CASSATION dans l'intérêt de la loi sans renvoi sur le pourvoi formé par le procureur général près la Cour de Cassation, d'ordre du garde des Sceaux, ministre de la Justice, dans l'intérêt de la loi, contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Douai, en date du 24 juillet 1985, qui a confirmé une ordonnance de refus d'informer du juge d'instruction.
LA COUR,
Vu la lettre du garde des Sceaux, ministre de la Justice, en date du 12 février 1986 ;
Vu la requête du procureur général près la Cour de Cassation en date du 18 mars 1986 ;
Vu l'article 620 du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 86 du Code de procédure pénale ;
Vu ledit article ;
Attendu que, selon l'alinéa 3 de l'article 86 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction n'est autorisé à rendre une ordonnance disant qu'il n'y a lieu à informer que si, pour des causes affectant l'action publique elle-même, les faits ne peuvent légalement comporter une poursuite ou si, à supposer les faits démontrés, ils ne peuvent admettre une qualification pénale ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le juge d'instruction, saisi d'une information suivie du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants contre un certain nombre d'inculpés a été, en outre, saisi par le procureur de la République d'un réquisitoire supplétif visant de nouveaux faits de même nature, révélés à la suite d'une enquête de police, et qui auraient été commis par deux des inculpés déjà en cause ainsi que par deux autres personnes ;
Attendu que, sur l'appel formé par le ministère public contre l'ordonnance par laquelle le juge d'instruction avait refusé d'informer sur les faits visés dans ledit réquisitoire supplétif, la chambre d'accusation, après avoir rappelé notamment que la décision entreprise faisait valoir " que si le procureur de la République a la possibilité de saisir le magistrat instructeur en cours d'information de faits non visés au réquisitoire, encore faut-il que ces faits aient été portés à la connaissance du magistrat instructeur à l'occasion de son information, soit directement, soit en exécution d'une commission rogatoire par lui délivrée ", énonce " qu'il n'est pas contestable que les faits dont s'agit sont des faits nouveaux dont la réalité n'a pas été établie en suite d'actes d'instruction ou de commission rogatoire délivrés par le magistrat instructeur " et en déduit que l'ordonnance de refus d'informer s'avère fondée en droit ;
Mais attendu, abstraction faite de ce qu'une ordonnance de non-informer ne peut intervenir, selon l'article 86 du Code de procédure pénale, qu'à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile mettant l'action publique en mouvement, que de tels motifs, qui d'ailleurs méconnaissent les conséquences de la connexité comme ils font une fausse interprétation des articles 80 et 82 du même Code, n'entrent pas dans les prévisions de l'alinéa 3 de l'article 86 précité et ne sauraient justifier la confirmation de la décision entreprise, laquelle, sous couvert d'un refus d'informer, revient à statuer sur la validité du réquisitoire supplétif du procureur de la République, ce que l'article 171 du Code de procédure pénale n'autorise pas le juge d'instruction à faire ;
D'où il suit que, dans l'intérêt de la loi, la cassation doit être prononcée ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement dans l'intérêt de la loi, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Douai du 24 juillet 1985 ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi.