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15/05/2014 | FRANCE | N°12/08388

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 15 mai 2014, 12/08388


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 15 MAI 2014



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/08388



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 avril 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - 9ème chambre 2ème section - RG n° 10/03398





APPELANTS



Monsieur [E] [L]

demeurant [Adresse 1]



Madame

[S] [L] née [I]

demeurant [Adresse 1]



Représentés par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936

Représentés par Me Agnès LASKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : C0710





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Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 15 MAI 2014

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/08388

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 avril 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - 9ème chambre 2ème section - RG n° 10/03398

APPELANTS

Monsieur [E] [L]

demeurant [Adresse 1]

Madame [S] [L] née [I]

demeurant [Adresse 1]

Représentés par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936

Représentés par Me Agnès LASKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : C0710

INTIMÉE

SAS AUDIT ET SOLUTIONS

agissant poursuites et diligences de son Président y domicilié en cette qualité

ayant son siège social [Adresse 2]

Représentée par Me Pascale BETTINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0140

Représentée par Me Thomas RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 février 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Valérie MICHEL-AMSELLEM, Conseillère chargée d'instruire l'affaire

Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Emmanuelle DAMAREY

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Madame Emmanuelle DAMAREY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte notarié du 30 décembre 2005, M. et Mme [L] ont acheté, par l'intermédiaire de la société Audit et Solutions, un appartement à [Adresse 3], en état futur d'achèvement, au prix de 263 800 euros, financé par un emprunt de 290 457 euros auprès de la banque Crédit Agricole du Midi.

Soutenant que le suivi de la livraison du bien acheté avait connu de graves dysfonctionnements et que les deux simulations qui leur avaient été faites par la société Audit et Solutions, étaient erronées, ils l'ont assigner en réparation devant le tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement rendu le 6 avril 2012, le tribunal de grande instance de Paris a :

- débouté [E] [L] et [S] [I] épouse [L] en leurs demandes ;

- condamné [E] [L] et [S] [I] épouse [L] aux dépens qui seront augmentés d'une somme de 2 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'appel interjeté le 4 mai 2012 par M. et Mme [L] contre cette décision.

Vu les dernières conclusions signifiées le 16 novembre 2012 par M. et Mme [L], par lesquelles il est demandé à la Cour de :

- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris ;

- dire et juger que la société Audit et Solutions a gravement failli à son devoir de conseil et d'information ;

- condamner la société Audit et Solutions à réparer le préjudice subi par M. et Mme [L] correspondant au paiement des sommes suivantes : 67 440 € au titre de la différence entre les loyers envisagés dans la simulation et les réels, 94 075 € au titre des intérêts non calculés et 19 710 euros au titre des assurances obligatoires, le tout avec intérêt au taux légal à compter du 20 décembre 2007 ;

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamner la société Audit et Solutions à payer à M. et Mme [L] la somme de 3 500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [L] soutiennent que la société Audit et Solutions n'avait pas seulement une mission d'agent immobilier, comme elle le prétend, mais un véritable rôle de conseil en gestion de patrimoine. Ils font valoir que celle-ci n'a pas rempli ses obligations de conseil et d'information. Ils précisent que les erreurs commises dans les simulations financières ont déterminé leur consentement.

Ils exposent que c'est bien l'intimée qui leur a fourni la simulation litigieuse et que bien que le document soit présenté comme « non contractuel », il s'agissait néanmoins d'un support déterminant de leur consentement à contracter.

Ils ajoutent que la simulation était trompeuse s'agissant du loyer pris en compte et du bénéfice annoncé et que de plus, l'inertie et le silence de la société Audit et Solutions qui ne les a pas suffisamment tenu informés des complications et des retards de livraison du logement ont constitué un manquement à ses obligations.

Les appelants exposent enfin qu'ils ont subi un premier préjudice lié au remboursement d'un prêt non couvert par le paiement des loyers et un second lié à l'impossibilité de revendre le bien sans perte financière importante.

Vu les dernières conclusions signifiées le 18 septembre 2012 par la société Audit et Solutions et par lesquelles il est demandé à la Cour de :

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions adverses qui sont et ou contraires à celles formées par la société Audit et Solutions ;

- confirmer le jugement entrepris ;

- y ajoutant condamner solidairement ou à défaut in solidum M. et Mme [L] à payer à la société Audit et Solutions une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée soutient que M. et Mme [L] avaient, lorsqu'ils se sont adressés à elle, déjà choisi le principe d'un achat immobilier et que se limitant à la discussion relative à la vente d'un tel bien, elle a agi comme agent immobilier et non pas comme un conseiller en gestion de patrimoine.

Elle précise qu'elle n'est intervenue que comme intermédiaire de la vente de l'immeuble, mais sans mandat de location ou de gestion, opérations pour lesquelles M. et Mme [L] ont mandaté deux autres agences.

S'agissant du devoir de conseil invoqué par M. et Mme [L], la société Audit et Solutions oppose qu'il n'est pas démontré que les tableaux de simulation aient émané d'elle et elle fait valoir qu'elle n'a pas manqué au devoir invoqué puisque, d'une part, la simulation n'avait pas de caractère contractuel et que, d'autre part, la valeur locative indiquée sur l'un de ces documents était celle indiquée par le vendeur et son mandant.

Concernant les préjudices liés aux retards et qualité insuffisante, l'intimée rappelle que cela est dû à des circonstances indépendantes de la volonté de la société Audit et solutions, qui n'avait aucun pouvoir sur le promoteur.

Elle expose qu'il n'y a pas de lien de causalité entre le préjudice prétendument subi et une faute de sa part, puisqu'elle n'a participé qu'à l'opération de vente et donc qu'elle a bien rempli ses obligations de moyens dans les informations données.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée, ainsi qu'aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la nature de l'intervention de la société Audit et Solutions

La société Audit et Solutions soutient qu'elle n'est intervenue auprès de M. et Mme [L] qu'en qualité d'agent immobilier et non de conseiller patrimonial. Elle reconnaît toutefois elle même qu'elle est spécialisée dans la vente d'immobilier neuf bénéficiant d'optimisation fiscale et indique que, si elle offre souvent un service de suivi pour la recherche de crédit et assiste ses clients jusqu'à la signature de l'acte, elle n'avait pas, en l'espèce, en charge d'accomplir une étude patrimoniale pour les appelants.

Il résulte des échanges de courriers électroniques produits qu'elle a été l'intermédiaire entre le promoteur de l'ensemble immobilier Euro Parc à [Localité 1] et M. et Mme [L] et qu'elle s'est chargée des formalités bancaires pour leur faire obtenir le prêt afférent à l'opération projetée (courriers électroniques de M. [L] à M. [B] des 20 et 21 novembre, 8 décembre 2005 pce. 6, 7, 9). Par ailleurs, sa plaquette de présentation produite par les appelants la présente comme étant spécialisée dans la présentation de solution d'investissement immobilier. Cette plaquette bien qu'elle soit postérieure aux carences reprochées indique que son développement date principalement de l'année 2004 et elle ne saurait de bonne foi nier qu'elle s'est présentée en 2005 comme spécialiste de l'investissement immobilier bénéficiant d'une optimisation fiscale et qu'elle était, à ce titre, tenue de délivrer une information sincère et appropriée à la demande de ses clients.

Cependant M. et Mme [L] ne rapportent pas la preuve de ce que la société Audit et Solutions s'est engagée envers eux à leur livrer une prestation globale dans laquelle elle se chargerait de toutes les démarches afférentes à leur projet d'achat. Le fait qu'une présentation de ses prestations soit faite en ce sens sur son site internet ne démontre pas que tel était le cas en 2005, lorsque les parties se sont engagées, et à défaut d'autre élément de preuve, notamment d'engagement écrit entre elles, il n'est pas établi que la société Audit et Solutions se soit engagée envers M. et Mme [L] à une obligation autre que celle de moyens de leur permettre d'investir de façon à bénéficier d'une optimisation fiscale.

Sur la violation par la société Audit et Solutions de ses obligations

Sur la provenance des documents de simulation

La société Audit et Solutions ne conteste pas sérieusement être l'auteur des tableaux de simulation que M. et Mme [L] invoquent à l'appui de leur demande. Elle explique d'ailleurs qu'aucune faute ne peut lui être reprochée à ce sujet car elle a repris pour établir ces documents l'évaluation locative qui avait été effectuée par la société Life Gestion, laquelle l'avait transmise au promoteur qui lui même la lui avait communiquée.

Cependant, la valeur locative reprise dans l'évaluation, quand bien même n'aurait-elle pas fait l'objet d'une étude sérieuse de la part de la société Audit et Solutions, ne pouvait être considérée comme certaine par M. et Mme [L] dans la mesure où il n'est pas contestable que le montant de loyers est une donnée fluctuante et évolutive dans le temps et l'espace. Il convient par ailleurs de relever que la différence entre le montant de loyer indiqué dans la simulation s'est révélée supérieure de 27 % à celui qui a finalement été pratiqué. Cette différence, compte tenu du caractère incertain et fluctuant d'une telle donnée, ne peut être retenue comme constitutive d'une faute de la part de la société Audit et Solutions envers M. et Mme [L]. Le fait que la société Audit et Solutions ait majoré le montant moyen des loyers par rapport à ce qu'énonçait le document d'information du promoteur ne peut non plus être retenu comme une faute de sa part dans la mesure où cette majoration demeurait de faible importance. De plus, M. et Mme [L] qui ont été destinataires du document du promoteur étaient en mesure de se rendre compte de la majoration en question. Enfin, la simulation précisait qu'elle était non contractuelle, ce qui ne pouvait qu'alerter leur vigilance.

S'agissant du « bénéfice » calculé dans le document de simulation, sa présentation sommaire n'apparaît, en tout état de cause, pas être de nature à pouvoir induire en erreur, puisqu'il ne comporte comme paramètres qu'un prix de vente égal au prix d'achat, dont est déduit le capital restant dû, laissant à son destinataire le soin d'ajouter tous les autres frais afférents à l'investissement immobilier, dont les intérêts. M. et Mme [L], bien que non spécialistes de l'immobilier ne pouvaient pas, compte tenu de leur niveau d'études, ne pas réaliser le caractère approximatif du calcul présenté. Aucune faute ne peut dans ces conditions être reprochée à la société Audit et Solutions.

Sur l'inertie et le silence de la société Audit et Solutions

M. et Mme [L] font valoir que la société Audit et Solutions aurait été négligente en ne répondant pas à leurs courriers électroniques et correspondances concernant, d'une part les retards pris dans la livraison du bien, d'autre part, leurs interrogations sur les possibilités qu'ils avaient de défiscaliser certaines sommes. Si les pièces qu'ils produisent démontrent une inertie certaine dans le suivi de l'opération, celle-ci ne peut être considérée comme fautive dans la mesure où les appelants ne rapportent pas la preuve, ainsi qu'il a été relevé précédemment, de ce que la société Audit et Solutions se serait engagée auprès d'eux à assurer ce suivi tant en ce qui concerne l'opération immobilière, que le conseil fiscal. Par ailleurs, et en tout état de cause, ils n'invoquent aucun préjudice qui serait résulté de l'inertie ainsi reprochée à la société Audit et Solutions.

C'est donc au regard de l'ensemble de ces éléments, à juste titre et par une motivation que la Cour adopte pour le surplus, que le tribunal a rejeté les demandes de réparation de M. et Mme [L]. Le jugement déféré doit donc être confirmé.

Sur les frais irrépétibles

Il est, compte tenu des éléments du litige, équitable de dire n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DIT qu'il n'y a pas lieu à prononcer de condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE toute demande autre plus ample ou contraire des parties ;

CONDAMNE M. et Mme [L] aux dépens qui seront recouvrés dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLa Présidente

E.DAMAREYC.PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/08388
Date de la décision : 15/05/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°12/08388 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-05-15;12.08388 ?
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