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05/03/2014 | FRANCE | N°12-29242

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 mars 2014, 12-29242


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Paris, 3 octobre 2012), que M. X..., engagé le 19 janvier 2007 en qualité d'ingénieur qualification par la société Logfi, a été licencié pour faute grave le 3 décembre 2009 pour avoir refusé d'effectuer des tâches de développement « web » ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur, dans le cadr

e de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié ;...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Paris, 3 octobre 2012), que M. X..., engagé le 19 janvier 2007 en qualité d'ingénieur qualification par la société Logfi, a été licencié pour faute grave le 3 décembre 2009 pour avoir refusé d'effectuer des tâches de développement « web » ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié ; que la circonstance que la tâche donnée à un salarié soit différente de celle qu'il exécutait antérieurement, dès l'instant où elle correspond à sa qualification, ne caractérise pas une modification du contrat de travail ; que la qualification à prendre en considération n'est pas celle correspondant aux diplômes ou titres effectivement détenus par le salarié mais celle correspondant à l'emploi précédemment occupé et à la qualification prévue par la convention collective ; qu'en jugeant que la proposition de la société Logfi adressée à M. X..., embauché en qualité d'ingénieur de qualification, d'effectuer des missions de développement constituait une modification du contrat de travail qui nécessitait l'accord du salarié, cependant que cette nouvelle tâche correspondait à la qualification conventionnelle du salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ qu'il appartient au juge, pour retenir l'existence d'une modification du contrat de travail, de rechercher si le changement de fonctions n'entraîne pas une diminution des responsabilités du salarié et l'accomplissement de tâches inférieures à sa qualification ; qu'en jugeant que l'employeur avait procédé à une modification du contrat de travail sans même vérifier si le changement de fonctions engendrait une diminution des responsabilités du salarié et l'accomplissement de tâches inférieures à sa qualification, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que le refus du salarié d'accomplir le travail relevant de sa qualification et de ses compétences constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, voire une faute grave ; qu'en jugeant que le licenciement de M. X... était dénué de cause réelle et sérieuse quand le salarié ne pouvait pas refuser d'accomplir les missions pour lesquelles il était employé et qui correspondaient à sa qualification, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-3 et les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'un changement d'affectation caractérise une modification du contrat de travail dès lors qu'il concerne des fonctions de nature et de qualification différentes ;
Et attendu qu'ayant relevé que les fonctions et la qualification de développeur étaient différentes de celles d'ingénieur qualification, le développeur participant à la conception de nouvelles applications et l'ingénieur qualification vérifiant les fonctionnalités et la conformité du produit en cours et en fin de développement, peu important que la convention collective applicable n'ait pas distingué les deux qualifications, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire l'existence d'une modification du contrat de travail qui ne pouvait être imposée au salarié ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa troisième branche, n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Logfi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Logfi et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Logfi
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Logfi à payer à Monsieur Kouider X... les sommes de 11 250 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, 3 541,65 ¿ à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 30 000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
AUX MOTIFS QU'aux termes du contrat de travail en date du 19 janvier 2007, Monsieur Kouider X... est engagé en qualité d'ingénieur qualification ; que ses bulletins de salaire portent mention de cette qualification ; que l'annuaire des métiers de l'Apec ainsi que l'observatoire des métiers du GET (groupement des écoles des télécommunications) font une description de chacun de ces emplois et distinguent très clairement leurs missions ; qu'ainsi le développeur participe à la conception et au développement de nouvelles applications, c'est lui qui a en charge toute la partie technique d'un projet web, l'ingénieur qualification vérifiant les différentes fonctionnalités et la conformité du produit en cours et en fin de développement, il garantit la fiabilité technique et la sûreté des équipements, process et produits ; qu'il résulte de l'attestation