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10/04/2014 | FRANCE | N°12/14559

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 10 avril 2014, 12/14559


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 10 AVRIL 2014



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/14559



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 avril 2012 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - 1ère Chambre - RG n° 2009F00318





APPELANTE



SAS ENTREPRISE VALERIAN

domiciliée [Adresse 2]



Représentée par Me Florence

Eva MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R251







INTIMÉE



SAS CEMEX GRANULATS RHÔNE MÉDITERRANÉE

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette q...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 10 AVRIL 2014

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/14559

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 avril 2012 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - 1ère Chambre - RG n° 2009F00318

APPELANTE

SAS ENTREPRISE VALERIAN

domiciliée [Adresse 2]

Représentée par Me Florence Eva MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R251

INTIMÉE

SAS CEMEX GRANULATS RHÔNE MÉDITERRANÉE

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité

ayant son siège social [Adresse 1]

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Représentée par Me Denis-Clotaire LAURENT, avocat au barreau de PARIS, toque : R010

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 janvier 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Valérie MICHEL- AMSELLEM, Conseillère faisant fonction de Présidente, chargée du rapport et Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Valérie MICHEL- AMSELLEM, Conseillère

Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Emmanuelle DAMAREY

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Madame Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCÉDURE

Par un contrat conclu le 13 avril 2005, la société Cemex Granulats Rhône Meditérranée (la société Cemex) a confié à la société Entreprise Valerian (la société Valerian) l'exploitation, pour son compte, de trois carrières dénommées [Localité 2], [Localité 3] et [Localité 1], situées dans le midi de la France pour une période de trois ans renouvelable ensuite d'année en année par tacite reconduction.

Le contrat n'a pas été dénoncé à son issue dans les délais prévus par ses dispositions et les parties ont tenté sans y parvenir de le renégocier. Les pourparlers ayant été rompus, la société Valerian, qui estimait que la société Cemex n'avait pas respecté les montants de tonnage au regard desquels les prix des prestations avaient été fixés et qu'il en résultait pour elle un préjudice, a réclamé à celle-ci le paiement de dommages et intérêts ainsi que d'une indemnité pour avoir résilié du contrat.

Faute de réponse, la société Valerian a par acte du 20 mars 2009, fait assigner la société Cemex en paiement.

Par jugement rendu le 10 avril 2012, le tribunal de commerce de Créteil a :

- condamné la société Cemex à payer à la société Valerian la somme de 203 822 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2009 ;

- ordonné la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1154 du code civil à compter du 20 mars 2009 ;

- débouté la société Valerian du surplus de sa demande ;

- débouté la société Cemex de ses demandes reconventionnelles ;

- condamné la société Cemex à payer à la société Valerian la somme de 4 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, débouté la société Valerian du surplus de sa demande et débouté la société Cemex de sa demande formée de ce chef.

Vu l'appel interjeté le 30 juillet 2012 par la société Valerian contre cette décision ;

Vu l'appel interjeté le 1er octobre 2012 par la société Cemex contre cette décision ;

Vu l'ordonnance de jonction en date du 6 décembre 2012 ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 11 décembre 2013 par la société Valerian, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Créteil le 10 avril 2012 ;

Et, statuant à nouveau :

- condamner la société Cemex à verser à la société Valerian la somme de 527.710,66 euros TTC au titre du non respect de la clause de production minimale ;

- condamner la société Cemex à verser à la société Valerian la somme de 254.689,37 euros TTC au titre de la résiliation de son contrat ;

- assortir ces condamnations des intérêts moratoires du code de commerce au taux de 8% à compter du 23 juin 2008 et de leur capitalisation à l'expiration d'un an d'intérêts échus, - conformément à l'article 1154 du code civil, soit à compter du 23 juin 2009 ;

A titre subsidiaire :

- désigner tel expert qu'il lui plaira, avec mission de :

. prendre connaissances des documents contractuels et de tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission,

