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30/06/2022 | FRANCE | N°19/19649

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 10, 30 juin 2022, 19/19649


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 10



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19649 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA3MY



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Septembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/08019





APPELANTE



VOIES NAVIGABLES DE FRANCE (VNF)

Etablissement Public à caractère administratif

(EPA), représenté par son Directeur Général, Mr [T] [I], agissant en vertu d'une délibération portant délégation de pouvoir du conseil d'administration du 20 mars 2014 modifiée

[Adresse 1]

[A...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19649 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA3MY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Septembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/08019

APPELANTE

VOIES NAVIGABLES DE FRANCE (VNF)

Etablissement Public à caractère administratif (EPA), représenté par son Directeur Général, Mr [T] [I], agissant en vertu d'une délibération portant délégation de pouvoir du conseil d'administration du 20 mars 2014 modifiée

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Christophe PACHALIS de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K148

Assisté de Me Hervé CASSEL de CASSEL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0049, substitué à l'audience par Me Vincent DUBOIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

ASSURANCES SERVICE FLUVIAL (ASF)

S.A.S. ,immatriculée au R.C.S. de VERSAILLES sous le numéro 498 083 674

représentée par son dirigeant légal en exercice domicilié audit siège social est sis

[Adresse 2]

[Adresse 2]

et

GENERALI FRANCE ASSURANCES

S.A. , immatriculée au R.C.S. de PARIS sous le numéro 440 315 570

représentée par son dirigeant légal en exercice domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

et

L.M.P.S.

S.A.R.L. , immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 414 052 068

représentée par son gérant en exercice domicilié audit siège dont le siège social est sis

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentés et assistés à l'audience par Me Damien AYROLE de la SELASU AYROLE AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0786

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été appelée le 19 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence PAPIN, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte de l'affaire dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Florence PAPIN, Présidente

Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère

Madame Hélène FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Dorothée RABITA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

La société à responsabilité limitée L.M.P.S., ci-après « la SARL L.M.P.S. », assurée auprès de la société anonyme Generali France assurances, ci-après « la SA Generali France assurances », exploitait un convoi composé du pousseur « [Y] » .

Après avoir dans un premier temps saisi le tribunal administratif de Melun qui s'est déclaré incompétent, faisant valoir qu'un accident survenu le 1er août 2012 avait causé des dommages au convoi et était imputable à un défaut d'entretien normal de l'écluse de [Localité 5] et, plus généralement, de l'infrastructure, la SARL L.M.P.S., la SA Generali France assurances et la société par actions simplifiée Assurances service fluvial, ci-après « la SAS Assurances service fluvial », ont, par exploit d'huissier du 12 mai 2017, fait assigner l'établissement public de l'État à caractère administratif Voies Navigables de France, « ci-après l'EPAVNF », devant le tribunal de grande instance de Paris au visa de l'article 1384 alinéa 1 er devenu l'article 1242 du code civil.

Par jugement du 26 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a :

- condamné l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SAS Assurances service fluvial les sommes de 37 161,87 euros et 925,29 euros pour frais d'expertise, à titre de dommages et intérêts ;

- condamné l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SARL L.M.P.S. la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts ;

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date dudit jugement ;

- condamné l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SAS Assurances service fluvial la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné l'EPA Voies Navigables de France aux dépens ;

- dit que les dépens pourront être recouvrés par Me Damien Ayrole, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement ; et

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Par déclaration du 21 octobre 2019, l'EPA Voies navigables de France a interjeté appel du jugement du tribunal de grande instance de Paris.

Par ses dernières conclusions en réponse notifiées par voie électronique (RPVA) le 13 février 2020, l'EPA Voies Navigables de France, agissant en qualité d'appelant, demande à la cour d'appel de Paris de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

' condamné l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SAS Assurances service fluvial les sommes de 36 161,87 euros et 925,29 euros pour frais d'expertise, à titre de dommages et intérêts ;

' condamné l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SARL L.M.P.S. la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts ;

' dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date dudit jugement ;

' condamné l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SAS Assurances service fluvial la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamné l'EPA Voies Navigables de France aux dépens ;

' dit que les dépens pourront être recouvrés par Me Damien Ayrole, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

' dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement ; et

' débouté l'EPA Voies Navigables de France du surplus de ses demandes.

