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30/05/2013 | FRANCE | N°10/19989

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 30 mai 2013, 10/19989


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 30 MAI 2013



(n° 11 , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19989



Décision déférée à la Cour : Arrêt du 17 avril 2008 - Cour d'Appel de PARIS - RG n° 04/22696





DEMANDEUR A LA TIERCE OPPOSITION



Monsieur [F] [D]

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté et

assisté de Me Nathalie ORPHELIN BARBERON (avocat au barreau de PARIS, toque : B 361)



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/018497 du 08/07/2009 accordée par le bureau d'aide juridictio...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 30 MAI 2013

(n° 11 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19989

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 17 avril 2008 - Cour d'Appel de PARIS - RG n° 04/22696

DEMANDEUR A LA TIERCE OPPOSITION

Monsieur [F] [D]

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté et assisté de Me Nathalie ORPHELIN BARBERON (avocat au barreau de PARIS, toque : B 361)

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/018497 du 08/07/2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

DÉFENDERESSES A LA TIERCE OPPOSITION

SAS TRIOPLAST SMS venant aux droits de la SA SMS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

Ayant son siège social

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 5]

Représentée par Me Chantal-Rodene BODIN CASALIS (avocat au barreau de PARIS, toque : L0066)

Assistée de Me Domitille POZZANA (avocat au barreau de PARIS, toque : P0581)

SOCIÉTÉ CIVILE GFA DU DOMAINE DE VAUVRETTE prise en la personne de ses représentants légaux

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

SCP [U] prise en la personne de son gérant Maître [U] ès qualité de mandataire liquidateur de la Société civile GFA DU DOMAINE DE VAUVRETTE

Ayant son siège social

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentées par la SCP Jeanne BAECHLIN en la personne de Me Jeanne BAECHLIN (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034)

Assistées de Me Benoît DESCOURS (avocat au barreau de PARIS, toque : T04)

SAS SOUFFLET AGRICULTURE, prise en la personne de son représentant légal et venant aux droits de la Société S.E.R.A.G.R.I.

Ayant son siège social

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Mireille GARNIER de la SCP MIREILLE GARNIER (avocats au barreau de PARIS, toque : J136)

Assistée de Me Sylvain RIEUNEAU (avocat au barreau de PARIS, toque : P57)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 mars 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Patricia POMONTI, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire

Madame Valérie MICHEL- AMSELLEM, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Guillaume LE FORESTIER

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS CONSTANTS ET PROCÉDURE

La société civile [Adresse 3] (la SC GFA) exerce une activité céréalière et de production de lait de chèvre pour la fabrication de fromages. Dans le cadre de cette activité, elle cultive et récolte le maïs qui, après l'ensilage, est destiné à l'alimentation des chèvres pendant la période hivernale.

Entre le 31 octobre et le 2 novembre 1997, la SC GFA a procédé à l'ensilage de 510 tonnes de maïs en réalisant des silos selon une technique particulière, dite silo taupinière. Ce type d'ensilage est composé d'un mélange de maïs et de pulpe de betterave surpressée, tassé par un tracteur afin d'évacuer l'air. Le silo, ainsi constitué, est ensuite recouvert d'une bâche, elle-même recouverte de terre.

Le 1er novembre 1997, le fils du gérant de la SC GFA, Monsieur [F] [D], s'est approvisionné en bâches auprès de la société Seragri pour pouvoir recouvrir les silos et, le 4 novembre 1997, il a constaté des fissures les affectant, ce qu'il a déclaré le même jour à la gendarmerie, soupçonnant dans un premier temps un acte de vandalisme.

Des mesures conservatoires ont été prises dans un second temps pour tenter de préserver le maïs, mais en vain . Monsieur [D] a donc dû acheter une alimentation de substitution pour le cheptel caprin. Au début de l'année 1998, la SC GFA a perdu la totalité du cheptel.

