La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/10/1995 | FRANCE | N°93-16655

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 octobre 1995, 93-16655


Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 25 mars 1993), que la société Didier Werke (société Werke) est titulaire de deux brevets, le premier dont la demande, déposée le 8 juillet 1976, sous le bénéfice d'une priorité allemande, a été enregistrée sous le numéro 76-21.220, le second dont la demande déposée le 23 juin 1977, sous le bénéfice d'une priorité anglaise, a été enregistrée sous le numéro 77-19.344 ; que ces deux brevets ont pour titre, le premier : " Pièces d'usure pour récipients contenant du métal fondu ", le second : " Pièces d'usure po

ur fermeture coulissante de buse de coulée, procédé pour la fabrication de t...

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 25 mars 1993), que la société Didier Werke (société Werke) est titulaire de deux brevets, le premier dont la demande, déposée le 8 juillet 1976, sous le bénéfice d'une priorité allemande, a été enregistrée sous le numéro 76-21.220, le second dont la demande déposée le 23 juin 1977, sous le bénéfice d'une priorité anglaise, a été enregistrée sous le numéro 77-19.344 ; que ces deux brevets ont pour titre, le premier : " Pièces d'usure pour récipients contenant du métal fondu ", le second : " Pièces d'usure pour fermeture coulissante de buse de coulée, procédé pour la fabrication de telles pièces " ; que la société Werke a assigné, pour contrefaçon, la société Terres réfractaires du Boulonnais (société TRB), qui fabrique et répare des pièces d'usure et qui a opposé, reconventionnellement, la nullité des brevets pour défaut de nouveauté et d'activité inventive ;

Sur le premier moyen pris en ses quatre branches :

Attendu que la société TRB fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré valable et contrefaite la revendication 1 du brevet n° 76-21.220 alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel viole l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, en retenant ainsi d'office et sans avoir au préalable invité les parties à s'en expliquer un moyen pris à la fois de l'annulation qu'elle prononce du brevet premier en date n° 77-19.344 et de l'interprétation qu'en cet état elle donne de la règle de l'article 12 de la loi du 2 janvier 1968 dans sa rédaction applicable en la cause ; alors, d'autre part, qu'aux termes de cette dernière disposition " ne peut être valablement revendiquée dans une demande de brevet toute invention contenue dans les revendications d'un brevet français qui n'était pas encore publié à la date du dépôt de la demande considérée, mais qui bénéficie d'une date antérieure " ; qu'en vertu de la règle ainsi légalement établie, la revendication seconde en date n'a jamais pu valablement exister et elle peut donc ensuite se voir attribuer le caractère d'une invention valablement protégée opposable au tiers, pour la seule raison que le brevet premier en date a fait ultérieurement l'objet d'une annulation par voie de justice ; qu'en en décidant autrement, l'arrêt viole ledit article 12 de la loi du 2 janvier 1968 ; alors, de surcroît, qu'en considérant comme acquise dans son raisonnement une identité de contenu entre la revendication 1 du brevet n° 76-21.220 et les revendications 1 ou 4 du brevet n° 77-19.344, la cour d'appel ne tire pas les conséquences légales de ses propres énonciations et constatations, en ne retenant pas, s'agissant du contenu de cette revendication 1 du brevet n° 76-21.220, la cause d'annulation qu'elle applique en même temps au contenu des revendications 1 ou 4 du brevet antérieur n° 77-19.344 ; que l'arrêt viole à cet égard les articles 1 et 6 de la loi du 2 janvier 1968 dans leur rédaction applicable en la cause ; et alors, enfin, qu'en s'abstenant d'examiner, en raison de l'erreur de droit par elle ainsi commise, le contenu réel et effectif des revendications en présence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision quant à l'application du même article 12 de la loi du 2 janvier 1968 ;

