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23/09/2013 | FRANCE | N°12/23124

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 1, 23 septembre 2013, 12/23124


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 1



ARRET DU 23 SEPTEMBRE 2013



(n° 4 , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/23124-CB



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 06 Décembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 12/57876





APPELANTS



SYNDICAT DES EMPLOYES DU COMMERCE ILE DE FRANCE CF TC Syndicat professionnel immatri

culé au répertoire de la ville de [Localité 14] sous le n° 19860248 représenté par son Président

[Adresse 5]

[Localité 11]



Représenté par Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 1

ARRET DU 23 SEPTEMBRE 2013

(n° 4 , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/23124-CB

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 06 Décembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 12/57876

APPELANTS

SYNDICAT DES EMPLOYES DU COMMERCE ILE DE FRANCE CF TC Syndicat professionnel immatriculé au répertoire de la ville de [Localité 14] sous le n° 19860248 représenté par son Président

[Adresse 5]

[Localité 11]

Représenté par Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE et BOULEBSOL AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

UNION SYNDICALE CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTIO N ET DES SERVICES DE [Localité 14] Union Syndicale immatriculée au répertoire de la ville de Paris sous le n° 19890235 représentée par son Secrétaire général

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE et BOULEBSOL AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293

Représentée par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT CGT-FORCE OUVRIERE DES EMPLOYES ET CADRES DU COMMERCE DE [Localité 14] Représenté par son secrétaire général en exercice

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE et BOULEBSOL AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

FEDERATION DES EMPLOYES ET CADRES DE LA CGT FORCE OUVRIERE Réprésentée par son Secrétaire Général

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE et BOULEBSOL AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293

SYNDICAT SUD COMMERCES ET SERVICES ILE DE FRANCE Syndicat professionnel immatriculé au répertoire de la ville de [Localité 14] sous le n° 20020075 représenté par son Secrétaire

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représenté par Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE et BOULEBSOL AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT COMMERCE INTER DEPARTEMENTAL D'ILE DE FRANCE CFDT Réprésenté par son Sécrétaire général

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représenté par Me Amandine BOULEBSOL de l'AARPI SERRE et BOULEBSOL AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

INTIMÉ et APPELANT INCIDENT

SA SEPHORA agissant poursuites et diligences en la personne de son Directeur général en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentée par Me Jean NERET, avocat au barreau de PARIS, toque : T04

Représentée par Me Luca DE MARIA, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

INTERVENANT VOLONTAIRE :

FÉDÉRATION CGT DES PERSONNELS DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 12]

Représentée par Me Stéphane KADRI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0316

* *

DOSSIER 13/08070 QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

DEMANDERESSE

S.A. SEPHORA agissant poursuites et diligences en la personne de son Directeur général en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 9]

représentée par Me Jean NERET, avocat au barreau de PARIS, toque : T04

DEFENDEURS

SYNDICAT DES EMPLOYES DU COMMERCE ILE DE FRANCE CF

[Adresse 5]

[Localité 10]

représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

UNION SYNDICALE CGT DU COMMERCE DE LA DISTRIBUTION SERVICES DE [Localité 14]

[Adresse 7]

[Localité 2]

représentée par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT CGT FORCE OUVRIERE DES EMPLOYES ET CADRES COMMERCE DE [Localité 14]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT FEDERATION DES EMPLOYES ET CADRES DE LA CGT FORCE OUVRIERE

[Adresse 4]

[Localité 4]

représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT SUD COMMERCES ET SERVICES ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 8]

représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT COMMERCE INTER-DEPARTEMENTAL D'ILE DE FRA

[Adresse 8]

[Localité 8]

représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT FEDERATION CGT DES PERSONNELS DU COMMERCE ET DES SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 12]

représenté par Me Stéphane KADRI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0316

FÉDÉRATION CGT DES PERSONNELS DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 12]

Représentée par Me Stéphane KADRI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0316

* *

DOSSIER 13/03652 QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

DEMANDEUR

SA SEPHORA agissant poursuites et diligences en la personne de son Directeur général en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentée par Me Jean NERET, avocat au barreau de PARIS, toque : T04

Représentée par Me Luca DE MARIA, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

DEFENDEURS

SYNDICAT DES EMPLOYES DU COMMERCE ILE DE FRANCE CF

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

UNION SYNDICALE CGT DU COMMERCE DE LA DISTRIBUTION SERVICES DE [Localité 14]

