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25/01/2010 | FRANCE | N°09/00774

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 25 janvier 2010, 09/00774


RG N° 09/00774



N° Minute :















































































































Notifié le :

Grosse délivrée le :







AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

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COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU LUNDI 25 JANVIER 2010







Appel d'une décision (N° RG 08/00301)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de VALENCE

en date du 15 janvier 2009

suivant déclaration d'appel du 17 Février 2009



APPELANT :



Monsieur [V] [B]

[Adresse 11]

[Localité 3]



Représenté par Me Christiane IMBERT-GARGIULO (avocat au barreau d'AVIGNON)



INTIMES :



L'E.A.R.L. LES SERRES DU PONT ...

RG N° 09/00774

N° Minute :

Notifié le :

Grosse délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU LUNDI 25 JANVIER 2010

Appel d'une décision (N° RG 08/00301)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de VALENCE

en date du 15 janvier 2009

suivant déclaration d'appel du 17 Février 2009

APPELANT :

Monsieur [V] [B]

[Adresse 11]

[Localité 3]

Représenté par Me Christiane IMBERT-GARGIULO (avocat au barreau d'AVIGNON)

INTIMES :

L'E.A.R.L. LES SERRES DU PONT prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

L'E.A.R.L. SUD ALLIANCE prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 4]

Maître [Z] [W]en qualité d'administrateur judiciaire de l'EARL SERRES DU PONT et de l'EARL SUD ALLIANCE

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Maître [C] [T] en qualité de mandataire judiciaire de l'EARL SERRES DU PONT et de l'EARL SUD ALLIANCE

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Non comparants, ni représentés à l'audience,

L'AGS - C.G.E.A. D'[Localité 10]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 6]

Représentée par la SCP FOLCO - TOURRETTE - BLANC (avocats au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Chantal FERBUS, Adjoint administratif.

DEBATS :

A l'audience publique du 07 Décembre 2009,

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 25 Janvier 2010.

L'arrêt a été rendu le 25 Janvier 2010.

RG 0900774 DD

Suite à la liquidation judiciaire de la société Primasud dont il était le gérant, M. [V] [B] a été engagé le 1er décembre 2006 en qualité de technicien, directeur d'exploitation par le repreneur des actifs, l'EARL Sud Alliance, propriété de son cousin M. [H] qui en était le gérant.

M. [B] a été mis à pied et convoqué le 17 décembre 2007 à un entretien préalable en vue d'un licenciement prévu le 26 décembre suivant et a reçu en main propre une lettre de licenciement le 28 décembre avant de signer un protocole d'accord.

Le Conseil de Prud'hommes de Valence a été saisi le 7 mai 2008 par M. [B] qui a demandé que soit prononcée la nullité de l'accord intervenu le 28 décembre 2007 et des dommages et intérêts pour non respect de la procédure, licenciement sans cause réelle et sérieuse et préjudice distinct, absence de mention du DIF.

Le conseil de prud'hommes a rendu sa décision le 15 janvier 2009. Il a débouté M. [B] de toutes ses demandes.

La Cour est saisie par l'appel interjeté le 17/02/2009 par M. [B], le jugement lui ayant été notifié le 31/01/2009.

Demandes et moyens des parties

M. [B], appelant, demande à la cour de réformer le jugement entrepris, de juger que l'accord du 28 décembre 2007 est nul et que le licenciement est irrégulier, en conséquence de condamner l'EARL Sud Alliance à lui payer les sommes suivantes :

* 3766,36 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure,

* 40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct,

* 7532,72 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 753,27 euros au titre des congés payés afférents,

* 3766,36 euros pour absence de mention du DIF,

* 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

De déclarer la décision opposable à l'AGS qui devra relever et garantir l'EARL Sud Alliance des condamnations prononcées contre elle,

D'ordonner la remise des documents salariaux rectifiés, au besoin sous astreinte.

M. [B] expose par conclusions régulièrement communiquées, déposées et développées oralement à l'audience que :

1) l'accord du 28/12/2007 a été signé alors qu'il existait un litige entre les parties (la lettre de licenciement en est l'aveu) et que c'est donc une transaction destinée à régler les conséquences du litige existant entre les parties, transaction qui ne répond pas aux critères de validité alors qu'il existe des violences et des pressions et qu'il n'y a pas de concessions réciproques,

2) cet acte est donc nul et en conséquence le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et la procédure est irrégulière, la lettre de licenciement ayant été remise en main propre,

2-2) en concluant que cet accord serait un moindre mal puisque s'il ne l'avait pas signé, M. [B] aurait été licencié pour faute grave, l'employeur avoue que la transaction a été signée avant la lettre de licenciement,

3) l'entretien préalable en vue d'un licenciement (qui n'a pas eu lieu) ayant été programmé le 26 décembre, le licenciement, qui doit être notifié au moins deux jours francs après, ne pouvait être notifié avant le 29 décembre, irrégularité de forme qui ouvre droit à des dommages et intérêts qui se cumulent avec les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (L 1235-14-3),

4) le licenciement est sans cause réelle et sérieuse deux des griefs invoqués devant la cour ne figurant pas dans la lettre de licenciement et le grief de mésentente ne concernant pas M. [B] mais sa femme et sa fille,

5) il existe un préjudice distinct en raison des circonstances ayant entouré le licenciement,

6) si le licenciement est jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse les autres droits salariaux de M. [B] doivent être respectés : préavis, DIF,

L'EARL Sud Alliance, Me [G], administrateur judiciaire et Me [T], ès qualité, intimés, demandent à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de toutes ses demandes, offrant subsidiairement de payer la somme de 315,14 euros au titre du DIF et demande la condamnation de M. [B] à lui payer la somme de 2500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les dépens.

L'EARL Sud Alliance, Me [G], administrateur judiciaire et Me [T], ès qualité, exposent par conclusions régulièrement communiquées, déposées, et développées oralement à l'audience que :

1) l'accord intervenu le 28 décembre 2007 est valide s'agissant d'une transaction portant sur l'objet de la rupture (licenciement sans cause réelle et sérieuse et non licenciement pour faute grave),

2) si la validité de l'accord n'est pas reconnue, la procédure est régulière, M. [B] ayant bien été convoqué à un entretien préalable en vue d'un licenciement par convocation remise en main propre le 17/12/2007,

2-2) l'absence de mention du DIF ouvre droit non pas à l'indemnité prévue par l'article L 1235-2 du code du travail mais doit ici être réparée par l'allocation de l'équivalent de 20 h de salaire,

2-3) la rupture est fondée et en tout état de cause la demande est indécente.

L'AGS CGEA d'Annecy fait assomption de cause avec le liquidateur et rappelle les conditions et limites de sa garantie.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;

Sur la rupture du contrat de travail :

Attendu que figurent aux dossiers des deux parties la convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute prévu le 26 décembre 2006 remise en main propre le 17 décembre 2007, la notification d'un licenciement aux termes d'une lettre remise en main propre le 28 décembre 2007 et enfin un protocole d'accord daté du 28 décembre 2007 ;

Attendu que M. [B] affirme avoir signé ces trois documents le 28 décembre 2007 ; qu'il n'en rapporte pas la preuve ;

Attendu qu'une rupture d'un commun accord ne peut intervenir qu'en l'absence de contentieux existant entre l'employeur et son salarié au moment de la rupture ; que la procédure de licenciement mise en 'uvre ici n'autorisait pas les parties à utiliser ce mode spécifique de rupture du contrat de travail ;

Attendu que l'acte signé le 28 décembre 2007 doit s'analyser en un accord transactionnel ;

Attendu qu'une transaction n'est licite que si elle est postérieure au licenciement puisque ce n'est qu'à partir du moment où le licenciement a été prononcé que le salarié à la connaissance complète de ses droits et est donc en mesure de transiger en toute connaissance de cause ;

Attendu que la notification du licenciement par remise en main propre de la lettre de licenciement est valable puisque l'envoi en lettre recommandée avec demande d'accusé de réception n'a pour objet que de donner date certaine au licenciement intervenu et ne constitue donc pas une formalité substantielle du licenciement ;

Attendu qu'il n'existe aucun moyen en l'espèce de savoir dans quel ordre ont été signés les deux actes datés du 28 décembre 2007 de sorte qu'il n'est pas établi que la transaction a été conclue après la notification du licenciement ; qu'il convient donc de juger que cette transaction est nulle ; qu'elle ne contient en outre aucune concession de la part de l'employeur ;

Attendu que la lettre de licenciement a été remise à M. [B] sans que le délai de 2 jours francs prévu par l'article L 1232-6 du code du travail ; qu'il s'agit d'une irrégularité de forme qui doit être réparée ; qu'il y a lieu d'allouer la somme de 500 euros en réparation du préjudice subi ;

Attendu que le licenciement de M. [B] est intervenu aux termes de la lettre du 28 décembre 2007 pour les deux motifs suivants :

« 1°) Vous n'accomplissez pas les tâches qui vous incombent.

