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04/04/2012 | FRANCE | N°11-10706

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 avril 2012, 11-10706


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 novembre 2010), que M. X... a été engagé à compter du 23 août 1998 en qualité de membre du personnel navigant technique par la société Régional airlines ; que le contrat de travail a été transféré à la société Régional compagnie aérienne européenne ; que, par lettre du 5 janvier 2007, l'employeur a informé le salarié que, conformément aux dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile et eu égard au fait qu'il de

vait atteindre le 12 avril 2007 la limite d'âge de 60 ans pour l'exercice des fonc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 novembre 2010), que M. X... a été engagé à compter du 23 août 1998 en qualité de membre du personnel navigant technique par la société Régional airlines ; que le contrat de travail a été transféré à la société Régional compagnie aérienne européenne ; que, par lettre du 5 janvier 2007, l'employeur a informé le salarié que, conformément aux dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile et eu égard au fait qu'il devait atteindre le 12 avril 2007 la limite d'âge de 60 ans pour l'exercice des fonctions de pilote ou de copilote, des recherches de reclassement dans un emploi au sol étaient entreprises dans la société et au sein du groupe ; que par lettre du 5 juin 2007, l'employeur a notifié la rupture du contrat de travail en application des dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile pour atteinte de la limite d'âge de 60 ans et en raison du refus des postes proposés au reclassement ; que contestant cette mesure, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer certaines sommes à titre de complément d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que le respect de son obligation de reclassement par la compagnie aérienne, qui se trouve empêchée par la loi de poursuivre l'exécution du contrat de travail d'un pilote, ne saurait être appréciée plus strictement qu'en cas de licenciement pour inaptitude physique ou pour motif économique ; que dès lors, ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile la cour d'appel qui, ayant constaté que le pilote s'était vu proposer deux offres valables de reclassement qu'il avait toutes deux refusées et que la société Régional compagnie aérienne européenne avait étendu ses recherches au groupe auquel elle appartient, décide cependant que l'employeur n'aurait pas rempli son obligation de reclassement ;
2°/ que le pilote de ligne ne saurait tirer de son droit d'être reclassé au sol un droit au maintien de sa rémunération de pilote de ligne ; qu'en écartant les deux propositions de reclassement écrites et précises adressées à M. X... le 23 avril 2007 au seul motif que celles-ci impliquaient «une forte diminution de rémunération», la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en l'absence de disposition expresse en ce sens, la nullité ne se présume point ; que le non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement n'a pas pour effet d'entraîner la nullité de la rupture du contrat de travail mais seulement de priver celle-ci de cause réelle et sérieuse ; que dès lors, viole les articles L.421-9 du code de l'aviation civile et L. 1221-1 du code du travail la cour d'appel qui déduit de la méconnaissance par l'employeur de son obligation de reclassement une cause de nullité de la rupture du contrat de travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement dans un emploi au sol ;
Attendu, ensuite, qu'après avoir constaté que le licenciement ne reposait que sur le fait que le salarié avait atteint l'âge de 60 ans, la cour d'appel, qui a retenu que celui-ci était nul, a fait une exacte application des dispositions combinées des articles L. 421-9 du code de l'aviation civile et de l'article L. 1132-4 du code du travail ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Régional compagnie aérienne européenne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Régional compagnie aérienne européenne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils pour la société Régional compagnie aérienne européenne
PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué a condamné la SA REGIONAL compagnie aérienne européenne à verser à Monsieur X... les sommes de 38.338,12 € à titre de complément d'indemnité de licenciement et 80.000 € de dommages-intérêts ;
- AUX MOTIFS QUE « la SA REGIONAL a formulé le 23 avril 2007 deux autres propositions de reclassement concernant des postes d'agent ASV ADV et d'approvisionneur sous-traitance, tous deux de statut ETAM impliquant une forte diminution de rémunération (1900 €) ; que Monsieur X... compte tenu de la modification de son contrat de travail, n'est pas fautif de les avoir refusées ; que même lorsque comme en l'espèce le salarié refuse des postes de catégorie inférieure dans l'entreprise, l'employeur doit justifier de l'impossibilité de proposer un autre poste adapté aux capacités de l'intéressé, fût-ce par modification du contrat de travail, avec au besoin adaptation au nouvel emploi, tant au sein de l'entreprise qu'à l'intérieur du groupe auquel celle-ci appartient, parmi les entreprises dont les activités l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie de leurs personnels ; que si la SA REGIONAL justifie d'une part des réponses négatives faites par des sociétés du groupe à ses demandes en recherche de postes de reclassement correspondant au profil de Monsieur X... et d'autre part que les sociétés CITY Jet et TRANSAVIA non sollicitées pour cette recherche, utilisent des appareils BOEING ou AVRO quadri réacteurs, de catégorie supérieure à celle des Embraer 145 sur lesquels Monsieur X... volait, démontrant ainsi l'absence de postes au sol correspondant à ce type d'avion et aux capacités du salarié, elle n'a pas répondu à la sommation de communiquer qui lui a été faite dans le cadre de la présente procédure par lettre du 9 janvier 2009, de produire son propre livre d'entrée et de sortie du personnel, et les annonces de postes SFI parues dans la bourse emploi du groupe avant le licenciement ; que faute de produire ces éléments, elle ne justifie pas de l'impossibilité de proposer un autre poste, fût-ce par modification du contrat de travail, et avec au besoin adaptation au nouvel emploi en son sein, et donc d'avoir complètement et loyalement satisfait à son obligation de recherche de reclassement, les réponses négatives des trois sociétés sollicitées étant au surplus insuffisantes à cet égard ; qu'en conséquence, la rupture du contrat de travail ne peut être justifiée par l'impossibilité de reclassement ; … ; Que dès lors que l'employeur n'a pas justifié être dans l'impossibilité d'offrir un poste de reclassement à son salarié, la rupture du contrat de travail reste nécessairement fondée sur le seul critère de l'âge, et ne répond pas aux prescriptions de l'article L.421-9 du Code de l'aviation civile interdisant la rupture du seul fait que le salarié avait atteint la limite d'âge prescrite ; que le licenciement sans cause réelle et sérieuse, doit donc être déclaré nul ; que le salarié dont le licenciement est déclaré nul peut prétendre d'une part, aux indemnités de rupture y compris de licenciement, la rupture n'étant pas intervenue dans les conditions du texte précité, d'autre part à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à celle prévue par l'article L.1235-3 du code du travail, indépendamment de la taille de l'entreprise ou de l'ancienneté dans celle-ci ; que la rupture n'étant pas intervenue dans les conditions posées par l'article L.421-9 du Code de l'aviation civile, Monsieur X... peut prétendre à l'indemnité conventionnelle de licenciement ; que celle-ci, compte tenu de l'indemnité de départ déjà accordée par l'employeur, ouvre droit à un solde d'indemnité de licenciement de 38.338,12 euros ; que Monsieur X... avait plus de 8 ans d'ancienneté à la date de la rupture dans une entreprise employant habituellement plus de 10 salariés ; qu'il ne justifie pas d'une période de chômage indemnisé ; que compte tenu de ces éléments la réparation de son préjudice doit être fixée à 80.000 € » ;
- ALORS, DE PREMIÈRE PART, QUE le respect de son obligation de reclassement par la compagnie aérienne, qui se trouve empêchée par la loi de poursuivre l'exécution du contrat de travail d'un pilote, ne saurait être appréciée plus strictement qu'en cas de licenciement pour inaptitude physique ou pour motif économique ; que dès lors, ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L.421-9 du code de l'aviation civile la cour d'appel qui, ayant constaté que le pilote s'était vu proposer deux offres valables de reclassement qu'il avait toutes deux refusées et que la société REGIONAL COMPAGNIE AERIENNE EUROPEENNE avait étendu ses recherches au groupe auquel elle appartient, décide cependant que l'employeur n'aurait pas rempli son obligation de reclassement ;
- ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE le pilote de ligne ne saurait tirer de son droit d'être reclassé au sol un droit au maintien de sa rémunération de pilote de ligne ; qu'en écartant les deux propositions de reclassement écrites et précises adressées à M. X... le 23 avril 2007 au seul motif que celles-ci impliquaient « une forte diminution de rémunération» (arrêt, p.3, al.8), la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
- ALORS, ENFIN ET SUBSIDIAIREMENT, QUE, en l'absence de disposition expresse en ce sens, la nullité ne se présume point ; que le non respect par l'employeur de son obligation de reclassement n'a pas pour effet d'entrainer la nullité de la rupture du contrat de travail mais seulement de priver celle-ci de cause réelle et sérieuse ; que dès lors, viole les articles L.421-9 du code de l'aviation civile et L.1221-1 du code du travail la cour d'appel qui déduit de la méconnaissance par l'employeur de son obligation de reclassement une cause de nullité de la rupture du contrat de travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-10706
Date de la décision : 04/04/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRANSPORTS AERIENS - Personnel - Personnel navigant professionnel - Pilote atteint par la limite d'âge légal - Obligations de l'employeur - Reclassement au sol - Manquement - Portée

