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10/09/2015 | FRANCE | N°12/04326

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 10 septembre 2015, 12/04326


MC/SB



Numéro 15/03300





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 10/09/2015









Dossier : 12/04326





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail pour motif économique















Affaire :



Association OGEC 'LE BEAU RAMEAU'



C/



[K] [I]

















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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 10 Septembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code ...

MC/SB

Numéro 15/03300

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 10/09/2015

Dossier : 12/04326

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail pour motif économique

Affaire :

Association OGEC 'LE BEAU RAMEAU'

C/

[K] [I]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 10 Septembre 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 10 Juin 2015, devant :

Monsieur CHELLE, Président

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

Madame COQUERELLE, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Association OGEC 'LE BEAU RAMEAU' venant aux droits et obligations de l'Association 'Ecole ND DE BETHARRAM'

[Adresse 1]

[Adresse 4]

Représentée par Maître VIALA, avocat au barreau de PAU

INTIME :

Monsieur [K] [I]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

Représenté par Maître TUCOO CHALA, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 03 DECEMBRE 2012

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE PAU

RG numéro : F09/00436

FAITS ET PROCEDURE

M. [I] a travaillé au sein de l'association ' Ecole Notre Dame de Bétharram' devenue l'association l'OGEC ' le Beau Rameau' du 4 septembre 1989 (ou 1999, aucun contrat de travail n'étant produit aux débats) au 18 juillet 2009, date de son licenciement pour motif économique, en qualité de surveillant.

Par courrier en date du 14 mai 2009, l'employeur, compte tenu de difficultés économiques, proposait à M. [I] de modifier son contrat de travail à temps partiel avec la qualification catégorie II Niveau 1, coefficient 373.

Aux termes d'une correspondance du 16 juin 2009, le salarié faisait connaître à son employeur qu'il ne pouvait pas accepter la modification proposée.

Le 23 juin 2009, le salarié était convoqué à un entretien préalable pour le 2 juillet 2009 et il était licencié pour motif économique par courrier en date du 18 juillet 2009.

Par requête en date du 10 août 2009, le salarié a fait citer l'Association devant le conseil de Prud'hommes de PAU, section 'activités diverses' afin qu'il soit dit que la procédure de licenciement n'a pas été respectée, que le licenciement intervenu est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il sollicitait, également, le paiement d'heures supplémentaires, d'indemnités de repas, d'indemnité de congés payés et des dommages et intérêts pour non- respect du délai de réflexion concernant la convention de reclassement personnalisé proposée.

Par jugement contradictoire en date du 3 décembre 2012, auquel il convient de se reporter pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions initiales des parties et des moyens soulevés, le Conseil de Prud'hommes de PAU a condamné l'Association l'OGEC ' le Beau Rameau' à payer à M. [I] les sommes suivantes :

2.000 euros au titre du non-respect du délai de 21 jours concernant la convention de reclassement personnalisé proposée

2.000 euros au titre du non-respect des critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements

9.000 euros pour non-respect de la priorité de réembauchage

11.000 euros pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

1.851,10 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés

2.500 euros au titre de l'article700 du code de procédure civile

Par procès-verbal au guichet unique de greffe en date du 21 décembre 2012, l'OGEC ' le Beau Rameau' a interjeté appel contre le jugement qui lui a été notifié le 5 décembre 2012.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions enregistrées au greffe le 21 novembre 2014, et reprises oralement à l'audience du 10 juin 2015, l'Association L'OGEC ' le Beau Rameau' conclut à l'infirmation du jugement rendu par le conseil de Prud'hommes de PAU et à la condamnation de M. [I] à lui payer une indemnité de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

A l'appui de sa défense, l'appelante fait valoir que:

- Concernant la convention de reclassement personnalisé :

- Le délai de réflexion de 21 jours se calcule par rapport à la date d'engagement de la procédure de licenciement pour motif économique qui correspond, soit à la date de l'entretien préalable, soit à la date de présentation de la lettre de convocation à la première réunion des instances représentatives du personnel prévue à l'article L 2323-6 du code du travail ; or , les réunions des représentants du personnel ont eu lieu en janvier, février et mars 2009

- En tout état de cause, M. [I] n'a pas accepté la convention pendant le délai de 21 jours mais plusieurs jours après l'expiration de ce dernier puisqu'il a envoyé à son employeur un courrier daté du 25 juillet 2009 pour indiquer qu'il s'apprêtait à accepter ladite convention, soit 3 jours après la fin du délai de réflexion de 21 jours.

- M. [I] n'a subi aucun préjudice puisqu'il a perçu davantage de son employeur et de l'Assédic que ce qu'il aurait perçu d'après les dispositifs de la convention de reclassement personnalisé

- Concernant la légitimité du licenciement pour motif économique

- La lettre de licenciement mentionne clairement les raisons économiques puisqu'elle précise que la décision est la conséquence de l'absorption de Notre Dame de Bétharram et de Saint Elisabeth d'Igon par l'OGEC 'le Beau Rameau' et de la réorganisation des établissements '.une mesure de réorganisation est un motif suffisamment précis

- Concernant la légitimité de la mesure de réorganisation

- Les difficultés économiques sont indiscutables, les résultats au titre des années scolaires 2006/2007 et 2008/2009 étant déficitaires

- Concernant la proposition de modification du contrat :

- L'offre formulée est suffisamment précise, M. [I] n'a pas répondu au courrier dans le délai de un mois, ce qui équivaut à un refus de sa part d'accepter la proposition

- En tout état de cause, même si la proposition ne respecte pas la procédure, le licenciement en raison du seul refus du salarié est sans cause réelle et sérieuse

- Aucun lien ne peut être retenu entre les trois lettres d'observations adressées à M. [I] et la procédure de licenciement de telle sorte qu'il ne peut être soutenu qu'il s'agirait d'un licenciement déguisé, à savoir un licenciement pour motif inhérent à la personne et non un licenciement pour motif économique'; les délégués du personnel ont été informés lors des réunions des 28 janvier, 6 février et 26 mars 2009 du projet de réorganisation'; il n'existe aucun lien de causalité entre les trois lettres d'observations lesquelles ne peuvent être considérées comme des avertissements, et la procédure de licenciement.

- Concernant l'ordre des licenciements

- L'employeur n'a jamais refusé de faire connaître au salarié les critères retenus pour l'ordre des licenciements

- En tout état de cause, cette indemnisation n'est pas cumulable avec celle allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-Le licenciement intervenu n'est nullement vexatoire s'agissant d'un licenciement pour motif économique

- Concernant les dommages et intérêts pour non- respect de la procédure

-Les dispositions légales de l'article L 1233-8 du code du travail n'ont pas lieu à s'appliquer, ne s'agissant pas d'un licenciement collectif mais d'un seul licenciement pour motif économique'; en tout état de cause, les délégués du personnel ont bien été consultés

-L'indemnité sanctionnant l'absence de cause réelle et sérieuse et l'indemnité sanctionnant la procédure ne sont pas cumulables

- Concernant la priorité de réembauchage

- M. [I] ne rapporte pas la preuve que M. [B], victime d'un infarctus début novembre aurait été remplacé par un nouveau salarié en qualité de surveillant d'internat à temps plein, alors que lui-même aurait sollicité ce poste

- En tout état de cause, M. [I] ne démontre pas l'existence d'un préjudice particulier supérieur à l'indemnité minimale légale

- Concernant l'indemnité de congés payés

- L'employeur lui a déjà versé l'indemnité à laquelle il avait droit sur son bulletin de salaire du mois d'octobre 2009

- Sur tous les autres chefs de demande, le salarié se contente d'allégations

Par conclusions enregistrées au greffe de la chambre sociale sous la date du 10 décembre 2014, et reprises oralement à l'audience du 10 juin 2015, M. [I] conclut qu'il plaise à la Cour':

Ordonner la rectification par l'Association l' OGEC «' le Beau Rameau'» venant aux droits et obligations de l'Association «' Ecole Notre Dame de Bétharram »' de l'attestation Assédic, du certificat de travail et du bulletin de paie du 1er au 22 octobre 2009