Les 20 janvier, 20 et 26 février 1998, une expertise amiable a été diligentée à la suite de la déclaration de sinistre effectuée par Monsieur [D] auprès de son assureur, la compagnie AXA. Cette expertise n'ayant pas été suivie de proposition d'indemnisation, la SC GFA a obtenu, par une ordonnance de référé du 27 mars 1998, la désignation d'un expert, Monsieur [T] qui a déposé son rapport le 10 octobre 1998.

La SC GFA a introduit une action en référé pour obtenir une nouvelle expertise dont elle a été déboutée. Elle a ensuite saisi le tribunal de commerce d'Auxerre aux fins d'obtenir l'annulation du rapport d'expertise et, à défaut, la condamnation au paiement de dommages et intérêts du revendeur des bâches, la société Seragri qui deviendra la société Soufflet Agriculture, et du fabricant des bâches, la société SMS qui deviendra la société Trioplast SMS. Le tribunal de commerce d'Auxerre a rendu un jugement le 6 mars 2000 qui a déclaré valable l'assignation délivrée le 3 juin 1999 à la société Seragri, rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise de M. [T] et débouté la SC GFA de ses demandes.

La SC GFA a interjeté appel de ce jugement le 17 avril 2000. Elle a également saisi le conseiller de la mise en état d'une demande tendant à l'annulation du rapport et à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise, dont elle a été déboutée.

La SC GFA a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Bourges du 22 octobre 2002. L'instance d'appel a été reprise par le liquidateur judiciaire de la SC GFA, la SCP [Y] qui deviendra la SCP [U].

Par un arrêt en date du 17 avril 2008 la Cour d'appel de Paris a :

- déclaré l'appel recevable,

- confirmé le jugement par substitution de motifs et, y ajoutant sur les dépens,

- débouté la SCP [Y], ès-qualités de mandataire judiciaire et de liquidateur du GFA de Vauvrette de toutes ses demandes, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCP [Y], ès-qualités de mandataire judiciaire et de liquidateur du GFA à payer aux sociétés Seragri et Trioplast SMS une indemnité de 5.000 € chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu la fusion-absorption intervenue entre la société Soufflet Agriculture et la société Seragri en date du 1er juin 2004.

Vu les assignations aux fins de tierce opposition délivrées à la demande de Monsieur [F] [D] à la société Trioplast SMS et à la SCP [U],ès-qualités, les 13 et 15 septembre 2010 et aux sociétés Soufflet Agriculture et Seragri le 14 janvier 2011 et leur jonction sous le même numéro.

Vu les dernières conclusions signifiées le 27 février 2013 par Monsieur [F] [D] par lesquelles il est demandé à la Cour de:

- recevoir Monsieur [F] [D] en ses demandes, en sa qualité de tiers opposant à l'arrêt ;

en conséquence,

- rétracter cet arrêt en ce qu'il a :

- débouté la SCP [Y], ès-qualités de mandataire judiciaire et de liquidateur du GFA de toutes ses demandes, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SCP [Y] ès qualités de mandataire judiciaire et de liquidateur du GFA à payer aux sociétés Seragri et Trioplast SMS une indemnité de 5.000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- au contraire, dire et juger que le rapport de Monsieur l'Expert [T] comporte un certain nombre d'omissions et d'erreurs d'une gravité telle, qu'elles ne permettent pas de valider les conclusions de cet Expert.

en conséquence,

- ordonner une nouvelle expertise reprenant les termes de la mission confiée à Monsieur [T], par tout expert ou technicien que la Cour jugera compétent, afin de déterminer de manière scientifique et impartiale la cause des fissures survenues sur les bâches posées par Monsieur [D] sur les silos appartenant au GFA ;

à titre subsidiaire,

- dire et juger que les vices de fabrication affectant les bâches fabriquées par la société Seragri et leur vente par la société Trioplast SMS, alors qu'elles provenaient manifestement d'un lot d'invendus de plus d'un an, au GFA, sont à l'origine des fissures ayant affecté ces bâches après leur pose sur les silos ;

- dire et juger que ces fissures sont la cause exclusive de la perte de la récolte, puis du cheptel caprin du GFA et, à terme, de la mise en liquidation de cette société ;