TRANSPORTS AERIENS - Personnel - Personnel navigant professionnel - Pilote atteint par la limite d'âge légal - Licenciement - Nullité - Cas - Manquement de l'employeur à son obligation de reclassement CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Nullité - Cas - Discrimination - Pilote ayant atteint la limite d'âge légal - Manquement de l'employeur à son obligation de reclassement

Fait une exacte application des dispositions combinées des articles L. 421-9 du code de l'aviation civile et L. 1132-4 du code du travail, la cour d'appel qui, ayant retenu que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement dans un emploi au sol d'un salarié copilote, en a déduit que le licenciement, qui ne reposait que sur le fait que ce salarié avait atteint l'âge de soixante ans, était nul


Références :

article L. 421-9 du code de l'aviation civile

article L. 1132-4 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 18 novembre 2010

Sur l'application de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile et le principe selon lequel le contrat de travail du personnel navigant n'est pas rompu du seul fait que la limite d'âge légal est atteinte sauf impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol, à rapprocher :Soc., 29 septembre 2004, pourvoi n° 02-40705, Bull. 2004, V, n° 238 (1) (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 avr. 2012, pourvoi n°11-10706, Bull. civ. 2012, V, n° 118
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, V, n° 118

Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Foerst
Rapporteur ?: M. Flores
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.10706
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