Annuler les avertissements des 10 décembre 2007, 14 avril et 5 novembre 2008

Condamner l'Association l'OGEC «' le Beau Rameau'» à payer à M. [I] une somme de 14.653,60 euros, à défaut de 4.800 euros, au titre de l'article L 1233-65 du code du travail (non- respect du délai de 21 jours de réflexion pour accepter ou refuser la convention de reclassement personnalisé)

Constater que l'Association l'OGEC'« le Beau Rameau'» n'a pas respecté les dispositions de l'article L 1233-8 en ne consultant pas les délégués du personnel et dire la procédure entachée de nullité

Dire et juger que le licenciement de M. [I] est sans cause réelle et sérieuse et condamner l'Association l'OGEC'« le Beau Rameau'» à payer à M. [I] les somme suivantes':

259,61 euros au titre des heures supplémentaires

1. 696,60 euros au titre des indemnités de repas

2.'155,33 euros au titre des congés payés

9.158,50 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

1.831,70 euros pour non-respect de la procédure de licenciement

43.960,80 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

21.980,40 euros pour violation de la clause de priorité de réembauchage

7.000 euros pour refus de répondre à la demande des critères de licenciement

10.000 euros pour licenciement vexatoire et discriminatoire

7.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

M. [I] fait valoir que':

- Le salarié dispose d'un délai de 21 jours pour accepter ou refuser la convention de reclassement personnalisé à partir de la date de la remise du document proposant ladite convention'; or, ce délai n'a pas été respecté par son employeur qui ne lui a laissé qu'un délai de 15 jours

- A aucun moment, les délégués du personnel n'ont été consultés sur le projet de licenciement collectif pour motif économique avant la mesure de licenciement

- Une telle absence de consultation est de nature à établir l'inexistence du motif économique allégué

- La procédure est entachée de nullité ce qui justifie l'octroi de dommages et intérêts

- Le motif prétendument économique du licenciement n'est pas établi de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse

- L'employeur ne démontre aucunement que la restructuration a été destinée à sauvegarder la compétitivité de l'entreprise et ne justifie pas de l'incidence sur son emploi et donc sur la suppression de celui-ci

- Il a été le seul à faire l'objet d'un licenciement économique et il n'est pas expliqué en quoi la suppression de son poste était de nature à sauvegarder la compétitivité de l'entreprise

- En réalité, le licenciement procède d'un motif inhérent à sa personne

- Aucune mesure de licenciement n'a été prévue dans le cadre de la réorganisation de l'établissement et la communication de la copie du cahier des procès- verbaux de réunion des délégués du personnel permettrait de l'établir

- Le refus de l'employeur de fournir les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements entraîne nécessairement un préjudice pour le salarié

- Le caractère vexatoire du licenciement résulte du fait que celui-ci était déjà prévu avant la tenue de l'entretien préalable et qu'il a été le seul salarié à être licencié pour motif économique

- Il a fait savoir à son employeur, par courrier en date du 25 juillet 2009, qu'il souhaitait bénéficier de la priorité de réembauchage'; or, ce dernier n'a pas donné suite à cette demande

La cour se réfère expressément aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens de fait et de droit développés par les parties.

MOTIVATION

L'appel, interjeté dans les formes et les délais prévus par la loi, est régulier en la forme.

Sur la convention de reclassement personnalisé

En application des dispositions de l'article L 1233-65 du code du travail, dans les entreprises non soumises à l'obligation de proposer le congé de reclassement prévu à l'article L 1233-71, l'employeur propose à chaque salarié dont il envisage de prononcer le licenciement pour motif économique, une convention de reclassement personnalisé.

La convention UNEDIC du 19 février 2009, agréée par arrêté du 30 mars 2009 et publiée au journal officiel du 1er avril 2009, définit les conditions et les modalités d'application de la convention de reclassement personnalisé. Son article 4 précise que «' chacun des salariés concernés doit être informé individuellement et par écrit du contenu de la convention de reclassement personnalisé et de la possibilité d'en bénéficier.

Il dispose d'un délai de 21 jours pour accepter ou refuser une telle convention à partir de la date de la remise du document proposant la convention de reclassement personnalisé selon les modalités prévues au paragraphe 2 »'

A savoir':

«' lorsque le licenciement pour motif économique doit être précédé d'un entretien préalable au licenciement, le document écrit d'information prévu au paragraphe 1 est remis au salarié au cours de cet entretien préalable contre récépissé

Lorsque le licenciement pour motif économique doit être soumis à la procédure d'information et de consultation des représentants élus du personnel dans le cadre de l'article L 1233-28 du code du travail, le document écrit d'information prévu au paragraphe 1 est remis à chaque salarié concerné, contre récépissé, à l'issue de la dernière réunion de consultation des représentants élus du personnel.

Ces dispositions s'appliquaient au salarié compris dans une procédure de licenciement économique engagée à compter du 1er avril 2009.

L'association l'OGEC «'Le Beau Rameau'» fait valoir, qu'aux termes des dispositions de l'article 22 de la convention ci-dessus mentionnée, il est possible de retenir comme date d'engagement de la procédure de licenciement pour motif économique, non seulement la date de l'entretien préalable, soit le 23 juin 2009, mais, également, la date de présentation de la lettre de convocation à la première réunion des instances représentatives du personnel prévu à l'article L 2323-6 du code du travail. Or, plusieurs réunions ont eu lieu les 28 janvier 2009, 6 février 2009 et 26 mars 2009 ainsi qu'en attestent les convocations et les procès-verbaux produits aux débats, de sorte que la règle prévoyant le délai de 21 jours ne serait pas applicable au cas d'espèce.

Cependant, la lecture des différents procès-verbaux invoqués au soutien de ces prétentions, permet de constater que si les réunions organisées les 3 premiers mois de l'année 2009 avec les délégués du personnel ont effectivement eu pour objet de faire le point sur le projet de réorganisation et de création d'un nouvel ensemble scolaire, la question relative à la possibilité d'opérer des licenciements du fait de cette opération n'a jamais été abordée.

Ces dates ne peuvent, ainsi, pas être considérées comme dates d'engagement de la procédure de licenciement.

L'annexe 6 produite aux débats par le salarié, à savoir, la lettre de convocation à l'entretien préalable datée du 23 juin 2009, permet d'établir que le bénéfice d'une convention de reclassement personnalisé a été proposé au salarié lors de l'entretien préalable fixé au 2 juillet 2009 et qu'un délai de 14 jours lui a été accordé, donc jusqu'au 16 juillet suivant, pour faire connaître sa réponse. M. [I] a été licencié par courrier du 18 juillet 2009.

Il n'est pas sérieusement contestable que l'employeur n'a pas respecté le délai de réflexion de nature à permettre au salarié de pouvoir accepter la convention de reclassement.

Ce dernier a nécessairement subi un préjudice dans la mesure où s'il avait bénéficié du délai de 21 jours, il aurait pu arrêter sa décision en pleine connaissance de cause, accepter la convention de reclassement personnalisé proposée et bénéficier de mesures destinées à favoriser son reclassement et à retrouver un emploi le plus rapidement possible. Or, il en a été privé.

La demande de dommages et intérêts du salarié est ainsi fondée.

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé sur ce point ainsi qu'en ce qui concerne le montant alloué.

Sur la régularité de la procédure

M. [I] se prévaut des dispositions de l'article L 1233-8 du code du travail aux termes desquels «' l'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours réunit et consulte le comité d'entreprise dans les entreprises de 50 salariés et plus, les délégués du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés dans les conditions prévues par la présente sous-section'».

Il fait valoir qu'à aucun moment les délégués du personnel n'ont été consultés sur le projet de licenciement collectif pour motif économique avant la mesure de licenciement.

Cependant, il résulte de la procédure que M. [I] n'a jamais été que le seul salarié licencié pour motifs économiques. Il n'est nullement établi qu'il s'agissait d'un licenciement collectif de telle sorte que le salarié ne peut se prévaloir des dispositions invoquées.

Ainsi, sa demande de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement ne pourra qu'être rejetée.

Le jugement déféré sera, par conséquent, confirmé de ce chef.

Sur la légitimité du licenciement pour motif économique:

M. [I] fait valoir que le motif prétendument économique du licenciement n'est nullement établi et que la mesure de licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

En vertu de l'article L 1233-2 du code du travail tout licenciement pour motif économique est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte des dispositions de l'article L.1233-3 du code du travail (ancien L321-1), que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives soit à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, soit à une réorganisation lorsqu'elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise et, dès lors que l'entreprise appartient à un groupe, à la condition qu'il s'agisse de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe dont relève l'entreprise et que l'existence d'une menace sur la compétitivité soit caractérisée.

Ces motifs et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié doivent être énoncés dans la lettre de licenciement.

La lettre d'énonciation des motifs de licenciement fixe les limites du litige.

En l'espèce, la lettre de licenciement datée du 18 juillet 2009 est libellée comme suit': «' Nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique.

Cette décision est la conséquence de l'absorption de Notre Dame de Bétharram et Saint -Elisabeth d'Igon par l'OGEC «' le Beau Rameau'» et de la réorganisation des établissements avec sur le site de Bétharram un collège, un lycée d'enseignement général, un internat garçons, sur le site d'Igon, une école maternelle et primaire, un lycée professionnel, un internat filles et enfin, sur le site de Montaut, une école maternelle et primaire.

Nous vous avions demandé par lettre du 14 mai 2009 d'accepter une modification de votre contrat de travail tenant compte de ces évolutions.

Or, par courrier du 16 juin 2009, vous nous avez précisé ne pas souhaiter accepter ces changements.

En réalité, cette situation nous conduit à supprimer votre poste';

Par ailleurs, aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée''»

La réorganisation peut être motivée soit par des difficultés économiques soit pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise. C'est seulement, dans ce dernier cas, que la réorganisation constitue un motif autonome de licenciement, mais il faut que la lettre de licenciement fasse explicitement état du motif de la réorganisation c'est-à-dire soit les difficultés économiques, soit la sauvegarde de la compétitivité.

En l'espèce, la lettre de licenciement ne fait nulle référence à des difficultés économiques, lesquelles ne sont pas citées; seule apparaît la notion de réorganisation qui conduit à analyser le motif comme étant la réorganisation comme motif autonome mais il faudrait alors que soit mentionnée « la menace sur la compétitivité de l'entreprise'» et que les pièces produites caractérisent cette menace.

Tel n'est pas le cas.

Dès lors, la lettre de licenciement apparaît insuffisamment motivée.

En outre, l 'OGEC «' le Beau Rameau'» invoque des difficultés économiques, plus particulièrement la détérioration de ses résultats. Elle produit aux débats des documents comptables qui établissent l'existence d'un résultat déficitaire de 82.452 euros au titre de l'année 2006/2007 et de 66.378,19 euros au titre de l'année 2008/2009.

Si ces résultats déficitaires ne sont pas contestés par le salarié, comme ne l'est pas davantage la suppression de son poste, seules des difficultés économiques sérieuses justifient un licenciement économique. Or, l'OGEC «' le Beau Rameau'» ne fait pas état de difficultés financières particulières liées aux résultats déficitaires invoqués (difficultés de trésorerie, difficultés bancaires'). Il n'est pas établi que la détérioration des résultats sur les 2 années mentionnées, lesquelles ne sont pas consécutives (les résultats pour l'année 2007/2008 ne sont pas connus) aient été de nature à entraîner effectivement des conséquences sur l'emploi du salarié.

Il n'est donc pas établi que la suppression du seul poste de travail de M. [I], puisque selon les affirmations de l'OGEC « le Beau Rameau'» M. [I] aurait été la seule personne licenciée pour raisons économiques, serait consécutive à des difficultés économiques et aurait permis de rétablir une situation financière détériorée.

L'employeur ne caractérise pas davantage une menace sur la compétitivité de l'entreprise.

Par conséquent, l'employeur ne justifie pas de la réalité d'un motif économique et le licenciement de M.[I] doit être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

M. [I] sollicite une somme de 43.960,80 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse se prévalant d'un salaire de 1.831,70 euros sur 24 mois.

Son ancienneté dans l'entreprise au moment de son licenciement justifie que lui soit octroyée une somme de 20.000 euros, le salarié ne produisant pas d'éléments de nature à justifier l'octroi du montant réclamé.

Par conséquent, le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Sur les critères de l'ordre des licenciements':

M. [I] sollicite la condamnation de son employeur à lui payer, sur le fondement de l'article L 1233-17 du code du travail, une somme de 7.000 euros en réparation de son préjudice faisant valoir que celui-ci a failli à son obligation de lui communiquer, sur sa demande, les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements.

Lorsque le salarié demande, dans les 10 jours de son départ, communication des critères, l'employeur doit les lui communiquer dans les 10 jours suivant la demande. A défaut, cela cause un préjudice au salarié qui se cumule avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dès lors, il sera alloué une somme de 2.000 euros à M. [I] et le jugement déféré sera confirmé.

Sur la rectification des documents sociaux

M. [I] fait valoir que l'attestation ASSEDIC, le certificat de travail, le bulletin de paie du 1er au 22 octobre 2009 et le reçu pour solde de tout compte du 23 octobre 2009 que l'employeur lui a fait parvenir le 10 novembre 2009 ont été établis par l'Ecole Notre Dame de Bétharram et signés par Mme [Y], directrice, alors que cette dernière a fait valoir ses droits à la retraite au 31 août 2009 et que le Collège Lycée Notre Dame de Bétharram est devenu de par la fusion absorption des OGECS Notre Dame de Bétharram et de Sainte Elisabeth d'Igon au 1er septembre 2009, l'Ensemble Scolaire Collège Lycée'« le Beau Rameau'».

Enfin soutient-il, le solde de tout compte n'est pas conforme, son préavis ayant débuté le 23 juillet 2009 pendant ses congés payés pour se terminer au 31 août 2009, soit plus de un mois de congés payés manquant.

Il sollicite, par conséquent, la rectification desdits documents.

Cependant, est produit aux débats un courrier en date du 10 novembre 2009 émanant de la Direction Départementale du Travail faisant état d'une demande d'homologation de rupture conventionnelle entre Mme [Y] et l'OGEC «'le Beau Rameau'» à la date du 28 novembre 2009. Il en résulte que Mme [Y] était bien en fonction au moment de la signature des documents dont la rectification est sollicitée.

En ce qui concerne le reçu pour solde de tout compte daté du 23 octobre 2009, le salarié disposait, conformément aux dispositions de l'article L 1234-20 du code du travail, d'un délai de 6 mois pour en contester les mentions, faute de quoi ce reçu est devenu libératoire pour l'employeur pour les sommes mentionnées sur le dernier bulletin de salaire.

Par conséquent, il convient de rejeter la demande du salarié sur ce point et de confirmer le jugement déféré.

Sur l'annulation des avertissements':

M. [I] sollicite l'annulation des avertissements qui lui ont été adressés les 10 décembre 2007, 14 avril 2007 et 5 novembre 2008 faisant valoir qu'il a répondu à deux d'entre eux par courriers en date respectivement des 18 décembre 2007 et 10 novembre 2008.

Ces courriers ne s'analysent, cependant, pas en des lettres d'avertissement, celui-ci étant une sanction. Il ne s'agit que d'observations, de demande de justificatif d'absence, voire de menace de sanction, sans plus.

Par conséquent, la demande de M. [I] en annulation des lettres d'avertissements ne pourra qu'être rejetée.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les heures supplémentaires:

L'article L3171-4 du code du travail compris dans la section IV de la Troisième partie du livre premier, Titre VII, relative aux «' Documents fournis au juge »' énonce en son premier alinéa qu'« en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié »';'

Cependant, la charge de la preuve ne repose pas initialement sur l'employeur puisque le deuxième alinéa précise que le juge forme sa conviction «' au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande ».

Il en résulte qu'il incombe au salarié qui engage une action au titre du temps du travail accompli d'étayer sa demande, c'est-à-dire de fournir, préalablement, au juge, un certain nombre d'éléments de fait, suffisamment précis, quant aux horaires effectivement réalisés, de nature à permettre l'engagement d'un débat' et de permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments.

