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03/04/2014 | FRANCE | N°12/02909

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 03 avril 2014, 12/02909


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 03 Avril 2014

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/02909 - MEO



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Février 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY section encadrement RG n° 10/01355



APPELANTE

Me [K] [N] (SCP [L] - [D] - [K] - [U]) - Mandataire liquidateur de la SAS HERLAU FINANCES

[Adresse 2]

[Lo

calité 2]

représenté par Me François DUPUY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0873 substitué par Me Aurélie DORANGES, avocat au barreau de VERSAILLES



INTIME

M...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 03 Avril 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/02909 - MEO

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Février 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY section encadrement RG n° 10/01355

APPELANTE

Me [K] [N] (SCP [L] - [D] - [K] - [U]) - Mandataire liquidateur de la SAS HERLAU FINANCES

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Me François DUPUY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0873 substitué par Me Aurélie DORANGES, avocat au barreau de VERSAILLES

INTIME

Monsieur [H] [E]

[Adresse 3]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Cheikhou NIANG, avocat au barreau de PARIS, toque : A0229

PARTIE INTERVENANTE :

UNEDIC AGS-CGEA IDF EST

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Février 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine METADIEU, Présidente

Mme Marie-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

M. [H] [E] a été embauché par la société SLS, selon un contrat à durée indéterminée à compter du 29 juin 1992, en qualité de chauffeur-livreur, statut employé. Promu régulièrement, M. [E] est devenu salarié de la SAS Herlau Finances, en qualité de directeur régional à compter du 1er janvier 2003. Son salaire mensuel brut s'est élevé en dernier lieu à 3 812 €.

La Sas Herlau Finance, créée en 1995, est la société mère de la société SLS, laquelle livre chez des particuliers des meubles, et électroménager en sous-traitance d'hypermarchés ou de spécialistes de commerce.

La Sas SLS a été rachetée par la société Commagnac Industries le 1er février 2010.

Convoqué par courrier du 8 juillet 2010 à un entretien préalable fixé au 16 juillet suivant, M. [E] a été licencié pour cause réelle et sérieuse le 30 juillet 2010.

L'entreprise compte plus de 11 salariés.

La relation de travail n'est régie par aucune convention collective.

Contestant son licenciement, M. [E] a saisi le conseil des Prud'Hommes d'Evry d'une demande tendant, en dernier lieu, à obtenir le paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'un rappel de salaire sur heures supplémentaires, avec les congés payés afférents, outre une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile. A titre reconventionnel, la société Herblau Finances a réclamé le paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par décision en date du 7 février 2012, le conseil des Prud'Hommes a jugé le licenciement de M. [E] sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société Herblau Finances à lui payer les sommes suivantes :

- 14 701,05 € à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires

- 1 470,10 € au titre des congés payés afférents

ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation soit le 31 décembre 2010,

- 45 744 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du jugement

Il a débouté la société Herblau Finances de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens.

Mise en redressement judiciaire, le 28 mai 2013, la société Herblau Finances s'est trouvée en liquidation judiciaire le 31 juillet 2013, avec une poursuite d'activité autorisée jusqu'au 7 août suivant. Un plan de cession a été adopté le 8 août 2013.

Me [K], en qualité de mandataire-liquidateur de la société Herblau Finances , a fait appel de la décision du conseil des Prud'Hommes. Il demande à la cour de juger que le licenciement de M. [E] est fondé et, en conséquence, de le débouter de toutes ses demandes et de le condamner à lui rembourser la somme de 14 701,05 €, outre 1 470,10 € versée au titre des heures supplémentaires. A titre subsidiaire, il demande à voir réduite à 22 872 € la somme allouée à M. [E] à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il réclame la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [E] conclut à la confirmation du jugement sur le principe des condamnations. Sur le quantum, il demande à la cour de fixer au passif de la procédure collective de la société Herblau Finances les sommes suivantes :

- 91 971 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 35 516,78 € à titre de rappel des heures supplémentaires

- 3 551,68 € au titre des congés payés afférents

- 4 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande, enfin, à ce que la décision à rendre soit déclarée opposable aux Ags.

Les Ags s'associent aux explications du mandataire-liquidateur de la société Herblau Finances et concluent au débouté de M. [E] . A titre subsidiaire, elles rappellent les limites légales de leur garantie.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 28 février 2014, reprises et complétées à l'audience.

MOTIVATION

- Sur les heures supplémentaires

En application de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En outre, l'absence d'autorisation préalable des heures supplémentaires n'exclut pas en soi un accord tacite de l'employeur.

