La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/10/2004 | FRANCE | N°03-86447

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 octobre 2004, 03-86447


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CASTAGNEDE, les observations de la société civile professionnelle RICHARD, et de Me COPPER-ROYER, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Dominique, épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BESANC

ON, en date du 1er octobre 2003, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre Mari...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq octobre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CASTAGNEDE, les observations de la société civile professionnelle RICHARD, et de Me COPPER-ROYER, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Dominique, épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BESANCON, en date du 1er octobre 2003, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre Marie-Claire Z... des chefs d'homicide et blessures involontaires et mise en danger d'autrui, a déclaré n'y avoir lieu à suivre ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6, 222-19 du Code pénal, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a décidé n'y avoir lieu à suivre à l'encontre du docteur Z... des chefs d'homicide involontaire, de blessures involontaires et de mise en danger de la vie d'autrui ;

"aux motifs que les experts ont estimé que la prise en charge médicale de Dominique X..., épouse Y... n'appelle aucune critique ; que la sortie du 25 août 1995, après la première hospitalisation, n'appelle aucun commentaire, en particulier il n'existait pas d'albumine dans les urines, pas d'hypertension ni d'oedème ; que la prise en charge effectuée le 27 août 1995 relevait de la compétence de la sage-femme qui a fait un usage normal de son droit de prescription, les examens ne montrant par ailleurs aucune anomalie en particulier placentaire ;

que l'examen effectué le 27 août 1995 par le docteur Z... n'appelle aucune remarque ; que ce praticien disposait des éléments complémentaires, à l'exception du dosage pondéral de l'albuminurie qui sera transmis à 18 heures 50 ; qu'à ce moment, ni la situation maternelle ni l'état foetal ne justifiaient donc une intervention, une césarienne n'étant pas indiquée ; que l'expert relève que l'attitude du docteur Z... aurait pu être plus active mais précise que la patiente, elle-même médecin, n'avait pas souhaité une activation du travail ;

que les prescriptions du docteur Z... sur la direction du travail ont été suivies et à 18 heures 50, l'état de l'enfant permettait le choix thérapeutique retenu ; qu'aucun manquement ne peut être relevé dans la mise en place de la procédure de l'intervention par péridurale ; que c'est à 20 heures 35 qu'intervient l'hématome rétro-placentaire aux conséquences fatales pour le foetus ; que selon les experts, il n'existe pas de marqueurs biologiques prédictifs et peu de signes cliniques, voire pas du tout dans la plupart des cas de ce phénomène ; qu'il n'existait pas d'utérus de bois, signe évocateur d'un hématome rétro-placentaire, et la patiente n'a pas signalé de douleurs en coup de poignard, douleur survenant lors de la constitution de l'hématome ; qu'aucun signe clinique (notamment de métrorragie précédant parfois ce phénomène) a existé dans le cas de Dominique X..., épouse Y... ; que ces métrorragies de sang noirâtre ne doivent pas être confondues avec les saignements Iors de la rupture de la poche des eaux ; qu'en effet, dans le cas d'espèce, la rupture de la poche des eaux a été faite postérieurement à l'hématome, alors que les métrorragies sont des signes annonciateurs du décollement ; que le contexte clinique à 18 heures 50 justifiait le déclenchement du travail sous péridurale, situation clinique imposant au docteur Z... de diriger le travail mais pas de réaliser une césarienne ; que s'il est regrettable que le docteur Z... ne soit pas venue examiner Dominique X..., épouse Y... à 18 heures 50, ses prescriptions ont été parfaitement suivies et sa présence n'aurait pas amené une décision différente ; qu'aucun élément ne permet d'affirmer que si la direction du travail avait été plus précoce, la complication ne serait pas survenue ; que compte tenu du caractère brutal de l'apparition de la souffrance foetale, l'extraction immédiate de l'enfant s'imposait, une intervention par césarienne n'ayant pas permis une extraction plus précoce ; que la prise en charge de l'enfant n'appelle aucune observation ; qu'avant de conclure, les experts ont examiné avec soin les observations de la partie civile présentée à l'appui de sa demande de contre-expertise ; que les experts estiment à plusieurs reprises qu'aucun signe avant coureur d'un hématome rétro- placentaire ne pouvait être décelé ; qu'à aucun moment, malgré l'hypertension, il y avait lieu de pratiquer une césarienne ; qu'ils ajoutent que l'intervention par péridurale était du ressort de l'anesthésiste et non du docteur Z... ; que la pathologie de Dominique X..., épouse Y... ne correspondait pas à un accouchement difficile et il ne s'agit pas d'un manque de surveillance de l'encadrement ni de la nécessité

d'une meilleure surveillance qui aurait permis une extraction plus rapide de l'enfant ;

que terminant l'analyse des observations de la partie civile, les experts indiquent que le docteur Z... s'est déplacée au chevet de la patiente dès que celle-ci le lui a demandé ; qu'il n'y a donc pas eu de retard dans l'intervention ; que les experts ont procédé à une analyse sur la survenance de l'hématome rétro-placentaire ; qu'ils soulignent que Dominique X..., épouse Y... a présenté une pathologie exceptionnelle par plusieurs côtés ; que ses grossesses n'avaient jamais été marquées par une hypertension ;

que l'hypertension de Dominique X..., épouse Y... est survenue de manière inopinée et isolée ; qu'au cours du travail, il n'a pas été mis en évidence de signes de début du phénomène ; que si tous les signes étaient apparus entre 18 heures 50 et 20 heures 30, ils auraient abouti à une décision d'extraction par césarienne et non à la poursuite du travail ; que concernant la conduite tenue entre 18 heures 30 et 20 heures 30, Dominique X..., épouse Y... se trouvait en situation de pré-éclampsie, c'est-à-dire présence d'albumine et hypertension, situation qui n'évoque en rien une possibilité de survenance d'un hématome rétro-placentaire ; que les experts notent que la conduite tenue a tout à fait été normale ;

