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04/03/2014 | FRANCE | N°13/12053

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 04 mars 2014, 13/12053


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 8



ARRET DU 04 MARS 2014



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12053



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Mai 2013 -Tribunal de Commerce d'EVRY - RG n° 2011L2830





APPELANT



Monsieur [N] [O]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représe

nté par Maître Thierry SERRA de l'AARPI SERRA ABOUZEID ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0280

Assisté de Maître Benoit HOVASSE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0283



INTIME



Monsieur [P] [S] ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRET DU 04 MARS 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/12053

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Mai 2013 -Tribunal de Commerce d'EVRY - RG n° 2011L2830

APPELANT

Monsieur [N] [O]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Maître Thierry SERRA de l'AARPI SERRA ABOUZEID ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0280

Assisté de Maître Benoit HOVASSE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0283

INTIME

Monsieur [P] [S] es qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la société MSA SPORT

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Maître Pascal GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205

Assisté de Maître Richard TORRENTE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1576

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Janvier 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente

Madame Evelyne DELBÈS, Conseillère

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Céline LITTERI

MINISTERE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Fabien BONAN, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie HIRIGOYEN, présidente et par Madame Céline LITTERI, greffière présente lors du prononcé.

La société MSA Sport a été constituée le 23 février 1999 avec pour objet l'exploitation de magasins d'équipement de la personne sous diverses enseignes dont Shop Center, Sport Dépôt, Sport Master et comme président M. [O].

La société MSA Sport était la société mère ou grand-mère d'un certain nombre d'autres sociétés également dirigées par M. [O], les sociétés Ile-de-France Sport, B2 Sport, Lema Distribution, ML Sport, Street Distribution et BRK Distribution.

Par ordonnance en date du 8 juillet 2008, le président du tribunal de commerce d'Evry a nommé Maître [Q] en qualité de mandataire ad hoc de ces sociétés (sauf la société BRK Distribution) avec mission de les assister 'dans la finalisation avec les principaux banquiers du maintien des concours bancaires et la mise en place avec d'autres banquiers de 'new money' permettant d'accompagner les entreprises jusqu'à la réalisation de leur fonds de commerce qui permettra de régler l'ensemble des créanciers et dans l'examen des mesures à prendre et à mettre en 'uvre en vue d'assurer leur restructuration et leur pérennité'.

Ce mandat ad hoc a été clos par un protocole d'accord négocié avec les banques bénéficiant de nantissements sur les fonds de commerce en date du 27 octobre 2008 prévoyant la vente par les filiales de leurs fonds de commerce, leur absorption par la société MSA Sport par voie de transmission universelle de patrimoine et le paiement, avec les fonds en provenance des ventes des fonds de commerce, de l'ensemble des banquiers prêteurs des différentes sociétés en contrepartie du maintien des concours bancaires.

Les opérations de cession des fonds de commerce des filiales et TUP se sont échelonnées entre 2008 et octobre 2010.

Puis, sur déclaration de cessation des paiements, par jugement en date du 7 mars 2011, le tribunal de commerce d'Evry a prononcé la liquidation judiciaire de la société MSA Sport, a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 3 mars 2011 et désigné Maître [S] en qualité de liquidateur.

Le passif de la société MSA Sport vérifié est ressorti à la somme de 907 944,16 euros dont un passif dit familial résultant d'une créance de M. [O] et la Scp Lemano de 226.187,06 euros et un passif contesté de 359.565,06 euros, objet d'une instance en cours.

En contrepartie de ce passif, l'actif réalisé s'élevait à la somme de 15.454,33 euros d'où une insuffisance d'actif de 892 489,83 euros retenue par le liquidateur judiciaire.

Au constat de cette insuffisance d'actif, estimant que M. [O] a poursuivi l'exploitation déficitaire de la société MSA Sport alors que celle-ci se trouvait en état de cessation des paiements dès avant la signature du protocole d'accord en date du 27 octobre 2008 et d'avoir, en outre, dévoyé le mandat ad hoc destiné à assurer la pérennité de l'entreprise mais sous couvert duquel il a liquidé l'ensemble d'un groupe de sociétés en privilégiant certains créanciers au détriment des autres, soit des fautes de gestion ressortant des dispositions de l'article L.651-2 du code de commerce, Maître [S], ès qualités, a fait assigner l'ancien dirigeant aux fins de sanction pécuniaire.

Par jugement du 27 mai 2013, le tribunal de commerce d'Evry a dit que M. [O] devra supporter 'l'intégralité de l'insuffisance d'actif actuelle et à venir de la société MSA Sport dans la limite de 900 000 euros' et a condamné M. [O] à payer cette somme entre les mains de Maître [S], ès qualités, avec exécution provisoire.

M. [O] a relevé appel selon déclaration du 14 juin 2013 et a obtenu l'arrêt de l'exécution provisoire par ordonnance du délégataire du premier président en date du 24 octobre 2013 .