- dire et juger qu'outre la SC GFA, Monsieur [D] a subi un préjudice financier évaluable à un montant de un million euros, à parfaire ;

en conséquence,

- condamner solidairement la société Soufflet Agriculture, venant aux droits de la société Seragri et la société Trioplast SMS à payer à Monsieur [D], en réparation du préjudice financier par lui subi, la somme de 1.650.000 d'euros ;

- condamner solidairement la société Soufflet Agriculture, venant aux droits de la société Seragri et la société Trioplast SMS à payer à Monsieur [D], en réparation du préjudice moral par lui subi, la somme de 200.000 euros ;

en tout état de cause,

- condamner solidairement la société Soufflet Agriculture, venant aux droits de la société Seragri et la société Trioplast SMS à payer à Monsieur [D] la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi sur l'Aide juridictionnelle.

M. [D] soutient tout d'abord qu'il a intérêt à agir en tierce opposition en ce qu'il n'a à aucun moment été partie à la procédure d'appel qui a donné lieu à l'arrêt du 17 avril 2008, ni été représenté à ce titre, et que l'existence d'une communauté d'intérêt entre lui et la SC GFA n'exclut aucunement la tierce opposition formée contre ladite décision qui porte gravement atteinte à ses intérêts.

M. [D] retient, d'une part, que le rapport d'expertise sur lequel l'arrêt est fondé est erroné et contestable en ce que les constatations présentent des contradictions et, d'autre part, que la Cour n'a à aucun moment pris sérieusement en compte ses anomalies pourtant patentes et particulièrement préjudiciables à la SC GFA puisque l'expert a considéré, de manière subjective et partiale, qu'il aurait dû prévenir son fournisseur de bâches, à savoir la société SMS, et non la gendarmerie après avoir découvert les fissures.

Il estime qu'il avait parfaitement le droit de craindre un acte de malveillance alors qu'il compte plusieurs années de pratique de cette technique d'ensilage, sans jamais avoir subi aucun sinistre ni problème particulier. Il ajoute que le fait que les animaux aient pu causé les déchirures constatées sur les bâches n'a jamais été évoqué.

Il considère ensuite que l'expert a connu pour la première fois dans cette affaire d'une telle technique d'ensilage et qu'il n'est donc pas déraisonnable de s'interroger sur sa compétence pour apprécier l'utilisation des bâches. Il affirme que celui-ci a commis une erreur grossière de calcul quant à la pluviométrie qui aurait pu entrainer la rupture des bâches, que ses conclusions sont parfaitement incohérentes quant au défaut de fabrication des bâches, en ce qu'il a changé de position entre ses premières conclusions et le rapport définitif, et, qu'en tout état de cause, son rapport ne saurait faire foi.

Toutefois, dans l'hypothèse où la Cour refuserait une nouvelle expertise, il fait valoir que la responsabilité civile solidaire de la société Seragri, aux droits de laquelle vient la société Soufflet Agriculture, et de la société Trioplast SMS devrait être engagée car il existe un lien de causalité direct entre le vice caché des bâches, la perte de la récolte, l'acquisition de nourriture de substitution, le décès du cheptel caprin puis la liquidation judiciaire du GFA.

Il souligne enfin le préjudice subi par la SC GFA créée et financée par lui, de sorte qu'il a nécessairement également subi un préjudice financier et moral personnel direct, actuel et certain du fait des agissements des sociétés Trioplast SMS et Soufflet Agriculture.

Vu les dernières conclusions signifiées le 28 mars 2012 par la SCP [U], ès-qualités de liquidateur de la SC GFA, par lesquelles il est demandé à la Cour de:

- dire et juger la SCP [U], prise en la personne de Maître [U] ès-qualités de mandataire liquidateur du GFA, recevable et bien fondée en ses demandes.

en conséquence, y faisant droit,

- recevoir Monsieur [F] [D] en ses demandes, en sa qualité de tiers opposant à l'arrêt rendu le 17 avril 2008 par la 5ème Chambre, Section B de la Cour d'Appel de Paris.

En conséquence,

- prononcer la rétractation dudit arrêt.