. entendre tout sachant,

. déterminer le prix de revient des prestations effectuées sur les carrières litigieuses pendant l'exécution du contrat et les comparer avec le montant de la facturation correspondant à ce contrat,

. déterminer le pourcentage de frais indirects et le pourcentage des aléas et bénéfices de la société Valerian pour le bilan 2008,

. de manière générale, déterminer tous les préjudices subis par la société Valerian du fait de l'exécution du contrat litigieux ;

- mettre les frais d'expertise à la charge de la société Cemex, et assortir d'une astreinte par jour de retard de paiement, le règlement de la somme à consigner sur les frais d'expertise ;

En tout état de cause :

- condamner la société Cemex à verser à la société Valerian la somme de 12.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Valerian soutient que les commandes de la société Cemex ont porté dès le début de l'exécution du contrat sur des quantités inférieures à celles qui étaient prévues et que celle-ci doit en conséquence réparer le préjudice qui en est résulté pour elle.

Elle précise que les prix avaient été fixés au regard des tonnages énoncés dans le contrat et que les prétendues compensations que lui aurait accordées la société Cemex n'ont en réalité pas existé. Elle soutient que sa partenaire a été de mauvaise foi et lui a faussement laissé espérer que le contrat serait rééquilibré lors de sa renégociation.

L'appelante soutient aussi que si c'est elle qui a adressé une lettre mettant en demeure la société Cemex de prendre parti sur la continuation du contrat, celle-ci est bien l'auteur de la rupture car elle n'a pas répondu à ses propositions. Elle fait valoir que la société Cemex avait en réalité anticipé son remplacement par une société concurrente et qu'elle aurait dû lui adresser une mise en demeure de replacer ses outils d'exploitation sur les sites.

Elle indique qu'en l'ayant brutalement remplacée sur le chantier par des tiers, sans raison et sans l'avoir mise en demeure, la société Cemex a méconnu la procédure de résiliation et a ainsi résilié le contrat de manière abusive. Elle précise, par ailleurs, n'avoir commis aucune faute qui aurait justifié que la société Cemex, d'une part, résilie unilatéralement le contrat en se fondant sur l'exception d'inexécution.

Elle expose que c'est la société Cemex qui, par son silence, est à l'initiative de la résiliation intempestive du contrat, et qu'elle est bien fondée à demander à être indemnisée de ce fait, les demandes reconventionnelles de la société Cemex étant dépourvues de tout fondement.

Vu les dernières conclusions signifiées le 14 novembre 2013 par la société Cemex, intimée et appelante incidente, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire la société Valerian tant irrecevable que mal fondée en tous ses moyens, fins et conclusions ;

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle a prononcé la condamnation de la société Cemex au profit de la société Valerian pour la somme de 203.882 euros ;

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté toutes les autres demandes de la société Valerian ;

Et statuant à nouveau :

- débouter la société Valerian de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société Valerian à payer à la société Cemex la somme de 33.169 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamner la société Valerian à payer à la société Cemex la somme de 20.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société Valerian à payer à la société Cemex la somme de 8.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Cemex soutient que le contrat ne contient aucune clause expresse de garantie contractuelle de tonnage et qu'à défaut d'une telle stipulation, la société Valerian est mal fondée à revendiquer le paiement de compensation. Elle fait valoir qu'elle a été contrainte de réduire ses commandes à la suite d'évènements extérieurs indépendants de sa volonté et que faute d'avoir demandé une renégociation, la société Valerian ne peut demander réparation d'autant qu'elle lui a accordé des compensations par la commande de travaux sans mise en concurrence de ses tarifs.

Elle affirme qu'elle a de plus accepté de modifier les tarifs concernant la carrière de [Localité 2] en janvier 2008, et que cet accord a convenu à la société Valerian qui a souhaité reconduire l'accord. Elle précise qu'elle n'est pas à l'origine de la résiliation et qu'elle était en droit de tirer les conséquences du comportement de la société Valerian qui avait déclaré par écrit qu'elle allait retirer ses moyens de production, et effectivement d'ores et déjà engagé ce retrait.

