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20/03/2007 | FRANCE | N°06/833

France | France, Cour d'appel de riom, Chambre sociale, 20 mars 2007, 06/833


833/06

Prud'hommes

JLT

La fourniture d'un logement dans l'immeuble dans lequel le salarié travaille, "au titre d'accessoire du contrat de travail",est une condition nécessaire pour que ce salarié puisse être soumis au régime dérogatoire des gardiens concierges

Appelant : M. Alain X...

Intimé : Le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre

FAITS ET PROCÉDURE

M. Alain X... a été embauché par le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre en qualité d'employé d'immeuble par un contrat de travail à d

urée indéterminée du 10 décembre 1984.

Il occupe, dans l'immeuble où il travaille, un appartement dans le...

833/06

Prud'hommes

JLT

La fourniture d'un logement dans l'immeuble dans lequel le salarié travaille, "au titre d'accessoire du contrat de travail",est une condition nécessaire pour que ce salarié puisse être soumis au régime dérogatoire des gardiens concierges

Appelant : M. Alain X...

Intimé : Le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre

FAITS ET PROCÉDURE

M. Alain X... a été embauché par le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre en qualité d'employé d'immeuble par un contrat de travail à durée indéterminée du 10 décembre 1984.

Il occupe, dans l'immeuble où il travaille, un appartement dans le cadre d'un bail conclu avec la SCI de Gestion et d'Investissement.

Le 25 août 2004, M. X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de CLERMONT-FERRAND afin d'obtenir le remboursement des loyers et charges indûment payés pendant 20 ans, soit la somme de 33600,00 € ainsi que le paiement de la somme de 10000,00 € à titre de dommages-intérêts.

Le Conseil, par jugement du 10 mars 2006, a débouté M. X... de ses demandes.

M. X... a relevé appel de ce jugement le 30 mars 2006.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. X..., concluant à la réformation, soutient qu'il a payé, pendant 20 ans, un loyer et des charges pour un logement qui n'était autre qu'un logement de fonction accessoire du contrat de travail

Il soutient qu'il appartient à la catégorie B des employés d'immeuble au sens de la convention collective et il estime qu'en cette qualité, il devait disposer d'un logement de fonction, que le caractère accessoire du logement au contrat de travail ressort des correspondances de l'employeur et que l'exercice de ses tâches nécessite sa présence continue dans les locaux.

Il considère que, s'agissant de loyers, la prescription quinquennale sur les salaires n'est pas applicable.

Il sollicite de condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre à lui payer la somme de 33600,00 € en remboursement des loyers et charges payés indûment ainsi que celle de 20000,00 € à titre de dommages-intérêts et celle de 3000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il demande de dire que le loyer du logement de fonction ne pourra être retenu comme avantage en nature à compter de l'arrêt que dans les limites prévues par la convention collective.

Le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre sollicite la confirmation du jugement, le rejet des demandes de M. X... et sa condamnation à lui payer la somme de 3000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il fait valoir que M. X... dépend de la convention collective nationale des gardiens concierges et employés d'immeuble, qu'elle s'applique au personnel disposant ou non d'un logement de fonction et que le contrat de travail signé par le salarié n'a jamais prévu de logement de fonction. Il ajoute que les bulletins de salaire ne font aucune référence à une quelconque déduction d'un avantage en nature logement.

Il souligne qu'aucune disposition légale ou conventionnelle ne stipule que le fait pour un concierge d'habiter dans la résidence où il travaille et où il paie son loyer n'est de nature à lui conférer le bénéfice d'un logement de fonction.

Il précise que l'appartement de M. X... appartient à la Société Civile de Gestion et d'Investissement et que ce logement ne pouvait pas être occupé à titre d'accessoire à un contrat de travail en vertu de l'article R 313-14 c) du code de la construction, ayant bénéficié d'un financement dans le cadre de la participation des employeurs. Il ajoute que le règlement de copropriété interdit au syndic d'attribuer un logement de fonction à M. X....

Il fait valoir que si le contrat de travail fait mention de la catégorie B définie par la convention collective, cette dernière, à l'époque du contrat, ne faisait pas référence à la définition légale du concierge et qu'en outre, M. X... ne rentre pas dans le cadre de la définition légale du concierge prévue par l'article L 771-1 du code du travail.

Il considère qu'en tout état de cause, la réclamation ne pourrait porter que sur 5 ans et que la rémunération devrait être réduite pour tenir compte d'un éventuel avantage en nature.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure et des prétentions et moyens antérieurs des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, oralement reprises.

DISCUSSION

Sur la recevabilité

La décision contestée ayant été notifiée le 13 mars 2006, l'appel, régularisé le 30 mars 2006, est recevable au regard du délai d'un mois prescrit par les articles 538 du nouveau code de procédure civile et R 517-7 du code du travail.

Sur le fond

L'article L 771-1 du code du travail dispose que sont considérées comme concierges, employés d'immeubles ou femmes de ménage d'immeubles à usage d'habitation, toutes personnes salariées par le propriétaire ou par le principal locataire et qui, logeant dans l'immeuble au titre d'accessoire du contrat de travail, sont chargées d'assurer sa garde, sa surveillance et son entretien ou une partie de ces fonctions.

Il résulte de ces dispositions que le régime des concierges d'immeubles d'habitation déterminés par les articles L 771-1 et suivants n'est applicable que si les conditions posées par ce texte sont remplies et, notamment, si le salarié loge dans l'immeuble "au titre d'accessoire du contrat de travail".