d'un salarié de la société Logfi en 2007 (pièce 25), Monsieur Y..., qu'il était dans la même équipe (quality assurance) que l'appelant et qu'ils ne faisaient que des travaux de qualification ; qu'en octobre 2009, l'employeur a voulu affecter l'appelant à des tâches de développement au motif qu'il y aurait une surcharge de travail dans ce secteur ; que d'une part, il n'apporte aucun élément de preuve de cette surcharge, ni aucun élément de nature à contredire les termes de l'attestation de Monsieur Z..., salarié de l'entreprise qui indique qu'à la même époque "d'autres collègues spécialisés dans le développement n'étaient affectés à aucune tâche et autorisés à rester chez eux" étant précisé que le nombre de salariés à l'époque des faits s'élevait à 58 ; que d'autre part, il ne fournit aucune explication et n'apporte aucune contradiction à l'encontre de l'argumentation de l'appelant qui indique et prouve (pièces 9 à 13) qu'il effectuait des tâches de qualification sur le projet "ma plus belle déco", et qu'il apparaît tout à fait discutable par rapport au sérieux de la prestation fournie par la société de confier des tâches de développement et de qualification à la même personne ; que la proposition d'effectuer des missions de développement à un ingénieur engagé comme ingénieur qualification constitue une modification des termes du contrat de travail qui requiert l'assentiment du salarié ; qu'en conséquence, Monsieur X..., engagé en qualité d'ingénieur qualification, était en droit de refuser d'effectuer des tâches d'ingénieur développement que tentait de lui imposer l'intimée qui ne justifie pas de la nécessité de cette affectation pour les besoins de la société, ni de l'opportunité d'une telle confusion des métiers par rapport à ses clients ; que le licenciement prononcé pour faute grave du salarié au motif qu'il a refusé d'effectuer des tâches de développement, est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse et le jugement du conseil de prud'hommes doit être infirmé ; que le salarié a droit à l'indemnité compensatrice de préavis et à l'indemnité de licenciement en retenant les calculs qu'il a effectués dès lors que les sommes évoquées à titre subsidiaire par la société ne tiennent pas compte des primes versées au salarié ; que l'intimée sera donc condamnée à lui verser la somme de 11 250 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 1 125 ¿ de congés payés afférents ainsi que la somme de 3 541,65 ¿ titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, il sera également alloué au salarié qui n'a pas retrouvé d'emploi stable après ce licenciement, une somme de 30 000 ¿ titre de dommages intérêts",
ALORS, D'UNE PART, QUE l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié ; que la circonstance que la tâche donnée à un salarié soit différente de celle qu'il exécutait antérieurement, dès l'instant où elle correspond à sa qualification, ne caractérise pas une modification du contrat de travail ; que la qualification à prendre en considération n'est pas celle correspondant aux diplômes ou titres effectivement détenus par le salarié mais celle correspondant à l'emploi précédemment occupé et à la qualification prévue par la convention collective ; qu'en jugeant que la proposition de la société Logfi adressée à Monsieur X..., embauché en qualité d'ingénieur de qualification, d'effectuer des missions de développement constituait une modification du contrat de travail qui nécessitait l'accord du salarié, cependant que cette nouvelle tâche correspondait à la qualification conventionnelle du salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail,
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il appartient au juge, pour retenir l'existence d'une modification du contrat de travail, de rechercher si le changement de fonctions n'entraîne pas une diminution des responsabilités du salarié et l'accomplissement de tâches inférieures à sa qualification ; qu'en jugeant que l'employeur avait procédé à une modification du contrat de travail sans même vérifier si le changement de fonctions engendrait une diminution des responsabilités du salarié et l'accomplissement de tâches inférieures à sa qualification, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail,
ALORS ENFIN ET PAR CONSEQUENT QUE le refus du salarié d'accomplir le travail relevant de sa qualification et de ses compétences constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, voire une faute grave ; qu'en jugeant que le licenciement de Monsieur X... était dénué de cause réelle et sérieuse quand le salarié ne pouvait pas refuser d'accomplir les missions pour lesquelles il était employé et qui correspondaient à sa qualification, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-3 et les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-29242
Date de la décision : 05/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 mar. 2014, pourvoi n°12-29242


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.29242
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