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06/02/2013 | FRANCE | N°12-12750

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 février 2013, 12-12750


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 novembre 2011), que la Ligue de football professionnel (la Ligue) ayant décidé de mettre fin à la mission d'étude qu'elle venait de confier à la société Wnd sport en raison de la parution dans le Journal du Dimanche d'un article présentant l'objet de cette mission et son déroulement, a été assignée par la société Wnd sport en réparation de son préjudice ;
Sur le premier moyen pris en ses quatre branches :
Attendu que la société Wnd sport fait g

rief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 novembre 2011), que la Ligue de football professionnel (la Ligue) ayant décidé de mettre fin à la mission d'étude qu'elle venait de confier à la société Wnd sport en raison de la parution dans le Journal du Dimanche d'un article présentant l'objet de cette mission et son déroulement, a été assignée par la société Wnd sport en réparation de son préjudice ;
Sur le premier moyen pris en ses quatre branches :
Attendu que la société Wnd sport fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient au créancier d'une obligation de ne pas faire de rapporter la preuve de ce que le débiteur y a contrevenu ; qu'en retenant que M. X... ne s'explique pas sur les conditions dans lesquelles le Journal du Dimanche a pu faire paraître des informations très précises sur les participants à la mission sans qu'il ait fourni l'information ou le billet rédigé par ses soins, la cour d'appel, qui a fait peser sur la société Wind sport la preuve de ce que la publication du billet litigieux ne lui était pas imputable, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
2°/que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement, par motifs adoptés, que le billet litigieux avait été «rédigé sur les indications de M. X...», ce que la société Wnd contestait, et ce sans autrement s'en expliquer, la cour d'appel, qui a statué sans réelle motivation, a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le débiteur d'une obligation de ne pas faire ne peut se voir reprocher la réalisation de l'acte interdit que pour autant qu'elle lui est effectivement imputable ; qu'en se bornant à retenir que «les différents courriers prouvent que M. X... avait fait part, avant la signature de son engagement, de ce qu'il devait un article au Journal du Dimanche et souhaitait remplir cet engagement», sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'article dont il s'agissait n'était pas dénué de tout lien avec la mission qui avait été confiée à la société Wnd sport, la cour d'appel, qui a statué par des motifs insuffisants à caractériser l'imputabilité de la publication du billet litigieux à M. X... et à la société Wnd sport, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
4°/ que la résolution unilatérale et immédiate du contrat n'est justifiée qu'autant que le manquement reproché est suffisamment grave pour justifier une telle sanction ; que la gravité du manquement s'apprécie indépendamment du préjudice qui pourrait éventuellement en avoir résulté ; qu'en retenant que «(la) faute (commise par la société Wnd) est importante dès lors qu'elle a pour effet de signifier qu'elle doit recourir à des conseillers extérieurs et n'est pas en mesure de gérer seule au sein de ses membres les questions posées par le financement de ses activités», la cour d'appel, qui a pris en considération les conséquences de la faute commise et, en particulier, le préjudice qui pourrait en avoir résulté, a statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir retenu que la société Wnd sport était tenue d'une obligation absolue de confidentialité, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a relevé d'une part, que le dirigeant de cette société avait informé la Ligue qu'il s'était engagé à fournir un article au Journal du Dimanche et qu'il désirait remplir au plus tôt cet engagement, et d'autre part, que les informations litigieuses publiées au Journal du Dimanche étaient très précises sur l'objet de la mission et les personnes que le dirigeant de la société Wnd sport devait rencontrer ; que de ces éléments précis et concordants, elle a pu déduire, par une décision motivée, sans inverser la charge de la preuve, que la société Wnd sport était à l'origine de la divulgation des informations publiées et que la gravité de cette faute justifiait la résiliation unilatérale du contrat par la Ligue ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Wnd Sport fait reproche à la cour d'appel de l'avoir condamnée à verser à la Ligue la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir sur le premier moyen, relatif à la résolution du contrat, entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société Wnd sport à payer à la Ligue la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts, ce chef de dispositif s'y rattachant par un lien de dépendance nécessaire ;
