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30/05/2013 | FRANCE | N°12-17231

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 mai 2013, 12-17231


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 10 février 2012), que Mme X..., engagée par la société Fermetures et services à compter du 1er mars 2000, a été licenciée le 26 janvier 2005 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes de nature salariale et indemnitaire ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire qu'elle n'avait pas la qualité de salariée et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en présence d'un contrat de travail

apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 10 février 2012), que Mme X..., engagée par la société Fermetures et services à compter du 1er mars 2000, a été licenciée le 26 janvier 2005 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes de nature salariale et indemnitaire ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire qu'elle n'avait pas la qualité de salariée et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ; que cette preuve se trouve rapportée lorsqu'est établie l'absence de tout lien de subordination entre les parties en cause ; qu'en estimant que la société Fermetures et services rapportait la preuve du caractère fictif du contrat de travail de Mme Y..., tout en constatant que cette dernière « a travaillé essentiellement pour le compte de l'Eurl Sam et services et d'autres sociétés dont son conjoint était gérant, et très occasionnellement pour celui de la société Fermetures et services », en émettant pour le compte de cette dernière des courriers et factures (arrêt attaqué, p. 5 § 3), ce dont il résultait que l'intéressée, en tant qu'elle avait travaillé même occasionnellement pour le compte de la société Fermetures et services, se trouvait alors nécessairement dans un lien de subordination caractérisant l'existence d'un contrat de travail réel, ainsi que la qualité d'employeur, ou le cas échéant de coemployeur, de la société Fermetures et services, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant que le montant des salaires perçus par Mme Y..., qui ont fait l'objet d'une facturation par la société Fermetures et services à la société Sam et services, « exclu(ait) la réalité des tâches accomplie par cette dernière Mme Y... au service de la société Fermetures et services » (arrêt attaqué, p. 4 § 4), tout en constatant que Mme Y... travaillait « très occasionnellement pour le compte de la société Fermetures et services » (arrêt attaqué, p. 5 § 3), la cour d'appel, qui a successivement énoncé que Mme Y... n'avait accompli aucune tâche pour le compte de la société Fermetures et services, puis qu'elle avait accompli des tâches occasionnelles, a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la réalité du contrat de travail s'apprécie au regard des tâches effectivement accomplies par l'intéressé dans le cadre d'un lien de subordination ; qu'en estimant que le contrat de travail de Mme Y... devait être considéré comme fictif en ce qu'il ne correspondait pas à « un emploi réel, constant et régulier accompli pour le compte de son employeur officiel » (arrêt attaqué, p. 5 § 3), ou encore en ce que l'intéressée « continuait à travailler à domicile » (arrêt attaqué, p. 4 § 6), alors qu'à supposer même que les tâches confiées à Mme Y... n'aient pas été constantes et régulières, et qu'elles aient été réalisées à domicile, il n'en subsistait pas moins l'existence, constatée par les juges du fond, de tâches accomplies pour le compte de la société Fermetures et services, ce qui suffisait à caractériser l'existence d'un contrat de travail réel, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
4°/ qu'en toute hypothèse, les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'en estimant que la preuve du caractère fictif du contrat de travail de Mme Y... se trouvait rapportée par le fait que la société Fermetures et services avait facturé à la société Sam et services le montant des salaires perçus par l'intéressée (arrêt attaqué, p. 4 § 4), cependant que cette convention entre les deux sociétés, à la supposer réelle, est inopposable à Mme Y... qui n'y était pas partie, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil ;