L'intimée expose que la société Valerian a décidé de ne respecter aucune de ses obligations contractuelles et de rompre de façon unilatérale et immédiate le contrat en retirant les moyens mis à disposition, tant en hommes qu'en matériel, alors que le contrat de 2005, qui était en vigueur pour avoir été reconduit, avait pour objet une continuité d'exploitation et la satisfaction des besoins continuels de granulat.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée, ainsi qu'aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande d'indemnisation relative au non respect des montants de production prévus par le contrat du 13 avril 2005

Le Contrat conclu entre les parties précisait sous le titre « Charges et conditions » que « Il est rappelé que les conditions du présent contrat sont établies pour une production moyenne de : 150 000 tonnes par an à [Localité 1], et 280 000 tonnes par an sur [Localité 2] et 300 000 tonnes par an sur la Mole (variation de plus ou moins 10 %) ». Il n'est pas contesté par la société Cemex que ces minimums n'ont pas été respectés et que ses commandes ont été d'un total annuel inférieur à ces prévisions. Par ailleurs, les parties s'accordent pour considérer que la signification de cette clause est que les termes du contrat, en particulier les prix, avaient été définis au regard de ces minimaux de production.

La société Valerian soutient qu'en ne lui permettant pas de réaliser les quantités minimales de commandes prévues par le contrat, la société Cemex a commis une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle. Elle fait valoir qu'il est sans portée que le non respect des minima aient été causés par des évènements extérieurs à la société Cemex et elle oppose que celle-ci n'a pas compensé la perte que ce non respect représentait pour elle, contrairement à ce qu'elle prétend.

L'appelante produit une attestation de M. [K], son ancien responsable, qui indique constater que dans des conclusions de 2011 la société Cemex aurait reconnu avoir délibérément minoré les quantités commandées ce qui prouverait, selon lui qu'«(...) elle nous a sciemment trompés sur ses besoins et fait subir des pertes intentionnellement à Valerian (...) ». Il ne peut toutefois être tiré des écritures par lesquelles la société Cemex expose les circonstances qui l'ont conduite à réduire les quantités commandées à la société Valerian, et qui lui sont effectivement extérieures, la démonstration de ce qu'elle aurait, ainsi que le soutient M. [K], sciemment trompé sa partenaire pour lui faire subir des pertes. Par ailleurs, outre que celle-ci ne précise pas quelles auraient été les motifs pour lesquels la société Cemex aurait souhaité l'affaiblir, aucun élément du dossier ne permet d'étayer l'allégation selon laquelle, la société Cemex aurait sciemment trompé la société Valerian sur les quantités qu'elle entendait lui commander.

La société Cemex soutient que pour compenser les pertes que pouvaient représenter pour la société Valerian les montants de commandes inférieurs aux prévisions, elle lui a confié des travaux supplémentaires, notamment, les travaux de découverte sur le site de la Mole sans mise en concurrence, ainsi que des travaux de curage envisagés sur la carrière de [Localité 2], ce dont témoigne son ancien directeur de carrière, M. [X].

Quand bien même l'objectivité des déclarations de M. [X] en la faveur de son ancien employeur doit elle être appréciée avec circonspection, la réalité des compensations relatées dans l'attestation est confortée par plusieurs éléments de preuve produits par la société Cemex. Ainsi, notamment, les devis concernant les travaux de curage de la carrière de [Localité 2], établis par les sociétés Spada et Valerian, montrent que cette dernière, bien qu'ayant présenté une offre plus élevée que sa concurrente a été chargée des travaux. Il est sans portée à ce sujet qu'elle ait finalement facturé une somme inférieure au devis, ce qui s'explique par un volume traité moins important que ce qui avait été prévu et par le fait qu'elle n'a pas facturé les frais d'« amenée » du matériel, ce qui était pourtant indiqué dans son offre. Par ailleurs, la société Valerian ne conteste pas avoir bénéficié entre 2005 et 2008, sur les trois sites, des travaux de « location de matériels en régie » et de chargements de blocs, détaillés dans un tableau produit par la société Cemex et dont le montant total s'est élevé à 2 156 775,69 euros. Elle ne conteste pas non plus avoir effectué les travaux de découverte sur le site de [Localité 3], ni ne démontre qu'elle aurait pour ce faire été mise en concurrence et aurait dû présenter une offre moins disante, ainsi que l'exigeaient pourtant les conditions particulières du contrat s'agissant des travaux annexes.

En outre, il est constant qu'en novembre 2007, les parties se sont accordées pour augmenter le prix dit « de chargement » concernant la carrière de [Localité 2]. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette augmentation de prix ait concerné les deux autres carrières. En effet, l'attestation de M. [K] ne fait porter l'augmentation reconnue que sur celle de [Localité 2] et la société Cemex ne démontre qu'elle se serait étendue aux deux autres, l'attestation de son ancien président, M. [S], limitant d'ailleurs l'augmentation à la seule carrière de [Localité 2]. Toutefois, cette augmentation démontre que la société Valerian était en mesure de négocier lorsqu'elle estimait que le contrat ne lui était pas profitable.

Enfin, il convient de relever que la société Valerian ne produit aucun élément qui démontrerait qu'elle n'a pas été satisfaite des compensations offertes par la société Cemex ou que celles-ci ne correspondaient qu'à des travaux supplémentaires totalement indépendants, ainsi qu'elle le prétend. Ainsi, bien que l'exécution du contrat se soit révélée, compte tenu des montants de commande, défavorable pour elle, la société Valerian ne produit aucun élément qui attesterait qu'elle aurait, au moment de la négociation sur la reconduite du contrat, adressé une revendication de réparation de pertes qu'elle aurait pu subir par le passé. Bien au contraire, non seulement elle ne l'a pas dénoncé à son échéance, comme elle aurait pu le faire, mais de plus, elle a souhaité le reconduire, ce qui est en complète contradiction, d'une part, avec l'importance des pertes qu'elle soutient avoir subies du fait de son exécution, d'autre part, avec l'impossibilité de négocier dont elle accuse sa partenaire.

De l'ensemble de ces éléments il résulte qu'il n'est pas établi que la société Cemex aurait commis une faute contractuelle dans la mise en 'uvre du contrat conclu avec la société Cemex. En conséquence, le jugement doit être réformé en ce qu'il a condamné cette dernière au paiement de dommages-intérêts à la société Valerian.

Sur la rupture du contrat

Le 28 avril 2008, la société Valerian a écrit à la société Cemex « Nous vous remercions de la confiance que vous nous avez accordée depuis trois ans. Sachez que nous nous sommes aussi investis pour répondre à vos attentes ; cependant le marché arrive à son terme au 1er mai 2008 et nous discutons avec vous depuis plusieurs semaines pour trouver un axe commun de collaboration future. Cependant votre décision tarde à venir et sans réponse de votre part, à échéance, nous considérerons que vous ne souhaitez pas poursuivre cette collaboration. Si tel est le cas nous prendrons nos dispositions pour retirer l'ensemble de nos moyens présents sur le site. »

La société Cemex n'a répondu à cette lettre que le 15 mai 2008 en rappelant à la société Valerian que le contrat avait été renouvelé faute d'avoir été résilié trois mois avant son échéance le 1er mai 2008. Elle prenait acte de ce qu'elle avait effectivement retiré ses moyens de la carrière le 9 mai précédent, précisait qu'elle avait dans ses conditions, été contrainte de faire appel à une autre société pour la remplacer et indiquait qu'elle considérait que la société Valerian était donc l'auteur et la responsable de la résiliation.

Il est exact que faute d'avoir été dénoncé en février 2008, comme le prévoyaient ses dispositions sur la durée, le contrat du 13 avril 2005 avait été reconduit pour une durée d'un an. Il n'est par ailleurs pas contesté que les parties avaient de part et d'autre accepté d'en renégocier les termes financiers, puisque toutes deux s'accordent sur le fait que des pourparlers sur ce point étaient menés et notamment qu'elles s'étaient rencontrées pendant le mois de mars 2008.

Le 4 avril 2008, la société Valerian avait adressé par courrier électronique à la société Cemex ses meilleurs prix pour « vos travaux de chargement et de transport ». Ces tarifs étaient identiques à ceux proposés à la société Cemex par la société Cazal, dans une offre du 2 avril 2008. Contrairement à ce que soutient la société Valerian, il n'est pas établi que la société Cemex aurait dès ce moment décidé de confier le marché à la société Cazal, aucun élément de preuve ne justifiant cette allegation.

Dans ces circonstances, la lettre du 28 avril précitée mettant en demeure la société Cemex de prendre parti sur l'offre de tarifs en la menaçant de retirer ses moyens des carrières et indirectement d'arrêter leur collaboration, puis de mettre cette menace à exécution, ont été des démarches de rupture à l'initiative de la société Valerian sans qu'aucun élément ne permettent d'imputer cette décision à la société Cemex, puisque le contrat étant reconduit, celle-ci n'avait pas d'obligation d'en négocier les tarifs à la hausse. Il est par ailleurs sans portée que la société Cemex n'ait pas adressé de mise en demeure après avoir constaté que la société Valerian avait retiré ses matériels des carrières et cessé le travail. En effet, celle-ci ayant pris l'initiative de la rupture, les dispositions du contrat qui, en tout état de cause ne concernaient pas le cas d'une cessation par la société Valerian de ses activités, n'étaient plus applicables. Enfin, il est, contrairement à ce que soutient la société Valerian, démontré par les constats d'huissier produits aux débats que les trois carrières étaient, à tout le moins le 14 mai 2008, dépourvues des matériels, engins et personnels d'exploitation de la société Valerian, la présence, le 21 mai 2008 sur le site de la carrière d'[Localité 1] d'une pelle mécanique dont le godet était démonté et d'un camion, ces deux engins étant à l'arrêt, ne rapporte aucune preuve qui serait de nature à remettre en cause la véracité des constats d'huissiers produits par la société Cemex.

Il se déduit de ce qui précède que la société Valerian a été à l'origine de la rupture et ne peut en conséquence demander la condamnation de la société Cemex à l'en indemniser. C'est donc à juste titre et par une motivation que la Cour adopte pour le surplus que le tribunal a rejeté cette demande.

Sur les demandes reconventionnelles

La société Cemex ne démontre pas la réalité du préjudice que lui aurait causé le départ de la société Valerian des trois carrières concernées par le contrat. En effet, les trois factures produites aux débats ne précisent pas que les matériaux livrés par les sociétés Lafarge, Carrière des grands Caous et Someca concernent la livraison de matériaux identiques à ceux produits dans les carrières exploitées par la société Valerian et que ces livraisons aient été nécessitées par la défection de la société Valerian. C'est donc à juste titre que le tribunal a rejeté cette demande.

Par ailleurs, le fait de se méprendre sur l'étendue de ses droits ne constitue pas à lui seul un abus et il n'est pas démontré en l'espèce que la société Valerian aurait agi avec légèreté blâmable ou avec malveillance. La demande de dommages-intérêts pour procédure abusive présentée par la société Cemex a donc, elle aussi, été justement rejetée par le tribunal.

Sur les frais irrépétibles

Il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la société Entreprise Valerian du surplus de sa demande et débouté la société Cemex Granulats Rhone Mediterannée de ses demandes reconventionnelles

Statuant à nouveau,

REJETTE la demande de la société Entreprise Valerian en paiement de dommages-intérêts relative au non respect des montants de production prévus par le contrat du 13 avril 2005 ;

DIT n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute demande autre, plus ample ou contraire des parties ;

CONDAMNE la société Entreprise Valerian aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile ;

Le GreffierLa Présidente

E.DAMAREYC.PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/14559
Date de la décision : 10/04/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°12/14559 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-10;12.14559 ?
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