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17/09/1997 | FRANCE | N°97-83617

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 septembre 1997, 97-83617


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Lyon,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de ladite cour d'appel, du 23 mai 1997, qui a renvoyé X... devant la cour d'assises des mineurs de la Loire sous l'accusation de viols et autres agressions sexuelles aggravés.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 7 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt a prononcé le renvoi de X... devant la juridiction de jugement pour des crimes de viols commis antérieure

ment au 22 octobre 1986 ;
" alors qu'en matière de crime l'action publique se p...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Lyon,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de ladite cour d'appel, du 23 mai 1997, qui a renvoyé X... devant la cour d'assises des mineurs de la Loire sous l'accusation de viols et autres agressions sexuelles aggravés.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 7 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt a prononcé le renvoi de X... devant la juridiction de jugement pour des crimes de viols commis antérieurement au 22 octobre 1986 ;
" alors qu'en matière de crime l'action publique se prescrit par dix années révolues à compter du jour où le crime a été commis ; qu'elle ne commence à courir à partir de la majorité de la victime que si le crime a été commis par l'ascendant de cette dernière ou par une personne ayant autorité sur elle ; qu'à défaut de motivation quant à la relation d'autorité à laquelle les termes de la prévention ne font d'ailleurs aucune référence, la seule qualité de frère aîné que l'arrêt semble retenir implicitement ne peut suffire à caractériser la circonstance interruptive ou suspensive de prescription, de sorte que le 22 octobre 1996, date de la plainte, et faute de toute motivation à cet égard, la prescription était acquise à l'égard des faits qualifiés viols et commis de 1985 au 22 octobre 1986 " ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 8 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt a prononcé le renvoi de X... devant la juridiction de jugement pour les délits connexes d'agressions sexuelles commis entre 1985 et 1990 ;
" alors qu'en matière de délit la prescription de l'action publique est de trois années révolues ; qu'elle ne commence à courir à partir de la majorité de la victime que si le délit a été commis par l'ascendant de cette dernière ou par une personne ayant autorité sur elle ; qu'à défaut de motivation quant à la relation d'autorité à laquelle les termes de la prévention ne font d'ailleurs aucune référence, la seule qualité de frère aîné que l'arrêt semble retenir implicitement ne peut suffire à caractériser la circonstance interruptive ou suspensive de prescription, de sorte que le 22 octobre 1996, date de la plainte et faute de toute motivation à cet égard, le délai de trois ans était révolu et les faits qualifiés délits apparaissent comme prescrits " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, selon les articles 7, alinéa 3, et 8, alinéa 2, du Code de procédure pénale, le point de départ du délai de prescription d'un crime ou d'un délit perpétré sur une victime mineure n'est reporté à la majorité de celle-ci que lorsque les faits ont été commis par une personne ayant autorité sur elle ou par un ascendant légitime, naturel ou adoptif ;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que, le 22 octobre 1996, Y..., née le 6 mai 1977, a révélé au juge des enfants qu'entre l'âge de 8 et 13 ans, elle avait subi des agressions sexuelles de la part de son frère aîné ;
Que, par l'arrêt attaqué, qui se borne à faire état de ce seul lien de parenté, X... est renvoyé devant la juridiction de jugement pour avoir, d'août 1985 à février 1990, par violence, menace, contrainte ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle et des atteintes sexuelles sur mineure de 15 ans ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'intéressé n'a pas la qualité d'ascendant de la victime et que l'arrêt n'a pas caractérisé à son encontre la circonstance aggravante personnelle d'autorité sur cette dernière, à défaut de laquelle les faits poursuivis, échappant aux dispositions dérogatoires instaurées au bénéfice des victimes mineures, se trouvent prescrits en tout ou en partie, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation de l'article 593 du Code de procédure pénale, contradiction de motifs :
" en ce que l'arrêt a prononcé le renvoi de X... devant la cour d'assises de la Loire pour viol commis en 1990 ;
" alors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que les seuls faits datant de 1990 " ne peuvent recevoir une qualification pénale dans la mesure où il n'y a même pas eu de commencement d'exécution... mais simplement manifestation d'intention " ; " qu'ainsi les termes de l'arrêt se contredisent eux-mêmes " ;
Sur le cinquième moyen de cassation pris de la violation des articles 222-23 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs :
" en ce que l'arrêt qualifie les faits reprochés à X... de viols et prononce le renvoi de ce chef devant la cour d'assises ;
" alors que la violence décrite dans l'arrêt est relative à des menaces de représailles exercées en raison de la plainte déposée en 1996, sept ans après les derniers faits, et non pas à des actes concomitants aux pénétrations sexuelles commises de 1985 à 1989, que la surprise n'est pas davantage caractérisée dès lors qu'à l'origine, les faits de pénétration ayant succédé à des attouchements impudiques fréquents se produisaient toujours selon le même processus comme un " gage " au cours d'un jeu entre deux enfants, l'un de 8 ans, l'autre de 13 ans, âge auquel la conscience de la sexualité et l'abus qui en est fait vis-à-vis d'autrui ne peuvent être affirmés sans une motivation particulière et appropriée à de telles circonstances ; qu'en tant qu'elle peut tout aussi bien s'appliquer à des atteintes qu'à des agressions sexuelles, la notion d'abus évoquée par l'arrêt ne permet pas de caractériser l'un des éléments constitutifs du viol " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, si les chambres d'accusation apprécient souverainement, au point de vue du fait, l'existence des charges de culpabilité, leurs arrêts sont déclarés nuls à défaut de motifs ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour renvoyer X... devant la cour d'assises des mineurs sous l'accusation de viols sur mineure de quinze ans, la chambre d'accusation se borne à énoncer que celui-ci, après avoir, par jeu, commis des attouchements sexuels répétés sur la personne de sa soeur Y..., de cinq ans sa cadette, l'aurait sodomisée de manière régulière pendant plusieurs années, en exécution de gages contractés à l'occasion de parties de cartes ; qu'elle ajoute que la victime, sachant son frère violent, se serait abstenue de dénoncer les faits par crainte de représailles ;
Que, par ailleurs, après avoir relevé que, selon la personne mise en examen, les derniers agissements de cette nature auraient eu lieu en janvier et février 1990 à Digoin, où résidait alors la famille, les juges retiennent que ces faits ne peuvent recevoir de qualification pénale, à défaut de commencement d'exécution ; que, cependant, l'arrêt ordonne le renvoi de l'intéressé devant la juridiction de jugement des chefs de viols et autres agressions sexuelles commis en janvier et février 1990 ;
Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations, pour partie contradictoires, qui ne relèvent aucun élément de contrainte ou de surprise, ni de violence concomitante aux actes de pénétration sexuelle, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Que, dès lors, la cassation est également encourue de ces chefs ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 16 et 20 de l'ordonnance du 2 février 1945 et 594 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt a prononcé le renvoi de X... devant la cour d'assises de la Loire pour viol commis entre 1985 et 1990 ;
" alors qu'en ce qui concerne les faits retenus à la prévention et commis jusqu'au 12 mai 1988, X..., né le 13 mai 1972 et à cette époque mineur de seize ans, ne pouvait être renvoyé que devant le tribunal pour enfants " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 9 de l'ordonnance du 2 février 1945 ;
Attendu qu'il résulte des articles 9 et 20 de l'ordonnance précitée que le mineur de 16 ans auquel est imputée une infraction qualifiée crime est renvoyé devant le tribunal pour enfants ;
Attendu que X..., né le 13 mai 1972, est renvoyé devant la cour d'assises des mineurs sous l'accusation de viols aggravés commis d'août 1985 à février 1990 ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que ces crimes auraient été perpétrés, pour partie, à une période où l'intéressé était âgé de moins de 16 ans, la chambre d'accusation a méconnu les textes susvisés qui déterminent dans l'intérêt des mineurs des règles impératives de compétence des juridictions ;
D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue ;
Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Lyon, en date du 23 mai 1997, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Dijon.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-83617
Date de la décision : 17/09/1997
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° PRESCRIPTION - Action publique - Suspension - Crime ou délit - Mineur victime - Conditions.