2°/ que la réparation du préjudice, qui doit être intégrale, n'est fonction que de l'étendue de celui-ci ; qu'en se fondant, pour fixer le montant de la réparation comme elle l'a fait, sur «la notoriété de la société Wnd sport», la cour d'appel, qui a pris en considération un critère étranger à la détermination du préjudice, a violé les articles 1145, 1147 et 1149 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale ;
3°/ qu'en édictant que celui qui contrevient à l'obligation de ne pas faire doit des dommages-intérêts par le seul fait de la contravention, indépendamment de tout préjudice effectivement subi, l'article 1145 du code civil institue des dommages-intérêts punitifs ; qu'en tant que peine, au sens de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ces dommages-intérêts punitifs doivent être proportionnés au préjudice subi et aux manquements constatés ;qu'en se bornant à retenir qu'il convient d'allouer à la Ligue, compte tenu justement de la notoriété de la société Wnd sport, une somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts, sans préciser le montant du préjudice effectivement subi par la Ligue, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle d'une juste application du principe de proportionnalité, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1145 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a relevé que le discrédit et la perte d'image subis par la Ligue en raison du manquement de la société Wnd sport à son obligation de confidentialité étaient d'autant plus importants que cette société jouissait d'une notoriété dans les milieux sportifs, a ainsi constaté l'existence et l'étendue du préjudice subi par la Ligue dont elle a souverainement évalué la réparation ; que le moyen qui manque en fait en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Wnd sport aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Wnd sport ; la condamne à payer à la Ligue de football professionnel la somme de 3 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Wnd sport.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société WND SPORT de ses demandes tendant à voir la LFP condamnée à lui verser diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat qui les liait,
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « La société WND SPORT soutient qu'elle n'est pas l'auteur du billet publié ; Mais, d'une part, les différents courriers prouvent que M. X... avait fait part, avant la signature de son engagement de ce qu'il devait écrire un article au Journal Du Dimanche et souhaitait au plus tôt remplir cet engagement et, d'autre part, il ne s'explique pas sur les conditions dans lesquelles le JDD a pu faire paraître des informations très précises sur les participants à la mission sans qu'il ait fourni l'information ou le billet rédigé par ses soins, ni pourquoi il est fondé à soutenir qu'après la divulgation de la liste des diffuseurs retenus, l'article critiqué perd sa plus grande importance alors que seule la LFP a qualité pour juger des conditions de l'information sur son fonctionnement, ce mode d'explication contenant, de toute façon, une contradiction ; à cet égard, le courrier de M. Y... ne valait pas autorisation de publier une quelconque information aussi longtemps que, dans le cadre du contrat, il n'aurait pas fait explicitement connaître la possibilité de dévoiler des informations concernant les ressources de la Ligue ; la société WND SPORT ne justifie pas, dans ces conditions, du caractère non fautif de ladite publication ; De plus, la LFP soutient justement que cette faute est importante dès lors qu'elle a pour effet de signifier qu'elle doit recourir à des « conseillers extérieurs » et n'est pas en mesure de gérer seule au sein de ses membres les questions posées par le financement de ses activités ; Dans ces conditions, la faute justifié la résolution du contrat » ;
Et AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE : « La publication d'un article du JDD sur l'existence de la mission qui lui avait été confiée par la Ligue, son objet précis, la façon dont il allait procéder, les noms des personnes qu'il allait rencontrer, rédigé sur les indications de M. X..., même si celles-ci n'ont pas été fournies à l'occasion d'une interview, constitue un manquement de la part de ce dernier à l'obligation de confidentialité qui avait été prévue, telle qu'elle a été précisée au fil des échanges avec M. Y... » ;
