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28/02/2013 | FRANCE | N°11/02843

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 28 février 2013, 11/02843


NR/SB



Numéro 884 /13





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 28/02/2013







Dossier : 11/02843





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution









Affaire :



[Z] [P]



C/



Société SURTEL

























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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 28 Février 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile....

NR/SB

Numéro 884 /13

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 28/02/2013

Dossier : 11/02843

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

[Z] [P]

C/

Société SURTEL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 28 Février 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 09 Janvier 2013, devant :

Madame ROBERT, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, greffière.

Madame ROBERT, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur CHELLE, Président

Madame ROBERT, Conseiller

Madame PAGE, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [Z] [P]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par la SELARL PITICO, avocats au barreau de PAU

INTIMÉE :

Société SURTEL

[Adresse 1]

[Localité 2]

Comparante en la personne de Monsieur [H], gérant

sur appel de la décision

en date du 11 JUILLET 2011

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE PAU

Monsieur [Z] [P] a été engagé par la société SURTEL par contrat de travail à durée indéterminée en date du 5 mai 1993 en qualité d'installateur d'alarme et de technicien service après-vente.

Conformément à la demande de Monsieur [P] en date du 15 juillet 2002, la durée du travail de Monsieur [Z] [P] est réduite à 20 heures par semaine par avenant du 26 août 2002.

Par lettre recommandée en date du 30 avril 2010, Monsieur [Z] [P] prend acte de la rupture de son contrat de travail à compter de cette date pour manquements graves de l'employeur à ses obligations à savoir le non-paiement des salaires depuis le 15 novembre 2007, date à compter de laquelle l'employeur devait reprendre le paiement des salaires à défaut d'avoir procédé à son licenciement à la suite de l'avis d'inaptitude rendu le 15 octobre 2007 par le médecin du travail.

Le 18 mai 2010, Monsieur [Z] [P] dépose une requête auprès du Conseil de Prud'hommes de Pau aux fins de condamnation de la société SURTEL au paiement des sommes suivantes :

- rappels de salaires et primes d'ancienneté pour la période du 15 novembre 2007 au 30 avril 2010 : 33.914,93 € bruts

- indemnité de congés payés sur rappels de salaire et primes d'ancienneté : 3.391 €

- indemnité de préavis : 3.091,62 € bruts

- indemnité de congés payés sur préavis : 309,16 €

- indemnité conventionnelle de licenciement : 4.464 €

- dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 18.549,72 €

- dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, pour absence de mise en place du régime de prévoyance collective dans l'entreprise : 40.060,60 €

- différence entre 80 % du SJR des années 2010 et 2011 le montant perçu du 1er janvier 2010 au 1er octobre 2011

- article 700 du code de procédure civile : 1.500 €.

Par jugement en date du 11 juillet 2011, le Conseil de Prud'hommes de Pau :

- déboute Monsieur [Z] [P] de l'ensemble de ses demandes

- déboute la société SURTEL de ses demandes reconventionnelles

- déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires

- dit que les éventuels dépens resteront à la charge des parties.

Monsieur [Z] [P] interjette appel par lettre recommandée en date du 29 juillet 2011 du jugement qui lui est notifié le 13 juillet 2011.

Monsieur [Z] [P] demande à la Cour de :

- Vu les articles L. 1226-2 et suivants du code du travail

- Vu les articles 14 et suivants de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985

- Vu l'article 1382 du Code civil

- Vu les articles 514, 696 et 700 du code de procédure civile

- réformer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Pau en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [P] de ses demandes

- condamner la société SURTEL à payer à Monsieur [Z] [P] les sommes suivantes :

rappels de salaires et primes d'ancienneté pour la période du 15 novembre 2007 au 30 avril 2010 : 33.914,93 € bruts

indemnité de congés payés sur rappels de salaire et primes d'ancienneté : 3.391 €

indemnité de préavis : 3.091,62 € bruts

indemnité de congés payés sur préavis : 309,16 €

indemnité conventionnelle de licenciement : 4.464 €

dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse  : 18.549,72 €

dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, pour absence de mise en place du régime de prévoyance collective dans l'entreprise : 40.060,60 € plus la différence entre 80 % du salaire journalier de référence des années 2010 et 2011 et le montant des pensions perçues du 1er janvier 2010 au 1er octobre 2011

article 700 du code de procédure civile : 2.500 €.

