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20/03/2007 | FRANCE | N°06/622

France | France, Cour d'appel de riom, Chambre sociale, 20 mars 2007, 06/622


622/06

Prud'hommes

JLT

CONTRAT D'USAGE - ASSOCIATION INTERMEDIAIRE

Appelant : Mme Annie X...

Intimé : L'association AVS

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Annie X... a été embauchée par l'association AVS en qualité d'aide ménagère par un contrat de travail à durée déterminée du 30 avril 2002.

La salariée a été maintenue dans son emploi par une succession de contrats de travail à durée déterminée jusqu'au mois d'avril 2004.

Saisi par la salariée, le Conseil de Prud'hommes de VICHY, par jugement du 3 février 2006, a

débouté Mme X... de ses demandes et l'a condamnée à payer à l'association AVS la somme de 400,00 € sur le fondement de l'a...

622/06

Prud'hommes

JLT

CONTRAT D'USAGE - ASSOCIATION INTERMEDIAIRE

Appelant : Mme Annie X...

Intimé : L'association AVS

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Annie X... a été embauchée par l'association AVS en qualité d'aide ménagère par un contrat de travail à durée déterminée du 30 avril 2002.

La salariée a été maintenue dans son emploi par une succession de contrats de travail à durée déterminée jusqu'au mois d'avril 2004.

Saisi par la salariée, le Conseil de Prud'hommes de VICHY, par jugement du 3 février 2006, a débouté Mme X... de ses demandes et l'a condamnée à payer à l'association AVS la somme de 400,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Mme X... a relevé appel de ce jugement le 10 mars 2006.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme X... demande d'annuler le jugement, faisant grief à celui-ci de se borner à rappeler les dispositions dérogatoires du droit commun en matière de contrats d'usage sans relever le caractère abusif du recours à ceux-ci en l'espèce.

Elle se fonde que la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 et sur l'arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes du 4 juillet 2006 pour soutenir que le conseil de prud'hommes aurait dû rechercher si des éléments concrets justifiaient la nécessité de ce recours en l'espèce.

Elle précise que les contrats de travail à durée déterminée successivement conclus ne respectent pas les dispositions de l'article L 122-3-1 du code du travail concernant la durée minimale du contrat.

Elle estime que la répétition de 19 contrats de travail à durée déterminée successifs, stipulant une durée minimale de seulement quelques heures à chaque fois, sur une période de 22 mois, assortis systématiquement d'une période d'essai d'une durée égale à la durée minimale inscrite au contrat, a dégénéré en abus.

Elle soutient que les principes de la directive s'imposent aux juridictions nationales et que cet abus du droit au recours à des contrats d'usage est contraire aux objectifs fixés par cette directive.

Elle sollicite de requalifier les contrats en un contrat de travail à durée indéterminée et de condamner, en conséquence, l'association AVS à lui payer les sommes de:

- 650,00 € à titre de dommages-intérêts pour absence de procédure,

- 650,00 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 7800,00 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

- 3000,00 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

A titre subsidiaire, elle demande de dire que la rupture avant terme de son contrat n'est pas intervenue pour une cause visée par l'article L 122-3-8 du code du travail, qu'elle est en conséquence abusive et l'employeur devra lui payer les sommes de:

- 650,00 € à titre de dommages-intérêts pour absence de procédure,

- 7800,00 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

- 1950,00 € à titre de dommages-intérêts pour brusque rupture,

Elle demande, en tout état de cause, de condamner l'employeur à lui payer la somme de 1500,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'association AVS sollicite la confirmation du jugement, le rejet des demandes de Mme X... et sa condamnation à lui payer la somme supplémentaire de 1000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'elle est une association intermédiaire et qu'elle appartient à un secteur d'activité où il est d'usage de ne pas recourir aux contrats de travail à durée indéterminée, conformément aux dispositions de l'article L 122-1-1, 3o du code du travail, du fait de la nature temporaire des emplois.

Elle estime, en conséquence, qu'il n'y a pas lieu de tenir compte du nombre de renouvellements ni de rechercher si la salariée occupait ou non un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

Elle soutient que la législation française est conforme au droit communautaire, le législateur ayant poursuivi, par l'acceptation de la reconduction illimitée des contrats de travail à durée déterminée d'usage dans le secteur spécifique des associations intermédiaires, un objectif de la politique sociale, celui de la réinsertion des publics en difficulté.

Elle estime que les contrats de travail à durée déterminée conclus avec la salariée étaient conformes à l'article L 122-3-1 du code du travail puisqu'ils mentionnent une durée minimale.

Elle conteste le caractère abusif de la rupture en faisant valoir que le contrat a été conclu sans terme précis et qu'il est arrivé à terme lorsque la mission a été réalisée.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure et des prétentions et moyens antérieurs des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, oralement reprises.

DISCUSSION

Sur la recevabilité

La décision contestée ayant été notifiée le 2 mars 2006, l'appel, régularisé le 10 mars 2006, est recevable au regard du délai d'un mois prescrit par les articles 538 du nouveau code de procédure civile et R 517-7 du code du travail.

Sur l'utilisation successive de contrat de travail à durée déterminée

Il est constant, en l'espèce, que, pendant la période du 30 avril 2002 au 18 mars 2004, Mme X... a été embauchée dans le cadre de 19 contrats de travail à durée déterminée successifs par l'association AVS laquelle a la qualité d'association intermédiaire dans le cadre des articles L 322-4-16 du code du travail.