Y substituant, à titre principal,

- dire et juger que le rapport de Monsieur l'expert [T] comporte un certain nombre d'omissions et d'erreurs d'une gravité telle, qu'elles ne permettent pas de valider les conclusions de cet expert ;

- dire et juger que les vices de fabrication affectant les bâches fabriquées par la société Seragri (devenue la société Soufflet Agriculture) et leur vente au GFA par la société SMS (devenue Trioplast SMS), alors qu'elles provenaient manifestement d'un lot d'invendus depuis plus d'un an, sont à l'origine des fissures ayant affecté ces bâches après leur pose sur les silos ;

- dire et juger que ces fissures sont la cause exclusive de la perte de la récolte, puis du cheptel du GFA et, à terme de la mise en liquidation judiciaire de cette société ;

- dire et juger que la SC GFA a subi un préjudice financier évaluable à la somme de 3.186.645,33 euros, sauf à parfaire ;

- En conséquence, condamner solidairement la société Soufflet Agriculture, venue aux droits de la société Seragri, et la société Trioplast SMS, venue aux droits de la société SMS, à verser à la SCP [U], prise en la personne de Maître [U], ès-qualité de mandataire liquidateur du GFA, la somme de 3.186.645,33 euros.

A titre subsidiaire,

- ordonner une nouvelle expertise qui sera confiée à un expert en matières plastiques, avec pour mission:

-d'entendre les parties contradictoirement et tous sachants eux-mêmes spécialistes en matière plastique ;

-de se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission ;

-de prendre connaissance des rapports d'analyses scientifiques réalisés ;

-de procéder à leur explicitation ;

-de visiter les lieux appartenant au GFA ;

-de décrire les désordres allégués ;

-de donner son avis sur la défectuosité des bâches fournies par la société SREAGRI, aux droits de laquelle est venue la société Soufflet Agriculture, et les responsabilités encourues;

-d'analyser les bâches litigieuses et de déterminer si celles-ci étaient atteintes, avant la vente, d'un vice qui a conduit à leur déchirure ;

-de dire si les vices affectant les bâches ont conduit à la détérioration de la récolte de maïs effectuée par la SC GFA en 1997.

- ordonner en complément une expertise qui sera confiée à un expert agricole et comptable, autre que Monsieur [T], afin :

-de prendre connaissance des pièces du dossier et notamment du rapport de Monsieur [V];

-de chiffrer le prix de la nourriture de remplacement du cheptel caprin ;

-de constater la chute de la production laitière caprine et la baisse de production qui s'ensuit, avec, si nécessaire, recours à un vétérinaire ;

-de manière générale, de chiffrer tous les chefs de préjudice du GFA ;

-de répondre à touts dires des parties.

En toute hypothèse,

- condamner solidairement les sociétés Soufflet Agriculture et Trioplast SMS à verser à Maître [U], ès qualité, la somme de 20.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCP [U], ès-qualités, soutient tout d'abord que la tierce opposition est recevable en ce que M. [D] a parfaitement démontré son intérêt à agir.

Sur le fond, elle fait valoir que le rapport d'expertise de Monsieur [T] ne doit pas lier la Cour en ce qu'il contient des erreurs flagrantes et est en contradiction avec les autres rapports produits dans la procédure. Elle ajoute que les différentes expertises ont parfaitement établi que l'origine du sinistre résultait d'un vice de fabrication des bâches et qu'aucun reproche ne pouvait être adressé à M. [D].

Elle affirme que la responsabilité civile des sociétés Trioplast SMS et Soufflet Agriculture doit être retenue car l'existence d'un vice caché et le lien de causalité entre la rupture des bâches viciées et la disparition du cheptel de GFA ont été établis et que les différentes pertes subies par la SC GFA à la suite de ce sinistre l'ont conduite à la liquidation judiciaire.

A tire subsidiaire, elle estime que la demande d'une nouvelle expertise par M. [D] doit être accueillie.

