CASSATION sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Impôts, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre correctionnelle, en date du 17 mai 1990, qui a relaxé Michel X... du chef de fausse déclaration de stock de vin et a mis hors de cause la SA Domaine X... citée en qualité de civilement responsable.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 408 et 1791 du Code général des impôts, de la foi due au procès-verbal (article L. 238 du Livre des procédures fiscales), ensemble violation des articles 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé les prévenus des fins de la poursuite fiscale exercée à leur encontre pour fausse déclaration des stocks de vin ;
" aux motifs que l'absence de précision sur la manière dont les agents ont opéré le contrôle des vins dans les chais ne permet pas d'avoir l'entière conviction que la déclaration des stocks de vin était entachée de fausseté ;
" alors qu'il résultait du procès-verbal, base des poursuites, que les agents ont vérifié par leurs moyens ordinaires les appels du chef de chais relatifs aux quantités et couleurs des vins stockés ; qu'en l'absence de tout élément de nature à infirmer les constatations des agents qui démontraient, selon les catégories de vin, des manquants ou des excédents, les juges ne pouvaient, eu égard à la force probante attachée à cet acte, que tenir pour exactes lesdites constatations " ;
Vu l'article L. 238 du Livre des procédures fiscales ;
Attendu que, selon ce texte, les procès-verbaux des agents des contributions indirectes font foi jusqu'à preuve contraire des faits qui y sont constatés ; que si le prévenu a le droit de combattre ces procès-verbaux par tous les moyens légaux de preuve, leur force probante ne peut être infirmée sur ses seules dénégations ou allégations ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal, base des poursuites, que le 8 novembre 1985 les agents de la Direction générale des Impôts ont procédé au contrôle du stock des vins détenus dans les chais de la société Domaine X... à Chablis ; que sur les appels du chef de chais, immédiatement vérifiés par eux, " avec leurs moyens ordinaires ", ils ont reconnu d'une part, un manquant de 144 hl de " Chablis ", d'autre part un excédent de 4 hl de " Petit Chablis ", de 54 hl de " Chablis Premier Cru " et de 46, 12 hl de " Chablis Grand Cru ", par rapport à la déclaration de stock souscrite le 27 août 1985 à la recette locale ;
Attendu que l'administration des Impôts ayant cité directement Michel X..., président de la société Domaine X..., comme prévenu de fraude en matière de déclaration de stock de vin, et la société Domaine X... en tant que civilement responsable, le tribunal correctionnel, passant outre à la demande d'expertise technique de X... qui contestait les méthodes et l'exactitude de la vérification, a déclaré la prévention établie et a prononcé sur les pénalités fiscales ;
Attendu que, pour renvoyer Michel X... des fins de la poursuite et mettre hors de cause la société Domaine X..., l'arrêt attaqué se borne à énoncer que " l'absence de précisions quant à la manière dont les agents des Impôts ont opéré le contrôle dans les chais, et surtout en ce qui concerne le vin en bouteilles, lequel n'a pas fait l'objet d'un second pointage à l'inverse de ce qu'ils avaient estimé devoir faire pour le vin en cuves, ne permet pas à la Cour d'avoir l'entière conviction que la déclaration de stock du 27 août 1985 était entachée de fausseté et par là même d'entrer en voie de condamnation " ;
Mais attendu qu'en l'état de ces seuls motifs d'où ne résulte pas la preuve contraire aux constatations matérielles rapportées au procès-verbal et alors qu'aucun procédé n'est imposé aux agents verbalisateurs pour évaluer les quantités de vin se trouvant en contravention, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 17 mai 1990 ;
Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon.