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05/10/2004 | FRANCE | N°03-85351

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 octobre 2004, 03-85351


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle COUTARD et MAYER, de la société civile professionnelle de CHAISEMARTIN et COURJON, de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU, et de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET

;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Charles,

- Y... Math...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle COUTARD et MAYER, de la société civile professionnelle de CHAISEMARTIN et COURJON, de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU, et de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Charles,

- Y... Mathieu,

- Z... Philippe,

- LA SOCIETE GIRAUDY VIACOM OUTDOOR,

- LA SOCIETE DAUPHIN,

civilement responsables,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 2 mai 2003, qui, pour infractions au Code de l'urbanisme, les a condamnés, le premier et le deuxième, chacun à 10 000 euros d'amende, le troisième à 2 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation présenté par la société civile professionnelle Peignot et Garreau pour Philippe Z... et pris de la violation des articles 510, 592 du Code de procédure pénale, violation de la loi ;

"en ce que l'arrêt attaqué énonce que la cour d'appel était composée, lors des débats, de M. Mahieux, président, et de M. Coural et Mme Hauduin conseillers, et, lors du délibéré, de M. Velly, président, et de M. Coural et Mme Hauduin conseillers ;

"alors que, seuls les juges devant lesquels l'affaire a été débattue peuvent en délibérer, de sorte qu'encourt la censure l'arrêt attaqué dont il résulte des mentions que M. Velly a participé au délibéré, en qualité de président, sans avoir participé aux débats" ;

Attendu que les mentions de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les mêmes magistrats ont participé aux débats et au délibéré et que l'arrêt a été lu par l'un d'eux, en application de l'article 485 du Code de procédure pénale ;

Que, dès lors, le moyen manque en fait ;

Mais sur le second moyen de cassation présenté par la société civile professionnelle Peignot et Garreau pour Philippe Z... et pris de la violation de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979, des articles L. 581-3, L. 581-44 du Code de l'environnement, L. 421-1, L. 422-1, L. 480-4, R. 421-1, R. 422-2 du Code de l'urbanisme, 111-4, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé partiellement le jugement du tribunal correctionnel d'Amiens du 30 octobre 2001 ayant relaxé Philippe Z... du chef des passerelles métalliques posées à la base de panneaux publicitaires situés 24 avenue de l'Hippodrome et 415 route de Paris mais déclaré Philippe Z... coupable d'exécution irrégulière de travaux soumis à déclaration préalable du chef de la passerelle métallique posée à la base des panneaux publicitaires situés 39 rue Emile Francfort ;

"aux motifs qu'en fait Philippe Z... est directeur à Amiens de la succursale GetB Affichage, Mathieu Y... de la succursale Dauphin Affichage Picardie et que Charles X... était directeur de la région Nord au service de la société d'affichage Giraudy ; que le 25 février et le 5 mai 1999, deux instructeurs du service "droit des sols" de la ville d'Amiens constatent que des passerelles avaient été posées sans déclaration préalable spécifique à divers endroits de l'agglomération picarde ; que, si certaines des sociétés de publicité concernées acceptaient de régulariser la situation à la demande de la ville d'Amiens, les trois prévenus allaient contester les prétentions de cette dernière ; attendu, pour le surplus, que les prévenus font valoir que les passerelles incriminées sont des accessoires indissociables des panneaux publicitaires et doivent bénéficier du même privilège que ceux-ci dans la mesure où elles sont destinées à assurer la sécurité des poseurs d'affiches ; attendu, certes en droit, que, selon l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme relatif au régime général du permis de construire, celui-ci n° est pas exigé pour l'installation des dispositifs ayant la qualification de publicité au sens de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 ; mais attendu que selon l'article 3 de ladite loi, si, au sens de celle-ci sont assimilés à des publicités des dispositifs dont le principal objet est de recevoir toute inscription, forme ou image destinée à informer le public ou attirer son attention, il résulte des propres déclarations des prévenus que les passerelles litigieuses n'ont pas du tout cet objet, ne serait-il qu'accessoire, puisque leur utilité est exclusivement sécuritaire ;

que l'interprétation téléologique extensive proposée par les intimés ne correspond donc pas aux termes précis de la loi ; qu'il ne ressort pas du dossier et notamment de l'examen des photographies, que des plates-formes eussent été intégrées aux panneaux publicitaires eux-mêmes ou aux dispositifs les supportant ; attendu que, certes en droit, selon l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme, le permis de construire n'est pas non plus exigé pour les ouvrages qui, en raison de leur nature ou de leur très faible dimension, ne peuvent être qualifiés de construction et qu'un décret précise ; que l'article R. 421-1 dudit Code donne à cet égard une liste de dix travaux ou ouvrages qui n'entrent pas dans le champ d'application du permis de construire ; attendu que l'énumération ainsi faite par le décret d'application et qui ne mentionne pas expressément les passerelles en cause, n'est pas limitative ; mais attendu que, selon la documentation technique versée aux débats, la longueur des plates-formes litigieuses est de 4 mètres et leur largeur de 0,80 mètre (soit sur une surface de 3,20 m2) de sorte qu'elles ne peuvent être assimilées aux ouvrages de "très faible" dimension cités par l'article R. 421-1 précité ; attendu, certes en droit, qu'au chapitre des exceptions au régime général, l'article L. 422-1 du Code de l'urbanisme dispose que sont exemptés du permis de construire les constructions ou travaux dont la "faible" importance ne justifie pas son exigence ; qu'en vertu de l'article L. 422-2 dudit Code, ils doivent faire l'objet d'une déclaration auprès du maire de la commune avant le commencement des travaux ; que l'article R. 422-2 précise en treize points successifs la nature et l'importance des dits travaux ou constructions exemptés de permis de construire ; attendu que les passerelles ne sont pas explicitement mentionnées dans cette liste réglementaire limitative mais que le treizième poste (aliéna m) vise plus généralement les constructions ou travaux (non prévus par les alinéas précédents) n'ayant pas eu pour effet de changer la destination d'une construction existante et :

- qui n'ont pas pour effet de créer une surface de plancher nouvelle ;

- ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors oeuvre brute inférieure ou égale à 20 mètres carrés ;

or, attendu que les plates-formes incriminées répondent strictement au dernier terme de l'alternative précitée ; que, contrairement aux allégations de Philippe Z..., le formulaire de déclaration (visé à l'article A 422-1 du Code de l'urbanisme) permet de désigner les passerelles dans la rubrique 323 et de les décrire dans la rubrique 328 ; que les trois prévenus sont des publicitaires citadins professionnels et qu'ils se sont donc affranchis d'une obligation légale, qu'ils ne pouvaient légitimement méconnaître sous le seul prétexte, qu'à leurs dires, nombre de municipalités négligeraient de la faire respecter ; que l'utilité des passerelles ne pouvait justifier, de leur part, la méconnaissance d'une règle de l'urbanisme applicable dès lors que les plates-formes n'étaient pas intégrées aux dispositifs mêmes de support des panneaux publicitaires" ;

"alors, d'une part, que les dispositions du Code de l'urbanisme relatives au permis de construire ainsi que les travaux exemptés d'un tel permis et soumis à déclaration préalable ne sont pas applicables en matière d'affichage publicitaire, de sorte qu'en estimant que la passerelle installée au 39 rue Emile Francfort aurait dû faire l'objet d'une déclaration préalable de travaux alors que s'agissant d'une accessoire indispensable à l'affiche publicitaire elle en suivait nécessairement le même régime, la cour d'appel a violé les articles 3 de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979, L. 421-1 et suivants du Code de l'urbanisme ;

"alors, d'autre part, que, conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 sont assimilés à des publicités les dispositifs dont le principal objet est de recevoir toute inscription, forme ou image destinée à informer le public ou attirer son attention, si bien qu'en énonçant que les passerelles ne relèveraient pas de ces dispositions puisqu'elles ne seraient pas intégrées aux panneaux publicitaires ou aux dispositifs les supportant alors que destinées à permettre aux afficheurs d'accéder aux panneaux publicitaires, elles en constituaient nécessairement une composante du dispositif, la cour d'appel a violé par refus d'application le texte précité ;

"alors, en outre, que la loi pénale est d'interprétation stricte, si bien qu'en estimant que la passerelle litigieuse aurait dû faire l'objet d'une déclaration préalable de travaux puisque l'article R. 422-2 du Code de l'urbanisme prévoit cette formalité concernant les travaux qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors oeuvre brute inférieure ou égale à 20 mètres carré tout en relevant pourtant que l'article en question ne vise pas précisément les passerelles et comporte une liste limitative, la cour d'appel qui n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient a donc violé l'article 111-4 du Code pénal ;

"alors, de plus, que conformément aux dispositions des articles L. 421-1, alinéa 4, et R. 421-1, 10 , du Code de l'urbanisme le permis de construire n'est pas exigé pour les ouvrages qui "en raison de leur nature ou de leur très faible dimension, ne peuvent être qualifiés de constructions", de tels les ouvrages comportant une surface au sol inférieure à 2 mètres carrés et une hauteur ne dépassant pas 1,50 mètre au-dessus du sol, de sorte qu'en énonçant que la passerelle ne pouvait être assimilée à un ouvrage de très faible dimension puisque, selon la documentation technique versée aux débats, la longueur des plates- formes litigieuses était de 4 mètres et leur largeur de 0,80 mètre, soit une surface de 3,20 m2, la cour d'appel a violé par fausse application les articles précités ;

"alors, enfin, que l'insuffisance de motifs équivaut à un défaut de motifs, de sorte qu'en omettant de répondre aux conclusions de Philippe Z... desquelles il résultait que la passerelle ne pouvait être soumise au régime de la déclaration préalable dans la mesure où ce régime donnerait un caractère permanent aux travaux d'une passerelle d'accès à un affichage publicitaire alors que la loi du 29 décembre 1979 a fait peser sur les exploitants une obligation générale de remise en état sur les supports mais également les accessoires, ce dont il résultait que le législateur n'aurait pu vouloir soumettre la construction de ces passerelles d'accès aux panneaux d'affichage aux dispositions du Code de l'urbanisme, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision" ;

Et sur le moyen unique de cassation présenté par la société civile professionnelle de Chaisemartin et Courjon pour Charles X... et pour la société Giraudy Viacom Outdoor, pris de la violation des articles L. 421-1, alinéas 3 et 4, et 480-4 du Code de l'urbanisme, L. 581-3 du Code de l'environnement (ancien article 3 de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979), 111-4 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Charles X... coupable d'avoir exécuté ou fait exécuter des travaux de construction immobilière exemptés de permis de construire, sans déclaration préalable auprès de la mairie et l'a condamné en répression au paiement d'une amende de 10 000 euros et à des dommages-intérêts au profit de la ville d'Amiens ;

"aux motifs que les prévenus font valoir que les passerelles incriminées sont des accessoires indissociables des panneaux publicitaires et doivent bénéficier du même privilège que ceux-ci, dans la mesure où elles sont destinées à assurer la sécurité des poseurs d'affiches - que, certes en droit, selon l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme relatif au régime général du permis de construire, celui-ci n'est pas exigé pour l'installation des dispositifs ayant la qualification de publicité au sens de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 ; mais que, selon l'article 3 de ladite loi, si, au sens de celle-ci sont assimilés à des publicités les dispositifs dont le principal objet est de recevoir toute inscription, forme ou image destinée à informer le public ou attirer son attention, il résulte des propres déclarations des prévenus que les passerelles litigieuses n'ont pas du tout cet objet, ne serait-il qu'accessoire, puisque leur utilité est exclusivement sécuritaire ; que l'interprétation téléologique extensive proposée par les intimés ne correspond donc pas aux termes précis de la loi ; qu'il ne ressort pas du dossier et notamment de l'examen des photographies, que des plates-formes eussent été intégrées aux panneaux publicitaires eux-mêmes ou aux dispositifs les supportant ; que, certes en droit, selon l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme, le permis de construire n'est pas non plus exigé pour les ouvrages qui, en raison de leur nature ou de leur "très faible" dimension, ne peuvent être qualifiés de construction et qu'un décret précise ; que l'article R. 421-1 dudit Code donne à cet égard une liste de dix travaux ou ouvrages qui n'entrent pas dans le champ d'application du permis de construire ; que l'énumération ainsi faite par le décret d'application et qui ne mentionne pas expressément les passerelles en cause, n'est pas limitative ; mais que, selon la documentation technique versée aux débats, la longueur des plates-formes litigieuses est de 4 mètres et leur largeur de 0,80 mètres (soit une surface de 3,20 m2) de sorte qu'elles ne peuvent être assimilées aux ouvrages de "très faible" dimension cités par l'article R. 421-1 précité ; que, certes en droit, au chapitre des exceptions au régime général, l'article L. 422-1 du Code de l'urbanisme dispose que son exemptées du permis de construire les constructions ou travaux dont la "faible" importance ne justifie pas son exigence ;

qu'en vertu de l'article L. 422-2 dudit Code, ils doivent faire l'objet d'une déclaration auprès du maire de la commune avant le commencement des travaux ; que l'article R. 422-2 précise en treize points successifs la nature et l'importance desdits travaux ou constructions exemptés de permis de construire ; que les passerelles ne sont pas explicitement mentionnées dans cette liste réglementaire limitative, mais que le treizième poste (alinéa m) vise plus généralement les constructions ou travaux (non prévus par les alinéas précédents) n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et : - qui n'ont pas pour effet de créer une surface de plancher nouvelle ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors oeuvre brute inférieure ou égale à 20 m2 ; or, attendu que les plates-formes incriminées répondent strictement au dernier terme de l'alternative précitée ; que, contrairement aux allégations de Philippe Z..., le formulaire de déclaration (visé à I'article R. 422-1 du Code de l'urbanisme) permet de désigner les passerelles dans la rubrique 323 et de les décrire dans la rubrique 328 ; vu I'article 121-3 et 132-24, 122-3 du Code pénal, ainsi que l'article L. 480-4 du Code de l'urbanisme ; que, vainement Charles X... invoque- t-il en l'espèce pour se disculper une erreur d'interprétation, qu'il n'était pas en mesure d'éviter, à propos de l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme ;

qu'en effet la prévention vise l'article L. 422-2 dudit Code, en infraction duquel il s'est, comme Philippe Z... et Mathieu Y..., délibérément abstenu de déclarer à la mairie d'Amiens l'installation de passerelles distinctes des panneaux publicitaires ;

que les trois prévenus sont des publicitaires citadins professionnels et qu'ils se sont donc affranchis d'une obligation légale, qu'ils ne pouvaient légitimement méconnaître sous le seul prétexte, qu'à leurs dires, nombre de municipalités négligeraient de la faire respecter ; que l'utilité des passerelles ne pouvait justifier de leur part la méconnaissance d'une règle d'urbanisme applicable dès lors que les plates-formes n'étaient pas intégrées aux dispositifs mêmes de support des panneaux publicitaires ;

"alors qu'aucune autorisation préalable d'urbanisme n'est exigée pour l'installation de dispositifs ayant la qualification de publicité au sens de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 ; que, selon l'article L. 581-3, alinéa 1, du Code de l'environnement, constitue une publicité, toute inscription, forme ou image, destinée à informer le public ou à attirer son attention, les dispositifs dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes ou images étant assimilés à des publicités ; qu'il en résulte nécessairement que sont dispensés de toute autorisation d'urbanisme les dispositifs dont le principal objet est de recevoir les inscriptions publicitaires, ainsi que leurs accessoires ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que les passerelles métalliques posées sur les panneaux publicitaires en cause étaient destinées à en assurer la sécurité, en sorte qu'elles constituaient l'accessoire indissociable de ces dispositifs publicitaires et, dès lors, par une interprétation s'imposant au juge, s'agissant d'une exception favorable au prévenu, n'étaient pas soumises à autorisation préalable d'urbanisme ; qu'en décidant pourtant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, en tout état de cause, qu'aucune autorisation préalable d'urbanisme n'est exigée pour les ouvrages qui, en raison de leur nature ou de leur très faible dimension, ne peuvent être qualifiés de constructions ; qu'en l'espèce, les demandeurs soutenant expressément que, par leur nature, les passerelles incriminées ne présentaient aucune des caractéristiques d'une construction ; que, comme l'a retenu la cour d'appel, la liste de dix travaux ou ouvrages donnée à cet égard par l'article R. 421-1 dudit Code, qui ne mentionne pas expressément les passerelles en cause, n'est pas limitative ; que, dès lors, en se bornant à affirmer, pour dire inapplicables ces dispositions en l'espèce, que les passerelles litigieuses ne pouvaient pas être assimilées à des ouvrages de très faible dimension, sans rechercher, comme elle y était invitée par les demandeurs, si, en raison de la nature de ces passerelles, la qualification de constructions n'était pas exclue, en sorte qu'elles étaient exonérées d'autorisation d'urbanisme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 421-1, alinéa 4, du Code de l'urbanisme" ;

