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16/10/2014 | FRANCE | N°12/09253

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 16 octobre 2014, 12/09253


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 16 Octobre 2014 après prorogation

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/09253

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Juin 2007 par le Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY - RG n° 06/01393 confirmé par la 18ème chambre E de la Cour d'appel de Paris par arrêt du 26 février 2009, dont la décision a été cassée par arrêt de la Cour de Cassation en date d

u 29 septembre 2010 qui a ordonné le renvoi devant la Cour d'Appel de Paris autrement composée.





APPELANTE

Madame [W] [T]

[Adresse 2]-

[Ad...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 16 Octobre 2014 après prorogation

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/09253

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Juin 2007 par le Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY - RG n° 06/01393 confirmé par la 18ème chambre E de la Cour d'appel de Paris par arrêt du 26 février 2009, dont la décision a été cassée par arrêt de la Cour de Cassation en date du 29 septembre 2010 qui a ordonné le renvoi devant la Cour d'Appel de Paris autrement composée.

APPELANTE

Madame [W] [T]

[Adresse 2]-

[Adresse 2]

non comparante, représentée par Me Gérard ARAKELIAN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 214

INTIMEE

SA SPRING TECHNOLOGIES

[Adresse 1]

représentée par Me Catherine LEGER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0703

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Juin 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DOUILLET, conseillère faisant fonction de Présidente et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu la saisine de cette cour, le 6 août 2012, par Mme [T] à la suite de l'arrêt de la Cour de cassation du 29 septembre 2010 ayant cassé et annulé l'arrêt rendu par cette cour le 26 février 2009 sur l'appel interjeté par Mme [T] à l'encontre d'un jugement prononcé le 12 juin 2007 par le conseil de prud'hommes de Bobigny ayant statué sur le litige qui oppose Mme [T] à la société SPRING TECHNOLOGIES sur ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail ;

Vu le jugement déféré qui

- a débouté Mme [W] [T] de toutes ses demandes,

- a débouté la société SPRING TECHNOLOGIES de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné Mme [T] aux dépens ;

Vu l'arrêt de cette cour en date du 26 février 2009 qui

- a confirmé le jugement du conseil de prud'hommes,

- a débouté les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné Mme [T] aux dépens ;

Vu l'arrêt de la Cour de cassation en date du 29 septembre 2010 qui a cassé en toutes ses dispositions l'arrêt de cette cour, remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

Mme [W] [T], appelante, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demande à la cour

- à titre principal : de juger que son licenciement est nul et, en conséquence, de condamner la société SPRING TECHNOLOGIES à lui payer la somme de 40 200 € à titre d'indemnité pour réparer l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement,

- à titre subsidiaire : de juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de condamner la société SPRING TECHNOLOGIES à lui payer la somme de 40 200 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- en tout état de cause : de condamner la société SPRING TECHNOLOGIES à lui payer la somme de 12 060 € à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral distinct, outre celle de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de fixer sur les sommes allouées les intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.

La société SPRING TECHNOLOGIES, intimée, conclut à la confirmation du jugement, au débouté de Mme [T] de l'ensemble de ses demandes et à sa condamnation à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

Par contrat écrit à durée indéterminée en date du 7 septembre 1999, à effet du 13 septembre 1999, Mme [T] a été engagée en qualité de développeur par la société SPRING TECHNOLOGIES, laquelle a pour activité l'édition et la distribution de logiciels et d'équipements, ainsi que la vente de services dans le domaine de l'informatique.

La convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils ("Syntec") est applicable.

Le 5 mai 2004, la société SPRING TECHNOLOGIES a convoqué Mme [T] pour le 18 mai 2004 à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Cette mesure a été prononcée par lettre du 26 mai 2004 pour cause réelle et sérieuse en ces termes :

' Depuis le mois d'octobre 2003, vous avez adopté un comportement totalement préjudiciable au bon fonctionnement du service, en instaurant délibérément un climat conflictuel avec votre supérieur hiérarchique, M. [H].

À compter de cette date en effet, vous avez tout d'abord refusé de le saluer, et lui avez adressé en revanche des mails en des termes particulièrement secs ou ironiques, prenant le moindre prétexte pour placer vos relations sur un terrain conflictuel.

Votre attitude d'opposition a atteint un degré supplémentaire le 27 avril 2004, puisque vous avez cru pouvoir porter de graves accusations à l'encontre de M. [H] et le dénigrer, aux termes d'un mail que vous m'avez adressé.

Vous avez ainsi affirmé que M. [H] :

- aurait refusé de vous intégrer au service informatique interne ;

- n'aurait 'aucune compétence technique dans vos domaines d'application' ;

- ne répondrait à la majorité de vos mails que sur relance ;

- aurait omis à plusieurs reprises de vous transmettre des informations ;

- aurait refusé les demandes permettant de faire évoluer votre poste ;

- ne vous aurait jamais soutenu lors des comités de direction ;

- chercherait « le moindre prétexte pour abuser de son autorité et pour faire des remarques non motivées avec une mauvaise foi évidente ».

En conclusion, vous avez justifié votre demande d'intégration au service informatique interne comme un moyen de 'vous soustraire au harcèlement moral de M. [H] ».

De telles accusations et un tel dénigrement de votre supérieur hiérarchique sont totalement inacceptables.

M. [H] ne s'est jamais opposé, comme vous l'affirmez, à votre intégration au service informatique interne, dans la mesure où vous n'avez jamais présenté de demande en ce sens avant le 27 avril 2004.

En outre, les seules remarques que M. [H] a été amené à vous faire étaient parfaitement légitimes et justifiées, puisqu'il vous a demandé à être prévenu au préalable d'une part, lorsque vous absentiez, d'autre part, lorsque vous envisagiez d'effectuer des heures supplémentaires.

Nous ne pouvons tolérer que vous mettiez en cause les compétences de votre supérieur hiérarchique, que vous instauriez un climat conflictuel permanent, et que vous vous placiez en opposition systématique avec ce dernier de façon totalement infondée. »

Le 11 avril 2006, Mme [T] a saisi le conseil de prud'hommes.

Dans son arrêt du 29 septembre 2010, la Cour de cassation a jugé qu'en retenant que le licenciement était justifié dès lors que la salariée avait abusé de sa liberté d'expression en imputant à son supérieur hiérarchique des faits de harcèlement moral majoritairement infondés, la cour d'appel, qui ainsi n'a pas caractérisé la mauvaise foi, a violé les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail.

Cette cour, désignée comme cour de renvoi, a été saisie le 6 août 2012.

SUR CE

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions écrites déposées par les parties à l'audience du 26 juin 2014 qu'elles ont développées oralement lors de cette même audience.

Sur le licenciement

Il résulte de l'article L. 1152-2 du code du travail qu'aucun salarié ne peut être licencié pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. L'article L. 1152-3 de ce même code prévoit qu'un licenciement intervenu en méconnaissance de cette disposition est nul.

En l'occurrence, il résulte sans conteste de la lettre de licenciement que l'employeur a licencié Mme [T] pour avoir, notamment, relaté des faits de harcèlement moral dont elle aurait fait l'objet de la part de M. [H], son supérieur hiérarchique.

Il appartient donc à cette cour de renvoi d'examiner si les faits de harcèlement moral dénoncés par Mme [T] sont établis et, dans la négative, si les griefs énoncés dans la lettre de licenciement - parmi lesquels l'accusation de harcèlement moral portée contre M. [H] - justifient le licenciement.

