La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/02/1986 | FRANCE | N°85-90167

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 février 1986, 85-90167


REJET ET CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement et sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Pierre,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux, Chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 1984, qui l'a condamné à 1 000 francs d'amende avec sursis pour infraction à l'article L. 221-17 du Code du travail ;
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 221-5, L. 221-17, R. 262-2 du Code du travail, 3 F et 85 du traité de Rome, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base

légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif a déclaré Pierre X... coupable ...

REJET ET CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement et sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Pierre,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux, Chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 1984, qui l'a condamné à 1 000 francs d'amende avec sursis pour infraction à l'article L. 221-17 du Code du travail ;
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 221-5, L. 221-17, R. 262-2 du Code du travail, 3 F et 85 du traité de Rome, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif a déclaré Pierre X... coupable d'avoir ouvert son établissement le jour du repos hebdomadaire au mépris des arrêtés préfectoraux en date des 10 mars 1976 et 2 mai 1978 pris par application de l'article L. 221-17 du Code du travail prescrivant la fermeture collective au public, le dimanche, des magasins de vente au détail d'articles d'ameublement neuf, ainsi que les rayons de vente des ces mêmes articles dans les magasins à commerces multiples et l'a condamné à une amende de 1. 000 francs assortie du bénéfice du sursis simple ;
" aux motifs, d'une part, qu'il n'est pas possible à la Cour de Cassation de prendre position sur la constitutionnalité des arrêtés préfectoraux " pris par application de l'article L. 221-17 du Code du travail " car cela équivaudrait à juger de la constitutionnalité de cet article de loi lui-même, ce qui n'entre pas dans la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire ;
" et aux motifs, d'autre part, qu'en ce qui concerne les articles 3 F et 85 du traité de Rome, la Cour n'y trouve rien qui soit contraire à la réglementation nationale du repos hebdomadaire, la concurrence n'est pas faussée pour autant, toutes les entreprises de la Chambre étant soumises aux mêmes règles et l'article 85 réglementant les ententes ne s'applique pas en l'espèce ;
" alors, d'une part, qu'ainsi que l'avaient déclaré les premiers juges, l'infraction ne pouvait exister que si le prévenu avait employé du personnel salarié le dimanche, que l'arrêt attaqué qui constate qu'il n'en était rien, a violé les textes visés au moyen ;
" alors, d'autre part, qu'en tout état de cause il appartenait au juge correctionnel de vérifier la comptabilité des arrêtés préfectoraux avec l'article L. 221-17 du Code du travail, que la Cour d'appel a donc méconnu sa compétence ;
" et alors enfin que l'arrêt attaqué se devait également de répondre aux conclusions par lesquelles X... faisait valoir qu'il résultait d'une attestation du maire de Saint-Cristoly-de-Blaye qu'un marché traditionnel se tient tous les dimanches matin dans cette localité et que tous les commerces locaux sont ouverts ; qu'en se dispensant de répondre à ce moyen qui était de nature à démontrer que les arrêtés préfectoraux des 10 mars 1976 et 2 mai 1978 pris par application de l'article L. 221-17 du Code du travail violaient le principe de la libre concurrence et les dispositions du traité de Rome, il a donc entaché sa décision d'un défaut de base légale ; "
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que le dimanche 12 juin 1983, X... Pierre, gérant d'un magasin d'ameublement à Saint-Christoly-de-Blaye, a fait l'objet d'un procès-verbal de gendarmerie pour avoir ouvert son établissement au public en violation d'arrêtés préfectoraux, pris en application de l'article L. 221-17 du Code du travail et prescrivant la fermeture, le dimanche, des magasins de vente au détail d'articles d'ameublement neufs ;
Attendu que, cité devant la juridiction répressive, X... a fait valoir, pour sa défense, que chaque dimanche matin, se tenait un marché dans la localité, que tous les magasins demeuraient ouverts et que lui-même n'employait aucun salarié ce jour-là ; qu'il a contesté la légalité des arrêtés préfectoraux, incompatibles, selon lui, avec le principe de la libre concurrence affirmé, tant par la constitution du 4 octobre 1958 que par le traité de Rome ;
Attendu que, pour écarter ces moyens de défense et déclarer la prévention établie, la Cour d'appel énonce que le prévenu conteste non pas la régularité des arrêtés préfectoraux, dont il n'allègue pas qu'ils aient été pris sans consultation préalable des organismes représentatifs des salariés et des employeurs ; mais bien la constitutionnalité de l'article L. 221-17 du Code du travail, en application duquel ont été pris lesdits arrêtés ; qu'il n'appartient pas aux juridictions de l'ordre judiciaire de se faire juges de la légalité d'un texte législatif.
Attendu que les juges ajoutent que la réglementation du repos hebdomadaire n'est contraire à aucune des dispositions du traité de Rome, expressément visées par X..., aucune atteinte n'étant portée à la libre concurrence, dès lors que toutes les entreprises de même nature de la région sont soumises aux mêmes règles ; qu'enfin la saisine de la Cour de justice des communautés européennes, prévue par l'article 177 du traité de Rome étant facultative, il n'y a pas lieu d'y recourir en l'absence de véritable difficulté ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance, la Cour d'appel a donné une base légale à sa décision sans encourir aucun des griefs énoncés au moyen ;
Que, d'une part, contrairement à ce qui est allégué, c'est sans erreur de droit qu'elle a refusé de prendre en considération l'argument du prévenu tiré de la circonstance qu'il n'employait aucun salarié le dimanche ; qu'il résulte, en effet, de l'article L. 221-17, que le préfet peut ordonner la fermeture des établissemens d'une même profession dans une région déterminée pendant la durée du repos hebdomadaire donné aux salariés ; que les infractions à un tel arrêté rompent l'égalité que la loi a entendu établir entre tous les professionnels, employant, ou non, du personnel ;
Que, d'autre part, c'est à bon droit qu'ayant constaté qu'aucun grief d'irrégularité n'était formé contre les arrêtés préfectoraux eux-mêmes, la Cour d'appel a énoncé qu'il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la constitutionnalité du texte législatif en application duquel ils ont été pris ;
Qu'enfin, ayant expressément relevé qu'aucune atteinte n'était portée au principe de la libre concurrence, toutes les entreprises de même nature de la région étant astreintes à l'obligation de fermeture le dimanche, la Cour d'appel n'était nullement tenue de répondre à l'argumentation que X... prétendait tirer de l'ouverture ce jour-là, des autres commerces, en raison de l'existence d'un marché local ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le moyen, relevé d'office, pris de la violation de l'article 751 du Code de procédure pénale ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 décembre 1985, la contrainte par corps ne peut être prononcée contre les personnes qui ont commencé leur soixante-dixième année au moment de la condamnation ;
Que X... étant né le 9 mars 1912, c'est en violation de cette disposition d'ordre public que la Cour d'appel a prononcé la contrainte par corps à son égard ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
1° Attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi en ce qui concernce les dispositions de l'arrêt attaqué condamnant X... à 1 000 francs d'amende avec sursis pour infraction à l'article L. 221-17 du Code du travail ;
2° CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux du 6 décembre 1984, dans les seules dispositions prononçant la contrainte par corps contre X... ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 85-90167
Date de la décision : 25/02/1986
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Repos hebdomadaire - Fermeture des établissements - Arrêté préfectoral - Portée - Etablissement n'employant pas de salarié