Et sur le moyen unique de cassation présenté par la société civile professionnelle Coutard et Mayer pour Mathieu Y... et pour la société Dauphin et pris de la violation des articles L. 421-1 et L. 480-4 du Code de l'urbanisme, L. 581-3 du Code de l'environnement, 111-4 du Code pénal, 591 du Code de procédure pénale ;

"en ce que Mathieu Y... a été reconnu coupable des délits à lui imputés ;

"aux motifs que les prévenus font valoir que les passerelles incriminées sont des accessoires indissociables des panneaux publicitaires et doivent bénéficier du même privilège que ceux-ci, dans la mesure où elles sont destinées à assurer la sécurité des poseurs d'affiches ; attendu, certes en droit, que, selon l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme relatif au régime général du permis de construire, celui-ci n'est pas exigé pour l'installation des dispositifs ayant la qualification de publicité au sens de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 ; mais attendu que, selon l'article 3 de ladite loi, si, au sens de celle- ci sont assimilés à des publicités les dispositifs dont le principal objet est de recevoir toute inscription, forme ou image destinée à informer le public ou attirer son attention, il résulte des propres déclarations des prévenus que les passerelles litigieuses n'ont pas du tout cet objet, ne serait-il qu'accessoire, puisque leur utilité est exclusivement sécuritaire ; que l'interprétation téléologique extensive proposée par les intimés ne correspond donc pas aux termes précis de la loi ; qu'il ne ressort pas du dossier et notamment de l'examen des photographies, que des plates-formes eussent été intégrées aux panneaux publicitaires eux- mêmes ou aux dispositifs les supportant ; attendu, certes en droit, que, selon l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme, le permis de construire n'est pas non plus exigé pour les ouvrages qui, en raison de leur nature ou de leur "très faible" dimension, ne peuvent être qualifiés de construction et qu'un décret précise ; que l'article R. 421-1 dudit Code donne à cet égard une liste de dix travaux ou ouvrages qui n'entrent pas dans le champ d'application du permis de construire ;

attendu que l'énumération ainsi faite par le décret d'application et qui ne mentionne pas expressément les passerelles en cause, n'est pas limitative ; mais attendu que, selon la documentation technique versée aux débats, la longueur des plates-formes litigieuses est de 4 mètres et leur largeur de 0,80 mètre (soit une surface de 3,20 m2), de sorte qu'elles ne peuvent être assimilées aux ouvrages de "très faible" dimension cités par l'article R. 421-1 précité ; attendu, certes en droit, qu'au chapitre des exceptions au régime général, l'article L. 422-1 du Code de l'urbanisme dispose que son exemptées du permis de construire les constructions ou travaux dont la "faible" importance ne justifie pas son exigence ; qu'en vertu de l'article L. 422-2 dudit Code, ils doivent faire l'objet d'une déclaration auprès du maire de la commune avant le commencement des travaux ; que l'article R. 422-2 précise en treize points successifs la nature et l'importance desdits travaux ou constructions exemptés de permis de construire ; attendu que les passerelles ne sont pas explicitement mentionnées dans cette liste réglementaire limitative mais que le treizième poste (alinéa m) vise plus généralement les constructions ou travaux (non prévus par les alinéas précédents) n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et qui n'ont pas pour effet de créer une surface de plancher nouvelle - ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors oeuvre brute inférieure ou égale à 20 m2 ; or, attendu que les plates-formes incriminées répondent strictement au dernier terme de l'alternative précitée ; que contrairement aux allégations de Philippe Z..., le formulaire de déclaration (visé à l'article R. 422-1 du Code de l'urbanisme) permet de désigner les passerelles dans la rubrique 323 et de les décrire dans la rubrique ; vu l'article 121-3 et 132-24, 122-3 du Code pénal, ainsi que l'article L. 480-4 du Code de l'urbanisme ;