Sur le harcèlement moral et la nullité du licenciement

Pour soutenir qu'elle a fait l'objet de harcèlement moral de la part de M. [H], son supérieur hiérarchique, Mme [T] expose qu'alors qu'elle n'avait jamais eu de problème avec sa hiérarchie, elle a vécu, de septembre 2003 à mai 2004, une période particulièrement difficile puisque, dans un contexte de fusions entre plusieurs sociétés et de surmenage, elle a dû faire face au refus inexpliqué de son supérieur hiérarchique de lui allouer un outil informatique adaptée aux tâches qui lui étaient demandées et de lui communiquer le mot de passe administrateur qui lui aurait permis d'effectuer en temps et en heure les missions qui lui étaient demandées par le comité de direction qui lui fixait des dates impératives à respecter ; qu'en outre, elle a appris, à la lecture du journal interne de la société de janvier 2004, que son employeur avait décidé de mettre en place dans les mois suivants, un logiciel géré par une société extérieure qui allait nécessairement avoir un impact sur son poste de travail et mettre en cause la pérennité de son emploi ; qu'en dépit de ses demandes légitimes d'informations adressées verbalement et par écrit à son supérieur, ce dernier n'a jamais daigné lui répondre, pas plus qu'il ne l'a conviée aux réunions d'information sur la mise en place de ce logiciel, alors qu'il connaissait son état de stress très important ; que, par ailleurs, durant les dernières semaines avant l'envoi de son courriel du 27 avril 2004, qui était un véritable appel au secours adressé à la direction, M. [H] n'a pas hésité à remettre en cause ses heures supplémentaires pourtant réalisés avec son accord, à lui reprocher une absence d'une journée pour enfant malade en lui demandant de bien vouloir anticiper ses absences à l'avenir, à calculer une partie de ses objectifs 2003 sur la base d'un sondage plutôt médiocre réalisé par le service informatique interne dont elle ne faisait pas partie, à refuser d'aborder la question de ses objectifs pour l'année 2004 et, plus généralement, celle de son avenir au sein de la société.

Mais il résulte des pièces produites de part et d'autre :

- que Mme [T] avait pour fonction de réaliser le portage de l'application GAIA (Globale Application Intégration Architecture), d'améliorer et d'optimiser le logiciel de gestion interne de la société en intégrant à l'application GAIA des évolutions apportées en fonction des demandes des utilisateurs de la société ;

que les adaptations et les procédures étaient définies lors des comités de direction dont Mme [T] informait les membres des difficultés rencontrées par les utilisateurs internes,

- qu'en 2001, à la suite du licenciement de M. [G], directeur technique et créateur du logiciel GAIA, Mme [T], qui était la seule avec ce dernier à connaître cet outil de gestion, a été en charge de la totalité du support technique sous l'autorité de M. [H], directeur administratif et financier nouvellement engagé,

- qu'à partir d'octobre 2003, les relations entre M. [H] et Mme [T] se sont détériorées, la salariée, contrairement à ce qu'elle affirme, refusant de serrer la main de M. [H], ainsi qu'en attestent Mme [K] et M. [O],

- que le courrier électronique qu'elle a adressé le 23 février 2004 aux membres du comité de direction, MM. [U], [A] et [H], pour s'inquiéter de son avenir suite à la programmation, pour septembre 2004, d'un pilote ERP devant intégrer l'outil GAIA dont elle avait la charge, et qui se terminait par : 'J'attends de vous une réponse précise et rapide afin que je puisse prendre les dispositions qui s'imposent dans le cas où vous souhaitiez rompre notre collaboration à court ou moyen terme', a été suivi dès le lendemain d'un entretien avec M. [A], lequel atteste avoir rassuré la salariée en lui précisant qu'il aurait toujours besoin de quelqu'un pour s'en occuper ; que Mme [T] a été conviée à participer, le 3 mars 2004, à la réunion de présentation de l'ERP, après avoir reçu l'accord de M. [H] ; que pourtant, par courrier électronique du 5 avril 2004, Mme [T] a écrit à M. [H] en se référant à son précédent message du 23 février 2004 pour demander : « Puis-je encore espérer un retour officiel ou dois-je considérer ce silence comme révélateur '',