1° MINEUR - Mineur victime - Action publique - Suspension - Crime ou délit - Prescription - Conditions 1° VIOL - Circonstances aggravantes - Ascendant légitime de la victime - Prescription - Action publique - Suspension - Mineur victime - Conditions.

1° Selon les articles 7, alinéa 3, et 8, alinéa 2, du Code de procédure pénale, en cas de crime ou de délit perpétré sur une victime mineure, la prescription de l'action publique ne commence à courir à la majorité de celle-ci que lorsque les faits ont été commis par une personne ayant autorité sur elle ou par un ascendant légitime, naturel ou adoptif.

2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Arrêts - Arrêts de renvoi en cour d'assises - Charges de culpabilité - Appréciation - Motivation - Nécessité.

2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Arrêts - Arrêts de renvoi en cour d'assises - Contrôle de la Cour de Cassation - Motifs le permettant - Nécessité.

2° Si les chambres d'accusation apprécient souverainement, au point de vue du fait, l'existence des charges de culpabilité, leurs arrêts sont déclarés nuls en cas d'absence, d'insuffisance ou de contradiction de motifs(1).

3° MINEUR - Chambre d'accusation - Pouvoirs - Renvoi devant la cour d'assises des mineurs - Mineur de seize ans (non).

3° MINEUR - Cour d'assises - Compétence - Mineur de seize ans (non).

3° Le mineur de 16 ans est justiciable du seul tribunal pour enfants et ne peut donc être renvoyé devant la cour d'assises des mineurs(2).


Références :

1° :
3° :
Code de procédure pénale 593
Code de procédure pénale 7, al. 3 et 8 al. 2
Code pénal 222-23

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon (chambre d'accusation), 23 mai 1997

CONFER : (2°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1995-07-11, Bulletin criminel 1995, n° 254, p. 710 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1995-11-28, Bulletin criminel 1995, n° 359, p. 1046 (cassation), et les arrêts cités. CONFER : (3°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1989-01-23, Bulletin criminel 1989, n° 26, p. 82 (cassation partielle), et les arrêts cités ;

A rapprocher : Chambre criminelle, 1957-03-21, Bulletin criminel 1957, n° 281, p. 504 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 sep. 1997, pourvoi n°97-83617, Bull. crim. criminel 1997 N° 302 p. 1011
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 302 p. 1011

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Fabre, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Batut.

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:97.83617
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