Vu les dernières conclusions signifiées le 5 mars 2013 par la société Soufflet Agriculture, venue aux droits de la société Seragri, par lesquelles elle demande à la Cour de:

A titre liminaire :

- donner acte à la société Soufflet Agriculture qu'elle vient aux droits de la société Seragri.

Au principal :

- dire irrecevable la tierce opposition formée par Monsieur [D] à l'encontre de l'arrêt d'appel du 17 avril 2008

- par suite, dire n'y avoir lieu à rétracter ledit arrêt d'appel ni à statuer sur les demandes formées par Monsieur [D].

- dire que l'arrêt du 17 avril 2008 dispose, à l'égard du GFA et de son liquidateur judiciaire la SCP [U], de l'autorité de la chose jugée.

- en conséquence, dire irrecevables les prétentions élevées par la SCP [U] ès qualités de liquidateur judiciaire du GFA.

Subsidiairement :

- dire la tierce opposition formée par Monsieur [D] mal fondée.

- dire irrecevables toutes les demandes de Monsieur [D], qu'il s'agisse de sa demande principale d'expertise judiciaire ou de ses demandes subsidiaires de condamnations pécuniaires.

- dire mal fondées les prétentions de la SCP [U] ès qualités.

- en conséquence, dire n'y avoir lieu à rétractation de l'arrêt d'appel du 17 avril 2008.

- débouter Monsieur [D] et la SCP [U] ès qualités de toutes leurs demandes.

En toute hypothèse :

- dire irrecevable, à défaut mal fondée, la demande de garantie formée par la société Trioplast SMS à l'encontre de la société Soufflet Agriculture.

- dire et juger que la société Trioplast SMS devra relever et garantir intégralement la société Soufflet Agriculture de toutes condamnations éventuellement mises à sa charge au profit de Monsieur [D] et ou de la SCP [U] ès qualités.

- condamner Monsieur [D] ou tout autre succombant à payer à la société Soufflet Agriculture une indemnité de 15.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Soufflet Agriculture soutient que la tierce opposition de M. [D] est irrecevable en ce qu'il ne peut être considéré comme un tiers à l'instance en sa qualité d'associé, de créancier, de caution et de gérant de la SC GFA et qu'il a été représenté dans la procédure d'appel. Elle retient que la tierce opposition est également irrecevable car aucune disposition du dispositif de l'arrêt rendu ne faisait expressément grief à Monsieur [D].

Elle considère que la demande principale d'une nouvelle expertise n'est pas recevable de même que la demande de dommages et intérêts formulée à titre subsidiaire car ces demandes sont nouvelles et prescrites. Elle ajoute que les prétentions de la SCP [U], ès-qualités, sont irrecevables parce que l'arrêt rendu par la Cour d'appel a autorité de chose jugée à son égard dans la mesure où elle était partie à l'instance d'appel.

Sur le fond, la société Soufflet Agriculture affirme que l'expert a parfaitement accompli sa mission, dans le respect du principe du contradictoire, et que son rapport, n'établissant aucune défectuosité des bâches, n'était pas erroné alors, qu'au contraire, le rapport produit par M. [D] doit être écarté.

A titre subsidiaire, elle estime que M. [D] n'a pas rapporté la preuve du lien de causalité entre les bâches d'ensilage et le sinistre et entre le sinistre et la liquidation judiciaire de la SC GFA et n'a pas justifié du quantum du préjudice allégué. Selon elle, les demandes pécuniaires de la SCP [U], ès-qualités ne sont pas plus fondées.

Elle demande enfin la garantie de la société Trioplast SMS de toutes condamnations éventuelles à son encontre car elle n'est pas le fabricant des bâches et n'a commis aucune faute et précise que, par contre, la société Trioplast SMS n'est pas fondée à obtenir sa garantie car cette dernière n'avait aucun devoir de conseil.