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société SURTEL de ses demandes reconventionnelles

- ordonner, le cas échéant, la compensation de la somme de 1.524,45 € due par Monsieur [Z] [P] à la société SURTEL en remboursement d'un prêt, avec les sommes que cette dernière devra verser dans le cadre du présent litige

- condamner la société SURTEL aux éventuels dépens.

Dans des conclusions écrites, déposées le 12 novembre 2012, reprises oralement, Monsieur [Z] [P] soutient que l'employeur s'est abstenu de le reclasser mais également de procéder à son licenciement et de reprendre le versement de ses salaires alors qu'il a été déclaré inapte définitif par la médecine du travail le 15 octobre 2007.

C'est dans ces conditions qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 30 avril 2010.

Il sollicite le versement de ses salaires ainsi que de ses primes d'ancienneté pour la période du 15 novembre 2007, soit un mois après la déclaration d'inaptitude et la prise d'acte le 30 avril 2010.

Il soutient que la société SURTEL avait connaissance de la visite médicale de reprise qu'elle avait elle-même sollicitée et qu'elle a été informée par Monsieur [Z] [P] de la décision d'inaptitude par courrier recommandé du 27 décembre 2007 et par télécopie du 4 mars 2008.

La visite passée le 15 octobre 2007 constituait incontestablement une visite de reprise et non de pré reprise, sollicitée par le salarié auprès de son employeur qui a pris lui-même rendez-vous avec la médecine du travail pour le 15 octobre 2007 et lui a confirmé ce rendez-vous par courrier recommandé du 3 octobre 2007.

De plus, la société SURTEL n'a pas mis en place de régime de prévoyance dans l'entreprise alors que le régime de prévoyance collective instituée par la convention collective revêt un caractère obligatoire pour les entreprises en relevant depuis le 7 mars 2003.

Ainsi, il aurait dû percevoir une pension égale à 80 % de son salaire brut de référence de sa mise en invalidité le 1er novembre 2003 jusqu'au premier jour du trimestre civil suivant son 60e anniversaire qui interviendra le 5 juillet 2011. Il subit un préjudice égal à la différence entre 80 % du salaire brut de référence et les pensions versées par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie égales à 50 % du salaire brut de référence.

Il précise qu'ayant travaillé à temps complet et n'étant passé à temps partiel que peu de temps avant la reconnaissance de son invalidité, il peut percevoir une pension d'invalidité supérieure au dernier salaire perçu à temps partiel.

Le non-paiement des salaires par l'employeur constitue un manquement grave à ses obligations et justifie la prise d'acte de la rupture, laquelle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse; l'employeur devra lui régler l'indemnité de préavis, l'indemnité conventionnelle de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement abusif.

Il n'a aucun souvenir d'un prêt consenti par son employeur en 1993 et la société n'établit pas la réalité ni le lien avec le contrat de travail ; elle sera donc déboutée de sa demande reconventionnelle.

La société SURTEL demande à la Cour de :

- confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes du 11 juillet 2011 en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [P] de toutes ses demandes

- dire que le contrat de travail de Monsieur [Z] [P] a été rompu par la démission de celui-ci en date du 14 janvier 2004 ou, à tout le moins, a été suspendu jusqu'au 30 avril 2010

- dire que Monsieur [Z] [P] a été rempli de ses droits

- le débouter de l'ensemble de ses demandes

- accueillir la demande reconventionnelle et condamner Monsieur [Z] [P] à payer à la société SURTEL la somme de 1.524,49 € en remboursement du prêt qui lui a été accordé en 1993 sous astreinte de 20 € par jour de retard à partir de la décision

- condamner Monsieur [Z] [P] à 25.000 € de dommages-intérêts conformément à l'article 32-1 du code de procédure civile

- condamner Monsieur [Z] [P] au paiement à la société SURTEL d'une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner Monsieur [Z] [P] aux dépens.

Dans des conclusions écrites, déposées le 28 décembre 2012 et reprises oralement, la société SURTEL soutient avoir réglé les primes et compléments de salaire jusqu'à la fin des droits soit le 31 octobre 2003, ne plus avoir reçu de justificatifs d'absence à compter du 31 décembre 2003 et n'avoir été informée de l'inaptitude de Monsieur [P] que par sa lettre de prise d'acte du 30 avril 2010.

Elle conteste la signature des courriers du 27 septembre, 27 décembre 2007 et 4 mars 2008 qui ne sont pas de la main de Monsieur [P].

Monsieur [Z] [P] sera donc débouté de sa demande en paiement de salaires.

Elle soutient que l'adhésion à une caisse de prévoyance n'était pas obligatoire lors de la mise en invalidité niveau II de Monsieur [Z] [P].

En tout état de cause, elle a réglé les compléments de salaire de la CPAM suivant les directives de la convention collective Prévention et Sécurité jusqu'à la veille de la mise en invalidité par la CPAM.

De plus, le plafonnement par rapport aux salaires d'activité doit jouer ; en l'espèce, si Monsieur [Z] [P] avait travaillé en 2004, il aurait perçu 9.893,18 € sur la base de 20 heures par semaine or, il a perçu au titre de sa pension d'invalidité pour 2004 la somme de 11.079,40 € et sollicite celle de 6.647,34 €, ce qui doublerait la somme qu'il aurait gagnée s'il avait travaillé.

La visite médicale transmise le 3 octobre 2007, effectuée à la demande du salarié, est une visite occasionnelle qui ne rentre ni dans le cadre d'une visite de pré- reprise, ni de reprise, seule à même de mettre fin à la suspension du contrat de travail.

Aucun des courriers adressés par Monsieur [Z] [P] à la société SURTEL ne fait allusion à une fiche médicale qu'il aurait remise à l'employeur dans les délais légaux tout simplement parce qu'il s'est gardé d'en informer son employeur.

À défaut d'avoir été informé de l'inaptitude, à défaut de qualification de la visite médicale de visite de reprise l'employeur n'avait pas à reprendre le paiement de salaires alors que Monsieur [P] percevait de plus une pension d'invalidité supérieure au salaire qu'il aurait perçu s'il avait travaillé.

En conséquence, la rupture du contrat de travail ne peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société SURTEL rappelle avoir apporté une aide financière et matérielle à Monsieur [P] qui était en situation de détresse lequel doit la somme de 1.524,49 € en principal pour le prêt qu'il n'a jamais remboursé.

SUR QUOI

Sur la rupture du contrat de travail :

Par lettre du 14 janvier 2004, Monsieur [P] informe son employeur qu'en raison de sa mise en invalidité niveau 2, il ne se rendra plus sur son lieu de travail.

Alors que le contrat de travail est toujours suspendu à défaut pour chacune des parties d'avoir procédé à sa rupture, le salarié par courrier du 18 juillet 2007, distribué le 30 juillet 2007, sollicite de son employeur un rendez-vous auprès de la médecine du travail afin que soit déterminé s'il est apte ou inapte à son poste de travail, demande qu'il renouvellera le 24 août 2007.

Par courrier du 3 octobre 2007, l'employeur adresse à Monsieur [Z] [P] une convocation au cabinet de l'AHIRP, sollicitant parallèlement les arrêts de travail ainsi que les certificats d'invalidité en sa possession.

La visite médicale sera effectuée par la médecine du travail le 15 octobre 2007.

Conformément aux dispositions de l'article R 241-51 du code du travail alors applicable (R 4624-21 et R 4624-22 ) la visite de reprise dont doit bénéficier le salarié à l'issue d'une suspension de son contrat de travail, lors de la reprise du travail et dont l'initiative appartient normalement à l'employeur, peut-être sollicitée par le salarié soit auprès de l'employeur, soit auprès du médecin du travail en avertissant l'employeur de cette demande.

En l'espèce, l'employeur a été averti de la demande de visite médicale de reprise puisqu'il a transmis au salarié la convocation auprès de la médecine du travail.

Cependant, l'employeur soutient que la visite du 15 octobre 2007 constitue une visite de pré- reprise sollicitée par le salarié conformément à l'alinéa 4 de l'article R241-51 du code du travail.

Il est constant que la visite de pré-reprise ne met pas fin à la période de suspension du contrat et en tout état de cause ne dispense pas d'une nouvelle visite médicale lors de la reprise effective du travail.

Cependant, la visite de pré-reprise, afin de préparer dans les meilleures conditions le retour au travail, prévue à l'alinéa 4 de l'article R.241-51 (R 4624-23 ) est à la seule initiative du salarié, du médecin traitant et du médecin conseil, contrairement à la visite de reprise, laquelle a lieu à l'initiative de l'employeur.