Il résulte de l'article L. 221-17 du Code du Travail que le préfet peut, après accord entre les syndicats d'employeurs et de salariés d'une profession et d'une région, représentant la majorité des professionnels concernés, et sur leur demande, ordonner la fermeture au public des établissements de la profession dans la région pendant la durée du repos hebdomadaire donné aux salariés. Cette fermeture s'applique à tous les établissements même s'ils n'emploient pas de salariés. Cette disposition ne porte nullement atteinte au principe de la libre concurrence et vise, au contraire, à maintenir l'égalité que la loi a voulu établir entre tous les professionnels, employant, ou non, du personnel (1).


Références :

Code du travail L221-17

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 06 décembre 1984

(1) A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1969-06-11, bulletin criminel 1969 N° 197 p. 475 (Rejet) et les arrêts cites. Cour de Cassation, chambre criminelle, 1976-05-26, bulletin criminel 1976 N° 187 p. 482 (Rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 fév. 1986, pourvoi n°85-90167, Bull. crim. criminel 1986 N° 79 p. 196
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1986 N° 79 p. 196

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Berthiau, Conseiller le plus ancien faisant fonctions.
Avocat général : Avocat général : M. Méfort -
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Sainte-Rose -
Avocat(s) : Avocat : La Société civile professionnelle Guiguet, Bachelier, Potier de la Varde

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.90167
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award