LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Maurice C..., agissant en qualité de syndic de la liquidation des biens de la société anonyme Morel etate, dont le siège est ... (Ille-et-Vilaine), demeurant en cette qualité ... (Ille-et-Vilaine),
en cassation d'un arrêt rendu le 20 juin 1989 par la cour d'appel de Caen (chambres réunies civiles et commerciales), au profit du Crédit industriel et commercial de Paris, CIC, dont le siège est ... (9ème),
défenderesse à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 17 novembre 1992, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Edin, conseiller rapporteur, MM. A..., E..., D...
F..., MM. Z..., X..., D...
Y..., MM. Lassalle, Tricot, conseillers, MM. B..., Rémery, conseillers référendaires, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Edin, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de M. C... et de Me Le Prado, avocat du CIC, les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 20 juin 1989), rendu sur renvoi après cassation, que la société d'exploitation des Etablissements Morel etate (la société) ayant été mise en règlement judiciaire et ayant été autorisée à continuer son activité, le Crédit industriel et commercial de Paris (la banque) lui a ouvert dans ses livres un compte courant ; qu'après homologation du concordat obtenu par la société, la banque lui a ouvert un nouveau compte ; que, le concordat ayant été résolu et la société ayant été mise en liquidation des biens, la banque a produit au passif pour le solde débiteur du premier compte ; que sa créance n'a été admise en 1976 par le juge-commissaire que déduction faite du solde créditeur du second compte ; que la banque a formé une réclamation contre cette décision ; que le 10 mars 1981, elle a assigné M. C..., syndic de la liquidation des biens, en paiement du solde débiteur du premier compte ; Sur le premier moyen :
Attendu que M. C... fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors, selon le pourvoi, que, M. C... s'étant formellement prévalu des mentions du registre d'audience du
26 mai 1978 dont ressortait, avec la mention "DI" inscrite par le greffier, que la banque s'était désistée de son instance en contestation de l'état des créances vérifié par le juge-commissaire en juin 1976, auquel s'attachait l'autorité de la chose jugée résultant des articles 42 de la loi du 13 juillet 1967 et 1351 du Code civil, il appartenait à la banque de combattre ce titre de procédure et, la force probante s'y attachant, pour prétendre à une créance de nature distincte de celle résultant de l'admission partielle en prouvant une erreur entachant le registre d'audience ou son intention de ne pas se désister de la demande, en dépit du délai imparti pour former la contestation et depuis longtemps expiré ; qu'en dispensant la banque de la charge de cette preuve, ce qui a privé M. C... du bénéfice de son exception de chose jugée, l'arrêt a violé les articles 459 du nouveau Code de procédure civile, conférant une force probante au registre d'audience, ensemble 1315 par renversement du fardeau de la preuve, et 1351 du Code civil ainsi que 42 de la loi du 13 juillet 1967 ; Mais attendu que l'arrêt retient qu'en l'absence de décision ou d'élément particulier laissant supposer que la banque ait entendu renoncer à sa contestation, la simple mention "DI" portée au registre d'audience par le greffier ne permet pas de considérer qu'elle ait voulu, de façon certaine et non équivoque se désister de sa demande ; qu'ainsi la cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain et sans inverser la charge de la preuve, a apprécié la force probante du seul élément qui lui était soumis à l'appui de l'allégation de désistement ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le second moyen :
Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, au motif que l'exception de péremption d'instance invoquée par M. C... n'avait pas été opposée avant tout autre moyen devant le tribunal lors de l'introduction de l'instance, alors, selon le pourvoi, que, dans ses conclusions du 18 octobre 1988, dénaturées, M. C..., loin de se prévaloir d'une extinction de l'action en paiement soumise à la juridiction de renvoi, opposait à la banque, pour le cas où il ne se serait pas désisté
de sa réclamation le 26 mai 1978, un moyen de défense, recevable à tout moment, et tiré de ce que la carence de la banque dans la procédure, distincte, de réclamation, l'empêcherait désormais de soutenir, contrairement à la décision d'admission partielle de sa créance chirographaire, qu'elle disposait d'une créance sur la masse ; qu'en statuant comme il a fait, pour étendre la règle de procédure civile à une procédure distincte de celle mise en sommeil, l'arrêt a dénaturé les conclusions claires et précises de M. C... et violé par là-même les articles 4, 386 et 388 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu qu'il résulte de l'article 53 du décret du 22 décembre 1967, que les créances contestées sont renvoyées à la première audience par les soins du greffier, que la saisine de la juridiction n'incombe pas aux parties mais au greffe du tribunal, et
qu'ainsi celles-ci ne peuvent pallier la négligence du service public par la mise en oeuvre d'un quelconque moyen de procédure, de sorte qu'on ne peut leur reprocher leur inaction pendant le délai de péremption ; qu'est ainsi inopérant le moyen tiré de la prétendue dénaturation de conclusions invoquant la péremption de l'instance de réclamation ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE Le pourvoi ;