Et, statuant à nouveau,

Tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, pour le cas où la cour considérerait que la présence d'un encombrant dans le sas de l'écluse du [Localité 5] le 1er août 2012 serait établie et que celle-ci serait directement en lien avec une partie des dommages observés,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires de la SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S. comme étant mal fondées ;

À titre très subsidiaire et pour le cas où la cour considérerait néanmoins, et outre que la présence d'un encombrant dans le sas de l'écluse de [Localité 5] le 1er août 2012 serait établie et que celle-ci serait directement en lien avec une partie des dommages observés, que cette présence serait imputable à un défaut d'entretien normal de l'ouvrage,

- ramener à de plus justes proportions les demandes indemnitaires de la SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S., qui ne sauraient dans ces conditions excéder la somme de 14 041,25 euros s'agissant de la réparation des préjudices matériels ;

En tout état de cause,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires de la SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S. comme étant mal fondées ;

- condamner la SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S. à payer à l'EPA Voies Navigables de France la somme de 4 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile ; et

- condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'EPA Voies Navigables de France soutient que, si il est certes gardien de l'écluse au sens de l'article 1384 du code civil dans sa rédaction applicable au moment des faits, en particulier du sas de l'écluse qui constitue une chose inerte, il appartient aux intimés de prouver qu'il a eu un rôle actif dans la survenance du dommage et son caractère anormal pour démontrer qu'il constitue la cause du dommage survenu.

Or, à ce titre, l'appelant soutient qu'outre le constat d'accident de bateau rédigé le 1er août 2012 rédigé sur la base des seules déclarations du pilote, aucun dommage n'a été contradictoirement constaté.

Les experts qui ont examiné les dommages ne sont pas catégoriques et ne formulent que des hypothèses sur leur origine.

Aucun élément ne permet d'établir objectivement la présence d'un encombrant dans l'écluse, lequel aurait provoqué l'accident.

Partant, selon l'appelant, le lien de cause à effet avec le dommage ne serait pas démontré par les intimées.

À titre subsidiaire, l'EPA Voies Navigables de France soutient qu'aucun défaut d'entretien normal de l'ouvrage en lien avec le dommage constaté ne peut lui être imputé.

Il soutient en effet, en premier lieu, sur le fondement de la jurisprudence de la Cour de cassation, n'être tenu que d'une obligation de moyen. Or, il a satisfait à cette obligation dès lors qu'il a fait procéder à des levés bathymétriques le 28 septembre 2011, lesquels ont conduit aux dragages d'entretien et d'amélioration du chenal no 1.

Le dragage n'est pas, selon l'appelant, une opération de maintenance systématiquement réalisée selon une périodicité immuable, mais davantage une opération justifiée par des crues exceptionnelles, dont aucune n'a été relevée entre 2011 et 2012.

Il soutient, en second lieu, que la Haute Seine ne se trouvait pas à l'étiage dès lors que l'éclusier, le 1er août 2012, a constaté des surcotes du niveau du bief de [Localité 5] par rapport aux côtes de la retenue normale.

Il soutient, en troisième lieu, que l'obligation d'entretien des écluses ne suppose pas l'enlèvement de tous les obstacles s'y trouvant à chaque instant, seuls ceux dont la présence est prévisible ou est signalée devant être dragués.

En ce sens, l'appelant soutient que l'encombrant n'a été ni identifié ni retrouvé et n'a pas davantage été signalé par la SARL L.M.P.S. Enfin, selon lui, il est manifeste que l'encombrant, à supposer qu'il ait existé, était immergé, ce qui conduit à écarter un arrêt de la Cour de cassation relatif aux objets flottants.

Sur l'évaluation du préjudice : à titre très subsidiaire, l'EPA Voies Navigables de France soutient qu'une partie des dommages constatés résulte de la faute de la SARL L.M.P.S. et, en particulier, de sa décision de poursuivre l'exploitation du pousseur « [Y] » postérieurement à l'accident et de la vétusté dudit pousseur. Cette faute doit conduire, selon l'appelant, à minorer le montant de la réparation du préjudice subi auquel il doit être condamné. Or, l'appelant fait grief à l'arrêt d'entrepris de n'être fondé que sur le rapport d'expertise d'assurance de M. [J] [D] du cabinet ICE, lequel a retenu un préjudice à hauteur de 37 961,87 euros et n'a pas tiré toutes les conséquences de la faute de la SARL L.M.P.S. pourtant relevée. Partant, l'appelant soutient que seul le chiffrage retenu par le rapport de M. [H] [Z] du cabinet CESAM, soit au plus 14 041,25 euros, doit être retenu.

Par leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique (RPVA) le 19 août 2020, la SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S., prises en qualité d'intimées, demandent à la cour d'appel de Paris de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- débouter l'EPA Voies Navigables de France de ses demandes et conclusions

- condamner l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SAS Assurances service fluvial, qui fait l'avance des frais irrépétibles, la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; et

- condamner l'EPA Voies Navigables de France aux entiers dépens.

La SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S. soutiennent que le procès-verbal dressé par l'éclusier le 1er août 2012 a une valeur probatoire particulière dès lors que les éclusiers sont réglementairement investis d'un pouvoir de police.

