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03/04/2014 | FRANCE | N°12/03995

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 03 avril 2014, 12/03995


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 03 Avril 2014

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/03995 - CM



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Mars 2012 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de CRETEIL section commerce RG n° 07/02136



APPELANTE

Madame [C] [F]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Ernest SFEZ, avocat

au barreau de PARIS, toque : C2042



INTIMEE

SAS COLIN TEAM TOY

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Corinne CASTAGNÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : P0384



COMP...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 03 Avril 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/03995 - CM

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Mars 2012 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de CRETEIL section commerce RG n° 07/02136

APPELANTE

Madame [C] [F]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Ernest SFEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : C2042

INTIMEE

SAS COLIN TEAM TOY

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Corinne CASTAGNÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : P0384

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mars 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Catherine MÉTADIEU, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine METADIEU, Présidente

Mme Marie-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

Greffier : Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Mme Catherine METADIEU, présidente et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

[C] [F] a été engagée par la société Garage J. Fournier, à compter du 15 juillet 2002, en qualité de comptable, selon contrat de travail à durée indéterminée, régi par la convention collective du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et de ma motocyclette et des activités connexes ainsi que celle du contrôle technique automobile.

Le 31 décembre 2003, la société Garage J. Fournier a cédé son fonds de commerce à la Sas Colin Team Toy qui en a repris les salariés.

Le 4 mai 2007, [C] [F] a remis à la Sas Colin Team Toy sa démission.

Remettant en cause sa démission elle a saisi le 1er mars 2012, le conseil de prud'hommes de Créteil.

Elle sollicitait la reconnaissance du statut de cadre ainsi que des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement en date du 1er mars 2012, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a débouté [C] [F] de l'intégralité de ses prétentions et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Appelante de cette décision, [C] [F] demande à la cour de l'infirmer, et statuant à nouveau, de :

1/

- juger que la rupture de son contrat de travail est imputable à l'employeur

- condamner la Sas Colin Team Toy à lui payer les sommes de :

' 8 409 € de préavis,

' 840,90 € de congés payés afférents,

' 3 037,05 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 2 803 € d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

' 41 847,36 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 5 632,20 € d'indemnité de fin de carrière,

- ordonner la remise des documents sociaux conformes, sous astreinte de 50 € par jour de retard 2/

- prononcer la requalification de son statut de comptable en statut de cadre de comptabilité

- condamner la Sas Colin Team Toy à lui payer les sommes de :

' 589,20 € de rappel de salaire,

' 58,92 € de congés payés afférents,

En tout état de cause,

- condamner la Sas Colin Team Toy au paiement de la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

- assortir les condamnations des intérêts au taux légal, avec capitalisation au titre de l'article 1154 du code civil.

La Sas Colin Team Toy conclut à la confirmation du jugement déféré, au débouté d'[C] [F] de toutes ses demandes et à sa condamnation au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour l'exposé des faits, prétentions et moyens des parties, aux conclusions respectives des parties déposées à l'audience, visées par le greffier et soutenues oralement.

MOTIVATIOn :

Sur le niveau de qualification d'[C] [F] :

[C] [F] expose :

- qu'elle a été engagée en qualité de comptable ayant les fonctions suivantes :

- tenue et suivi de la comptabilité générale

- établissement des informations et documents analytiques et budgétaires de la société, des balances et pré-bilan, des écritures d'inventaires, de l'établissement des déclarations comptables et fiscales,

ce qui correspond à la référence N.6.1 de la qualification de comptable dont les fonctions sont énumérées au répertoire national des certifications des services de l'automobile.

- qu'à partir de janvier 2004, ses responsabilités se sont accrues, qu'elle exerçait à [Localité 1], à proximité de la direction, qu'elle avait en charge deux sites, qu'elle est devenue la supérieure hiérarchique de Madame [K], la deuxième comptable, que ses fonctions ont évolué de telle sorte qu'elles correspondaient à la fiche N.C.1.1 du Rnqsa, soit à la qualification de cadre de comptabilité,

- que la convention collective applicable précise que les cadres de niveau III, classification à laquelle elle peut prétendre, 'sont ceux qui assument de larges responsabilités exigeant une forte expérience et une réelle autonomie de jugement et d'initiative, en particulier dans la direction d'un des services de l'entreprise'.

La Sas Colin Team Toy réplique qu'[C] [F] n'assumait pas la responsabilité de l'ensemble des activités de comptabilité comme n'ayant ni les qualifications ni les compétences pour ce faire, que c'est l'expert-comptable de la société qui était chargé d'accomplir les opérations comptables complexes.

[C] [F] a été embauchée comme comptable, correspondant à un emploi relevant de la catégorie personnel de maîtrise selon la convention collective en vigueur à cette époque.

Le répertoire national des qualifications des services automobiles (Rnqsa) distingue huit qualifications au titre des emplois de comptabilité.

[C] [F] revendique la qualification cadre, niveau III A, niveau la plus haute des qualifications comptables du Rnqsa prévoyant pour cette catégorie :

'Le chef de comptabilité assure la responsabilité de la réalisation de l'ensemble des activités comptabilité : de l'élaboration et du suivi de budget à l'établissement des documents comptables.

Il intervient dans le cadre d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises dans laquelle l'activité de comptabilité, du fait de son importance, peut être structurée en plusieurs pôles distincts (paie, fournisseurs, clients, facturation...). Il a sous sa responsabilité l'ensemble des cadres et du personnel du secteur'.

Les activités relevant de cette qualification sont les suivantes :

'A. Activités relevant au management du secteur comptabilité :

- appui à l'encadrement du secteur comptabilité ;

- encadrement des collaborateurs ;

- attribution de missions, participation au recrutement aux modalités de rémunération, à la définition et au suivi du plan de formation au suivi de l'évolution des carrières, au tutorat de jeunes en formation alternée, etc...