qu'en définitive, les experts concluent comme suit : que Dominique X..., épouse Y... a présenté une complication exceptionnellement grave d'hématome rétro-placentaire (apoplexie utérine) qui est apparue brutalement en fin de travail, précédé quelques heures auparavant par une hypertension de fin de grossesse, alors qu'il n'y avait dans ses antécédents aucun facteur de risque de pré-éclampsie ; que la grossesse s'était normalement déroulée tant cliniquement qu'échographiquement et biologiquement ; que cet hématome a été total d'évolution sur aiguë, sans phase de début, comme cela s'observe dans les formes typiques où une hypertonie utérine apparaît progressivement et où des signes d'hypotonie utérine apparaissent progressivement et où des signes d'hypoxie débutante permettent d'intervenir à temps ;

qu'à noter également que le circulaire serré du cordon n'a eu aucune traduction sur le rythme cardiaque foetal pendant toute la période de dilatation jusqu'à 20 heures 36 ; que le caractère exceptionnellement brutal de cette apoplexie utéro-placentaire explique l'absence de décision de césarienne prophylactique, la grande majorité de ces hypertensions répondant bien aux traitements anti-hypertenseurs et au déclenchement de l'accouchement ; que pour répondre aux moyens du mémoire, il résulte du rapport d'expertise que l'absence de déplacement du docteur Z... a été sans conséquence, que le retard dans la communication du taux d'albuminurie a pu être source d'un retard dans le diagnostic de pré-éclampsie mais en aucun cas dans le diagnostic de la survenance possible d'un hématome rétro-placentaire, les experts ajoutant que rien ne permet de dire que cet hématome ne se serait pas produit si l'accouchement avait été déclenché plutôt ; qu'enfin, les experts ont constaté que Dominique X..., épouse Y... avait été prise en charge conformément aux règles de l'art dans la période comprise entre 18 heures 30 et 20 heures 30 ;

"1 ) alors que commet le délit d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne, le médecin qui par sa faute, a privé son patient de toute chance de survie ou de guérison ; que Dominique X..., épouse Y... soutenait que le docteur Z... avait commis une faute, dès lors qu'elle n'avait pas cherché à connaître le résultat de son taux d'albuminurie qui, associé à l'hypertension, révélait un état de pré-éclampsie ; qu'elle ajoutait que si le docteur Z... s'était préoccupée d'obtenir ce résultat d'analyse, révélant un état de pré-éclampsie, elle aurait été conduite à provoquer immédiatement l'accouchement, ce qui aurait pu permettre d'éviter les conséquences de l'hématome rétro-placentaire, alors même que celui-ci n'avait pas été diagnostiqué ; qu'en se bornant à affirmer que le retard dans la communication au docteur Z... du taux de l'albuminurie de Dominique X..., épouse Y... ne pouvait être la source d'un retard dans le diagnostic de la survenance possible d'un hématome rétro-placentaire, sans rechercher si la faute du docteur Z... avait privé Dominique X..., épouse Y... de toute chance d'éviter le dommage, dès lors qu'à défaut d'avoir eu connaissance des résultats de l'analyse biologique, le médecin n'avait pu provoquer l'accouchement, privant ainsi Dominique X..., épouse Y... de toute chance de guérison, la chambre de l'instruction n'a pas répondu à une articulation essentielle du mémoire de Dominique X..., épouse Y... ;

"2 ) alors que Dominique X..., épouse Y..., soutenait que le docteur Z... avait également commis une faute, en choisissant de ne pas se déplacer au chevet de la patiente à 18 heures 50, alors que celle-ci présentait des signes de pré-éclampsie ; qu'elle soulignait que s'agissant d'un accouchement dystocique, le docteur Z... était tenue d'être présente, la sage-femme n'étant pas compétente pour réaliser un tel accouchement ; qu'en se bornant à affirmer que l'absence de déplacement du docteur Z... avait été sans conséquence sur le dommage, sans répondre à une articulation essentielle du mémoire de Dominique X..., épouse Y..., la chambre de l'instruction a exposé sa décision à la censure de la Cour de cassation ;

"3 ) alors que Dominique X..., épouse Y... faisait également valoir que les signes de pré-éclampsie nécessitaient de provoquer rapidement l'accouchement, quelle que fût la méthode, de sorte que si le docteur Z... s'était déplacée à son chevet à 18 heures 50, elle aurait pu constater qu'il était nécessaire de provoquer l'accouchement en raison de l'état de pré-éclampsie, ce qui aurait permis d'éviter les conséquences de l'hématome rétro-placentaire ; qu'en se bornant à affirmer que l'absence de déplacement du docteur Z... avait été sans conséquence, motif pris de ce que l'hématome rétro-placentaire ne pouvait être diagnostiqué, sans rechercher si la faute du docteur Z... avait privé Dominique X..., épouse Y..., de toute chance d'éviter le dommage, dès lors qu'à défaut de s'être déplacée, elle n'avait pu prendre la décision de provoquer l'accouchement, privant ainsi Dominique X..., épouse Y..., de toute chance d'éviter les conséquences de l'hématome rétro-placentaire, la chambre de l'instruction n'a pas répondu à une articulation essentielle du mémoire de Dominique X..., épouse Y..." ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour déclarer n'y avoir lieu à suivre, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

Que la demanderesse se borne à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de la chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;

Que, dès lors, le moyen est irrecevable, et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;

Par ces motifs,

DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Castagnède conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-86447
Date de la décision : 05/10/2004
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Besançon, 01 octobre 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 oct. 2004, pourvoi n°03-86447


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.86447
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award