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Représentée par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT CGT FORCE OUVRIERE DES EMPLOYES ET CADRES COMMERCE DE [Localité 14]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT FEDERATION DES EMPLOYES ET CADRES DE LA CGT FORCE OUVRIERE

[Adresse 4]

[Localité 4]

Représenté par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT SUD COMMERCES ET SERVICES ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représenté par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT COMMERCE INTER-DEPARTEMENTAL D'ILE DE FRA

[Adresse 8]

[Localité 8]

Représenté par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Représenté par Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 218

SYNDICAT FEDERATION CGT DES PERSONNELS DU COMMERCE ET DES SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 12]

Représenté par Me Stéphane KADRI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0316

FÉDÉRATION CGT DES PERSONNELS DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 12]

Représentée par Me Stéphane KADRI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0316

Ministère Public : M. HENRIOT Avocat Général

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Juin 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Irène CARBONNIER, Présidente

Madame Claire MONTPIED, Conseillère

Madame Claude BITTER, Conseillère

qui en ont délibéré

GREFFIÈRE : Madame Nora YOUSFI, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE,

- prononcé publiquement par Madame Irène CARBONNIER, Président de chambre, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Irène CARBONNIER, Présidente et par Madame Aline NEGRE greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

Vu l'appel principal interjeté par le syndicat des employés du commerce Ile-de-France CFTC, l'union syndicale CGT du commerce de la distribution et des services de [Localité 14], le syndicat CGT-Force Ouvrière des employés et cadres du commerce de [Localité 14], la fédération des employés et cadres de la CGT-Force Ouvrière, le syndicat Sud commerces et services Ile-de-France, le syndicat commerce inter départemental d'Ile-de-France CFDT et l'appel incident de la société Sephora à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue le 6 décembre 2012 par la vice-présidente du tribunal de grande instance de Paris de référé, ayant :

- Reçu la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services et le syndicat commerce inter départemental d'Ile-de-France CFDT en leur intervention volontaire ;

- Fait interdiction, à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision, à la société Sephora d'employer des salariés le dimanche dans son établissement de [Localité 13] Village situé [Adresse 12] sans disposer d'une autorisation exécutoire et ce, sous astreinte de 50 000 euros par infraction constatée passé ce délai,

- Dit que l'astreinte courra durant un délai de trois mois à l'issue duquel il pourra être à nouveau fait droit, se réservant la liquidation de l'astreinte,

- Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande tendant à voir ordonner à la société Sephora de cesser d'employer des salariés entre 21 heures et 6 heures dans son établissement des [Adresse 9],

- Condamné la société Sephora à payer aux syndicats demandeurs la somme de 7 000 euros à titre de provision à valoir sur les dommages-intérêts,

- Condamné la société Sephora à payer au syndicat des employés du commerce Ile-de-France CFTC, à l'union syndicale CGT du commerce, de la distribution et des services de [Localité 14], au syndicat CGT-Force Ouvrière des employés et cadres du commerce de [Localité 14], au syndicat Sud commerces et services Ile-de-France et au syndicat commerce inter départemental d'Ile-de-France CFDT la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société Sephora à payer à la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions en réplique et récapitulatives des appelants principaux, lesquels demandent à la cour de :

- Débouter la société Sephora de son appel incident et confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, à l'exception de celles disant n'y avoir lieu à référé sur la demande tendant à voir ordonner à la société Sephora de cesser d'employer des salariés entre 21 heures et 6 heures dans son établissement des [Adresse 9],

Statuant à nouveau sur ce point de :

- Enjoindre à la société Sephora de cesser d'employer des salariés dans ses établissements entre 21 heures et 6 heures, et plus particulièrement dans son établissement situé [Adresse 9] et ce, sous astreinte de 300 000 euros par infraction constatée,

- La condamner aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à verser à chacun des requérants la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions responsives et d'appel incident de la société Sephora, laquelle demande à la cour de :

- Dire qu'il n'y a lieu à référé sur la question du travail de nuit,

- Infirmer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a condamné sous astreinte la société Sephora à cesser d'employer des salariés le dimanche dans son établissement de [Localité 13] Village,

- Condamner in solidum les syndicats demandeurs à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu les conclusions de la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services, partie intervenante, laquelle demande à la cour de :

- Dire et juger bien fondée son intervention volontaire,

- Infirmer l'ordonnance de référé entreprise en ce qu'elle dit n'y avoir lieu à référé sur la demande tendant à voir ordonner à la société Sephora de cesser d'employer des salariés entre 21 heures et 6 heures dans son établissement situé [Adresse 9],

-Ordonner à la société Sephora de cesser d'employer des salariés entre 21 heures et 6 heures dans ses établissements et, notamment, dans son établissement situé [Adresse 9] et ce, sous astreinte de 300 000 euros par infraction constatée,

-Condamner la société Sephora à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- La condamner aux entiers dépens de la procédure ;

Vu la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles L 3132-4 et R 3135-2 du code du travail, présentée par la

société Sephora dans un écrit distinct et motivé ;

Vu les observations des appelants principaux, de la partie intervenante et du ministère public sur la question prioritaire de constitutionnalité de la société Sephora relative à la conformité des articles L 3132-4 et R 3135-2 du code du travail ;

Vu le mémoire en réplique de la société Sephora sur sa demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles L 3132-4 et R 3135-2 du code du travail ;

Vu la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l'article L 3122-32 du code du travail, présentée par la société Sephora dans un écrit distinct et motivé ;

Vu les observations des appelants principaux, de la partie intervenante et du ministère public sur la question prioritaire de constitutionnalité de la société Sephora relative à la conformité de l'article L 3122-32 du code du travail ;

Vu le mémoire 'en duplique' de la société Sephora sur sa demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l'article L 3122-32 du code du travail ;

SUR CE,

Considérant que les procédures numéros 13/03652 et 13/08070 seront jointes à la procédure numéro 12/23124 pour une bonne administration de la justice ;

Sur la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles L 3132-4 et R 3135-2 du code du travail,

Considérant que la société Sephora soutient que les dispositions de l'article L 3132-24 du code du travail, lesquelles énonce que 'les recours présentés contre les décisions prévues aux articles L 3132-20 et L 3132-23 ont un effet suspensif', sont contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution au motif que toute partie privée, qui conteste, même de façon dilatoire ou abusive, une autorisation administrative motivée permettant le travail dominical, peut empêcher la mise en oeuvre de cette dernière, sans que son bénéficiaire puisse voir sa cause entendue dans un délai compatible avec la durée de l'autorisation consentie et sans que le sérieux du recours soit même examiné dans un délai raisonnable; qu'il est ainsi porté atteinte au principe d'égalité, aux droits de la défense et au droit au procès équitable, à la liberté d'entreprendre et à la liberté du travail, enfin au principe de légalité des délits et des peines et des droits de la défense ;

Sur la recevabilité de la demande d'examen de la question prioritaire de constitutionnalité,

Considérant que le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté dans un écrit distinct et motivé ; que la demande est donc recevable en la forme ;

Sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité,

Considérant que L 3132-24 du code du travail, lequel n'a pas été déclaré conforme à la Constitution, ni dans le cadre du contrôle de constitutionnalité a priori, ni dans celui d'une question prioritaire de constitutionnalité, se rattache à la procédure par un lien suffisant et doit être considéré comme applicable au litige dès lors qu'à l'appui de leur demande tendant à ce que la société Sephora cesse d'employer des salariés le dimanche dans l'établissement situé [Adresse 11], les syndicats font état du caractère suspensif de leur recours contre la décision préfectorale autorisant la société à déroger au repos dominical ;

Considérant, s'agissant du caractère sérieux de la question prioritaire de constitutionnalité, qu'en ce qui concerne le droit au procès équitable et le délai raisonnable, l'article L 3132-24 du code du travail ne prive pas le bénéficiaire de l'autorisation préfectorale du droit d'accès au juge ; que la procédure administrative permet à l'intéressé d'intervenir et d'être entendu sur la requête en annulation de l'autorisation qui lui a été accordée ;

Que la durée de la procédure administrative dépend principalement des diligences des parties et ne résulte pas des dispositions de l'article L 3132-24 du code du travail ;

Qu'en ce qui concerne le principe d'égalité, la liberté d'entreprendre et la liberté du travail, les moyens de la société Sephora ne sont pas davantage sérieux ;

Que le repos dominical constitue une mesure nécessaire à la protection des droits et des libertés des salariés qui découlent des alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution et n'est pas contraire à la liberté du travail ;

Que la liberté d'entreprendre n'a pas le caractère d'une liberté absolue ;

Qu'il est loisible au législateur, à qui il incombe de concilier deux droits constitutionnels en concurrence, d'apporter des limitations à cette liberté d'entreprendre liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi par la loi ;

Que l'article L 3132-24 du code du travail, clair et précis, qui tend à assurer l'effectivité du droit des salariés au repos dominical jusqu'à la décision de la juridiction administrative ne méconnaît pas les principes constitutionnels, compte tenu de l'objectif poursuivi par la loi;