En l'espèce, la cour se référant aux éléments produits aux débats, adopte les motifs des premiers juges et confirme leur décision en ce qu'ils ont retenu que M. [E] avait effectué pour la période considérée, et antérieurement à la création de son activité propre, 468 heures supplémentaires qui devaient lui être payées à hauteur de 14 701,05 €, outre 1 470,10 € au titre des congés payés afférents.

- Sur le licenciement

Aux termes de l'article L1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

En outre, en application de l'article L 1232-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. Enfin, un même fait fautif ne peut donner lieu à double sanction.

En cas de litige, le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié (article L 1235-1 du code du travail).

Les faits invoqués doivent être matériellement vérifiables.

En application de l'article L 1232-6 du code du travail, la motivation de la lettre de licenciement fixe les limites du litige.

En l'espèce, la lettre du licenciement en date du 30 juillet 2010, énonce les griefs suivants à l'encontre de M. [E] :

- des relations d'affaires établies en direct, en tant qu'auto-entrepreneur, avec des clients de l'entreprise SLS, alors même que M. [E] est cadre dans la société holding, la société Herblau Finances. Ce faisant, il est reproché à M. [E] d'utiliser, pour les besoins de cette activité, le matériel de manutention et le personnel de l'entreprise.

- incapacité à communiquer et fédérer son équipe autour de projets structurels et procédures (insuffisance managériale)

- insubordination avérée à l'égard de votre management direct

S'agissant du premier grief, M. [E] , qui reconnaît l'existence d'une activité d'auto entrepreneur exercée en parallèle de ses fonctions au sein de la société Herblau Finances , consistant également en une activité de livraison de meubles, fait valoir d'une part qu'il n'était lié à la société par aucune clause de non concurrence et d'autre part qu'il avait porté à la connaissance de la nouvelle direction cet état de fait en signalant la possibilité d'y mettre un terme à sa première demande.

L'absence d'une clause de non con concurrence au contrat de travail ne dispense pas le salarié de l'obligation de loyauté qui découle du contrat de travail.

En l'espèce, M. [E] ne démontre pas avoir porté à la connaissance de son employeur son activité d'auto entrepreneur avant d'avoir exécuté, le 1er juin 2010, les termes de la note interne en date du 29 avril 2010 qui l'y obligeait ainsi que tous autres salariés de l'entreprise.

Tout d'abord, la connaissance par l'employeur de l'existence de cette activité parallèle ne vaut pas autorisation de sa part. Ensuite, il ressort des débats, que l'exercice de cette activité s'est faite avec les moyens humains et matériels de la société Herblau Finances , ce que ne conteste pas sérieusement M. [E] .

En effet, selon les explications fournies par la société Herblau Finances et les pièces produites aux débats, non sérieusement contestées par M. [E] :

- M. [E] procédait à l'achat de marchandises, de l'enlèvement gracieux de lots de destockage, à la vente de ces produits sur internet et à leur livraison aux clients

- les livraisons aux clients s'effectuaient par le biais de la société Herblau Finances que M. [E] réglait par le moyen de chèques personnels

- M. [E] se facturait les coûts de transport à des montants déterminés par lui-même et sans commune mesure avec le coût réel de transport et les tarifs pratiqués habituellement par la société Herblau Finances : ainsi une livraison à [Localité 4] située à 622 km de lieu d'enlèvement de la marchandise n'a donné lieu à aucune facturation par M. [E] .

- M. [E] ne réglait pas à la société Herblau Finances les coûts des autres prestations fournies par la société Herblau Finances dans le cadre de ces opérations de livraison : la manutention était opérée par le personnel de la société Herblau Finances et avec les véhicules de celle-ci .

Il résulte de ce qui précède qu'est moins en cause l'exercice d'une activité parallèle de M. [E] mais les conditions d'exercice de celle-ci qui caractérise l'emploi à son profit des moyens humains et matériels de la société Herblau Finances.

Il s'ensuit qu'en détournant au profit de son activité propre les moyens de la société Herblau Finances, M. [E] a méconnu l'obligation de loyauté qu'il devait à son employeur.

Pour ce seul grief qui est établi, le licenciement prononcé à son encontre par la société Herblau Finances est bien fondé et M. [E] ne peut qu'être débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré est donc infirmé partiellement.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement déféré sur le licenciement

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Dit que le licenciement de M. [H] [E] repose sur une cause réelle et sérieuse

Déboute M. [E] de sa demande d'indemnité en application de l'article L1235-3 du code du travail

Confirme le jugement déféré pour le surplus

Fixe en conséquence au passif de la procédure collective relative à la société Herblau Finances la somme de 14 701,05 € outre 1 470,10 € au titre des congés payés afférents

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Dit que la présente décision est opposable aux Ags dans la limite de leur garantie légale.

Condamne M. [E] aux dépens.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 12/02909
Date de la décision : 03/04/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°12/02909 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-03;12.02909 ?
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