Selon l'article 18 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d'immeubles, les salariés relevant cette convention se rattachent:

- soit au régime de droit commun (catégorie A) lorsqu'ils travaillent dans un cadre horaire: 169 heures correspondant à un emploi à service complet,

- soit au régime dérogatoire (catégorie B) défini par les articles L 771-1 et suivants du code du travail (excluant toute référence à un horaire) lorsque leur emploi répond à la définition légale du concierge, leur taux d'emploi étant déterminé par l'application du barème d'évaluation des tâches constituant l'annexe I à la convention: 10000 unités de valeur correspondant à un emploi à service complet.

Il s'ensuit que la fourniture d'un logement dans l'immeuble dans lequel le salarié travaille, "au titre d'accessoire du contrat de travail", soit, par conséquent, la fourniture d'un logement de fonction, est une condition nécessaire pour que ce salarié puisse être soumis au régime dérogatoire des gardiens concierges (catégorie B).

En l'espèce, il ressort du contrat de travail que M. X..., embauché en qualité d'employé d'immeuble, a été rattaché à la catégorie B avec la qualification de "gardien-concierge de l'immeuble résidence de la Barre" et il n'est pas contesté que le salarié avait pour tâches d'assurer la garde, la surveillance et l'entretien de l'immeuble dans lequel il était logé.

S'il est vrai que, l'article 18 de la convention collective, dans sa rédaction à l'époque de la conclusion du contrat de travail, ne faisait pas référence, pour l'attribution de la catégorie B, à la définition légale du concierge ni à la condition d'un logement de fonction, M. X... est en droit de se prévaloir des nouvelles dispositions de la convention collective issues de l'avenant du 14 janvier 1994 et de l'arrêté d'extension du 19 septembre 1994.

L'employeur fait valoir que le contrat de travail ne fait pas mention d'un logement de fonction et que le salarié n'a formulé aucune réclamation pendant 20 ans. Il est également vrai que le logement occupé par le salarié n'appartient pas à l'employeur, que l'immeuble a été construit par un organisme habilité à recevoir la participation à l'effort de construction des employeurs dans le cadre de l'article L 313-1 du code de la construction et que, selon l'article R 313-14 c) du même code, les logements qui bénéficient d'un financement dans le cadre de la participation des employeurs ne peuvent être occupés à titre d'accessoire d'un contrat de travail. Cependant, aucune de ces circonstances ne saurait dispenser l'employeur de son obligation de fournir au salarié un logement de fonction dès lors qu'il a employé ce dernier selon le régime dérogatoire défini par la convention collective.

Le fait que le règlement de copropriété de l'immeuble ne prévoie pas de logement de fonction n'est pas de nature à interdire au syndicat des copropriétaires de fournir un tel logement à son salarié.

Il s'ensuit qu'ayant été embauché en qualité de gardien-concierge d'immeuble et placé sous le régime dérogatoire prévu par la convention collective, M. X... devait bénéficier de la fourniture par l'employeur d'un logement de fonction au sein de l'immeuble dans lequel il exerçait son activité professionnelle.

Or, il est constant que M. X... occupe un logement dans l'immeuble au titre d'un bail et qu'il supporte intégralement le paiement du loyer.

Selon l'article 23 de la convention collective, le montant du salaire en nature représenté par la mise à disposition d'un logement de fonction est évalué en appliquant à la surface exclusivement réservée à l'habitation un prix au mètre carré défini en annexe sans que la surface retenue puisse excéder 60 mètres carrés. L'avenant no53 du 24 octobre 2001, portant, notamment, actualisation des salaires en nature, fixe à 3,00 € la valeur des "mètres carrés logement" et à 15,08 € le prix du km/h pour le chauffage.

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande tendant à la condamnation de l'employeur à lui rembourser la différence entre le montant des loyers et charges payés et le montant qu'il aurait dû supporter en application de la convention collective.

Toutefois, la somme revendiquée ayant le caractère d'un salaire, la réclamation du salarié ne peut porter que sur une période de cinq ans, par application de l'article L 143-14 du code du travail et non sur l'intégralité de la durée d'exécution du contrat de travail.

Compte tenu que, selon les calculs du salarié, la somme revendiquée de 33600,00 € correspond à la somme payée indûment pendant 20 ans, sa demande doit être accueillie à hauteur de 8400,00 €.

Il y a lieu, en outre, de dire qu'à compter du présent arrêt, le loyer du logement de fonction ne pourra être retenu comme avantage en nature que dans les limites prévues par la convention collective.

M. X... ne justifiant pas d'un préjudice non réparé par la somme allouée ci-dessus, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts.

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile

En application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, l'employeur doit payer à M. X... la somme de 1000,00 € au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement :

En la forme,

- Déclare l'appel recevable,

Au fond,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté M. Alain X... de sa demande de dommages-intérêts,

Infirme le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau,

- Dit que le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre doit payer à M. Alain X... la somme de 8400,00 € à titre de rappel de salaire,

- Dit qu'à compter du présent arrêt, le loyer du logement de fonction ne pourra être retenu comme avantage en nature que dans les limites prévues par la convention collective.

- Dit que le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre doit payer à M. Alain X... la somme de 1000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- Dit que le syndicat des copropriétaires de la résidence de la Barre doit supporter les dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06/833
Date de la décision : 20/03/2007
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Emplois domestiques - Concierge - / JDF

La fourniture d'un logement dans l'immeuble dans lequel le salarié travaille, "au titre d' accessoire du contrat de travail", est une condition nécessaire pour que le salarié puisse être soumis au régime dérogatoire des concierges d'immeubles d'habitation, déterminé par les articles L. 711-1 et suivants du code du travail


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand, 10 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2007-03-20;06.833 ?
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