Par dernières conclusions signifiées le 6 décembre 2013, l'appelant demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de confirmer en tant que de besoin l'abandon de la créance de la famille du dirigeant d'un montant de 239 407,06 euros, de dire que l'insuffisance d'actif éventuellement imputable à celui-ci dès lors qu'une faute de gestion serait caractérisée, ce qui n'est pas le cas, ne saurait excéder la somme de 29 132,46 euros, de dire que Maître [S], ès qualités, ne rapporte pas la preuve d'une faute de gestion imputable au dirigeant et en corrélation avec l'insuffisance d'actif de la société MSA et de condamner Maître [S], ès qualités, au paiement de la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives signifiées le 11 décembre 2013, Maître [S], ès qualités, demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner la partie adverse au paiement de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

M. [O] critique le jugement pour l'avoir condamné à supporter le montant de l'intégralité de l'insuffisance d'actif actuelle et à venir de la société MSA Sport dans la limite de 900 000 euros alors qu'un tribunal ne peut entrer en voie de condamnation à l'encontre d'un dirigeant pour un montant supérieur à celui de l'insuffisance d'actif certaine, en relation causale directe avec la faute de gestion qui lui est reprochée, que seules les dettes antérieures au jugement d'ouverture peuvent être prises en compte, qu' il suffit de se reporter aux motifs du jugement dont appel pour constater que le tribunal a notamment mis à sa charge un passif contesté à hauteur de 359.565,06 euros (au titre de l'instance Lotto) ainsi que le passif familial auquel les créanciers avaient pourtant renoncé à hauteur de 223.186,06 euros ce qui devrait conduire à plafonner une éventuelle condamnation à la somme de 323.096,04 euros (907.944,16 - 226.186,06 - 359.565,06 = 323.096,04 euros), qu'au surplus, selon l'état déposé au greffe par Maître [S], ès qualités, le montant des créances proposées à l'admission au 12 avril 2012 n'excédait pas 506.614 euros, somme de laquelle, il convenait de retrancher, la créance du CGEA qui ne saurait, de jurisprudence constante, être mise à la charge du dirigeant (57.932,55 euros), la créance familiale précitée et plus généralement toutes celles consécutives au prononcé de la liquidation judiciaire dont la créance OSEO, devenue exigible par l'effet du jugement d'ouverture, qu'à l'issue de ces opérations, seule demeure éventuellement une créance de 29 132,46 euros (56.895,17 - 27.762,71), qu'il n'est pas démontré de faute de gestion en relation avec le passif incontestablement admis d'autant qu'à compter de 2007, l'exploitation était poursuivie sous mandat ad hoc.

Il résulte de l'article L.651-2 du code de commerce que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que les dettes de la personne morale seront supportées, en tout ou en partie, par le dirigeant de droit.

En l'espèce, aux termes de l'assignation, il est reproché à M. [O] d'avoir poursuivi l'exploitation déficitaire de la société MSA Sport et, 'au delà', d'avoir conduit une opération liquidative de son groupe via la société MSA Sport qui est à l'origine du préjudice subi par les créanciers de celle-ci et ce, en contradiction avec l'objet du mandat ad hoc lequel tendait à la pérennité des sociétés du groupe.

Il ressort des pièces au débat que du 1er mars 2006 au 31 décembre 2007, la société MSA Sport a réalisé un chiffre d'affaires de 3.607.274 euros et dégagé une perte d'exploitation de 1.272.408 euros, que l'exercice 2008 a fait ressortir un chiffre d'affaires de 2.112.338 euros et une perte d'exploitation de 780.639 euros, qu'au cours de l'exercice 2009, la société a réalisé un chiffre d'affaires de 818.480,07 € dégageant une perte d'exploitation de 1.138.029,05 euros et au cours de l'exercice 2010, un chiffre d'affaires de 166.765,43 euros dégageant une perte d'exploitation de 407.848,61 euros.

L'exploitation a donc été poursuivie malgré le déficit apparu dès 2007.

Or, la poursuite d'exploitation déficitaire d'une entreprise, même si celle-ci ne se trouve pas en état de cessation des paiements, est une faute de gestion dont M. [O] ne peut prétendre être exonéré par la mise en oeuvre concomitante d'un mandat ad hoc dès lors qu'un tel mandat ne dispense pas le dirigeant de ses obligations.

Quant au montant de l'insuffisance d'actif, il convient de relever qu'il n'est pas justifié de l'abandon de créance allégué s'agissant du passif dit familial, que la contestation élevée à l'encontre de la créance déclarée par la société Lotto, admise par le juge- commissaire, a été résolue par l'arrêt confirmatif de cette cour d'appel en date du 17 octobre 2013, que la créance OSEO a été admise au passif, que le passif ne tient pas compte, en revanche, des créances AGS contrairement à ce qui est suggéré par l'appelant dont l'évaluation n'apparaît pas justifiée, que le passif tel que vérifié diminué de l'actif réalisé détermine, en effet, une insuffisance d'actif de 892 489,83 euros.

La faute de gestion prouvée à l'encontre du dirigeant doit avoir contribué à l'insuffisance d'actif.

En l'espèce, il est établi par les pertes d'exploitation successives qui ont conduit à la liquidation judiciaire que la poursuite de l'activité déficitaire a contribué à l'insuffisance d'actif ce qui justifie de retenir la responsabilité de l'ancien dirigeant, la preuve n'étant pas rapportée, en revanche, que l'opération liquidative concernant les filiales aurait produit des effets distincts.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont condamné M. [O] au titre de l'insuffisance d'actif.

Au vu des éléments de la cause, il convient cependant de fixer la part mise à sa charge à la somme de 500 000 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement sauf du chef du quantum de l'insuffisance d'actif mise à la charge de M. [O],

Statuant du chef infirmé

Condamne M. [O] à payer à Maître [S], ès qualités, la somme de 500 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif de la société MSA Sport,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne M. [O] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/12053
Date de la décision : 04/03/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I8, arrêt n°13/12053 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-04;13.12053 ?
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