attendu que, vainement, Charles X... invoque-t-il en l'espèce pour se disculper une erreur d'interprétation, qu'il n'était pas en mesure d'éviter, à propos de l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme ;

qu'en effet, la prévention vise l'article L. 422-2 dudit Code, en infraction duquel il s'est, comme Philippe Z... et Mathieu Y..., délibérément abstenu de déclarer à la mairie d'Amiens l'installation de passerelles distinctes des panneaux publicitaires ; que les trois prévenus sont des publicitaires citadins professionnels et qu'ils se sont donc affranchis d'une obligation légale, qu'ils ne pouvaient légitimement méconnaître sous le seul prétexte, qu'à leurs dires, nombre de municipalités négligeraient de la faire respecter ; que l'utilité des passerelles ne pouvait justifier de leur part la méconnaissance d'une règle d'urbanisme applicable dès lors que les plates-formes n'étaient pas intégrées aux dispositifs mêmes de support des panneaux publicitaires ;

"alors que sont dispensés de permis de construire les "dispositifs dont le principal objet est de recevoir des inscriptions, formes ou images" publicitaires ; que sont également dispensés de permis de construire les dispositifs dont l'objet est d'en être l'annexe ou l'accessoire, ce qui est le cas quand ils en assurent la sécurité ; que l'objet du litige étant l'édification de passerelles servant, selon la cour d'appel, à la sécurité de dispositifs recevant de la publicité, et selon la prévention étant "en l'espèce des passerelles métalliques posées à la base de panneaux publicitaires" donc par définition leur accessoire, était en tant que tel dispensé de permis de construire" ;

Les moyens étant réunis ;

Vu les articles L. 421-1 du Code de l'urbanisme et L. 581-3 du Code de l'environnement ;

Attendu que, selon ces textes, il n'est exigé ni permis de construire ni déclaration préalable pour l'installation des dispositifs ayant la qualification de publicité, auxquels sont assimilés les dispositifs dont le principal objet est de les recevoir ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables d'avoir exécuté des travaux de construction sans déclaration préalable, l'arrêt attaqué retient qu'ils ont mis en place, au pied de panneaux publicitaires, des passerelles métalliques destinées à en faciliter l'exploitation et à améliorer la sécurité ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de ses propres constatations que les prévenus ont modifié des dispositifs destinés à recevoir des publicités et sans rechercher, après les avoir invités à s'en expliquer, si les faits ne constituaient pas l'infraction prévue et punie par les articles L. 581-6 et L. 581-34 du Code de l'environnement, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Amiens, en date du 2 mai 2003, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Palisse conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-85351
Date de la décision : 05/10/2004
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

URBANISME - Déclaration préalable - Construction - Travaux effectués sans déclaration - Exclusion - Cas - Dispositif ayant la qualification de publicité - Portée.

Le montage de passerelles au pied de panneaux publicitaires, pour en faciliter l'exploitation, ne constitue pas des travaux de construction, pour lesquels les articles L. 421-1 et suivants du Code de l'urbanisme exigent un permis de construire ou une déclaration préalable, une telle opération étant soumise aux dispositions de l'article L. 581-34 du Code de l'environnement.


Références :

Code de l'environnement L581-3, L581-6, L581-34
Code de l'urbanisme L421-1 et suivants

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 02 mai 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 oct. 2004, pourvoi n°03-85351, Bull. crim. criminel 2004 N° 237 p. 852
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 237 p. 852

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: M. Palisse.
Avocat(s) : la SCP Coutard et Mayer, la SCP de Chaisemartin et Courjon, la SCP Peignot et Garreau, la SCP Bachellier et Potier de la Varde.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.85351
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