- que les entretiens individuels annuels se faisaient, ainsi que l'atteste Mme [K], en février et mars de chaque année et que s'il y avait un retard dans le service de M. [H], il concernait l'ensemble des salariés et pas seulement Mme [T],

- qu'il n'est pas établi qu'un nouvel ordinateur ait été promis à Mme [T] en septembre 2003,

- qu'à la demande de Mme [T], du 10 décembre 2003, d'attribution d'un nouveau PC plus rapide, il a été répondu, dès le 11 décembre 2003, qu'il était nécessaire de mettre à plat l'ensemble du parc informatique et qu'un ordinateur plus rapide lui serait en principe attribué en 2004,

- qu'il n'est pas établi que Mme [T] avait habituellement accès au mot de passe administrateur,

- que Mme [K] atteste que M. [H] laissait aux membres de son équipe une large autonomie d'organisation, Mme [V] précisant qu'il donnait généralement ses instructions oralement, ce qui peut expliquer l'absence ponctuelle de réponse écrite à certains courriers électroniques de Mme [T],

- que, d'une manière générale, les demandes exprimées par Mme [T] (de délai supplémentaire, de décalage des congés, de départ anticipé en fin de journée, d'aménagement d'horaires, de pose de journées pour s'occuper de son enfant ou pour raisons personnelles) étaient prises en compte et que l'employeur a répondu, pour la rassurer, à ses interrogations quant à son avenir au sein de l'entreprise,

- qu'aucune demande en paiement n'est formée au titre des heures supplémentaires invoquées.

Mme [T] fournit le certificat médical du Dr [I], neurologue, qui certifie, en juin 2006, lui donner des soins et précise notamment que Mme [T]'a présenté une période de troubles psychologiques en rapport avec des soucis professionnels de septembre 2003 à mai 2004 environ'. Mme [T] verse encore le certificat du Dr [S], psychiatre, qui atteste l'avoir suivie selon un rythme mensuel d'octobre 2004 à mai 2007. Ces éléments ne peuvent suffire, en soi, à faire présumer de l'existence d'un harcèlement moral de la part de M. [H].

Dans ces conditions, en l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée. La demande relative à la nullité du licenciement fondée sur l'article L. 1152-3 du code du travail et celle, subséquente, tendant à l'octroi d'une indemnité, dont il sera relevé qu'elles sont formées pour la première fois devant cette cour de renvoi, doivent, par conséquent, être rejetées.

Sur le bien fondé du licenciement

Le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.

Cependant, Mme [T] a été licenciée, non seulement pour avoir porté des accusations de harcèlement moral à l'encontre de son supérieur hiérarchique, mais également pour avoir délibérément instauré un climat conflictuel avec ce dernier, préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise, remis en cause ses compétences et adopté un comportement d'opposition systématique.

La société SPRING TECHNOLOGIES démontre qu'en plus d'imputer - sans fondement, comme il vient d'être exposé - des faits de harcèlement moral à son supérieur hiérarchique, dans un courriel du 27 avril 2004, adressé à l'intéressé, mais également à MM. [U] et [A], Mme [T], à compter du mois d'octobre 2003, a instauré délibérément un climat conflictuel avec sa hiérarchie :

- en refusant systématiquement et publiquement de saluer M. [H] (attestations [K] et [O]),

- en adressant à sa hiérarchie des courriels comminatoires ou ironiques (le 11 décembre 2003, à propos du mot de passe administrateur qu'elle n'avait jamais eu : 'Pourquoi un tel manque de confiance '' et, à propos de l'annonce de la remise d'un nouvel ordinateur courant 2004 : 'Une année comportant 12 mois, puis-je l'espérer dans le trimestre à venir ou dois-je me résigner à travailler encore une année dans ces conditions ' » ; le 23 février 2004 : 'J'attends de vous une réponse précise et rapide'; le 2 mars 2004 : 'Merci de me fournir une réponse avant le 5 mars 2004"),

