W]

né le 01 Mars 1974 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentés par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN

assistés de Me Jean-Pierre GOUEDARD, avocat au barreau de COUTANCES,

INTIMÉ :

Monsieur [J] [O]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Anne FOUBERT, avocat au barreau de CAEN

assisté de Me Stéphanie LOUCHART avocat au barreau de Coutances-Avranches

DÉBATS : A l'audience publique du 24 mars 2022, sans opposition du ou des avocats, M. GANCE, Conseiller, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme COLLET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

M. GANCE, Conseiller,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 31 Mai 2022 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant devis du 31 juillet 2014, M. [W] et M. [N] ont confié à M. [O] des travaux de charpente et de couverture moyennant paiement d'un prix de 34 453,13 euros.

Par ordonnance du 5 décembre 2016, le tribunal de grande instance de Coutances a enjoint à M. [N] et M. [W] de payer la somme de 11 113,71 euros à M. [O] au titre d'un solde de facture.

Par courrier du 15 janvier 2017, M. [N] et M. [W] ont formé opposition à cette ordonnance.

Par jugement du 2 novembre 2017 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal de grande instance de Coutances a :

- déclaré M. [W] et M. [N] recevables en leur opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 5 décembre 2016

- confirmé l'ordonnance d'injonction de payer du 5 décembre 2016

- condamné M. [W] et M. [N] à payer à M. [O] la somme de 11 113,71 euros outre intérêts à compter du 18 juillet 2016

- condamné M. [W] et M. [N] à payer à M. [O] la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

- condamné M. [W] et M. [N] aux dépens qui seront distraits dans les formes de l'article 699 du code de procédure civile

- rejeté toutes autres demandes.

Par déclaration du 9 janvier 2018, M. [W] et M. [N] ont formé appel de ce jugement.

Par arrêt du 21 juillet 2020, la cour d'appel de Caen a :

- prononcé la nullité du jugement déféré

statuant à nouveau

- déclaré recevable l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 5 décembre 2016

- ordonné avant dire droit une expertise judiciaire et missionné M. [F].

Selon ordonnance du 9 septembre 2020, M. [E] a été désigné en qualité d'expert en lieu et place de M. [F].

L'expert a déposé son rapport le 18 mai 2021.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 16 juillet 2021, M. [W] et M. [N] demandent à la cour de :

- déclarer M. [O] sur le fondement des dispositions de l'article 1147 ancien du code civil responsable des désordres qui affectent les travaux réalisés

- en conséquence condamner M. [O] à leur payer la somme de 40 256,47 euros au titre du coût total des travaux de reprise avec intérêts de droit à compter de la signification des conclusions, sauf à déduire le solde des travaux dus à M. [O]

- condamner M. [O] également à leur payer une somme de 10 000 euros au titre de dommages et intérêts au titre de la privation de jouissance

- condamner également M. [O] à leur payer une somme de 5 000 euros selon l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise judiciaires de M. [E] ainsi que les frais d'expertise amiable de M. [C].

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 20 septembre 2021, M. [O] demande à la cour de :

- condamner M. [W] et M. [N] à lui payer la somme de 11 113,71 euros en principal outre intérêts à compter du 18 juillet 2016 et déduire cette somme des dommages et intérêts alloués au titre des travaux de reprise des désordres

- débouter M. [W] et M. [N] de leur demande de dommages et intérêts au titre de la privation de jouissance globale et de condamnation à supporter le coût du rapport amiable de M. [C]

- lui accorder la possibilité de s'acquitter des sommes dues à M. [W] et M. [N] selon l'échelonnement de 23 mensualités de 250 euros et le solde lors de la 24ème mensualité

- partager par moitié les dépens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 23 février 2022.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Suivant devis du 31 juillet 2014, M. [W] et M. [N] ont confié à M. [O] des travaux de charpente et de couverture moyennant paiement d'un prix de 34 453,13 euros.

Les travaux ont été exécutés et M. [O] a émis une dernière facture de 11 113, 71 euros que les maîtres de l'ouvrage ont refusé de régler au motif que les travaux présentaient des désordres.