ALORS, de première part, QU'il appartient au créancier d'une obligation de ne pas faire de rapporter la preuve de ce que le débiteur y a contrevenu ; qu'en retenant que M. X... ne s'explique pas sur les conditions dans lesquelles le JDD a pu faire paraître des informations très précises sur les participants à la mission sans qu'il ait fourni l'information ou le billet rédigé par ses soins, la Cour d'appel, qui a fait peser sur la société WND SPORT la preuve de ce que la publication du billet litigieux ne lui était pas imputable, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;
ALORS, de deuxième part, QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement, par motifs adoptés, que le billet litigieux avait été « rédigé sur les indications de M. X... », ce que la société WND contestait, et ce sans autrement s'en expliquer, la Cour d'appel, qui a statué sans réelle motivation, a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, de troisième part, QUE le débiteur d'une obligation de ne pas faire ne peut se voir reprocher la réalisation de l'acte interdit que pour autant qu'elle lui est effectivement imputable ; qu'en se bornant à retenir que « les différents courriers prouvent que M. X... avait fait part, avant la signature de son engagement, de ce qu'il devait un article au JDD et souhaitait remplir cet engagement », sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'article dont il s'agissait n'était pas dénué de tout lien avec la mission qui avait été confiée à la société WND SPORT, la Cour d'appel, qui a statué par des motifs insuffisants à caractériser l'imputabilité de la publication du billet litigieux à M. X... et à la société WND SPORT, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du Code civil ;
ALORS, enfin, et en toute hypothèse, QUE la résolution unilatérale et immédiate du contrat n'est justifiée qu'autant que le manquement reproché est suffisamment grave pour justifier une telle sanction ; que la gravité du manquement s'apprécie indépendamment du préjudice qui pourrait éventuellement en avoir résulté ; qu'en retenant que « (la) faute (commise par la société WND) est importante dès lors qu'elle a pour effet de signifier qu'elle doit recourir à des conseillers extérieurs et n'est pas en mesure de gérer seule au sein de ses membres les questions posées par le financement de ses activités », la Cour d'appel, qui a pris en considération les conséquences de la faute commise et, en particulier, le préjudice qui pourrait en avoir résulté, a statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société WND SPORT à payer à la LFP la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts,
AUX MOTIFS QUE : « Il résulte des faits que la LFP, qui a subi par l'effet de la divulgation un discrédit caractérisé, est fondée à demander réparation pour ce qu'elle appelle cette « perte d'image » ; qu'il convient de lui allouer, compte tenu justement de la notoriété de la société WND SPORT, une somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts » ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen, relatif à la résolution du contrat, entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société WND SPORT à payer à la LFP la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, ce chef de dispositif s'y rattachant par un lien de dépendance nécessaire ;
ALORS, à tout le moins, QUE la réparation du préjudice, qui doit être intégrale, n'est fonction que de l'étendue de celui-ci ; qu'en se fondant, pour fixer le montant de la réparation comme elle l'a fait, sur « la notoriété de la société WND SPORT », la Cour d'appel, qui a pris en considération un critère étranger à la détermination du préjudice, a violé les articles 1145, 1147 et 1149 du Code civil, ensemble le principe de réparation intégrale ;
ALORS, en toute hypothèse, QU'en édictant que celui qui contrevient à l'obligation de ne pas faire doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention, indépendamment de tout préjudice effectivement subi, l'article 1145 du Code civil institue des dommages-intérêts punitifs ; qu'en tant que peine, au sens de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ces dommages-intérêts punitifs doivent être proportionnés au préjudice subi et aux manquements constatés ; qu'en se bornant à retenir qu'il convient d'allouer à la LFP, compte tenu justement de la notoriété de la société WND SPORT, une somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts, sans préciser le montant du préjudice effectivement subi par la LFP, la Cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle d'une juste application du principe de proportionnalité, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1145 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-12750
Date de la décision : 06/02/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 fév. 2013, pourvoi n°12-12750


Composition du Tribunal
Président : M. Bargue (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.12750
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