5°/ que dans ses conclusions d'appel (p. 4 à 8), Mme Y... faisait valoir qu'à l'occasion de la procédure pénale ouverte à la suite d'une plainte déposée contre elle des chefs de faux et d'escroquerie, qui s'était clôturée par une ordonnance de non-lieu, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy avait constaté qu'elle avait effectué des prestations pour le compte de la société Fermetures et services ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que Mme X... n'avait pas accompli de réelles prestations pour la société Fermetures et services, la cour d'appel a, par ce seul motif, sans se contredire, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que Mme X..., épouse Y..., n'avait pas la qualité de salariée de la société Fermetures et Services et de l'avoir déboutée de l'intégralité de ses demandes ;
AUX MOTIFS QU' en présence d'un contrat de travail écrit, il appartient à la partie qui en conteste l'existence de rapporter la preuve de son caractère fictif ; que l'examen minutieux des pièces du dossier fait apparaître les éléments suivants : 1°) en premier lieu, il apparaît que le contrat de travail à effet du 1er mars 2000 signé entre Mme X... et la société Fermetures et Services prévoyait une durée de travail de 20 heures hebdomadaires pour un salaire mensuel brut de 3.900 F à effectuer à domicile, sans description des tâches ; que concomitamment, une facturation a été dressée par la société Fermetures et Services à l'adresse de l'Eurl Sam et Services pour travaux de secrétariat effectués par Mme X... au service de cette entreprise pour une période de cinq mois de juin à octobre 2000 pour un montant respectif brut de 4.038,89 F, 4.006,90 F, 6.042 F, 4.355,83 F et 5.539,87 F, soit absorbant dans tous les cas le montant du salaire brut contractuel de Mme X..., tous éléments excluant la réalité de tâches accomplies par cette dernière au service de la société Fermeture et Services ; 2°) en deuxième lieu, il apparaît qu'à compter du 17 octobre 2000, soit sept mois après le premier contrat de travail, la durée de travail de Mme X... a été portée de 20 à 32 heures hebdomadaires, soit selon une proportion de 1,60, alors que parallèlement son salaire mensuel brut a été fixé à 7.400 F (1.128 €), correspondant à une proportion largement supérieure de 1,89 ; 3°) selon avenant du 1er avril 2004, la durée de travail de Mme X... a été fixée à 35 heures hebdomadaires avec un salaire brut mensuel fixé à 1.479,69 €, sans modification des autres clauses contractuelles, ce qui signifie qu'elle continuait à travailler à domicile ; que la facturation adressée de façon rétroactive par la société Fermetures et Services à l'Eurl Sam et Services au titre des frais de secrétariat sur les années 2002 à 2005 a été fixée respectivement à 9.600 € pour l'exercice 2002-2003, à 11.500 € pour l'exercice 2003-2004 et à 17.200 € pour l'exercice 2004-2005 ce qui équivalait sur une période de 12 mois à un montant mensuel de 800 € pour 2002-2003, de 958,33 € pour 2003-2004 et de 1.433 € pour 2004-2005, absorbant quasiment le salaire fixé contractuellement par la société Fermetures et services au profit de Mme X... ; qu'à ce sujet, il ressort de la déposition de M. A..., salarié de l'Eurl Sam et Services du 1er avril 2000 au 14 mai 2004, que juste après son embauche, M. Y... lui a présenté Mme X... comme étant la secrétaire de l'Eurl Sam et Services, M. A... précisant que l'intéressée gérait les feuilles d'heures du mois, lui adressait son planning de la semaine, se déplaçait sur les chantiers et prenait totalement part à la réalisation des travaux ; qu'il ajoute que Mme X... s'occupait également de toute la gestion administrative de diverses SCI (SCI RNA, SCI Aquarius, copropriété d'immeubles) ainsi que de la société Overstyle créée en avril 2003 par M. Y..., son compagnon devenu par la suite son conjoint ; que M. A... conclut en indiquant avoir toujours vu Mme X... employée de la société Fermetures et Services travailler pour le compte de l'Eurl Sam et Services et d'autres sociétés comme les SCI et la société Overstyle ; qu'il ressort de l'examen des quelques bulletins de paye versés par Mme X... sur la période de janvier 2004 à février 2005 que les congés acquis sur la période de référence de juin 2003 à mai 2004 à hauteur de 42 jours ont été reportés en leur intégralité sur la nouvelle période de référence démarrant le 1er juin 2004, ce qui n'est pas usuel dans le cadre d'une relation de travail habituelle ; que les quelques courriers et factures édités sur les années 2002 à 2004 pour le compte de la société Fermetures et Services par Mme X..., de même que l'attestation de M. B..., comptable de la société Fermetures et services certifiant avoir été en contact avec l'intéressée pour la remise de documents comptables et les explications ne sont pas de nature à contredire l'ensemble des données ci-dessus énoncées faisant apparaitre que Mme X... a travaillé essentiellement pour le compte de l'Eurl Sam et Services