Vu les dernières conclusions signifiées le 31 mai 2012 par la société Trioplast SMS par lesquelles il est demandé à la Cour de:

- dire et juger que les pièces visées à l'assignation en tierce-opposition en date du 13 septembre 2010 n'ont pas été communiquées ou communiquées tardivement

- dire et juger que Monsieur [D] est irrecevable en son action en tierce-opposition formée à l'encontre de l'arrêt d'appel du 17 avril 2008

- par suite, dire n'y avoir lieu à rétractation de l'arrêt d'appel ni à statuer sur les demandes formées par Monsieur [D]

- en conséquence, dire irrecevables les prétentions élevées par la SCP [U] ès qualité de liquidateur judiciaire du GFA

à titre principal

- dire et juger Monsieur [D] mal-fondé en l'ensemble de ses demandes, tant en principal, qu'en subsidiaire

- dire et juger la SCP [U] ès qualité de liquidateur judiciaire du GFA mal-fondé en l'ensemble de ses demandes, tant en principal, qu'en subsidiaire

en conséquence,

- dire n'y avoir lieu à rétractation de l'arrêt d'appel

- débouter Monsieur [D] et la SCP [U] ès qualité de liquidateur judiciaire du GFA de l'ensemble de leurs demandes, tant en principal, qu'en subsidiaire

à titre subsidiaire

- débouter la société Soufflet Agriculture des ses demandes à l'encontre de la société Trioplast SMS

- dire et juger que pour le cas où une condamnation viendrait, cependant, à être prononcée à l'encontre de la société Trioplast SMS, celle-ci en serait intégralement relevée et garantie par la société Soufflet Agriculture, revendeur des bâches

en conséquence,

- la condamner à garantir la société Trioplast SMS de l'ensemble de ses condamnations, tant en principal, frais et accessoires

en tout état de cause

- condamner Monsieur [D] ou tout autre succombant à verser à la société Trioplast SMS la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Trioplast SMS retient à titre liminaire que les demandes de M. [D] doivent être rejetées en ce qu'il n'a pas communiqué les pièces visées à l'assignation en temps utile compte tenu de l'ancienneté de l'acte introductif d'instance et de ses demandes tendant à la reconnaissance d'un préjudice propre et personnel.

Ensuite, elle soutient que l'action en tierce opposition de M. [D] est irrecevable en ce qu'il n'est pas tiers à la décision contestée, au regard de sa qualité de gérant, d'associé, de créancier et de caution de la SC GFA, mais aussi que sa demande principale en nullité du rapport et en désignation d'un nouvel expert est irrecevable de même que ses demandes subsidiaires en raison de leur caractère nouveau et de leur prescription.

Elle considère également, que les demandes de la SCP Axel et Ponroy, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SC GFA, sont irrecevables en ce que celles-ci sont parfaitement similaires à celles présentées précédemment devant la Cour, qui ont fait l'objet d'une décision de justice passée en force de chose jugée.

Sur le fond, la société Trioplast SMS soutient tout d'abord que le rapport de l'expert ne doit pas être écarté, en ce qu'il a respecté le principe du contradictoire, a accompli la mission qui lui était impartie en recherchant les causes des désordres et que celui-ci était parfaitement compétent, alors que le rapport non contradictoire produit par M. [D] ne peut être pris en considération.

Elle ajoute, que sa responsabilité ne peut être retenue sur la base du rapport de l'expert, que M. [D] n'a pas démontré l'existence d'un vice de fabrication des bâches et que les opérations d'expertise ont établi que les dommages résultaient de fautes qui lui sont imputables, de sorte que les demandes d'indemnisation formulées par ce dernier et la SCP Axel et Ponroy ne sont pas justifiées. Enfin, la société Trioplast SMS considère que la société Soufflet Agriculture a manqué à son devoir de conseil et devra la garantir en cas de condamnation.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, il y a lieu de relever que le bordereau des pièces de M. [D], demandeur à la tierce opposition, était annexé à l'assignation du 13 octobre 2010 délivrée aux sociétés Seragri et Trioplast SMS. Cette dernière soutient cependant qu'elles ne lui ont pas été communiquées. Pourtant le même bordereau a été systématiquement annexé aux différents jeux de conclusions déposés par M. [D]. En tout état de cause, la sommation de communiquer de la société Trioplast SMS date du 23 mai 2012 et son absence de réaction depuis lors laisse présumer qu'elle a bien eu communication des pièces litigieuses en réponse à cette sommation. Au demeurant, l'ensemble des pièces de M. [D] a à nouveau été communiqué le 27 février 2013, soit largement avant la clôture du 7 mars 2013, de sorte que la société Trioplast SMS ne peut arguer d'un non respect du principe du contradictoire, dès lors qu'elle a disposé d'un temps suffisant pour faire valoir ses arguments relatifs aux dites pièces, qui sont très anciennes et déjà connues des parties de longue date, puisque produites par la SC GFA. Elle doit donc être déboutée de sa demande de rejet des pièces communiquées par M. [D].