- enfin, en remettant en cause de façon virulente, dans le courriel précité du 27 avril 2004, les compétences, l'autorité et la bonne foi de son supérieur hiérarchique, en ces termes :

' Le moment est certes mal choisi en cette période de licenciements économiques pour parler de mon cas personnel, mais je souhaite retrouver une certaine sérénité dans mon travail, perdue depuis des mois en partie par les différentes interventions de M. [H]. Suite au refus de M. M. [H], à mon sens non motivé, de m'intégrer au service informatique interne, je souhaite re-formuler cette demande sur les motifs suivants :

Concernant mon lien hiérarchique direct :

1. M. [H] n'a aucune compétence technique dans mes domaines d'application,

2. M. [H] ne répond à la majorité de mes mails que sur relance(s),

3. M. [H] a omis à plusieurs reprises de me transmette des informations, m'obligeant à réaliser dans l'urgence les mises à jour de GAIA correspondantes,

4. M. [H] refuse les demandes permettant de faire évoluer mon poste, pénalisant ainsi mon travail,

5. M. [H] ne m'a jamais soutenu lors des différents comités de direction, alors qu'il avait parfois les éléments pour le faire et n'a même jamais demandé que le bénéfice du doute me soit accordé,

6. M. [H] cherche le moindre prétexte pour abuser de son autorité et me faire des remarques non motivées avec une mauvaise foi évidente (...)'.

Le caractère bien fondé des reproches ainsi formulés par Mme [T] ne ressort pas des éléments du dossier. En effet, Mme [T] ne justifie pas avoir demandé à intégrer le service informatique interne avant son courriel du 27 avril 2004. Aucun élément ne permet de retenir que M. [H] aurait volontairement retenu des informations au détriment de Mme [T] ou qu'il aurait adressé à celle-ci des remarques non motivées ou encore qu'il ne l'aurait pas soutenue lors des comités de direction. Comme il a été dit, les reproches relatifs à la remise d'un nouvel ordinateur et à la communication d'un mot de passe administrateur ne sont pas justifiés et de nombreux courriels montrent que M. [H] accédait aux demandes de Mme [T]. Enfin, Mme [T] n'est pas restée sans réponse quant à ses inquiétudes. Il n'est pas démontré qu'elle ait été écartée des réunions la concernant. Les abus d'autorité et remarques injustes de M.[H] ne sont nullement établis.

De surcroît, M. [N] qui a assisté la salariée au cours de l'entretien préalable, atteste que Mme [T] a reconnu lors de cet entretien avoir 'instauré délibérément un climat conflictuel avec son supérieur hiérarchique'.

Indépendamment de l'accusation de harcèlement moral portée sans fondement contre M. [H], le comportement de Mme [T] ayant consisté à instaurer délibérément un climat conflictuel avec son supérieur hiérarchique et à mettre en cause de façon injustifiée, dans un courriel adressé à des tiers, à la fois ses compétences, son autorité et sa bonne foi, ne permettait pas la poursuite de la relation de travail.

Dans ces conditions, le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse. Le jugement de première instance sera confirmé sur ce point et Mme [T] déboutée de ses demandes contraires.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct

Pour les raisons qui ont été exposées supra, cette demande, fondée sur le harcèlement moral allégué, sera rejetée.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Succombant en son recours, Mme [T] sera condamnée aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

Il y a lieu, en équité, de laisser à la société SPRING TECHNOLOGIES la charge de ses frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Mme [T] de ses demandes relatives au harcèlement moral, à la nullité du licenciement, au préjudice moral distinct,

Condamne Mme [T] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société SPRING TECHNOLOGIES,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le Greffier,P/Le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 12/09253
Date de la décision : 16/10/2014

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°12/09253 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-16;12.09253 ?
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