Mais attendu, d'une part, que, d'un côté, l'arrêt relève que la société TRB demande l'annulation des revendications 1 et 4 du brevet n° 77-19.334 et que, d'un autre côté, dans les conclusions de cette société, signifiées le 16 décembre 1992, il est indiqué que " la revendication 1 du brevet 76-21.220 est entièrement comprise dans l'introduction de la revendication 1 du brevet français 77-19.344 bénéficiant de la priorité antérieure du 25 juin 1976 " ; que la cour d'appel, qui, pour prononcer l'annulation des revendications 1 et 4 du brevet n° 77-19.344 et déclarer valable la revendication 1 du brevet n° 76-21.220, a fait application de l'article 12 de la loi du 2 janvier 1968, nécessairement dans la cause en raison de l'antériorité susceptible d'exister par suite du dépôt de deux demandes de brevets par le même titulaire à des dates différentes, n'a fait, par l'interprétation qu'elle a donnée de ce texte, que tirer les conséquences juridiques des faits qui étaient soumis à son appréciation et n'a donc pas manqué au respect du principe de la contradiction ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient que la demande de brevet n° 76-21.220 ne peut pas revendiquer la priorité unioniste résultant de la demande déposée en Allemagne le 31 mai 1976, et qu'en conséquence la date devant être prise en considération pour la protection de ce brevet est donc celle du dépôt en France de la demande soit le 8 juillet 1976, ce dont il résulte que le brevet n° 77-19-344 qui bénéficie d'une priorité anglaise du 25 juin 1976 lui est antérieur ; que la cour d'appel, qui répondait au moyen tiré de l'antériorité du brevet n° 77-19.344 opposé au brevet n° 76-21.220, a fait l'exacte application de l'article 12 de la loi du 2 janvier 1968 dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 juillet 1978, en retenant que, dans l'hypothèse de l'annulation du premier brevet et de l'identité de contenu dans les revendications des deux brevets litigieux, le second pouvait être déclaré valable, ledit texte ayant pour objet d'éviter que la même invention fasse l'objet de plus d'un brevet ;

Attendu, en outre, que la cour d'appel n'a pas retenu que la revendication 1 du brevet n° 76-21.220 était contenue dans les revendications 1 ou 4 du brevet n° 77-19.344 mais a, pour répondre au moyen tiré de l'antériorité du second sur le premier, indiqué que même si une telle hypothèse était réalisée, la nullité du brevet premier en date n'entraînait pas nécessairement celle du second en date ; que la cour d'appel a, souverainement, décidé que les revendications 1 et 4 du brevet n° 77-19.344 étaient annulées en raison de l'évidence de la solution qu'elles proposaient, en l'occurrence le procédé consistant à couler directement le béton réfractaire dans une enveloppe métallique réalisée sous forme de coffrage perdu tandis que les revendications 1 et 2 du brevet n° 76-21.220, étaient déclarées valables en raison de ce qu'aucune antériorité ne faisait apparaître l'utilisation du béton réfractaire à prise hydraulique pour la fabrication de pièces d'usure, ce dont il résultait nécessairement que la cour d'appel attribuait à chacun des deux brevets litigieux un objet distinct ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel, en comparant les revendications litigieuses aux antériorités qui leur étaient opposées, a examiné le contenu effectif et réel desdites revendications ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 93-16655
Date de la décision : 17/10/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BREVET D'INVENTION - Revendication - Titulaire de deux brevets contenant des revendications identiques - Annulation du premier - Portée .

Dans l'hypothèse où une même personne est titulaire de deux brevets et où il y a identité de contenu dans les revendications de ceux-ci, l'annulation du premier n'empêche pas que le second soit déclaré valable, l'article 12 de la loi du 2 janvier 1968, dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 juillet 1978, n'ayant pour objet que d'éviter que la même invention fasse l'objet de plus d'un brevet.


Références :

Loi 68-1 du 02 janvier 1968 art. 12

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 mars 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 oct. 1995, pourvoi n°93-16655, Bull. civ. 1995 IV N° 234 p. 218
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1995 IV N° 234 p. 218

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Mourier.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Gomez.
Avocat(s) : Avocats : Mme Thomas-Raquin, M. Bertrand.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:93.16655
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award