M. [I] sollicite, à ce titre, le paiement de 18 heures x 11,5382 x 1,25 nuit soit 259,61 euros.

Il n'apporte, cependant aux débats, aucun élément de nature à étayer sa demande, de sorte qu'il ne pourra qu'être débouté de ses prétentions sur ce point.

Le jugement déféré sera confirmé.

Sur l'indemnité de repas':

M. [I] sollicite le règlement d'une somme de 1.696,60 euros à ce titre et produit aux débats un tableau récapitulatif, établi par ses soins, des repas qui lui seraient dus depuis l'année 2003.

Cependant, il ne précise pas le fondement juridique de ses prétentions et n'apporte aux débats aucun élément de preuve, de sorte qu'il ne pourra qu'être débouté de ses prétentions.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les conges payés':

M. [I] sollicite paiement de la somme de 2.155,33 euros au titre des congés payés.

Une indemnité compensatrice de congés payés s'élevant à la somme de 304,23 euros a été payée au salarié au vu de son bulletin de salaire du mois d'octobre 2009.

Le salarié n'établit pas le bien fondé de ses prétentions supplémentaires de sorte qu'il sera débouté de ses prétentions de ce chef et le jugement déféré infirmé.

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement':

M. [I] sollicite, à ce titre, un montant de 9.138,50 euros.

Il résulte, cependant, de son bulletin de salaire du mois d'octobre 2009 que ce montant lui a déjà été payé.

Il sera, par conséquent, débouté de ce chef de prétentions et le jugement déféré sera confirmé.

Sur la priorité de reembauchage':

L'article L 1233-45 du code du travail dispose que le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauchage durant un délai de un an à compter de la date de rupture de son contrat s'il en fait la demande au cours de ce même délai.

Dans son courrier daté du 25 juillet 2009 dont l'OGEC «' le Beau Rameau »' a accusé réception le 28 juillet 2009, M. [I] a fait savoir à son employeur qu'il désirait bénéficier d'une priorité de réembauchage au sein de l'établissement.

L'employeur ne conteste pas que M. [B] ait été remplacé par un nouveau salarié sans que son emploi n'ait été proposé à M. [I].

Dès lors, il y a lieu de considérer que l'employeur n'a pas respecté la priorité de réembauchage à l'égard du salarié.

Aux termes des dispositions des articles L 1235-13 et L 1235-14 du code du travail, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à deux mois de salaire'; le conseil de Prud'hommes a fixé à 9.000 euros les dommages et intérêts alloués au salarié de ce chef'; ce préjudice, justement évalué, ne mérite pas réévaluation.

M. [I] sera débouté de sa demande en ce qui concerne le montant sollicité (21.980,40 euros).

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur le caractère vexatoire du licenciement

Selon le salarié, le caractère vexatoire de la mesure de licenciement résulterait du fait que la décision de le licencier avait déjà été prise avant l'entretien préalable et qu'il ait été le seul salarié licencié pour motif économique. Il sollicite une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.

En l'espèce, cependant, aucun élément de la procédure ne permet de caractériser l'aspect vexatoire du licenciement intervenu, s'agissant d'un licenciement pour motif économique.

Le salarié sera donc débouté de ses prétentions et le jugement déféré confirmé sur ce point.

L'OGEC «'le Beau Rameau'» sera condamné aux entiers dépens de la procédure.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe':

Confirme le jugement du conseil de Prud'hommes de PAU du 3 décembre 2012 sauf en ce qui concerne les congés payés et le montant des dommages et intérêts alloué au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Déboute M. [I] de ses prétentions au titre des congés payés.

Condamne l'OGEC «' le Beau Rameau'» à payer à M. [I] une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Condamne l'OGEC «' le Beau Rameau »' aux entiers dépens.

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Monsieur GAUTHIER, Conseiller suite à l'empêchement de Monsieur CHELLE, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/04326
Date de la décision : 10/09/2015

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°12/04326 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-10;12.04326 ?
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