Les intimées ajoutent que ce procès-verbal fait état d'un « vacarme, plus bruit, plus vibration dans les hélices, quelque chose est resté sous le pousseur. Donc réserve de montée sur cale. Choc Hélice ». Les intimées ajoutent que, la faute étant présumée, l'appelant ne peut s'exonérer de sa responsabilité que par la démonstration d'un cas de force majeure ou fortuit, tel n'étant pas le cas en l'espèce.

La SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S. soutiennent que le dragage du sas de l'écluse réalisé par l'appelant le 3 octobre 2011 est trop ancien en raison de la fréquence annuelle des crues de la Seine, lesquelles ont pu charrier des encombrants. Elles allèguent que l'appelant ne prouve pas l'exécution des obligations d'entretien qui lui incombent et qu'en tout état de cause, il ressort de l'examen réalisé le 1er août 2012 que les pales des hélices et des safrans ont été endommagés à la suite d'une prise d'encombrants.

Elles soutiennent, en second lieu, qu'à la date de l'accident, la rivière était à l'étiage, rapprochant ainsi la coque du bateau du fond de l'écluse et exposant la première aux encombrants.

Sur l'évaluation du préjudice, la SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S. soutiennent que la somme de 37 961,87 euros au titre du préjudice subi a été évaluée au cours de trois réunions d'expertise contradictoires, que la circonstance tirée de la poursuite de l'exploitation du pousseur postérieurement à l'accident a déjà été intégrée dans l'évaluation dudit préjudice par les experts et que si la SARL L.M.P.S. avait immédiatement mis fin à l'exploitation du pousseur «[Y] », elles réclameraient l'indemnisation du préjudice commercial né du défaut d'exploitation de cette unité.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément renvoyé pour les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité :

Selon l'article 1384, alinéa 1er, du code civil, ancien du code civil, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.

Le fait de la chose visé par cet article signifie que la chose a été, ne fût-ce que pour partie, l'instrument du dommage.

Une chose inerte ne peut être « l'instrument d'un dommage », si la preuve n'est pas rapportée qu'elle occupait une position anormale ou qu'elle était en mauvais état. Il appartient à la victime de rapporter la preuve du « rôle actif » de la chose inerte dans la réalisation du dommage.

Le gardien d'une chose instrument du dommage ne peut être exonéré qu'en démontrant que le dommage a été causé par la force majeure, le cas fortuit ou la cause étrangère.

L'article L 4311-1 du code des transports précise que l'établissement public VNF est chargé de l'exploitation, de l'entretien, de la maintenance des Voies navigables françaises (...).

C'est en qualité de gardien du sas de l'écluse que sa responsabilité est mise en cause.

Le 1er août 2012, un document intitulé 'constat d'accident de bateau. Les circonstances de l'accident' a été établi par un agent gestionnaire de l'écluse M.[B], signé par lui et par le conducteur du convoi, M.[X], la signature de ce dernier étant précédée de la mention ' lu et approuvée' faisant état d''un vacarme plus bruit plus vibration dans les hélices. Quelque chose est resté sous le pousseur donc réserve de montée sur cale.

Choc hélice'.

Page 18 des conclusions de l'appelant, on peut lire qu'il s'agit d'une écluse à grand gabarit, permettant le passage simultané de plusieurs bateaux et que 'compte tenu de ces dimensions, son bon fonctionnement et la sécurité des passagers sont assurés par la présence permanente de quatre agents de VNF'.

Il s'en déduit que le document précité n'a pu être établi sur la base des seules déclarations du conducteur et que l'agent responsable du fonctionnement de l'écluse, M.[B], a effectivement assisté à l'accident contrairement à ce qu'allégue l'EPA VNF.

Il atteste donc bien qu'un accident a eu lieu dans le sas de l'écluse le 1er août 2012 lors du passage du convoi [Y] en raison de la présence d'un encombrant et le fait qu'il n'ait pas été précisément identifié ou qu'il n'y ait pas eu d'autre incident importe peu.

Le pousseur a ensuite continué à être exploité jusqu'au 28 septembre 2012, date à laquelle les safrans et appareils de propulsion ont été déposés puis où l'EPA VNF d'une part, la SAS Assurances Service Fluvial d'autre part ont chacun missionné leur expert qui ont indiqué que les dommages correspondaient au moins pour partie, avec la prise d'un encombrant.

L'EPA VNF est tenu d'une obligation de moyens concernant l'entretien de l'écluse.

Le dragage du sas de l'écluse réalisé par l'appelant le 30 octobre 2011 ne peut suffire compte tenu de son ancienneté datant de 9 mois à démontrer que l'EPA VNF a satisfait à son obligation.