Considérant, enfin, s'agissant de l'article R 3135-2 du code du travail, qui édicte des sanctions pénales, outre sa nature réglementaire, qu'il n'est pas applicable au litige civil dont la cour est saisie et ne se rattache à lui par aucun lien suffisant, ;

Considérant, en conséquence, qu'il n'y a lieu de transmettre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles L 3132-4 et R 3135-2 du code du travail ;

Sur la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l'article L 3122-32 du code du travail,

Considérant que la société Sephora soutient que les dispositions de l'article L 3122-32 du code du travail sont contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution au motif que 'les conditions du recours au travail de nuit posées par cet article et pénalement sanctionnées sont en effet insuffisamment définies, portent par la même atteinte au principe de légalité des délits et des peines et sont entachés d'une incompétence négative';

Sur la recevabilité de la demande d'examen de la question prioritaire de constitutionnalité,

Considérant que le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté dans un écrit distinct et motivé ; que la demande est donc recevable en la forme ;

Sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité,

Considérant que l'article L 3122-32 du code du travail, qui constitue le fondement des demandes des organisations syndicales présentées devant le juge des référés statuant en matière civile, n'édicte pas de sanctions pénales ;

Qu'il est dissociable de l'article R 3124-15 du code du travail qui, réprimant pénalement le non respect des dispositions sur le travail de nuit, ne sert pas de fondement à l'action des demandeurs et n'est pas applicable au litige ;

Que l'examen de la conformité de l'article L 3122-32 du code du travail au principe de légalité des délits et des peines est étranger à l'objet des demandes de nature civile et ne se rattache à elles par aucun lien ;

Que dans ces conditions, il n'y a lieu de transmettre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité ;

Sur le travail de nuit dans l'établissement Sephora situé [Adresse 9],

Considérant que l'article L 3122-32 du code du travail énonce que 'le recours au travail de nuit est exceptionnel.' qu''Il prend en compte les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et est justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale' ;

Que la violation de ces dispositions, protectrices des salariés, constitue un trouble manifestement illicite ;

Considérant que la société Sephora, qui ne conteste pas recourir au travail de nuit dans son établissement de l'[Adresse 9], s'oppose aux demandes des syndicats faisant valoir que les conditions de l'article L 3122-32 du code du travail sont réunies ;

Que la société expose qu''à peine une centaine des 4 100 salariés [de son] réseau commercial' travaille après 21 heures, de sorte que le recours au travail de nuit est exceptionnel ; qu'elle indique respecter les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs en ce que le travail de nuit s'effectue sur la base du volontariat, qu'il ouvre droit à une majoration de salaire et à un repos compensateur, que les salariés sont raccompagnés en taxi à leur domicile à partir de minuit, qu'ils bénéficient d'un suivi médical, qu'aucun accident du travail de nuit n'a eu lieu en 2009, 2010, 2011 et qu'elle n'en a recensé qu'un seul en 2012 ; que la société soutient en outre que le travail de nuit est justifié par les contraintes de fonctionnement de l' établissement des [Adresse 9] dont l'approvisionnement doit s'effectuer de nuit et que son ouverture la nuit est un facteur de développement de l'activité touristique à [Localité 14] ; que la société ajoute que le travail de nuit étant organisé depuis 1996 dans l'établissement des [Adresse 9], elle n'est pas concernée par la conclusion d'un accord collectif préalable à la mise en place du travail de nuit, prévu à l'article L 3122-33 du code du travail ;

Mais considérant que le caractère exceptionnel visé à l'article L 3122-32 du code du travail ne se définit pas par rapport aux effectifs de la société ; qu'il s'apprécie au regard du secteur d'activité pour lequel le travail de nuit est inhérent ou pour lequel il n'existe pas d'autres possibilités d'aménagement du temps de travail, ce qui n'est pas le cas des commerces de parfumerie, comme celui de la société Sephora, laquelle n'établit pas que les difficultés de livraison alléguées nécessitent que son établissement soit ouvert à la clientèle de nuit et qu'il soit dérogé au mode d'organisation normale du travail de son personnel ;

Qu'à supposer que les contreparties accordées aux salariés, prévues par la loi, et les mesures d'accompagnement mises en oeuvre par la société Sephora permettent de répondre aux impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs de nuit, l'attraction commerciale liée à l'ouverture de nuit de l'établissement, qui n'offre pas des services d'utilité sociale, ne constitue pas une nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique au sens de l'article L 3122-32 du code du travail ;

