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19/04/2005 | FRANCE | N°02-17600

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 avril 2005, 02-17600


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 5 février 2002, rectifié par un arrêt du 14 mai 2002), que, sur ordre de la société Leygafinance, importatrice de matières premières, et pour permettre à la société Caisoon security limited (la société Caisoon), avec laquelle elle envisageait de conclure un contrat de fourniture, de financer son propre approvisionnement au moyen de facilités de caisse que devait cons

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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 5 février 2002, rectifié par un arrêt du 14 mai 2002), que, sur ordre de la société Leygafinance, importatrice de matières premières, et pour permettre à la société Caisoon security limited (la société Caisoon), avec laquelle elle envisageait de conclure un contrat de fourniture, de financer son propre approvisionnement au moyen de facilités de caisse que devait consentir à celle-ci le Crédit lyonnais Luxembourg, le Crédit lyonnais France a souscrit en faveur de ce dernier une garantie à première demande que la société Leygafinance a contregarantie ; que le contrat de fourniture n'ayant jamais été conclu mais la garantie ayant été appelée par le Crédit lyonnais Luxembourg, la société Leygafinance, appelée elle-même à exécuter son propre engagement, a demandé judiciairement la nullité de la garantie à première demande pour absence de cause ;

Attendu que la société Leygafinance fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer au Crédit lyonnais France, à charge, pour ce dernier, de payer le Crédit lyonnais Luxembourg la contrevaleur au 13 juin 2001 de la somme de 2 515 810,25 US dollars outre intérêts, alors, selon le moyen :

1 / que la garantie à première demande, obligation causée, suppose l'existence d'un contrat de base entre le donneur d'ordre et le bénéficiaire ; qu'en l'absence d'un tel contrat de base servant objectivement de support à la garantie, cette dernière est intrinsèquement nulle ; qu'en l'espèce, n'existaient, de première part aucun lien contractuel direct entre la société Leygafinance, donneur d'ordre et le Crédit lyonnais Luxembourg, bénéficiaire, et de seconde part, aucune opération commerciale déterminée qui fut en cours entre la société Leygafinance et la société Caisoon, le projet initial pour lequel avait été bloqué la somme de 3 050 000 US dollars (lettres des 26 novembre et 23 décembre 1999 de la société Caisoon à la société Leygafinance) n'ayant pas vu le jour et aucune autre transaction précise n'ayant pu être constatée lorsque la garantie à première demande litigieuse a été sollicitée et constituée, même si les relations commerciales perduraient alors entre les parties ;

que la société Leygafinance invoquait dans ces circonstances, "la nullité non pas du contrat de base puisqu'il n'existe pas de contrat de base (mais) la nullité de la garantie elle-même" ; que néanmoins les juges du fond ont cru pouvoir retenir comme constitutif d'un contrat de base, la fourniture de matière première par la société Caisoon à la société Leygafinance et, en conséquence, comme cause de la garantie à première demande consentie par le Crédit lyonnais France, garant au Crédit lyonnais Luxembourg, bénéficiaire, sur ordre de la société Leygafinance, la fourniture de crédit par le Crédit lyonnais Luxembourg à la société Caisoon et comme cause de la contre-garantie consentie par la société Leygafinance au Crédit lyonnais France, ladite garantie de premier rang ; qu'en l'état de ces seules constatations et énonciations, qui éludent totalement la question de l'absence de tout lien de droit entre la société Leygafinance, donneur d'ordre et le Crédit lyonnais Luxembourg, bénéficiaire, et l'absence d'un contrat de base qui soit lié à une opération commerciale alors en cours entre la société Leygafinance et la société Caisoon, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 et 1134 du Code civil ;

2 / que la société Leygafinance faisait ressortir dans ses écritures d'appel le caractère léonin de la garantie litigieuse, en ce que l'engagement pris par la société Leygafinance était du fait, de l'absence d'un contrat de base, dénué de toute contrepartie et notamment que "c'est la société Leygafinance qui supportera la charge de la dette en définitive, alors qu'au départ c'est elle qui est créancière d'une obligation de remboursement sur la société Caisoon ; que la société Leygafinance faisait ainsi pertinemment valoir qu'elle s'était trouvée abusivement contrainte de souscrire une garantie pour qu'une facilité de caisse soit octroyée, non pas à elle-même, mais à la société Caisoon, dont elle se trouvait en réalité par ailleurs créancière, de sorte que cette garantie, dépourvue de toute contrepartie, était nécessairement abusive et léonine ;

que l'arrêt attaqué, qui n'a pas répondu à ces conclusions pertinentes, ne satisfait pas aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'engagement d'un garant à première demande est causé, dès lors que le donneur d'ordre a un intérêt économique à la conclusion du contrat de base, peu important qu'il n'y soit pas partie ;

Attendu que l'arrêt ne retient pas, contrairement à ce qu'affirme le moyen, que le contrat de base était constitué par la fourniture de matière première mais relève, par motifs adoptés, que l'engagement de la société Leygafinance était destiné à assurer à la société Caisoon les moyens financiers permettant à celle-ci de procurer la matière première à fournir à la société Leygafinance et , par motifs propres, que la cause de la garantie à première demande consentie par le Crédit lyonnais France en faveur du Crédit lyonnais Luxembourg était constituée par la facilité de caisse accordée par ce dernier à la société Caisoon ; qu'il résulte de ces constatations et appréciations que la société Leygafinance avait un intérêt économique à la conclusion du contrat de base constitué par la facilité de caisse accordée par le Crédit lyonnais Luxembourg à la société Caisoon ; que la cour d'appel, qui a répondu en l'écartant, au moyen évoqué à la deuxième branche, et a décidé que la garantie à première demande était causée, peu important que la société Leygafinance ne soit pas partie au contrat de base et que l'opération commerciale d'acquisition, que ce contrat rendait possible, n'ait pas été conclue, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Leygafinance aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Leygafinance à payer au Crédit lyonnais la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf avril deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 02-17600
Date de la décision : 19/04/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BANQUE - Garantie à première demande - Validité - Conditions - Cause - Détermination.

L'engagement d'un garant à première demande est causé, dès lors que le donneur d'ordre a un intérêt économique à la conclusion du contrat de base, peu important qu'il n'y soit pas partie.


Références :

Code civil 1131, 1134

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 février 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 avr. 2005, pourvoi n°02-17600, Bull. civ. 2005 IV N° 91 p. 94
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 IV N° 91 p. 94

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Tricot.
Avocat général : Avocat général : M. Jobard.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Cohen-Branche.
Avocat(s) : Avocats : Me Le Prado, la SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:02.17600
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