Ainsi, les commandes ne sont pas passées en temps et en heure, ce qui entraîne de nombreuses difficultés, notamment pour le dé-blanchiment des serres ou l'avancement des cultures (gaines CO2 manquantes).

Les données informatiques pour la gestion de la serre ne sont pas saisies correctement et vous ne prenez pas non plus la peine d'informer la gérance sur le suivi des cultures et les problèmes liés aux traitements de celles-ci.

Enfin, vous ne procédez pas à une inspection régulière des serres pour suivre les cultures.

Ce manque de rigueur, inacceptable au regard des missions qui sont les vôtres, nuit à la bonne marche de l'entreprise.

2°) Vous n'assurez pas une bonne gestion du personnel.

Vos subordonnés se sont plaints des difficultés qu'ils rencontrent avec vous.

Non seulement ces derniers sont trop souvent livrés à eux-mêmes, mais encore vous adoptez vis-à-vis d'eux une attitude hautaine et désagréable chaque fois qu'ils viennent vous signaler des problèmes ou vous demander des instructions.

De surcroît, vous semez la zizanie au niveau des salaires entre les permanents, les saisonniers et les occasionnels créant une ambiance de travail détestable qui n'est pas sans incidence sur le fonctionnement de l'entreprise. » ;

Attendu que la lettre de licenciement fixe les limites du litige de sorte que les motifs qui n'y sont pas énoncés ne peuvent être examinés ;

Attendu que le premier motif n'est pas étayé ; qu'il ne peut donc justifier un licenciement ;

Attendu que le second motif est établi par les témoignages tant du propre fils de M. [B], [X] qui atteste que « M. [B] [V] n'ayant pas la volonté de travailler avec M. [H] du fait de sa jalousie et du nouveau fonctionnement de l'entreprise, il commença à délaisser son travail, arriver en retard et par finir à ne plus s'occuper de la serre » ; que M. [Y] [K] confirme cet état de fait « l'orgueil, la jalousie, la méchanceté et la nostalgie de ne plus diriger « seuls » a conduit ces personnes (les consorts [B]) à changer du jour au lendemain' : ils se sont isolés tout seuls et veulent maintenant entraîner toute l'entreprise dans leur déchéance » ; que Mme [A] [L] atteste « Mme [B] a dit à M. [H] qu'il fallait partager la vente de tomates vendues au noir, ce qu'il a refusé car il faut sauver la société et mettre l'argent à la banque. M. [B] et Mme [B] ont demandé à Mme [O] responsable du conditionnement de renvoyer tous les clients pour l'achat de tomates et de les laisser pourrir » ; qu'il résulte en effet de plusieurs témoignages de salariés qu'il existait une pratique massive de vente au noir des tomates (Mme [E], Mme [N], Mme [S], Mme [O]) ;

Que ces témoignages établissement les difficultés rencontrées par les salariés avec M. [B] ; que ces difficultés sont d'une gravité suffisantes pour fonder le licenciement pour faute de M. [B] ;

Attendu que le préavis a été payé avec dispense de l'effectuer ;

Attendu que l'absence de mention du DIF dans la lettre de licenciement sera réparée par l'allocation de la somme de 350 euros ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour après en avoir délibéré conformément à la loi, contradictoirement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Constate que la transaction signée par les deux parties est nulle ;

Dit que le licenciement de M. [B] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Condamne l'EARL Sud Alliance à payer à M. [B] les sommes de :

* 500 euros au titre de l'irrégularité de procédure,

* 350 euros au titre du DIF non mentionné dans la lettre de licenciement ;

Y ajoutant,

Déclare le présent arrêt opposable à l=AGS gérée par le CGEA d=Annecy,

Dit que la garantie de l'AGS-CGEA d'[Localité 10] interviendra dans les conditions des articles L 3253-14 et -20 du Code du travail, dans la limite des plafonds légaux, les intérêts de droit étant arrêtés au jour du jugement déclaratif,

Rappelle que cette obligation n=est pas applicable pour les sommes allouées sur le fondement de l=article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Constate que l'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne l'EARL Sud Alliance aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Monsieur SEGUY, Conseiller pour le président empêché, et par Madame VERDAN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/00774
Date de la décision : 25/01/2010

Références :

Cour d'appel de Grenoble, arrêt n°09/00774


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-25;09.00774 ?
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