Or, en l'espèce, la visite du 15 octobre 2007 a été organisée à l'initiative de l'employeur sur la demande qui lui en a été faite instamment par le salarié qui en a également saisi l'inspection du travail et doit être considérée comme une visite de reprise.

En effet, si l'employeur était informé dès l'année 2004 de la mise en invalidité deuxième catégorie de Monsieur [Z] [P] lequel cependant avait alors clairement manifesté sa volonté de ne pas reprendre le travail, il est évident que le salarié, qui réclamait à deux reprises à son employeur un rendez-vous auprès de la médecine du travail afin que soit déterminé s'il est apte ou inapte à son poste de travail, démontrait sa volonté que soit définitivement examinée sa situation au regard de son contrat de travail suspendu depuis plusieurs années.

La société SURTEL produit une attestation rédigée par la directrice du service de santé au travail de Pau (AHIRP) qui déclare que la visite médicale du lundi 15 octobre 2007 passée par Monsieur [Z] [P] s'analyse en une visite occasionnelle, à la demande du salarié, (article R. 4624-18 du code du travail), ce qu'elle confirme dans un courrier adressé au conseil du salarié appuyant son affirmation sur l'extrait de l'édition des visites issues du logiciel médical sur lequel figure en clair que la visite du 15 octobre 2007 est une visite occasionnelle à la demande du salarié précisant qu'elle ne sait pour quel motif le docteur [W] qui a procédé à l'examen a coché « visite de reprise ».

En effet, si l'historique des visites médicales passées par Monsieur [Z] [P] auprès de l'AHIRP mentionne au 15 octobre 2007 :

- visite occasionnelle demandée par le salarié

- prochain acte : périodique prévue le 12 octobre 2009

Il est cependant également mentionné : « aptitude : inapte à tous les postes », en contradiction avec une visite médicale programmée deux ans plus tard mais également en contradiction avec la fiche médicale délivrée au salarié, seul document dont il a connaissance qui mentionne:

- Visite médicale de reprise :

Avis d'aptitude : inapte définitif à la reprise de son poste pour... de danger immédiat (application R 241-51-1 du code du travail) Inapte à tout poste dans l'entreprise en accord avec la décision du médecin conseil (invalidité groupe II).

Enfin, le classement d'un salarié en invalidité 2ème catégorie par la sécurité sociale ne dispense pas l'employeur de la visite de reprise et, en cas de carence de l'employeur, le salarié peut solliciter lui-même la visite de reprise à condition d'en aviser au préalable l'employeur.

En conséquence, il y a lieu d'analyser la visite médicale du 15 octobre 2007 en visite médicale de reprise, laquelle, au visa du danger immédiat et de l'article R241-51 du code du travail n'a donné lieu qu'à un seul examen médical.

En application de l'ancien article L. 122-24-4 du code du travail (L1226-2 à L1226-4) le salarié dont l'inaptitude médicale est constatée par le médecin du travail à l'occasion d'une visite médicale de reprise doit être soit reclassé, soit licencié en cas d'impossibilité de reclassement.

À défaut de reclassement ou de licenciement dans le délai d'un mois après la visite de reprise ayant conduit à la constatation de l'inaptitude, il doit recevoir le salaire correspondant à l'emploi occupé avant la suspension du contrat.

En l'espèce, par lettre du 27 décembre 2007, distribuée le 2 janvier 2008 Monsieur [Z] [P] s'étonne de n'avoir eu aucune proposition à la suite de son rendez-vous à la médecine du travail (15 octobre 2007) et sollicite le paiement de ses salaires pour octobre, novembre et décembre.

Par lettre du 22 janvier 2008, l'employeur sollicite la production du certificat d'arrêt et/ou de reprise de travail à laquelle Monsieur [Z] [P] répondra par lettre du 4 mars 2008 à laquelle sera joint un fax envoyé par sa fille portant copie de la fiche médicale de la médecine du travail.

Ce n'est en conséquence qu'au 4 mars 2008 et non ainsi que le soutient l'employeur lors de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié que ce dernier prendra connaissance de la fiche d'inaptitude dans le cadre de la visite de reprise.

C'est dans ce contexte que Monsieur [Z] [P], le 30 avril 2010, écrit à son employeur :

« Par décision du 15 octobre 2007, le médecin du travail a conclu à mon inaptitude définitive aux fonctions d'installateur d'alarme et technicien service après-vente que j'occupais au sein de votre société, pour cause de danger immédiat (article R241-51-1 du code du travail), ainsi qu'à tout autre poste dans l'entreprise.

