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30/06/2004 | FRANCE | N°03-10650

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 juin 2004, 03-10650


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Versailles, 14 novembre 2002) et les productions, que la société Générale d'armement et de navigation (société SGAN) ayant pris en charge plusieurs véhicules ainsi que de l'outillage, chargés par TTM, depuis Le Havre jusqu'à Fort-de-France, a, en raison du blocage du port de Fort-de-France par des ouvriers de l'industrie bananière, débarqué la marchandise en Guadeloupe et en République Dominicaine ; que les frais

de réacheminement ayant été facturés aux destinataires et une partie de la c...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Versailles, 14 novembre 2002) et les productions, que la société Générale d'armement et de navigation (société SGAN) ayant pris en charge plusieurs véhicules ainsi que de l'outillage, chargés par TTM, depuis Le Havre jusqu'à Fort-de-France, a, en raison du blocage du port de Fort-de-France par des ouvriers de l'industrie bananière, débarqué la marchandise en Guadeloupe et en République Dominicaine ; que les frais de réacheminement ayant été facturés aux destinataires et une partie de la cargaison ayant subi des dégradations, les sociétés Mutuelles du Mans assurances IARD, le GAN, Axa, Le Continent, General et UAP Caraïbes (les assureurs) ont assigné la société SGAN en remboursement des sommes qu'ils avaient versées aux propriétaires ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que les assureurs reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes, alors, selon le moyen :

1 / que commet une faute caractérisée le transporteur maritime qui s'engage à acheminer une marchandise vers un port où elle doit être débarquée tout en sachant par avance que le déchargement de la marchandise ne pourra pas être effectué sauf à une date indéterminée ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que le transporteur maritime avait pris en charge des camions bien qu'il eût une connaissance précise de l'impossibilité dans laquelle il se trouvait de satisfaire à ses obligations compte tenu du blocage du port de destination ; qu'en déclarant dès lors qu'il n'y avait pas de faute prouvée et pour affranchir le transporteur de sa responsabilité et qui plus est de l'obligation d'apporter la preuve, le cas échéant, d'un fait exonératoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 27 de la loi du 18 juin 1966 ;

2 / que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même, que la cour d'appel a cru pouvoir exonérer le transporteur de sa responsabilité en se bornant à relever que la société SGAN "affirme" sans que les assureurs démontrent le contraire, que les intérêts cargaisons étaient informés de la grève ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;

3 / que les assureurs avaient fait valoir qu'il n'était pas établi que TMM ait été avertie de la grève ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pertinent de nature à établir que les intérêts cargaisons n'avaient pas été avertis de la grève, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que, dès lors que le transporteur maritime est responsable des pertes et dommages à moins qu'il ne prouve que le dommage provient de grève pour quelque cause que ce soit et qu'il appartient au chargeur d'apporter la preuve d'une faute du transporteur pour que celui-ci ne puisse bénéficier de ce cas excepté, la cour d'appel, qui a retenu, d'un côté, que le navire n'avait pu accoster à Fort-de-France en raison d'une grève affectant le port et, d'un autre côté, que les assureurs n'étaient pas en mesure d'apporter la preuve d'une faute de la société SGAN, a, sans inverser la charge de la preuve, répondu en l'écartant au moyen prétendument omis et légalement justifié sa décision ;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que les assureurs font encore le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1 / que même en admettant que les chargeurs avaient pris le risque d'expédier les véhicules, il n'était nullement établi, et ce par aucun document, qu'ils avaient accepté l'aléa de l'expédition ; qu'une telle acceptation qui aboutirait à exonérer le transporteur serait nulle ; qu'en exonérant dès lors le transporteur motif pris de ce que les chargeurs auraient pris le risque d'expédier les véhicules en toute connaissance de cause, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, privant sa décision de toute base légale au regard de l'article 27 de la loi du 18 juin 1966 et 1134 du Code civil ;

2 / que dès lors qu'un transporteur maritime connaît parfaitement les difficultés de déchargement au port de destination ainsi que les exigences des autorités locales, il ne peut se prévaloir de l'attitude de ces autorités pour prétendre à une exonération de responsabilité ; qu'il est constant que le transporteur maritime connaissait l'existence de la grève et ne pouvait ignorer en tant que professionnel que les autorités maritimes interdiraient l'accès du port, ce qui excluait tout cas de force majeure ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 27 de la loi du 18 juin 1966 ;

3 / que dans leurs conclusions d'appel, les assureurs avaient reproché au transporteur de ne pas avoir avisé en tant que professionnel du transport tant les expéditeurs des marchandises que les destinataires suite à la situation créée depuis le 27 novembre 1998 du fait du déclenchement des mouvements de grève et en déduisait qu'à supposer que les chargeurs aient été informés de la situation, ceci ne saurait leur être opposé en l'absence d'accord du destinataire d'assurer tout ou partie du risque et de réduire ainsi les obligations contractuelles de la société SGAN ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen dirimant établissant le manquement à l'obligation de conseil du transporteur, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que, sous couvert d'un manque de base légale et d'une violation de la loi, le moyen ne tend, dans ses première et troisième branches, qu'à instaurer devant la Cour de Cassation une discussion de pur fait ;

Attendu, en second lieu, que la cour d'appel ayant justifié sa décision en retenant, d'un côté, que le navire n'avait pu accoster à Fort-de-France en raison d'une grève affectant le port et, d'un autre côté, que le chargeur avait pris le risque d'expédier les véhicules en toute connaissance de cause, pour en déduire que les assureurs n'étaient pas en mesure d'apporter la preuve d'une faute de la société SGAN, le moyen, pris en sa deuxième branche, critique un motif surabondant ;

D'où il suit que le moyen, non fondé dans ses première et troisième branches, ne peut être accueilli dans sa deuxième branche ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les demanderesses aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les demanderesses à payer à la Société générale d'armement et de navigation la somme globale de 1 800 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 03-10650
Date de la décision : 30/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (2e Chambre, Section 1), 14 novembre 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 jui. 2004, pourvoi n°03-10650


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.10650
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