***

M. [D] a formé tierce opposition à l'encontre de l'arrêt contradictoirement rendu par la Cour d'appel de Paris le 17 avril 2008 entre, d'une part, la SC GFA du Domaine de Vauvrette, placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Bourges du 23 octobre 2002, qui a nommé la SCP [U] en qualité de liquidateur, d'autre part, la société Segrari, devenue Soufflet Agriculture, et la société SMS, devenue Trioplast SMS.

Cet arrêt a confirmé le jugement du tribunal de commerce d'Auxerre du 6 mars 2000 qui a notamment rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise de M. [T], homologué ce rapport et débouté la SC GFA du Domaine de Vauvrette de sa demande en indemnisation par les sociétés Seragri et Trioplast de son préjudice résultant de la rupture des bâches couvrant l'ensilage destiné à la nourriture du bétail, avec pour conséquence la perte de son cheptel.

Les sociétés Soufflet Agriculture et Trioplast SMS soulèvent l'irrecevabilité de la tierce opposition de M. [D].

Aux termes de l'article 582 du code de procédure civile, 'la tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l'attaque . Elle remet en question relativement à son auteur les points jugés qu'elle critique, pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit'.

L'article 583 du même code précise qu' 'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, à la condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque' et que 'les créanciers et autres ayants cause d'une partie peuvent toutefois former tierce opposition au jugement rendu en fraude de leurs droits ou s'ils invoquent des moyens qui leur sont propres'.

Celui qui demande la rétractation d'un arrêt doit donc avoir un intérêt à agir c'est à dire que la décision rendue à son insu doit lui faire grief. Cet intérêt doit être distinct de celui de l'une des parties ayant participé au procès car il ne s'agit pas de refaire le procès à l'identique pour obtenir un meilleur résultat.

Il doit également être un tiers, c'est à dire n'avoir été, ni partie, ni représenté à la décision attaquée. C'est aux sociétés Soufflet Agriculture et Trioplast SMS, qui soulèvent cette irrecevabilité, qu'il appartient de prouver que le tiers opposant, M. [D], était représenté dans l'instance d'origine.

Pour justifier son intérêt à agir M. [D] fait valoir :

- qu'il est gérant du GFA et qu'il encourt des sanctions édictées par les articles L 624-1 et suivants du code de commerce à l'encontre des dirigeants de personnes morales en liquidation judiciaire,

- qu'il est associé du GFA, qu'il répond indéfiniment des dettes sociales,

- qu'il est créancier du GFA,

- qu'il a vendu la totalité de ses biens personnels pour soutenir le GFA,

- qu'il a perdu la totalité des sommes investies dans le GFA,

- qu'il est caution personnelle de plusieurs emprunts contractés par le GFA ,

- qu'il est le mandataire ad hoc du GFA depuis le 8 juin 2006,

- qu'il n'a perçu aucune rémunération depuis 1991 en sa qualité de gérant, ni à titre de salaires, ni à titre de dividendes,

- qu'il a subi un préjudice moral,

- qu'il ne peut retrouver un emploi.

Il est constant que M. [D] ne peut se prévaloir, ni de sa qualité de gérant de la SC GFA, ni de celle d'associé, puisqu'à ces titres il était représenté par la société dans les instances dans lesquelles celle-ci a été partie. Il convient en effet de rappeler que l'assignation devant le tribunal de commerce d'Auxerre, de même que l'appel interjeté contre le jugement rendu par ce tribunal, ont été faits au nom de la SC GFA prise en la personne de ses représentants légaux, soit son gérant, M. [D]. En outre, celui-ci reconnaît que son préjudice financier résulte des sommes importantes qu'il a dû investir dans la SC GFA en sa qualité d'associé majoritaire.

