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03/06/2008 | FRANCE | N°07-86404

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 juin 2008, 07-86404


- X... Dominique,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANÇON, chambre correctionnelle, en date du 28 juin 2007, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, 23, 29, 31, 35 bis et suivants de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, man

que de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué, statuant sur ...

- X... Dominique,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANÇON, chambre correctionnelle, en date du 28 juin 2007, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, 23, 29, 31, 35 bis et suivants de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué, statuant sur les seuls intérêts civils, a écarté l'exception de bonne foi et condamné Dominique X... à payer la somme de 1 500 euros à Jean-Louis Y... en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la diffamation publique ;
" aux motifs que l'encyclopédie en ligne Wikipedia définit le racisme comme une idéologie qui postule une hiérarchie entre les êtres humains selon leur origine ethnique ; que, plus particulièrement en droit, l'emploi du terme raciste renvoie à l'infraction de discrimination fondée sur l'appartenance vraie ou supposée à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, de sorte que le fait de qualifier une personne de raciste consiste à lui imputer une attitude idéologique ou encore un comportement discriminatoire ; que l'emploi du terme « raciste » par le responsable d'une association dont la vocation et l'objet est précisément de lutter contre les comportements xénophobes ou discriminatoires, à l'égard d'une personne chargée d'un mandat public, revêt une signification particulièrement sérieuse tenant tant à la notoriété de la personne qui en est l'auteur qu'aux responsabilités exercées par celle qui est visée ; que, dans ces conditions, l'emploi, au cours d'une interview télévisée, du terme « raciste » visant clairement Dominique Y... revêt un caractère diffamatoire dépassant les limites de la polémique et que ne justifie nullement un contexte judiciaire tendu, fût- il houleux, si bien qu'il y a lieu d'infirmer les dispositions civiles du jugement et d'allouer à la partie civile, qui a subi un préjudice manifeste, une somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts ;
" alors que l'intention d'éclairer les habitants d'une commune sur le comportement discriminatoire de leur maire est un fait justificatif de bonne foi ; qu'il en est particulièrement ainsi lorsque le terme « raciste », employé par le président d'une association de lutte contre les discriminations, est utilisé dans le contexte d'une polémique judiciaire médiatisée concernant l'activité publique du maire mis en cause, dès lors que celui- ci a précédemment tenu des propos de nature discriminatoire qui ont donné lieu à l'ouverture d'une information judiciaire sur plainte avec constitution de partie civile du président de ladite association, suivie par une poursuite pénale en diffamation initiée par le maire à l'encontre des membres de cette association, lesquels avaient également dénoncé ces propos litigieux dans une pétition ; que, précisément, le terme « raciste » a été employé, à l'issue de l'audience au cours de laquelle ont eu lieu les débats du chef de diffamation, par le président de l'association SOS Racisme venu soutenir ses membres, tandis qu'il était interrogé par des journalistes d'information dans le cadre d'un reportage télévisé local qui faisait le point sur les deux procédures judiciaires parallèles ; que, dès lors, c'est à tort que la cour d'appel a affirmé que l'emploi du terme « raciste », au coeur de cette polémique judiciaire, n'était pas justifié par la bonne foi du président de l'association SOS Racisme, initiateur de la plainte en injure publique raciale consécutive aux propos du maire de Saint-Claude, qui avait affirmé que la communauté turque pratiquait une économie souterraine criminelle fondée sur le trafic de stupéfiants, puisque ce fait concernait l'activité publique du maire, en dehors de toute attaque à sa vie privée " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure, que Dominique X..., président de l'association SOS Racisme, a été cité devant le tribunal correctionnel, pour diffamation publique envers Jean- Louis Y..., maire de la commune de Saint-Claude, à la suite de propos tenus par lui à la sortie d'une audience : "... pour la première fois en France, finalement, un raciste arrive à faire un procès contre les anti- racistes qui ont fait oeuvre, j'allais dire, de leur rôle de militant au quotidien, de vigilance, de gardien de la république en dénonçant des propos discriminatoires et diffamatoires envers la communauté turque de Saint- Claude... " ; que les juges du premier degré ont relaxé Dominique X... ; qu'appel a été interjeté par la seule partie civile ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et condamner Dominique X... au paiement de dommages-intérêts, l'arrêt énonce que l'emploi du terme " raciste " revêt un caractère diffamatoire dépassant les limites de la polémique, que ne justifie nullement un contexte judiciaire tendu, fût-il houleux " ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans répondre aux conclusions du prévenu qui invoquait le bénéfice de la bonne foi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 28 juin 2007, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pelletier président, Mme Ménotti conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Anzani, Palisse, Guirimand, MM. Beauvais, Guérin, Straelhi, Finidori conseillers de la chambre ;
Avocat général : M. Mathon ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-86404
Date de la décision : 03/06/2008
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 28 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 jui. 2008, pourvoi n°07-86404


Composition du Tribunal
Président : M. Pelletier (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.86404
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