Aucune réception n'étant intervenue, la responsabilité de M. [O] est recherchée sur le fondement de l'article 1147 du code civil dans sa version applicable au litige.

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire de M. [E] que différents désordres ont été constatés.

- sur la mauvaise exécution des lucarnes :

Les lucarnes n'ont pas été posées conformément au plan établi par l'architecte qu'il s'agisse aussi bien de leur hauteur que de leur dimension. L'aspect des lucarnes se trouve ainsi complètement modifié par rapport à leur incorporation sur la toiture.

Il s'agit d'une non-conformité contractuelle.

L'expert préconise le démontage des lucarnes existantes avec découverture et modification de la charpente et prévoit une nouvelle implantation des lucarnes avec modification de leurs ossatures et la reprise des toitures.

L'expert a chiffré les travaux liés au remplacement des lucarnes à la somme de 30 152,18 euros selon devis établi le 31 mars 2021 par l'entreprise Lepetit pour le lot charpente et par l'entreprise Lm Couverture pour le lot couverture.

La responsabilité de M. [O] se trouve dès lors engagée au titre de la mauvaise exécution des lucarnes, celui-ci n'ayant pas respecté les plans de l'architecte.

- sur les débris d'ardoise au niveau de la sous-toiture existante :

L'expert a relevé que la pose de la sous-toiture existante est conforme au DTU en vigueur (c'est à dire aux normes de construction) mais que des débris d'ardoise sont tombés au moment de l'exécution des travaux ce qui a eu pour conséquence d'obstruer l'épaisseur du contre lattage et empêche ainsi la ventilation naturelle de la toiture.

M. [E] impute la cause de ces désordres à une négligence de M. [O] qui n'a pas retiré les débris d'ardoise tombés sur la sous toiture afin de garantir la ventilation naturelle de la toiture.

Il préconise le retrait des chutes d'ardoises existantes sur la sous-toiture et qu'il soit procédé à nouveau à la réalisation de la couverture en certains endroits. Il chiffre les travaux de reprise à la somme de 739,20 euros TTC.

La responsabilité de M. [O] est donc engagée à ce titre.

- sur la fixation des pannes de la charpente :

L'expert a relevé que les pannes de bois de la charpente n'ont pas été correctement fixées. Il impute les défaillances de fixation à des problèmes de scellement sur la maçonnerie et à des problèmes de fixation mécaniques s'agissant des sabots métalliques.

L'expert indique qu'il s'agit d'une malfaçon et d'un non-respect des règles de l'art et chiffre les travaux de reprise à la somme de 283,80 euros TTC.

M. [O] a donc engagé sa responsabilité à ce titre.

- sur les châssis de toit de type Velux :

L'expert a retenu que les châssis de toit de type Velux qui ont été posés ne correspondent pas à ceux qui ont été commandés et facturés. Il précise que ces châssis ne correspondent pas aux documents contractuels, que ce soit au niveau de la référence catalogue des châssis posés que de leur pose qui n'est pas conforme au plan d'architecte ainsi qu'au devis Ld Couverture. M. [O] a posé des châssis à rotation au lieu et place des châssis à projection contractuellement prévus.

La cause des désordres réside dans le non-respect par M. [O] du devis et du plan établi par l'architecte.

L'expert a prévu au titre des travaux de reprise, de déposer une partie de la toiture et des châssis de toit des velux existants au nombre de quatre unités, de modifier la charpente existante, de refaire de nouveaux chevêtres, de fournir et de poser les bons châssis à la bonne hauteur et de reprendre les parties de toiture déposées avec complément d'ardoises neuves.

L'expert chiffre le coût des travaux de reprise à la somme de 9 081,29 euros TTC.

M. [O] a ainsi manqué à ses obligations contractuelles en posant des Velux non conformes à ceux qui ont été commandés. Il a donc engagé sa responsabilité à ce titre.

Au total, les manquements contractuels de M. [O] justifient la réalisation de travaux de reprise dont le coût total s'élève à 40 256,47 euros TTC.

M. [O] sera donc condamné payer à M. [N] et M. [W] la somme de 40256,47 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Par ailleurs, M. [W] et M. [N] sollicitent la somme de 10 000 euros à titre de privation de 'jouissance globale' au titre des désordres subis, ainsi qu'au titre des travaux de reprise à venir.

Toutefois, ce préjudice de jouissance en lien avec les travaux est un préjudice futur. Or, il n'est pas certain que les maîtres de l'ouvrage fassent effectivement réaliser les travaux, en particulier ceux afférents aux non-conformités contractuelles qui constituent les principaux désordres à reprendre et qui n'affectent la jouissance de l'ouvrage que marginalement.

En revanche, comme indiqué précédemment, les désordres ont causé un préjudice de jouissance depuis l'achèvement des travaux (c'est à dire 2014) même s'il est limité.

Compte tenu de la nature des désordres et de la période écoulée, ce préjudice sera évalué à 1500 euros.

M. [O] sera condamné à payer à M. [W] et M. [N] la somme de 1500 euros au titre du préjudice de jouissance.

Ces derniers seront condamnés à payer à M. [O] la somme de 11113,71 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 18 juillet 2016.

La compensation des créances réciproques sera ordonnée.

M. [O] sollicite un délai de paiement afin qu'ils puisse s'acquitter des sommes dues à M. [W] et à M. [N] par 23 mensualités de 250 euros et le solde lors de la 24ème mensualité.

Le montant des condamnations prononcées contre M. [O] (dont les frais d'expertise et frais irrépétibles) même après compensation avec sa propre créance, est proche de la moitié de son chiffre d'affaires annuel.

Il convient en conséquence de faire droit à sa demande de délais de paiement en disant qu'il pourra se libérer de sa dette par mensualités de 500 euros exigibles le 5 de chaque mois pendant un délai de deux ans.

Il sera précisé que la première mensualité sera exigible le 5 du mois suivant la signification de l'arrêt et la dernière qui portera sur le solde augmenté des intérêts échus le 31 mai 2024.

Enfin, à défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance, la totalité du solde de la dette sera immédiatement exigible.

Les frais d'expertise amiables relèvent des frais irrépétibles et non des dépens.

Succombant, M. [O] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel (dont les frais d'expertise de M. [E].)

Il est enfin équitable de condamner M. [O] à payer à M. [W] et M. [N] la somme de 3500 euros au titre des frais irrépétibles (dont les frais d'expertise amiable qui était nécessaire pour établir les désordres et justifier en cas de contestation que soit ordonnée une expertise judiciaire).

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe ; 

Vu l'arrêt de la cour d'appel de Caen du 21 juillet 2020 ayant annulé le jugement déféré ;

Dit que le présent arrêt se substitue à l'ordonnance d'injonction de payer du 5 décembre 2016 ;

Condamne M. [O] à payer à M. [W] et M. [N] les sommes de 40 256, 47 euros au titre des travaux de reprise et 1500 euros pour le préjudice de jouissance, et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Condamne M. [W] et M. [N] à payer à M. [O] la somme de 11 113, 71 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2016 au titre du solde de facture ;

Ordonne la compensation entre ces créances réciproques ;

Autorise M. [O] à se libérer de sa dette (en ce inclus les dépens et frais irrépétibles) par mensualités de 500 euros exigibles le 5 de chaque mois ;

Dit que la première mensualité sera exigible le 5 du mois suivant la signification de l'arrêt et que la dernière mensualité portant sur le solde et les intérêts échus sera exigible le 31 mai 2024 ;

Dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance, la totalité de la dette redeviendra immédiatement exigible sans aucune formalité ;

Rappelle que pendant le cours des délais de paiement ainsi accordés, les majorations d'intérêts et pénalités de retard cessent d'être dues et que les procédures d'exécution sont suspendues ;

Condamne M. [O] à payer les dépens de première instance et d'appel dont les frais d'expertise judiciaire;

Condamne M. [O] à payer à M. [W] et M. [N] la somme de 3500 euros au titre des frais irrépétibles (en ce inclus les frais d'expertise amiable [C] de 1150,92 euros)

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires comme précisé aux motifs.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

M. COLLETG. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/00077
Date de la décision : 31/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-31;18.00077 ?
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