et d'autres sociétés dont son conjoint était gérant, et très occasionnellement pour celui de la société Fermetures et Services, de sorte que son contrat de travail passé avec cette société doit être considéré comme fictif et ne correspondant pas à un emploi réel, constant et régulier accompli pour le compte de son employeur officiel ; qu'il en résulte que Mme X... n'a pas la qualité de salariée de la société Fermetures et Services et que son licenciement est sans portée ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ; que cette preuve se trouve rapportée lorsqu'est établie l'absence de tout lien de subordination entre les parties en cause ; qu'en estimant que la société Fermetures et Services rapportait la preuve du caractère fictif du contrat de travail de Mme Y..., tout en constatant que cette dernière « a travaillé essentiellement pour le compte de l'Eurl Sam et services et d'autres sociétés dont son conjoint était gérant, et très occasionnellement pour celui de la société Fermetures et services », en émettant pour le compte de cette dernière des courriers et factures (arrêt attaqué, p. 5 § 3), ce dont il résultait que l'intéressée, en tant qu'elle avait travaillé même occasionnellement pour le compte de la société Fermetures et Services, se trouvait alors nécessairement dans un lien de subordination caractérisant l'existence d'un contrat de travail réel, ainsi que la qualité d'employeur, ou le cas échéant de coemployeur, de la société Fermetures et Services, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé L.1221-1 du code du travail ;
ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant que le montant des salaires perçus par Mme Y..., qui ont fait l'objet d'une facturation par la société Fermetures et Services à la société Sam et Services, « exclu(ait) la réalité des tâches accomplie par cette dernière Mme Y... au service de la société Fermetures et services » (arrêt attaqué, p. 4 § 4), tout en constatant que Mme Y... travaillait « très occasionnellement pour le compte de la société Fermetures et services » (arrêt attaqué, p. 5 § 3), la cour d'appel, qui a successivement énoncé que Mme Y... n'avait accompli aucune tâche pour le compte de la société Fermetures et Services, puis qu'elle avait accompli des tâches occasionnelles, a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE la réalité du contrat de travail s'apprécie au regard des tâches effectivement accomplies par l'intéressé dans le cadre d'un lien de subordination ; qu'en estimant que le contrat de travail de Mme Y... devait être considéré comme fictif en ce qu'il ne correspondait pas à « un emploi réel, constant et régulier accompli pour le compte de son employeur officiel » (arrêt attaqué, p. 5 § 3), ou encore en ce que l'intéressée « continuait à travailler à domicile » (arrêt attaqué, p. 4 § 6), alors qu'à supposer même que les tâches confiées à Mme Y... n'aient pas été constantes et régulières, et qu'elles aient été réalisées à domicile, il n'en subsistait pas moins l'existence, constatée par les juges du fond, de tâches accomplies pour le compte de la société Fermetures et Services, ce qui suffisait à caractériser l'existence d'un contrat de travail réel, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L.1221-1 du code du travail ;
ALORS, EN QUATRIEME LIEU, QU' en toute hypothèse, les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'en estimant que la preuve du caractère fictif du contrat de travail de Mme Y... se trouvait rapportée par le fait que la société Fermetures et Services avait facturé à la société Sam et Services le montant des salaires perçus par l'intéressée (arrêt attaqué, p. 4 § 4), cependant que cette convention entre les deux sociétés, à la supposer réelle, est inopposable à Mme Y... qui n'y était pas partie, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil ;
ET ALORS, EN DERNIER LIEU, QUE dans ses conclusions d'appel (p. 4 à 8), Mme Y... faisait valoir qu'à l'occasion de la procédure pénale ouverte à la suite d'une plainte déposée contre elle des chefs de faux et d'escroquerie, qui s'était clôturée par une ordonnance de non-lieu, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy avait constaté qu'elle avait effectué des prestations pour le compte de la société Fermetures et Services ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-17231
Date de la décision : 30/05/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 10 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 mai. 2013, pourvoi n°12-17231


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.17231
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