Que pas davantage, la société Sephora ne peut se prévaloir du souhait de certains de ses salariés de travailler la nuit pour déroger aux dispositions protectrices de l'article L 3122-32 du code du travail, lesquelles, applicables à l'ensemble de ses salariés, sont d'ordre public;  

Considérant, enfin, que la discussion tirée de l'article L 3122-33 du code du travail sur la conclusion préalable d'une convention ou d'un accord collectif est dénuée de pertinence;

Que les dispositions de l'article L 3122-32 du code du travail issu de la loi du 9 mai 2001, relative à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, sont d'application immédiate

pour tous les salariés des secteurs qu'elle concerne ;

Que la convention ou l'accord collectif ne peut déroger aux dispositions protectrices d'ordre public de cette loi et suppose, pour être conclu, que les conditions du recours au travail de nuit énoncées à l'article L 3122-32 soient réunies, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

Considérant, en conséquence, que le trouble manifestement excessif est caractérisé et que c'est à tort que le premier juge a estimé n'y avoir lieu à référé sur la demande tendant à voir ordonner à la société Sephora de cesser d'employer des salariés entre 21 heures et 6 heures dans son établissement des [Adresse 9] ;

Qu'il convient, pour faire cesser ce trouble manifestement excessif, d'ordonner à la société Sephora, à compter du 8ème jour suivant la signification de l'arrêt, de ne pas employer de salariés entre 21heures et 6 heures dans son établissement situé [Adresse 9] et ce, sous astreinte de 80 000 euros par infraction contestée, passé ce délai;

Considérant, s'agissant de la demande des organisations syndicales concernant les autres établissements de la société Sephora, sans plus de précision, que le premier juge a relevé, à juste titre, qu'il ne pouvait être statué par voie de dispositions générales ;

Sur le travail dominical le dimanche dans l'établissement [Adresse 10], situé [Adresse 11],

Considérant que l'article L 3132-3 du code du travail énonce que 'Dans l'intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche' ;

Qu'en application de l'article L 3132-20 du code du travail, il peut être dérogé à cette règle par autorisation préfectorale, sous certaines conditions ;

Que l'article L 3132-24 du code du travail prévoit que le recours présenté contre la décision préfectorale a un effet suspensif ;

Que la violation de la règle du repos dominical, protectrice des salariés, constitue un trouble manifestement illicite ;

Considérant que par arrêté en date du 25 juillet 2012, pris en application de l'article L3132-20 du code du travail, la société Sephora a été autorisée par le préfet de la région d'Ile-de-France à accorder le repos hebdomadaire par roulement à tout ou partie du personnel salarié occupé dans son magasin [Adresse 10] ;

Que les syndicats demandeurs ont déposé une requête aux fins d'annulation de cet arrêté, enregistrée le 23 août 2012 au greffe de la juridiction administrative ;

Considérant qu'au soutien de son appel incident, la société Sephora, qui ne conteste pas employer des salariés le dimanche en dépit du recours en annulation ci-avant rappelé, demande à la cour d'écarter l'application de l'article L 3132-24 du code du travail comme contraire à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme sur le droit d''être entendue de façon équitable et dans un délai raisonnable' ;

Mais considérant que l'article L 3132-24 du code du travail ne prive pas la société Sephora d'intervenir à la procédure administrative devant laquelle elle peut apporter des éléments au soutien de l'autorisation attaquée ; que les délais dans lesquels il est statué sur le recours formé contre cette autorisation, qui dépendent principalement de la célérité des parties, ne résulte pas davantage des dispositions de l'article l'article L 3132-24 du code du travail contesté ;

Que l'article L 3132-24 du code du travail ne rompt pas le principe de l'égalité des armes mais tend, au regard de l'objectif poursuivi, dans l'attente de la décision administrative sur le recours en annulation d'une autorisation dérogatoire, à assurer l'effectivité du repos dominical, principe fondamental du droit du travail ;

Qu'enfin, il ne peut être sérieusement soutenu que l'article L 3132-24 du code du travail prive le justiciable de toute défense devant la juridiction pénale au motif que le bénéficiaire de l'autorisation peut être condamné pénalement dès le dépôt du recours contre l'arrêté d'autorisation dont il ne serait pas informé ; qu'outre le fait que l'intéressé peut faire valoir tous ses moyens de défense devant la juridiction pénale, celui-ci, qui a connaissance de la possibilité du recours et de ses délais mentionnés dans l'arrêté, est informé par le requérant du dépôt de la requête aux fins d'annulation ;