Les levés bathymétriques par sondage réalisés les 25 mai et 18 juillet 2012 ne constituent pas à proprement parler des opérations d'entretien. Le fait également que la rivière n'était pas à l'étiage est indifférent.

Dès lors, ne démontrant pas que le dommage a été causé par un cas de force majeur, un cas fortuit ou une cause étrangère, c'est à juste titre que le premier juge a retenu la  responsabilité de l'EPA VNF en qualité de gardien de l'écluse.

Sur l'évaluation du préjudice :

L'expert du CESAM, selon rapport en date du 2 octobre 2012, intervenant à la demande de l'assureur de l'EPA VNF, retient, dans la conclusion de son rapport, page 9, en lien avec l'accident, les dommages aux hélices et sur les safrans. Il évalue le préjudice à la somme de 14.041,25 euros.

Il résulte de l'expertise amiable de ICE réalisée par M.[D] à la demande de la SAS Assurances Service Fluvial que les désordres constatés sur les deux hélices de propulsion ainsi que les compensations de safrans sont en lien avec l'accident.

Il observe que les dommages affectent les deux lignes de propulsion ainsi que les plans directionnels et qu'il a été procédé au remplacement des propulseurs ruinés, à la remise en état des compensations des safrans, au remplacement des bagues de grain, à la rectification d'un des arbres porte hélice et qu'une partie significative des opérations de main d'oeuvre a été conduite par les préposés de LMPS.

Il retient au vu des factures produites, que le préjudice s'élève à la somme de 37.961,87 euros.

La société LMPS a été indemnisée par la SAS Assurances Service Fluvial représentant Generali à hauteur de 37.161,87 euros (pièce 6 des intimées : quittance subrogative).

Chaque expert a tenu compte dans son évaluation du fait que la continuation de l'exploitation a aggravé les préjudices matériels, M.[D] ne retenant que partiellement la demande soumise par la société LMPS.

Il y a lieu d'observer qu'un préjudice de perte d'exploitation aurait pu être demandé par la société LMPS s'il n'y avait pas eu de poursuite d'exploitation.

L'expert du CESAM a écarté la facture Chambon s'élevant à 2 494 euros relative à l' arbre à Hélice et aux grains au motif qu'elle serait sans lien avec l'événement. Il impute les dommages aux bagues à la vétusté et mentionne que la continuation de l'exploitation a ' immanquablement aggravé les dommages au système de propulsion' .

L'expert M.[D] considère que l'arbre porte hélice bâbord et ses bagues de grain doivent être changés étant abîmés alors qu'ils avaient été installés neufs en décembre 2011.

L'expert du CESAM ne s'explique pas par rapport à cet élément ni ne précise pour quelles raisons la poursuite d'exploitation aurait aggravé les dommages au système de propulsion se contentant de procéder par affirmation.

Il y a lieu de considérer que ce dommage, qui ne peut résulter de la vétusté, et ne peut être relié de manière certaine à la poursuite de l'exploitation, est bien en lien avec l'accident.

Monsieur [D] s'appuyant sur un écrit de la société Helicia a considéré, au vu de leur état, que les hélices, fortement déformées, n'étaient pas réparables et devaient être remplacées tandis que le CESAM considère que les déformations sont légères et dès lors réparables.

Cependant il résulte des photos produites par le CESAM que concernant l'hélice n°1, le bord de fuite de l'ensemble des pales présente des déchirures et que l'une des pâles est pliée de manière conséquente et que concernant l'hélice N°2, le bord de fuite de l'une des pâles est replié de manière conséquente et que l'ensemble des pales présente de légères déformations.

La société Hélicia a écrit le 5 décembre 2012, après examen des hélices, qu'il existe, au vu des fortes déformations, un risque de fissuration au moment du redressage lequel est aléatoire avec pour conséquence des vibrations lors du fonctionnement.

La victime devant être replacée dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit, et au vu de ces constats, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a retenu les conclusions de l'expert M.[D], condamné l'EPA VNF à payer à la SAS Assurances service fluvial les sommes de 37 161,87 euros et 925,29 euros pour frais d'expertise, à titre de dommages et intérêts et condamné l'EPA Voies Navigables de France à payer à la SARL L.M.P.S. la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la franchise restée à sa charge ;

Sur les demandes accessoires :

La décision déférée est confirmée en ce qui concerne l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

L'EPA VNF est condamné aux dépens d'appel et à payer au titre de l'article700 du code de procédure civile la somme de 3 000 euros aux intimées.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision entreprise,

Y ajoutant,

Condamne l'EPA VNF à verser à la SA Generali France assurances, la SAS Assurances service fluvial et la SARL L.M.P.S. une indemnité totale de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'EPA VNF aux dépens de l'appel,

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 19/19649
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.19649 ?
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