En application des dispositions prévues à l'article L1226-4 du code du travail, à défaut d'avoir procédé à mon licenciement dans le mois ayant suivi cette décision, vous auriez dû reprendre le versement de mes salaires.

Depuis le 15 novembre 2007, vous ne m'avez pas réglé la moindre somme à titre de salaire, en dépit de plusieurs rappels.

Cette situation qui vous est entièrement imputable rend impossible la poursuite de mon contrat de travail.

Je vous informe donc que je prends acte de la rupture de mon contrat de travail à compter du 30 avril 2010, pour manquements graves à vos obligations........ »

L'inexécution de l'obligation de reprendre le paiement des salaires, à défaut par l'employeur de procéder au licenciement de Monsieur [Z] [P], caractérise un manquement suffisant grave justifiant la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, laquelle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il y a lieu de faire droit aux demandes de Monsieur [Z] [P] en paiement de :

- l'indemnité compensatrice de préavis à laquelle il a droit dès lors que la rupture est imputable à l'employeur, soit la somme de 3.091,62 € (article 8 du contrat de travail) outre la somme de 309,16 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis.

- l'indemnité légale de licenciement, à défaut de dispositions conventionnelles, soit conformément aux dispositions de l'article R. 1234-1 du code du travail, 1/5 de mois de salaire par année d'ancienneté plus 2/15 de mois par année d'ancienneté au-delà de 10 ans.

L'ancienneté s'entend cependant des années de service, excluant les arrêts de travail pour motifs non professionnels.

En conséquence, l'indemnité de licenciement de Monsieur [Z] [P] sera calculée sur la période du 5 mai 1993 au 4 janvier 2003, date à compter de laquelle Monsieur [Z] [P] a été en arrêt de travail, sauf à y rajouter la période de mars 2008 à avril 2010, période durant laquelle l'employeur a fait preuve d'inertie dans la gestion de la situation de Monsieur [P] soit 11 ans et 10 mois sur la base d'un salaire de 1.030,54 € :

soit :

206,11 (1030,54 x 1/5) x 11) +171,76 + 412,27 ( 2/5 x 1030,54 )+ 343,56 = 3.194,80 €

- des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail soit la somme de 8.000 €

Sur la demande en paiement des salaires :

Obligation est faite à l'employeur de reprendre le paiement des salaires au terme d'un délai d'un mois suivant la déclaration d'inaptitude à défaut d'avoir procédé au licenciement d'un salarié déclaré inapte, salaire qui ne peut faire l'objet d'aucune réduction au motif notamment de la concomitance de prestations versées en application d'un régime de prévoyance qui relève des seuls rapports entre l'institution de prévoyance et le salarié.

Cependant, en l'espèce, il résulte des pièces produites, que malgré les demandes effectuées par l'employeur, le salarié n'a fourni à l'employeur la fiche d'inaptitude que le 4 mars 2008, date à compter de laquelle l'employeur est redevable des salaires et ce jusqu'à la date de la prise d'acte le 10 avril 2010.

Sur la base d'un salaire mensuel moyen de 1.030,54 € en 2008 (avenant du 26 août 2002 : 86 heures x 11,90 €), la société SURTEL est redevable de la somme de 26.622,28 €.

Il doit également percevoir au titre de la prime d'ancienneté pour la période du 4 mars 2008 au 30 avril 2010 la somme de :

-2008 :1.174,81 €

-2009 :1.483,97 €

-2010 :494,66 €

soit un total de 3.153,44 €

En conséquence, il y a lieu de fixer le rappel de salaire dû par l'employeur à Monsieur [Z] [P], prime d'ancienneté comprise à la somme de 29.775,72 € outre les congés payés y afférents soit 2.977,57 €.

Sur la demande reconventionnelle de la société SURTEL :

Le 2 décembre 2001, Monsieur [Z] [P] signe une reconnaissance de dette à son employeur, la SARL SURTEL, reconnaissant devoir la somme de 10'000 fr. en remboursement du prêt qui lui est accordé pour couvrir son découvert bancaire de 1993.