Considérant, en conséquence, qu'il n'y a lieu à écarter les dispositions de l'article L 3132-24 du code du travail pour inconventionnalité ;

Considérant que l'ouverture de l'établissement Sephora, situé [Adresse 11], en violation des dispositions précitées, constitue un trouble manifestement excessif qu'il convient de faire cesser ;

Que sera donc confirmée en toute ses dispositions, la décision du premier juge ordonnant, sous astreinte, à la société Sephora de cesser d'employer des salariés le dimanche dans l'établissement concerné, sans disposer d'une autorisation exécutoire ;

Considérant, s'agissant de la demande des organisations syndicales concernant les autres établissements de la société Sephora, sans plus de précision, que le premier juge a relevé, à juste titre, qu'il ne pouvait être statué par voie de dispositions générales ;

Sur la provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession,

Considérant que c'est à bon droit que le premier juge a estimé qu'en refusant d'appliquer les dispositions de l'article L 3132-3 du code du travail sur le repos dominical édictées dans l'intérêt des salariés, nonobstant le recours suspensif contre l'autorisation préfectorale, la société Sephora porte atteinte aux droits de ces derniers et que sa responsabilité de ce chef n'est pas sérieusement contestable ;

Que les organisations syndicales sont fondées à obtenir une provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice ainsi causé à l'intérêt collectif des salariés qu'elles défendent;

Que la provision, qui leur a été allouée en première instance à hauteur de la somme de 7 000 euros, a été justement fixée et sera confirmée ;

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Considérant que l'équité commande de condamner la société Sephora, partie perdante, à payer au syndicat des employés du commerce Ile-de-France CFTC, à l'union syndicale CGT du commerce de la distribution et des services de [Localité 14], au syndicat CGT-Force Ouvrière des employés et cadres du commerce de [Localité 14], à la fédération des employés et cadres de la CGT- Force Ouvrière, au syndicat Sud commerces et services Ile-de-France, au syndicat commerce inter départemental d'Ile-de-France CFDT, chacun, la somme de 1 500 euros et à la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel, la décision du premier juge au titre des frais engagés en première instance, justement évalué, étant confirmée ;

Que la société Sephora sera également condamnée aux entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS,

Ordonne la jonction des procédures numéros 13/03652 et 13/08070 à la procédure 12/23124,

Rejette la demande de transmission à la cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles L 3132-4 et R 3135-2 du code du travail,

Rejette la demande de transmission à la cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l'article L 3122-32 du code du travail,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a reçu les interventions volontaires de la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services et du syndicat commerce inter départemental d'Ile-de-France CFDT,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a ordonné, sous astreinte, à la société Sephora de cesser d'employer des salariés le dimanche dans son établissement situé [Adresse 11], sans disposer d'une autorisation exécutoire, sauf à dire que l'interdiction court à compter du 8 ème jour suivant la signification de l'arrêt,

Confirme la décision déférée sur le montant de l'astreinte de 50 000 euros par infraction constatée et ses modalités de mise en oeuvre, sauf à dire que l'astreinte court, passé le délai ci-dessus indiqué,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a condamné la société Sephora à payer aux syndicats demandeurs la somme de 7 000 euros à titre de provision valoir sur les dommages-intérêts,

Confirme la décision déférée sur les condamnations prononcées au titre des frais irrépétibles engagés en première instance,

Infirme la décision déférée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande tendant à voir ordonner à la société Sephora de cesser d'employer des salariés entre 21 heures et 6 heures dans son établissement situé [Adresse 9],

Ordonne à la société Sephora, à compter du 8 éme jour suivant la signification de l'arrêt, de cesser d'employer des salariés entre 21heures et 6 heures dans son établissement situé [Adresse 9], et ce, sous astreinte de 80 000 euros par infraction contestée, passé ce délai ;

Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

Condamne la société Sephora, partie perdante, à payer au syndicat des employés du commerce Ile-de-France CFTC, à l'union syndicale CGT du commerce de la distribution et des services de [Localité 14], au syndicat CGT-Force Ouvrière des employés et cadres du commerce de [Localité 14], à la fédération des employés et cadres de la CGT Force Ouvrière, au syndicat Sud commerces et services Ile-de-France, au syndicat commerce inter départemental d'Ile-de-France CFDT, chacun, la somme de 1 500 euros et à la fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel,

Condamne la société Sephora aux entiers dépens.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/23124
Date de la décision : 23/09/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K1, arrêt n°12/23124 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-23;12.23124 ?
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