L'article L 122-3-10 du code du travail n'autorise la conclusion avec le même salarié de contrats de travail à durée déterminée successifs que dans des cas limitativement limités et, notamment, dans les cas prévus par l'article L 122-1-1 du code du travail relatif aux emplois pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

Il n'est pas contesté que l'article D 121-2 du code du travail, pris en application de ce texte, inclut, parmi les secteurs d'activité concernés, les activités exercées par les associations intermédiaires.

Il s'ensuit que l'utilisation successive de contrats de travail à durée déterminée dans le cas de Mme X... est conforme aux dispositions légales et réglementaires en vigueur.

La clause 5 de l'accord-cadre du 18 mars 1999 sur le travail à durée déterminée qui figure en annexe de la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 énonce qu' "afin de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs", les Etats membres doivent introduire, "d'une manière qui tienne compte des besoins des secteurs spécifiques et/ou de catégories de travailleurs", certaines mesures et notamment "des raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ou relations de travail".

La Cour Européenne de Justice des Communautés Européennes, par arrêt préjudiciel du 4 juillet 2006, a estimé que "cette clause doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à l'utilisation de contrats de travail à durée déterminée successifs qui serait justifiée par la seule circonstance qu'elle est prévue par une disposition législative ou réglementaire générale d'un Etat membre. Au contraire, la notion de "raisons objectives" au sens de ladite clause requiert que le recours à ce type particulier de relations de travail, tel que prévu par la réglementation nationale, soit justifié par l'existence d'éléments concrets tenant notamment à l'activité en cause et aux conditions de son exercice".

Il ressort de cet arrêt que l'utilisation répétée de contrats de travail à durée déterminée ne peut être justifiée que par l'existence de facteurs objectifs tenant aux particularités de l'activité concernée et aux conditions de son exercice.

En l'espèce, il ressort des articles L 322-4-16 et suivants du code du travail que les associations intermédiaires ont pour objet d'embaucher des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, en vue de faciliter leur insertion sociale et particulière, en les mettant, à titre onéreux et à titre temporaire, à la disposition de personnes physiques et morales. Ces associations assurent l'accueil, le suivi et l'accompagnement de leurs salariés dans le cadre d'une convention conclue avec l'Etat.

Les difficultés des personnes concernées au regard de leur insertion dans l'emploi et l'objectif poursuivi de rechercher leur réinsertion sociale et professionnelle constituent une raison objective au sens de l'accord cadre du 18 juin 1999 de nature à justifier que le nombre des renouvellements possibles des contrats ne soit pas limité.

C'est donc à tort que Mme X... soutient que l'utilisation successive de contrats de travail à durée déterminée constitue un abus.

Sur la conformité des contrats de travail avec l'article L 122-3-1 du code du travail

L'article L 122-3-1 du code du travail dispose que le contrat de travail à durée déterminée doit comporter la date d'échéance du terme lorsqu'il comporte un terme précis et la durée minimale pour laquelle il est conclu lorsqu'il ne comporte pas de terme précis.

En l'espèce, les contrats de travail de Mme X..., conclus sans terme précis, comporte une durée minimale de deux heures, quatre heures ou cinq heures, selon les cas.

La salariée ne peut prétendre que la durée minimale telle que convenue entre les parties constituerait un abus au motif qu'elle aurait été ainsi maintenue dans une situation de précarité. Outre que la fixation de la durée minimale résulte de l'accord des parties, il convient de relever que le contrat de travail à durée déterminée sans terme précis a par nature une durée incertaine puisqu'elle correspond à la durée de la mission.

Ces contrats étant conformes aux exigences de l'article L 122-3-1 du code du travail, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de requalification en un contrat de travail à durée indéterminée.

Sur la rupture du contrat de travail

En application de l'article L 122-1-2 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée conclu sans terme précis a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu.

En l'espèce, le contrat de Mme X... a été conclu pour exécuter des prestations de "ménage, repas, compagnie, courses" au profit de Mme Y....

L'employeur justifie que, par lettre du 16 avril 2004, Mme Y... l'a informé de ce qu'elle souhaitait "arrêter les interventions d'AVS au plus tôt et dans tous les cas au 30 avril 2004".

La mission ayant justifié le contrat de travail étant ainsi réalisée, il ne peut être fait grief à l'association d'avoir avisé la salariée du terme du contrat au 18 avril 2004.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes de dommages-intérêts.

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Il n'est pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais non compris dans les dépens. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné Mme X... à payer à l'association une somme au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement :

En la forme,

- Déclare l'appel recevable,

Au fond,

Confirme le jugement sauf en sa disposition relative à l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Infirmant sur ce point et statuant à nouveau,

- Dit n'y avoir lieu à application de sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- Dit que Mme Annie X... doit supporter les dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06/622
Date de la décision : 20/03/2007
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Cas de recours autorisés - Succession de contrats à durée déterminée - Validité - / JDF

Les associations intermédiaires sont incluses parmi les secteurs d'activités où il est d'usage de recourir au contrat à durée déterminée


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Vichy, 03 février 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2007-03-20;06.622 ?
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