Cependant, il est admis que l'associé d'une société civile, poursuivi en paiement des dettes sociales, dont il répond indéfiniment à proportion de sa part dans le capital social, est recevable à former tierce opposition à l'encontre de la décision condamnant la société au paiement, si cet associé invoque des moyens propres, que la société n'a pas soutenus. A l'inverse, est irrecevable la tierce opposition d'une partie qui se contente de reprendre les mêmes moyens et n'allègue aucun moyen propre qu'elle seule aurait pu envisager.

De même, l'associé qui a cautionné une dette de la société peut également, ès-qualités de caution, former tierce opposition, à condition de faire valoir un moyen personnel, c'est à dire un moyen que le débiteur ne pouvait pas lui-même invoquer. Il ne s'agit pas de réparer une erreur et de faire valoir un moyen qui aurait pu être avancé mais qui a été oublié, un moyen propre étant un moyen personnel à l'intéressé, que lui seul peut faire valoir.

En l'espèce, les moyens soulevés par la SC GFA pendant la procédure ayant abouti à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 avril 2008 et ceux soutenus par M. [D] à l'appui de sa tierce opposition sont strictement identiques. En effet, tout comme la SC GFA, il met en cause le rapport d'expertise de M. [T], demande une nouvelle expertise et sollicite, à titre subsidiaire, l'indemnisation de son préjudice par les sociétés Soufflet Agriculture et Trioplast SMS, ce préjudice étant la conséquence directe de celui qui est allégué par la SC GFA, avec les intérêts de laquelle les siens se confondent. Il ne fait état d'aucun moyen que lui seul aurait pu soulever et qui serait étranger à la débitrice principale, la SC GFA.

Par ailleurs, M. [D] ne prétend pas que l'arrêt attaqué aurait été rendu en fraude de ses droits. Il ne peut donc se prévaloir des deux seules exceptions à l'irrecevabilité de la tierce opposition formée par un créancier ou une caution. Il n'y a donc pas lieu de rétracter l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 avril 2008 et d'examiner les demandes présentées par M. [D].

Les sociétés Soufflet Agriculture et Trioplast SMS soulèvent également l'irrecevabilité des demandes de la SCP [U], ès-qualités de liquidateur de la SC GFA.

La SCP [U], ès-qualités, était partie à l'instance qui a abouti à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 avril 2008 qui a débouté la SC GFA de toutes ses demandes. Cet arrêt se trouve revêtu à l'égard de cette dernière de l'autorité de la chose jugée, ce qui lui interdit de le remettre en cause dans le cadre de la présente instance en tierce opposition, une partie à l'instance d'origine ne pouvant solliciter la rétractation de la décision précédemment rendue, quand bien même il aurait été fait droit à la tierce opposition de M. [D]. Les demandes de la SCP [U], ès-qualités, sont donc irrecevables.

L'équité commande d'allouer à chacune des sociétés Soufflet Agriculture et Trioplast SMS une indemnité de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

DONNE ACTE à la société Soufflet Agriculture quelle vient aux droits de la société Séragri,

DEBOUTE la société Trioplast SMS de sa demande de rejet des pièces de M. [D],

DECLARE M. [D] irrecevable en sa tierce opposition formée contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 avril 2008,

DECLARE irrecevable les demandes de la SCP [U], prise en la personne de Me Ponroy, ès-qualités de liquidateur de la société civile GFA du Domaine de Vauvrette,

DEBOUTE les parties de leurs plus amples demandes,

CONDAMNE M. [F] [D] à payer chacune des sociétés Soufflet Agriculture et Trioplast SMS une indemnité de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [F] [D] aux dépens de sa tierce opposition.

Le GreffierLa Présidente

E.DAMAREYC.PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 10/19989
Date de la décision : 30/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°10/19989 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-30;10.19989 ?
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