B. Gestion et organisation des activités comptables :

Le chef comptable réalise ou assure la responsabilité des activités suivantes :

- organisation de l'activité du secteur comptabilité, répartition dans activités, suivi et contrôle des résultats...;

- encadrement de l'ensemble des activités relatives au secteur de la comptabilité, telles que paie, déclarations sociales et fiscales, gestion des comptes clients, gestion des comptes fournisseurs...;

- suivi de l'activité : collecte de données, élaboration et actualisation de tableaux de bord comptables, production de rapports d'activité ...;

- préparation et suivi du budget prévisionnel de l'entreprise ;

- établissement du bilan du compte de résultat, de l'annexe :

- gestion de la trésorerie ;

- négociation des conditions bancaires ;

- contribution à l'élaboration et à la mise en oeuvre de démarches qualité ;

Le chef de comptabilité s'assure de l'application des règles, normes et procédures en matière de comptabilité, de contrôle interne, de fiscalité et de droit social'.

[C] [F] n'apporte aucun élément justifiant de ce qu'elle remplissait l'ensemble des missions ci-dessus.

En revanche, la Sas Colin Team Toy verse aux débats l'attestation de l'expert comptable de l'entreprise, M. [V] qui déclare avoir accompli de début 2007 au 30 septembre 2009, les tâches suivantes :

- établissement des documents comptables : bilan, compte de résultats, annexes,

- établissement des déclarations fiscales,

- arrêté de gestion,

- analyse des situations de gestion,

- finalisation pour établissement définitif des tableaux de gestion Toyota

- établissement des fiches de paie et des déclarations annuelles (Dads 1 et 2).

Il en résulte qu'[C] [F], si elle était chef comptable niveau agent de maîtrise, n'assurait pas les missions complexes de comptabilité dévolues par le Rnqsa, au chef de comptabilité, niveau cadre.

Il convient donc de la débouter de sa demande de reconnaissance du statut de comptable niveau cadre.

Sur la rupture du contrat de travail :

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

[C] [F] a donné sa démission le 4 mai 2007, en ces termes :

' Par la présente, je vous informe qu'à dater du 5 juillet 2007, je ne ferai plus partie de votre personnel'.

Elle a reçu son solde de tout compte le 31 juillet 2007 et l'a dénoncé le 27 septembre suivant, faisant valoir qu'ayant obtenu des assurances concernant sa qualification et l'augmentation de son salaire, elle avait accepté de poursuivre son activité, qu'alors qu'elle attendait sa fiche de paie de juillet 2007, elle avait eu la surprise de se voir remettre un solde de tout compte, qu'une rencontre a eu lieu le 11 septembre, mais qu'aucune suite n'a été donnée concernant la révision de son dossier.

La démission d'[C] [F], selon ce dernier courrier, n'était ni claire ni dépourvue d'ambiguïté, dès lors qu'elle estimait ne pas être remplie de ses droits et qu'elle revendiquait une qualification professionnelle supérieure à celle qui était la sienne ainsi qu'une augmentation de salaire corrélative.

En acceptant que la salariée travaille au-delà du terme du préavis, ce sans soit que soit formalisé un quelconque accord entre les parties témoignant de leur volonté de prolonger la durée du préavis de quelques semaines et pour quelque motif que ce soit, l'employeur a reconnu que non seulement [C] [F] s'était rétractée, mais encore a nécessairement et implicitement admis la poursuite de la relation contractuelle initiale.

Il en résulte que la Sas Colin Team Toy ne pouvait remettre à [C] [F] son solde de tout compte sans avoir auparavant mis oeuvre une procédure de licenciement.

La rupture du contrat de travail dans ces circonstances est constitutive d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

[C] [F] percevant un salaire mensuel de 2 744,08 €, il lui sera accordé les sommes suivantes :

- 5 488,16 € d'indemnité compensatrice de préavis

- 548,81 € de congés payés afférents

- 2 744,08 € d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise, dont il n'est pas soutenu qu'il est inférieur à 11 salariés, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à [C] [F], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-3 du code du travail, une somme de 24 500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cette dernière sera déboutée de sa demande d'indemnité pour inobservation de la procédure, cette indemnité ne se cumulant pas avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnité de fin de carrière

[C] [F] revendique l'application de l'article 4.11 de la convention collective applicable et sollicite la somme de 5 632,20 € à titre d'indemnité de fin de carrière.

Elle avait 59 ans au moment du licenciement et justifie par la production de ses certificats de travail avoir commencé à travailler comme comptable depuis le 23 décembre 1996 sans discontinuité quand bien même elle a changé trois d'employeur.

Elle verse également son relevé de carrière Arrco et régime général.

Il résulte de l'ensemble de ses éléments qu'[C] [F] remplit les conditions de l'article 4.11 b de la convention collective applicable lui ouvrant droit à la perception d'un capital de fin de carrière.

Il convient par conséquent de condamner la Sas Colin Team Toy à lui verser la somme de 5 632,20 € qu'elle réclame et dont les modalités de calcul ne sont pas remises en cause par l'employeur.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur d'[C] [F] et de lui allouer la somme de 1 800 € à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré

Condamne la Sas Colin Team Toy à payer à [C] [F] les sommes :

- 5 488,16 € d'indemnité compensatrice de préavis

- 548,81 € de congés payés afférents

- 2 744,08 € d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 5 632,20 € d'indemnité de fin de carrière

- 24 500 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 800 € en application l'article 700 du code de procédure civile

Déboute les parties du surplus de leurs demandes

Condamne la Sas Colin Team Toy aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 12/03995
Date de la décision : 03/04/2014

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°12/03995 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-03;12.03995 ?
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