Monsieur [Z] [P] ne justifie pas s'être acquitté du règlement de ce prêt dont le remboursement est sollicité par l'employeur dans le cadre de la présente procédure et qui n'a existé que du fait des relations de travail ; il y a lieu de faire droit à la demande.

Sur la demande d'indemnisation pour l'absence de mise en place dans l'entreprise d'un régime de prévoyance :

Monsieur [Z] [P] soutient qu'il aurait dû bénéficier des dispositions du régime de prévoyance des entreprises de prévention et sécurité qui prévoit l'allocation aux salariés placés en situation d'invalidité, à la suite d'une décision de la sécurité sociale, une rente complémentaire mensuelle égale, pour les salariés en deuxième et troisième catégorie, à 80 % du salaire brut de référence, y compris les prestations brutes de la sécurité sociale (article 14.3 du régime des salariés non-cadres).

Le service de la rente est maintenu sous réserve du versement des prestations brutes de la sécurité sociale jusqu'à la liquidation de la retraite et au plus tard jusqu'au premier jour du trimestre civil suivant celui du 60ème anniversaire.

Il soutient avoir ainsi été privé de cette rente du 1er novembre 2003, date de sa mise en invalidité au 1er octobre 2011, premier jour du trimestre civil suivant son 60 ème anniversaire intervenant le 5 juillet 2011.

Le régime de prévoyance collective de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité a été instauré par avenant du 10 juin 2002 étendu par arrêté du 7 février 2003.

La société SURTEL conteste toute carence et produit les conditions particulières d'un contrat d'assurance santé collective conclu avec SUD-OUEST MUTUALITE à effet du 1er novembre 2007.

Cependant, la convention collective précise expressément qu'à compter de l'entrée en vigueur de l'avenant du 10 juin 2002 applicable au plus tôt à compter du 1er janvier 2003, date suivant la publication de son arrêté d'extension, les entreprises disposant déjà d'un régime de prévoyance pouvaient maintenir leur adhésion si les garanties sont au moins équivalentes à celles prévues par ce nouveau régime et à défaut de disposer d'un délai de six mois pour se mettre en conformité avec les nouvelles dispositions.

Si la société SURTEL ne justifie pas s'être conformée aux dispositions conventionnelles, il est cependant certain que les calculs auxquels se livre le salarié ne sont pas conformes à la réalité.

Lors de sa mise en invalidité son salaire brut mensuel de référence tel que ressortant de ses bulletins de salaire était de 1.023,40 € soit un salaire annuel de référence de12.280,80 €, soit une rente annuelle de 9.824,64 € alors qu'il a perçu de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des pensions d'invalidité supérieures.

En conséquence, à défaut de justifier d'un préjudice, Monsieur [Z] [P] sera débouté de ce chef de demande.

Sur la demande fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [Z] [P] l'intégralité des frais engagés, il convient de lui allouer une indemnité de 1.000 €

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et en dernier ressort,

Reçoit l'appel formé par Monsieur [Z] [P] le 29 juillet 2011,

Confirme le jugement du Conseil de Prud'hommes de PAU en date du 11 juillet 2011 en ce qu'il a débouté Monsieur [P] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de mise en place du régime de prévoyance collective dans l'entreprise ;

L'infirme pour le surplus de ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Dit que la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne en conséquence la société SURTEL à verser à Monsieur [Z] [P] la somme de 3.091,62 € au titre du préavis outre la somme de 309,16 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis.

Condamne la société SURTEL à verser à Monsieur [Z] [P] la somme de 3.194,80 € à titre d'indemnité légale de licenciement.

Condamne la société SURTEL à verser à Monsieur [Z] [P] la somme de 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Constate que l'employeur n'a pas respecté l'obligation édictée par l'article L1226-4 du code du travail.

Condamne en conséquence la société SURTEL à payer à Monsieur [Z] [P] la somme de 29.775,72 € bruts outre les congés payés y afférents soit 2.977,57 € bruts.

Condamne Monsieur [Z] [P] à payer à la société SURTEL la somme de 1.524,45 € en remboursement du prêt qui lui a été consenti.

Ordonne la compensation de la somme de 1.524,49 € avec les sommes dues par la société SURTEL à titre de dommages-intérêts dans le cadre du présent litige.

Condamne la société SURTEL à payer à Monsieur [Z] [P] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société SURTEL aux dépens.

Arrêt signé par Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/02843
Date de la décision : 28/02/2013

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°11/02843 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-28;11.02843 ?
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